La Salette
l'esplanade de l'apparition
Lorsqu'au terme de l'ascension, on arrive sur le plateau où depuis on a construit le sanctuaire de Notre-Dame de la Salette, on aperçoit à sa droite, à une distance de vingt-cinq ou trente mètres, un petit monument, surmonté d'une statue de la sainte
Vierge, qui est destiné à indiquer le lieu où Marie, après avoir rempli
sa mission de bonté et de miséricorde, disparut aux yeux des enfants.
Ce
petit oratoire se trouve sur l'un des côtés du plateau, à l'endroit où
le terrain s'affaisse subitement pour former un des bords du ravin au
fond duquel coule le petit ruisseau du Sesia.
Passons le monument de l'Assomption...
Source : Livre "La Salette : album composé de 8 vues dessinées d'après nature et lithographiées" par A. Maugendre
Mois de Notre-Dame de la Salette, 31ème jour
L'assomption de Notre-Dame de La Salette
Nous
voici en présence des dernières circonstances de l'apparition : or,
pendant que la divine Vierge s'élevait en l'air, Elle a regardé le ciel,
ensuite la terre du côté de Rome, et puis, Elle a disparu peu à peu aux
yeux des enfants, pour remonter au séjour glorieux d'où Elle était
descendue.
Étudions
aujourd'hui, avec les yeux de la foi et les sentiments de la piété, ces
deux derniers regards de notre Mère, dont l'un va au ciel et l'autre à
Rome.
1° Premier regard de Notre-Dame de la Salette, vers l'Italie, du côté de Rome :
L'Italie,
Rome, quels mots, quels souvenirs ! Quel appel touchant à nos pensées
et à nos sentiments ! Rome, la nouvelle Jérusalem de la terre ; Rome, la
tête et le cœur de l'Église, le centre de la vérité, le foyer de la vie
catholique ! La source intarissable de cette eau surnaturelle qui
étanche la soif de l'esprit et du cœur, et qui jaillit jusqu'à la vie
éternelle !...
Dans
ce regard inexprimable de Marie vers notre Rome, et les pleurs qui ont
deux fois rempli ses yeux, il y avait sans doute des larmes sur les
malheurs qui menaçaient de la rendre veuve de son pontife ; des larmes
sur les œuvres sacrilèges qui pourraient la livrer aux mains impies des
méchants !..,
Mais
aussi, que de tendresse ineffable, que de forte consolation, que
d'amour protecteur et maternel dans ce même regard sur la ville de son
Fils et sur le front de son pontife !
Et ce regard maternel, Marie le devait à Pie IX, qui l'a proclamée Vierge immaculée.
Ah!
nous aussi, à l'exemple de Marie, et des yeux du cœur éclairés par la
foi, regardons Rome avec une filiale tendresse, et offrons à l'Eglise
mère, dans l'effusion de notre cœur, le serment du Prophète :
« Que je m'oublie moi-même, si jamais je pouvais l'oublier, si je pouvais jamais te devenir infidèle ! »
2° Après ce premier regard d'amour, Marie regarde le ciel, où Elle va remonter...
Le
ciel ! Oh ! quel mot consolant pour les âmes ! Le ciel, notre patrie !
le ciel, notre espérance ! Le ciel, l'objet, le terme de tous nos vœux,
de tous nos efforts ! l'aspiration de tout notre être, de toute notre
existence ! le ciel, pour lequel nous avons été créés, pour lequel nous
avons tout reçu de sa libéralité infinie ! le ciel, où la bonne Mère
nous attend, et Dieu lui-même, pour nous faire partager un
incompréhensible bonheur ! Richesses, plaisirs, honneurs, vous n'êtes
rien à côté du ciel ! Vous pouvez être aux mondains l'incessante pâture
de l'illusion ; vous pouvez jeter à leur faim insatiable quelques
miettes empoisonnées ! mais comme vous disparaissez et devenez
méprisables à mes yeux, placés à l'horizon du ciel !...
Non,
je le sens aujourd'hui en voyant monter ma Mère au ciel, vous n'êtes
pas faits pour moi ! je suis trop grand pour descendre jusqu'à vous;
vous êtes trop bas pour monter jusqu'à moi, destiné à une gloire et à
une félicité infinies !
