Ascain
église Notre-Dame de l'Assomption
L'architecture de l'église d'Ascain est tout à fait représentative des églises de village du Pays Basque Nord : une construction simple (rectangulaire, sans transept, avec peu d'ouvertures) à laquelle est adossé un imposant clocher-porche (celui d'Ascain est d'une hauteur totale de 22 mètres et dispose de 4 étages, les murs ayant, à la base, une largeur de 1 mètre).
L'édifice actuel date de 1626, comme en témoigne l'inscription au-dessus de l'arcade, côté place.
Il
subsiste des traces d'une église plus ancienne : avec ses pierres plus
usées et de couleur différente (ocre, beige et rose), une partie du mur
Nord (côté Hôtel de la Rhune) est nettement différente du reste de
l'édifice. On pense qu'il s'agit d'une église édifiée (ou remaniée) au
XVe siècle.
Une
curiosité attire l'attention lorsque l'on regarde l'église depuis le
Monument aux Morts. Tout en haut, une niche plein cintre abrite une
statuette de pierre ; le personnage - féminin - tient dans ses bras une
tour crénelée ; il s'agit de sainte Barbe, patronne de tout ce qui a
rapport au feu ; elle est placée tout en haut du clocher pour le
protéger (et, avec lui, protéger le village) contre la foudre.
Le
clocher d'Ascain possède 4 cloches, dont 3 en activité (la quatrième,
qui se trouvait jadis sur la toiture au-dessus du chœur, est aujourd'hui
désaffectée) ; si la plus grosse cloche (pesant 1,300 kg et ayant une
hauteur de 1 m 20) date de 1904, les deux autres (pesant, à elles deux,
plus d'une tonne) datent de 1874.
Les galeries
Ce
qui frappe le plus le visiteur non familiarisé avec les églises du Pays
Basque, ce sont les imposantes galeries en bois qui courent le long des
murs. Il s'agit là d'une véritable caractéristique architecturale des
églises du Pays Basque Nord (à noter que l'on ne trouve pas ces galeries
dans les églises du Pays Basque Sud).
L'idée
des galeries est née au XVIe siècle. Le Pays Basque connaissant, en
pleine période de chrétienté, une importante expansion économique et
démographique (due principalement à la pêche et à l'arrivée du maïs),
les églises s'avèrent être trop petites. L'évêque de Bayonne (originaire
d'Ascain) suggère alors aux curés d'agrandir leurs églises sans toucher
aux murs : en ajoutant ces galeries qui permettent d'augmenter
d'environ un tiers la capacité d'accueil de l'édifice.
Ces galeries en forme de "U" s'élèvent sur 3 niveaux et disposent d'un accès direct sur l'extérieur.
Au
premier niveau, sous l'orgue (composé de 20 jeux et inauguré en 1987),
une tribune est réservée, pour les grandes fêtes, au conseil municipal ;
elle est malicieusement appelée "astoteia", un mot qui signifie "le
lieu des ânes".
Derrière
cette tribune, une large porte donne accès à une salle située au-dessus
du porche : c'est là que se tenait, sous l'Ancien Régime, l'assemblée
des "maîtres de maison" (etxeko jaunak), lointain ancêtre de nos
assemblées municipales.
Le retable principal
Nombre d'églises du Pays Basque Nord comportent un retable de style baroque.
Celui
d'Ascain est particulièrement riche. Classé à l'inventaire des
Monuments Historiques, il est daté du début XVIIIe (c'est-à-dire un peu
postérieur à celui de Saint Jean de Luz).
Les
retables trouvent leur source dans le mouvement de Contre-Réforme qui a
suivi la révolte de Luther. Luther niant la réalité de la présence
eucharistique et réprouvant le culte (et donc la représentation) des
saints, les artistes baroques vont développer une apologétique
parfaitement contraire : tabernacle surdimensionné et richement décoré
et statuaire très importante.
Au-dessus
du tabernacle, on trouve toujours, dans les retables baroques, la
statue du patron ou de la patronne de l'église : ici, c'est la Vierge de
l'Assomption, magnifiquement représentée (remarquez le drapé de la robe
de la Vierge, ainsi que le naturel du mouvement ascendant de l'ensemble
Vierge-anges).
De
chaque côté de la Vierge, saint Joseph (représenté avec sa règle de
menuisier-charpentier) et saint Jean l'Evangéliste (tenant dans ses
mains un papyrus et une plume).
De chaque côté du tabernacle, saint Pierre (avec sa clé) et saint Paul (avec l'épée).
