Cadouin, L'abbaye Notre-Dame de la Nativité

Cadouin
L'abbaye Notre-Dame de la Nativité

image de l'abbaye

Chevet de l'abbatiale de Cadouin



L'abbaye Notre-Dame de la Nativité de Cadouin est un ancien monastère créé en 1115 en Dordogne, sur le territoire de l'ancienne commune de Cadouin.

 

Historique de l'Abbaye

En 1115, l'évêque Guillaume et les chanoines de la cathédrale Saint-Front donnent à Robert d'Arbrissel une partie de la forêt de Cadouin, à la Sauvetat.

L'ermite Géraud de Salles fonde, au nom de Robert d'Arbrissel, un ermitage dans un vallon à l'écart de la vallée de la Dordogne en 1115.

D'autres dons vont venir enrichir le patrimoine de l'abbaye par la noblesse des environs, dont ceux par Guillaume de Biron et Maynard de Beynac.

Sentant la fin de sa vie proche, Robert d'Arbrissel cède à son ami les deux lieux situés dans la forêt de Cadouin, le Val Seguin et la Sauvetat.

Il l'abandonne à leur pouvoir et à leur volonté ainsi qu'il le manifeste devant des personnalités importantes telles que le duc Foulque V d'Anjou et l'abbesse de l'abbaye de Fontevraud, Pétronille de Chemillé.

En 1119, Géraud de Sales transforme l'ermitage en abbaye et fait venir comme premier abbé Henri, un moine de l'abbaye de Pontigny.

Le XI des calendes de novembre 1119 sont posés les fondements du nouveau monastère.

Entre 1120 et 1140, l'abbaye de Cadouin va essaimer et va avoir six abbayes-filles sur le territoire Aquitain qui vont elles-mêmes fonder des abbayes.

Ainsi l'abbaye de Grandselve fondé par Géraud de Sales en 1114-1117 qui se détache de l'abbaye de Cadouin pour se rattacher à l'ordre cistercien en 1145, l'abbaye d'Ardorel dans le diocèse de Castres fondée en 1124 par Élie, un disciple de Géraud de Sales.

L'abbatiale fut consacrée en 1154 en présence des évêques de Périgueux, d'Agen et d'Angoulême, des abbés de Moissac, de Terrasson, de Condom.

La tradition veut que l'abbaye ait été remise à l'abbaye de Pontigny en 1119, au moment de l'arrivée de moines venant de cette abbaye, dont le premier abbé.

Il semble acquis aujourd'hui que cette information est erronée. Tout au long du XIIe siècle des contacts ont existé entre l'ordre cistercien et l'abbaye de Cadouin, mais l'abbaye n'a rejoint l'ordre qu'entre 1199 et 1201.

Un accord a été passé en 1201 entre l'abbé de Pontigny et l'abbé de Cadouin en présence de l'archevêque de Bordeaux Hélie de Malemort, de l'évêque de Périgueux Adhémar et de Raimond de La Roche, prieur de Saint-Avit-Sénieur. Cet accord cite les abbayes filles de Cadouin.

L'abbaye de Cadouin est la deuxième fille de l'abbaye de Pontigny et la onzième abbaye de l'ordre cistercien. Malgré son appartenance à l'ordre de Cîteaux, l'abbaye de Cadouin a conservé ses traditions et ses usages particuliers.

Les XIIe et XIIIe siècles ont été des périodes prospères pour l'abbaye. La dévotion au suaire qui aurait été rapporté de Terre Sainte au début du XIIe siècle par Raymond, comte de Toulouse, entraîne de nombreuses donations.

Dans sa notice sur l'abbaye de Cadouin, l'abbé Audierne fait arriver le suaire à Cadouin en 1112, amené de Palestine par un clerc originaire de Cadouin, en reprenant l'histoire racontée dans le manuscrit de Cadouin intitulé Recueil de textes relatifs à la querelle eucharistique, à la vie des moines ; Apophtegmes des Pères du Désert ; Liste des évêques de Jérusalem ; Itinéraires en Terre Sainte dans la marge du folio 126.

L'abbaye est protégée par les seigneurs locaux et les évêques de Périgueux. Cependant le chapitre général de Cîteaux ordonne des enquêtes pour vérifier l'administration qui semble laisser à désirer.