Et
il ne faut pas vous plaindre de mon indifférence et de mon mépris ;
Jésus vous a ainsi traités, méprisant tout de la terre, richesses,
royauté, honneurs ; et Marie imite aujourd'hui son exemple, ne voulant
emporter au ciel rien de la terre, pas même les roses dont Elle avait
fait à ses pieds une couronne virginale ! Tels sont la portée et le sens
des deux derniers regards de Notre Dame de la Salette, au moment de
prendre son essor, au sommet des Alpes, dans la nuée lumineuse de sa
gloire ; en face de ces deux regards de notre Mère, âme chrétienne, il
nous faut estimer ce que Dieu nous a faits, c'est-à-dire, un citoyen du
ciel, un frère des saints, un noble membre de la famille de l'Église,
dont les pensées et les sentiments doivent monter et monter sans cesse,
jusqu'à ce qu'il aille vivre là-haut éternellement de lumière et
d'amour, d'inaltérable lumière et de parfait amour.
Réflexions
On
pourrait appeler l'assomption de Notre Dame de la Salette, la voie du
ciel : elle nous est indiquée par toutes les circonstances qui
accompagnent cette assomption.
1°
Marie, pour s'élever au ciel, n'est pas restée au fond du vallon de
l'apparition ; Elle a gravi l'éminence voisine, un lieu plus élevé qui
domine le plateau de la montagne : cet acte de notre Mère est un
enseignement : Elle a voulu, en montant Elle-même, nous apprendre à nous
élever au-dessus des basses régions de la terre, vers le ciel, offert à
nos désirs, promis à nos aspirations et à nos efforts.
2°
Aux termes du récit, la Vierge se balançait doucement dans les airs
comme un globe de feu, au moment de l'assomption : il résulte de ces
paroles, que le corps très pur de Marie, semblable à un astre
resplendissant, se mouvait dans une atmosphère lumineuse : cette clarté
brillante était le rejaillissement de son âme glorifiée :
«la beauté du corps, dit saint Augustin, dérive de la clarté de son âme».
Marie
se propose ici figure et modèle de l'âme innocente et pure, qui, au
moment de quitter la vie, secouant ses blanches ailes, trouve sans
effort une puissance d'essor suffisante à la ravir au ciel...
3° La Vierge disparaît peu à peu aux regards attentifs des deux bergers.
Cette
disparition progressive contient encore un enseignement salutaire : il
faut voir dans cette circonstance, l'image de ce détachement commandé,
par lequel nous devons successivement nous déprendre de tout ce qui est
corruptible et passager ; faire disparaître de notre esprit la fausse
appréciation des choses terrestres ; en détruire l'illusion trompeuse et
l'amour fallacieux dans notre cœur ; devenir, en un mot, selon la belle
expression de saint Paul, des hommes spirituels, qui s'envolent à
l'éternel séjour, où il ne peut rien entrer que de pur ; et vers lequel
ne peut monter, dit saint Ambroise, que ce qui est dégagé de tout poids
étranger !...
4° Marie, en disparaissant, disent les bergers, laissait après Elle, dans l'espace, une traînée lumineuse.
Il
faut voir ici l'emblème du doux et pur éclat des vertus chrétiennes que
nous devons laisser après nous à ceux qui nous survivent ;
c'est-à-dire, un sillon de lumière qui leur montre le chemin de la vraie
gloire, de la vraie fortune, de la vraie félicité, par lequel ils
devront nous suivre, et venir nous rejoindre au ciel !...
5°
Enfin il est raconté qu'en voyant Marie s'élever et disparaître
complètement, les bergers s'élancent, pour retenir, disent-ils, quelque
chose de ce qui s'échappe du corps et des pieds de la Vierge ; mais tout
s'évanouit dans l'espace, et ils ne saisissent que le vide !...
Ames
chrétiennes, pourrons-nous vous proposer, à la fin de ce mois béni, une
image plus fidèle, une figure plus saisissante du néant de la vie, et
du vide de toutes choses humaines et créées ?...
Oui,
comme la vie est courte ! comme le temps passe rapidement ! comme tout
s'évanouit dans le vide, ne laissant ici-bas que l'empreinte presque
effacée d'avance d'un vague souvenir! et où allons-nous ? à l'éternité
!...
Nous
traversons le temps avec ses affaires, ses rares joies, ses nombreuses
tristesses, et nous arriverons là, à ce terme inévitable de toute vie,
l'éternité !...
« L'éternité, terme sans terme, disent les Pères ; fin qui est un commencement, et un commencement sans fin !... »
Source : Livre "Mois de Marie de la Salette, ou l'apparition méditée sous forme d'exercices" par Boissin
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