Enfin,
tout en haut du retable, une colombe. Cette représentation est capitale
pour comprendre la "théologie" des retables baroques. A Luther qui
affirme que le culte des saints détourne le chrétien de sa relation à
Dieu et doit donc être proscrit, les artistes baroques répondent, non
seulement en sculptant beaucoup de statues, mais en plaçant toujours une
représentation de Dieu au sommet de leurs retables (signifiant par là
que le culte des saints n'a de sens que s'il conduit à Dieu) : ici,
c'est la colombe, représentation traditionnelle de l'Esprit Saint.
A
noter l'imposante surélévation de l'ensemble du chœur, ce qui permet
d'installer la sacristie sous le chœur. Cette disposition originale se
retrouve dans plusieurs églises basques (Saint Jean de Luz, Ciboure,
Sare, Cambo, etc...).
Les retables latéraux
Les
deux retables latéraux sont sans doute légèrement postérieure au
retable principal. Celui de droite est particulièrement remarquable en
raison de la présence d'une très belle statue de la Vierge, dorée à la
feuille : il s'agit d'une copie (obtenue par un moulage opéré sans doute
au XIXe siècle) d'une statue du début du XIVe siècle ; l'original est
en marbre blanc et se trouvait au Monastère de Longchamp ; il est
actuellement au Musée de Cluny, à Paris, et est répertorié sous le nom
de "Vierge de Longchamp". Remarquez que l'Enfant Jésus tient
curieusement un oiseau dans sa main.
On
ne manquera pas d'admirer la beauté et l'élégance de la charpente en
bois, au-dessus de l'avant-chœur ; peut-être l'œuvre de charpentiers de
marine (particulièrement réputés à Ascain) ; les curieux personnages
situés en haut des retables latéraux n'évoquent-ils pas, d'ailleurs, les
proues des navires ?
Les statues côté chaire
Sous
la chaire, on peut admirer 3 statues remarquables : au centre, un
Christ à la longue chevelure, en bois de noyer (XVIIe siècle).
De
chaque côté, deux statues représentent, l'une saint Mathieu (un enfant
s'accroche à ses basques), l'autre saint Luc (avec, à ses pieds, le
buste du bœuf).
Ces
deux statues, qui, jusqu'en 1963, étaient à l'abandon dans le clocher,
proviennent sans doute du retable original de l'église (celui en place
au XVIIe siècle). On remarquera sans peine des restes de dorure sur
chacune de ce deux statues.
Les autres statues
- près de l'autel latéral gauche : statue de saint François d'Assise
- près de la porte côté droit : statue de saint Jean-Baptiste
- près du baptistère : statue très naïve de saint Antoine de Padoue
La porte des cagots
Le
mur gauche (côté chaire) est percé d'une porte très basse : elle est
appelée "porte des Cagots". Le phénomène "Cagot" (dont on trouve trace
dès le XIIe siècle et qui ne s'est terminé qu'à la fin du XVIIIe)
désigne l'exclusion très sévère dont était victime une partie de la
population, appelée "Cagots" ; cette exclusion pourrait provenir du fait
que ces personnes étaient réputées comme ayant des lépreux dans leur
ascendance (même si elles n'avaient pas développé elles-mêmes la
maladie) : la lèpre étant considérée comme héréditaire, il convenait de
s'en protéger, fût-ce par des mesures qui apparaissent aujourd'hui
particulièrement inhumaines.
L'église
acceptait la présence des cagots aux offices, mais les textes
stipulaient qu'ils devaient se tenir le plus loin possible de l'autel,
d'où le positionnement de cette porte près du fond de l'église.
Le sol
On remarquera au sol de nombreuses dalles funéraires.
Jusqu'à
la fin du XVIIIe siècle en effet, il n'y avait pas de cimetière
extérieur à l'église ; chaque maison possédait, dans la nef, un
emplacement dans lequel se faisaient les inhumations (et qui était
attaché à la maison).
Les
femmes étant, dans la culture basque, chargées de rendre le culte aux
morts, elles se plaçaient, lors des offices, sur la dalle (en basque :
le "jarleku") de la maison. Peut-être doit-on trouver là l'origine de la
tradition qui veut que les galeries soient réservées aux hommes :
n'ayant pas la charge "culturelle" du culte aux défunts et l'église
étant trop petites pour accueillir tout le monde dans la nef, on peut
penser qu'ils sont naturellement montés aux galeries.
Suspendue
à la voûte, une maquette de bateau rappelle le riche passé maritime
d'Ascain (le village était, en particulier, réputé pour ses chantiers
navals) : d'une longueur de 1 mètre 10, la maquette représente un trois
mâts carré de commerce, avec faux sabords, tel qu'il naviguait au milieu
du XIXe siècle.
Source : brochure offerte par la paroisse dans l'église.
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