Les guerres du XIVe siècle vont entraîner la décadence de l'abbaye.

L'abbaye est considérée en ruines en 1357. Il ne reste plus que deux moines dans l'abbaye pour garder le suaire.

La Guerre de Cent Ans va amener le transport du suaire de Cadouin à Toulouse en 1392 par l'abbé de Cadouin, Bertrand du Moulin, qui y reste jusqu'en 1462.

À la fin de la guerre, en 1453, il ne reste plus que le prieur et deux moines. 
Ce transport du suaire à Toulouse a privé l'abbaye des dons des pèlerins.

Au Moyen Âge, cette abbaye était soutenue par les rois de France. Le redressement de l'abbaye est commencée sous l'abbatiat de Pierre de Gaing (1455-1475) et son neveu.

Grâce à la protection royale, ce dernier fait reconstruire le cloître grâce à la donation annuelle de 4 000 livres tournois au monastère faite par le roi Louis XI en 1482.

Après les guerres de religion, l'abbaye est en commende. En 1643, l'abbaye adhère à la réforme cistercienne de la stricte observance.

L'évêque de Sarlat atteste de l'authenticité du suaire de Cadouin en 1644.

Après la suppression temporaire des abbés commendataires, en 1661, l'abbé Pierre Mary (1666-1696) entreprend un renouveau spirituel et temporel.

Au XVIIIe siècle, le retour de la commende va entraîner une décroissance du nombre de moines et des revenus de l'abbaye.

En 1768 il reste cinq moines dans l'abbaye et ses revenus annuels sont de 5 757 livres.

En 1789, il y a six moines avec l'abbé Alain de Solminihac.

L'inventaire des biens de l'abbaye est fait le 21 et 22 juin 1790.

Tous les biens, en dehors de l'église abbatiale devenue bien communal, sont vendus en 1791.

Le cloître et les bâtiments conventuels sont rachetés par le département en 1839.

L'ancienne abbaye de Cadouin est classée monument historique en 1840.

Elle est inscrite en 1998 sur la liste du patrimoine mondial par l'UNESCO au titre des chemins de Saint-Jacques-de-Compostelle en France.

 

L'église abbatiale

Plan des bâtiments monastiques


L'église abbatiale de Cadouin est une église romane de trois nefs avec quatre travées voûtées en berceau brisé.

Elle est consacrée en 1154.

La façade occidentale, à la saintongeaise, se présente comme un grand mur austère et massif, avec un porche à quatre rouleaux en son centre, trois grandes baies, en plein centre et plusieurs arcatures aveugles.

L'intérieur est marqué par la sobriété de la décoration.

La croisée du transept est dominée par une superbe coupole à pendentifs.

Le chœur est décoré de chapiteaux aux motifs végétaux traditionnels dans l'architecture cistercienne primitive. Les chapiteaux de la nef sont en revanche plus frustes.

L'église possède la particularité d'être percée de trois oculi (petite fenêtre ronde) alignées, une sur la façade et deux sur la coupole.

À chaque équinoxe ces oculi sont traversées par un rayon de soleil, matérialisant l'orientation symbolique de l'église vers l'Orient.

 

Le cloître

Cadouin, l'abbaye Notre-Dame de la Nativité
Carte postale de Cadouin, le cloître


Le cloître, de fonds roman, est décoré du XVe au XVIe siècle. Des colonnes richement sculptées supportent des voûtes compliquées.

Dans la galerie nord, on trouve un magnifique siège abbatial en pierre.

Aux angles se trouvent des portes flamboyantes du XVe siècle et des portes Renaissance du XVIe siècle.

Autour du cloître se trouvent des bâtiments abbatiaux restaurés aux XVIIe siècle et qui abritent aujourd'hui une auberge de jeunesse.

 

Le suaire de Cadouin

 
Saint-Suaire de Cadouin, en réalité voile de la période fatimide, tissé en Égypte sous le règne du calife Al-Mustalî (1094 -1101)


Aucune archive ne permet de retracer les origines du Suaire de Cadouin.

Pendant des siècles, l'histoire se mêle de légende et l'héritage de cette relique de la Passion par les moines de Cadouin s'inscrit dans la lignée de biens des "reliques" médiévales.

Une pancarte affichée dans l'abbatiale depuis le Moyen Age attestait de l'authenticité de cette relique.

Ramenée de Terre Sainte après la 1re Croisade, elle était destinée à la cathédrale du Puy, celle d'Adhémar de Monteil, légat du pape dirigeant cette Croisade, puisque c'est lui qui était l'heureux bénéficiaire de l'invention de cette relique pendant le siège d'Antioche.

Mais les chanoines du Puy refusèrent de croire à l'histoire du prêtre périgourdin que le légat-évêque avait chargé de ramener la relique dans sa cathédrale.

C'est donc naturellement dans sa paroisse de Brunet que le prêtre périgourdin décidait de conserver cette précieuse relique.

Voisin des moines de Cadouin qui venaient de s'installer dans le vallon du Bélingou, en contrebas de Brunet, le prêtre ne tardait pas à rejoindre la communauté monastique. Son église en bois ayant brûlé, le Saint Suaire, miraculeusement épargné, était récupéré en 1117 par les moines de Cadouin qui accueillaient le malheureux prêtre dans les murs de leur abbaye fondée deux ans plus tôt.

Le Saint Suaire était désormais cadunien, il le resterait pour toujours, malgré quelques épisodes extérieurs à Cadouin.

Plus probablement entre 1201 et 1214 (date de la première mention du Suaire dans un acte de Simon IV de Montfort), l'abbaye entre en possession du « Suaire du Christ » et le conserve, durant plusieurs siècles.

Cette relique insigne vaut à l'abbaye de Cadouin de devenir un lieu de pèlerinage important, sur le chemin de Compostelle.

À partir de 1214 l'histoire de l'abbaye est intimement mêlée à celle de sa relique : grandeur et décadence se succèdent jusqu'à la Révolution et au départ des derniers moines.

Louis XI, après la Guerre de Cent Ans et un procès interminable avec les consuls de Toulouse, rend la relique aux caduniens, confiée aux Toulousains pendant ce conflit pour éviter d'être dérobée, c'est que ce roi dévot estime légitime la requête cadunienne.

Le roi rend la relique à ses propriétaires et finance en grande partie la reconstruction de l'abbaye endommagée pendant la guerre, et notamment la construction du cloître gothique flamboyant qui fait aujourd'hui la renommée de Cadouin.

Le roi finance également la création d'une halle, qui existe toujours au centre du village, pour relancer l'activité économique autour de l'abbaye.

Le pèlerinage de Cadouin décline pendant les guerres de religion, mais est relancé en 1644, par la publication d'un procès-verbal d'authenticité de Mgr de Lingendes.

Les abbés Louis d'Arodes (1660-1666) et Pierre Mary (1666-1696) profitent de cette embellie, avant un déclin qui dure jusqu'à la Révolution et la dispersion des moines.

Le Saint-Suaire est sauvé de l'incendie par Bureau, le maire de Cadouin, qui le cache sous son plancher, jusqu'à ce qu'il puisse être rendu au culte le 8 septembre 1797.

Cependant, il ne fait l'objet que d'un pèlerinage paroissial jusqu'à ce que Mgr Dabert, évêque de Périgueux, le relance en 1866. En effet, le XIXème siècle est une longue suite d'ostensions aussi confidentielles que périodiques.

Chaque année au mois de septembre la relique est sortie de son reliquaire et une procession parcourt les rues du village pour offrir la relique en vénération aux pèlerins.

Le village, que commence à toucher l'exode rural s'endort paisiblement... jusqu'en 1866 quand Mgr Dabert prend la tête du diocèse.

Il cherche un sanctuaire diocésain capable de drainer des foules de pèlerins pour participer à son œuvre d'évangélisation diocésaine.

Quand il apprend l'existence à Cadouin d'une relique de la Passion il ne tarde pas à réagir.

Il jette son dévolu sur le Saint Suaire et l'histoire de Cadouin s'en trouve encore une fois bouleversée ; Ferveur dure jusqu'en 1934.

À cette date, un historien jésuite détermine la date de l'objet grâce à la présence de bandes décoratives ornées d'un texte.

Il y relève une inscription en coufique, style d'écriture de l'alphabet arabe.

Ouvert par la « fatiha », la profession de foi islamique, le texte indique ensuite que le voile fut tissé à l'époque de Al-Musta'li, calife de l'Égypte fatimide, et de son vizir El Afdal, à l'extrême fin du XIe siècle.

En 1936, à la suite de la publication de cette information, Mgr Louis évêque de Périgueux annule le pèlerinage ancestral à Cadouin, qui perdit là une grande partie de ses revenus.

Habituellement visible dans le cloître de l'abbaye, le suaire, exceptionnel tissu fatimide intact (un seul autre est connu), est parti en restauration à Périgueux en juillet 2005.

L'original devrait également retrouver sa place au cœur de l'abbaye mais il ne sera plus présenté au public:l'exposition prolongée à la lumière détériorant le tissu. Depuis 2012, un fac-similé est présenté au public.

Une exposition présente les récents travaux du cloître ainsi que le facsimilé du tissu fatimide nommé Saint Suaire de Cadouin réalisé depuis 2006 par l'E.N.S.I.S.A (École Nationale Supérieure d'Ingénieurs d'Alsace) avec la collaboration du L.R.M.H (Laboratoire de Recherche des Monuments Historiques) .

Depuis près de 20 ans, sous l'égide des « Amis de Cadouin », un colloque historique et archéologique réunit les passionnés de Cadouin chaque année fin août.

 

Les manuscrits de l'abbaye de Cadouin

Malgré les ravages du temps, les manuscrits de Cadouin restent un témoin important de la richesse de sa bibliothèque.

Ces manuscrits correspondent à la pratique de la vie monastique, partagée entre prière, messe, offices, étude de l'écriture sainte et travail.

Les plus anciens manuscrits sont un Sacramentaire grégorien à l'usage de Cahors, de la première moitié Xe siècle, et le Lectionnaire de la messe réunissant l'épistolier et l'évangéliaire confectionné au XIe siècle.

La plupart des manuscrits d'étude datent du XIIe siècle.

Cette bibliothèque était renommée au XVIIIe siècle. En 1712, dom Jacques Boyer, de la congrégation de Saint-Maur, signale l'existence de « quantités de beaux manuscrits » dans les archives de Cadouin.

Nicolas Baudeau, chanoine de l'abbaye de Chancelade, a recopié de nombreux actes qui ont permis de reconstituer une partie du cartulaire de l'abbaye.

À la demande l'évêque de Périgueux, Guillaume Vivien Leydet chargé en 1769 d'une recherche d'anciens manuscrits liturgiques repère les manuscrits conservés à l'abbaye de Cadouin.

L'abbaye de Cadouin, hormis l'église, est vendue comme bien national en 1793.

Le décret du 17 juillet 1793 supprime les droits féodaux et les redevance seigneuriales en imposant de brûler les titres seigneuriaux le 10 août.

L'inventaire des biens de l'abbaye fait en 1790 mentionne les manuscrits.

On ne sait pas si certains livres de l'abbaye n'ont pas aussi été brûlés le 10 août 1793.

Certains livres avaient déjà été rassemblés par des administrateurs du district de Belvès pour les placer dans une bibliothèque publique.

Une trentaine d'ouvrages des XVIe et XVIIe siècles sont conservés dans les Archives du diocèse de Périgueux.

D'autres manuscrits sont conservés à Cadouin dans des conditions délicates.

Une première étude de ces manuscrit est faite par Eugène Chaminade (1847-1922) qui a été longtemps curé de Sainte-Croix-de-Beaumont.

Il a publié en 1887 la Monographie des manuscrits de chant de l'abbaye de Cadouin.

Devant l'importance historique de ces manuscrits et la nécessité de les protéger, ils ont été classés au titre des monuments historiques le 4 mai 1905.

Après la Loi de séparation des Églises et l'État, un inventaire des biens de la fabrique est fait le 23 janvier 1906.

La quasi-totalité des archives et des manuscrits de l'abbaye de Cadouin sont aujourd'hui déposés dans les Archives départementales de la Dordogne.

Ces manuscrits sont consultables sur la Bibliothèque numérique du Périgord.

 

Galerie


Façade du XIIe siècle


Salle capitulaire


Cloître


Vierge à l'enfant


Détail de fresque


Porte renaissance et porte romane


Clés de voûtes représentant les évangélistes Marc (lion) et Matthieu (ange)

Source :

















Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire