Paray le Monial Notre-Dame de Romay

Paray le Monial
Notre-Dame de Romay


Paray le Monial, Notre-Dame de Romay
Carte postale de Notre-Dame de Romay


Quelle que soit la véritable étymologie du nom de Romay, sa consonnance exhale un parfum exquis de catholicité.
Romay est un petit hameau à un quart d'heure de Paray le Monial, où se présente pleine de grâce et de fraîcheur une antique chapelle dédiée à la mère de Dieu.
Sa gloire est toute intérieure, toute de foi et de confiance.
Le sanctuaire, antérieur au XIIe siècle, a reçu à son rond point une large fenêtre ogivale, et de chaque côté une petite fenêtre du XIVe siècle.
Au côté droit de la nef et à l'entrée du sanctuaire, on a construit en 1723 un petit oratoire dédié à Sainte Anne.
La façade et la porte d'entrée ont été refaites, il y a peu d'années, dans le style des XIVe et XVe siècles.
Deux aiguilles à clochetons ornent la naissance du fronton que surmonte une belle croix gothique, en arrière de laquelle est la petite cloche qui appelle les fidèles au saint lieu.
Au-dessus de la porte d'entrée, la Vierge aimable, placée dans une niche gothique, tend les bras à ses enfants, et leur ouvre son cœur.

L'autel de Sainte Anne, comme celui de la Sainte Vierge, est neuf et de marbre blanc.
L'objet principal de ce saint lieu est la madone placée au-dessus du tabernacle où ne se gardent jamais les saintes espèces. Elle se dessine, avec l'enfant Jésus dans les bras, sur un joli vitrail de couleur qui lui sert de fond. A droite et à gauche sont les tableaux de St Joseph et de St Pierre, l'un avec le lys, emblème de la pureté ; l'autre avec le chantre impitoyable de sa faute et de sa pénitence.
A gauche, dans la nef, grande toile, médiocre peinture représentant le triomphe de la Religion, avec cette inscription :
« Vouée par les Dames de Paray à Notre-Dame de Bon-Secours pour le salut de la France, en 1815. »
Tout à fait à la clef de l'arc du sanctuaire, joli cadre doré, au milieu duquel, sur du velours-soie cramoisi, est placé un cœur en vermeil, hommage de la ville préservée du choléra en 1854.
Le fond de la nef, au-dessus de la porte d'entrée, est occupé par une petite tribune qu'éclaire un œil de bœuf à vitraux de couleurs.
Tel est le modeste sanctuaire auquel nous consacrons cette étude de piété filiale de reconnaissance et d'amour.
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La première origine de Romay, comme celle des plus vénérés sanctuaires, se perd dans la nuit des temps. Elle est due à quelque manifestation demeurée inconnue de la tendresse et de la puissance de Marie.
Faut-il la reculer au delà du Xe siècle ? Nous ne sommes pas éloignés de le croire. Mais alors, les murs l'attestent, il a reçu plus de développement ; et nous aimons à les considérer comme une invocation à la Vierge céleste, alors que les fondateurs du Prieuré donnaient, en 980, le premier coup de pioche à la terre voisine qui devait fournir toute la pierre nécessaire à la construction du monastère et de l'église.
En recueillant les vestiges trop effacés de la tradition, n'avons-nous pas souvent entendu les anciens nous parler de ces bœufs célèbres qui, seuls et sans guides, par le chemin solitaire qui subsiste encore au pied de la colline, ont amené de Romay la pierre murale nécessaire à la construction de l'un et de l'autre ? Et, dans cette légende, ne pouvons-nous pas apercevoir l'action dès lors merveilleuse de Notre-Dame de Romay ? 
Sans aucun doute , c'est un sentiment pareil de confiance et d'intercession qui, plus tard, au XIVe siècle, fit tailler à jour, et placer dans le sanctuaire béni, ces fenêtres ogivales dont nous avons parlé.
Nous retrouvons dans la principale le type et parfait modèle de celles que la main des artistes chrétiens allait jeter, à la même époque, sur la tour inachevée de l'église bénédictine. Ces larges ouvertures, qui formaient les huit côtés égaux du clocher des moines, surmontés du dôme majestueux que nous avons vu, il y a deux ans, remplacé par la flèche et un nouvel étage plus en harmonie avec le reste de l'édifice, étaient la reproduction exacte, mais dans de plus vastes proportions, de la grande fenêtre de Romay.
  [ocr errors]Notre-Dame de Romay est au Charollais ce qu'est Fourvières au Lyonnais, Notre-Dame de la Garde au Provençal.
Le concours des pèlerins étrangers rivalise avec la piété des habitants.
Tel qui ne prie plus Dieu, ne peut se défendre d'aimer Marie, de s'agenouiller quelquefois, de verser une larme au pied de son autel de Romay. Et c'est là trop souvent le dernier espoir du salut de plusieurs qui semblent pourtant n'avoir à cœur que de se perdre. 
Les dimanches et les jours de fêtes, il est beau et consolant de voir le chemin de Romay couvert toute la journée de pieux pèlerins, et le sanctuaire tout parfumé de prières !
Mais c'est surtout lorsque la procession solennelle, dans quelques circonstances de l'année, comme aux Rogations ou au mois de mai, sortant de la grande église, s'achemine lentement, longuement vers Romay, à travers les sillons, au chant des hymnes et des cantiques, c'est alors que la foule des serviteurs de Marie offre au regard attentif et ému, à côté du poétique tableau si bien décrit par Chateaubriand, le spectacle d'un profond et significatif recueillement.
Ce n'est point seulement de Paray que l'on s'achemine ainsi en foule vers Romay.
Chaque année la paroisse de Chalmoux accomplit, aux premiers jours de mai, un vœu fait par ses pères à une époque immémoriale.
On se redit seulement, de génération en génération, que les fléaux du Ciel, sept ans de suite, comme dans la vieille Egypte, avaient ravagé le territoire lorsque, reconnaissant la main qui les frappait, les habitants ne virent plus rien à faire que de se vouer à la Reine du ciel. Ils s'engagent à perpétuité, pour eux et leurs enfants, à venir chaque printemps en pèlerinage à Notre-Dame de Romay.
Fidèles à ce pieux devoir, hommes, femmes et enfants, chaque année, descendent de leur montagne et parcourent neuf lieues de chemin pour se trouver, dès les cinq heures du matin, au rendez-vous, qui est la chapelle de l'hospice de Paray.
C'est de là qu'ils partent en procession, la croix en tête, au chant des litanies de Lorette, conduits par leur pasteur accouru comme eux, jusqu'au sanctuaire de Romay, où ils entendent la messe, invoquent sur leurs familles et leurs biens la vertu cachée que recèle la parole évangélique, et se chargent des bénédictions de la Vierge immaculée pour toute la paroisse qu'ils sont heureux et fiers de représenter quelquefois au nombre de plus de cent.
Aussi les anciens aiment-ils à répéter que, depuis ce vœu si bien accompli, il est inouï que la grêle et les autres fléaux aient frappé leur territoire.
Cependant l'an dernier, pour la première fois, à la veille des récoltes, le bras de Dieu s'est montré comme une menace que la Vierge ne pouvait plus conjurer à cause de nos crimes.
Honneur aux habitants de Chalmoux, qui, loin de s'en scandaliser, n'en sont venus cette fois que plus nombreux et plus fervents à Notre-Dame de Romay ! 
IV
Un pareil concours, une confiance aussi persévérante, ne peuvent s'expliquer que par la continuation des miséricordes et des bienfaits de Marie sur ceux qui viennent l'invoquer en son sanctuaire de Romay.
Nul ne saura jamais toutes les grâces de consolation, de lumière et de secours qu'elle ne cesse d'y prodiguer aux âmes.
Goûtez plutôt, et voyez combien est doux au cœur un instant auprès de Notre-Dame de Romay !
Mais les bénédictions purement spirituelles de Marie ne vont jamais seules dams ses sanctuaires illustres.
Elle passe, comme son fils, en faisant le bien et guérissant toute sorte d'infirmités au milieu de son peuple. 
La gloire de Romay n'est donc point tellement intérieure qu'elle soit dépourvue de l'éclat des miracles. Telle est la conviction universelle, et la tradition nous a conservé des souvenirs que nous aimons à recueillir ici.
Une femme de grand caractère et de haute vertu, la mère Bauderon, restauratrice de l'hospice de Paray après la Révolution française, et décédée à quatre-vingt-onze ans, il y a une vingtaine d'années, aimait à redire le récit suivant à ses compagnes, dont plusieurs vivent encore pour l'attester :
 « Autrefois il y avait à Paray un assez grand nombre de familles protestantes. Un miracle arrivé à Romay détermina leur conversion. Une de mes parentes était mariée à l'un d'eux nommé Decamp. De ce mariage était née une petite fille, privée dès sa naissance de l'usage de ses jambes et incapable de marcher. Elle avait environ quatre ans lorsque sa mère, recueillant les souvenirs de son enfance ou cédant peut-être dans sa douleur aux instances de quelques amies pleines de confiance en Notre-Dame de Romay, consent à lui laisser présenter sa fille, à en laisser solliciter d'elle la guérison. On apporte la pauvre enfant dans une jatte : on la dépose ainsi au milieu du sanctuaire pendant la sainte messe offerte à son intention. Au moment de l'élévation, l'enfant se lève d'elle-même et court saisir la clochette que le clerc venait de remettre sur le marchepied de l'autel. N'était-ce pas vraiment un carillon d'ange ? N'était-ce pas le Te Deum naïf de l'action de grâces ? L'enfant était guérie ; et après le saint sacrifice achevé au milieu des larmes de la dévotion et de la reconnaissance, la petite revenait à Paray de son pied, donnant la main au prêtre et escortée par tous les témoins de cette merveille. Toute la population fut mise en émoi ; et l'on vit revenir à la foi catholique tout ce qu'il y avait encore de religionnaires à Paray,»
 Tel était le récit de la mère Bauderon ; et cette ville, qui gardera longtemps d'elle un si bon souvenir, sait si c'était une femme d'intelligence et de cœur !
Dans les registres de la paroisse, aujourd'hui déposés à la mairie, au 20 mars 1683, nous trouvons l'acte d'abjuration d'Abel Decamp. C'est précisément le père de l'enfant miraculée. Bien qu'alors on n'inscrivît point sur les registres toutes les abjurations, qui étaient quelquefois très-nombreuses, on aura tenu à inscrire celle-là, moins à cause de l'importance du personnage que pour rappeler le souvenir des merveilles de Notre-Dame de Romay.

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II est une sorte de bienfaits surnaturels réservée aux plus illustres sanctuaires de Marie, la résurrection des enfants morts sans baptême et leur admission au sacrement de la régénération.
Jacques Marchand en cite quelques exemples authentiques dans son Candelabrum mysticum (lect. IV, prop. 2e) ; et un homme dont le nom seul impose le respect et la confiance, Juste-Lipse, n'a pas voulu se défendre du pieux mouvement qui le portait à célébrer en vers latins un miracle pareil arrivé de son temps dans le sanctuaire de Notre-Dame de Hall.
« Ecoutez, dit-il, mon récit est certain, confirmé par des témoins et des écrits sérieux, confirmé par un tableau en tissu que l'on peut voir dans la chapelle de Hall. Voici la chose. Une dame près d'accoucher tombe languissante. Elle met au jour un enfant mort. Les amis et parents mettent en terre, selon l'usage, le cadavre. Ils se retirent, et le lendemain annoncent avec peine la chose à la mère qui n'y peut croire. Elle pleure tout le jour. Or, sur le soir, elle crut apercevoir une femme décemment vêtue qui lui promettait une abondante consolation si elle faisait un vœu à Notre-Dame de Hall. L'idée la frappe. Elle appelle et demande qu'on lui accorde au moins d'entrevoir son enfant que pendant tant de mois elle a gardé dans son sein maternel. On méprise sa prière ; on lui dit que l'enfant est mort et enseveli depuis trois jours. Elle insiste, joignant de nouveau les larmes aux prières. Un refus obstiné l'irrite : elle déclare qu'elle refusera de boire et de manger jusqu'à ce qu'on l'ait exaucée. Vaincus par ces menaces, ils vont, remuent la terre, rapportent l'enfant qu'ils mettent sur le lit de la mère. Elle demande de la lumière, examine attentivement. Que voit-elle ? — L'enfant change de couleur. De pâle il devient pourpre : il remue les bras et fait entendre six vagissements. On le porte au lieu saint pour y recevoir l'eau sainte ordonnée par la loi. Mais le prêtre n'est pas libre ; il est à l'autel et immole à Dieu la victime non sanglante. Après le sacrifice, nouveau retard : il ne veut point croire que l'enfant soit vivant. On l'affirme , il le nie, quand soudain l'enfant respire vivement....   Le prêtre alors remplit son ministère, eux, le leur, et l'on revient au logis. Enfin vers midi, s'assoupissant de nouveau après être entré au bercail de Jésus-Christ, l'enfant meurt et s'en va dans la demeure céleste. »
 Nous aimons à reproduire ainsi mot à mot, ligne pour ligne, le récit de Juste-Lipse, parce que c'est le récit simple et véridique de ce qui est cent fois arrivé à Romay.
Entre toutes les faveurs célestes que lui attribue la foi des peuples, c'est celle-là qui l'emporte pour le nombre et l'éclat ; et il y a quelques jours seulement, une mère désolée faisait  ainsi porter son enfant mort-né au même endroit où la petite Decamp avait été guérie ; bientôt il donnait les mêmes signes de vie que l'enfant de Notre-Dame de Hall ; il recevait le saint baptême et était admis aux honneurs de la sépulture catholique, symbole de la gloire du Ciel.
Il est plus aisé de rire de la foi des peuples que de la déraciner. La faiblesse des esprits forts ne vaut pas la force céleste des vrais croyants. Aucune raison naturelle n'expliquera la confiance des fidèles : aucun effort humain ne l'étouffera.

VI
C'est peut-être ici le lieu de rappeler un fait étrange dont tout le monde a entendu parler dans cette ville, dont tout le monde garde encore le souvenir après plus de cinquante ans.
Le 19 novembre 1807 , François Lécué, âgé de 37 ans, couvreur à Paray, s'en revenait sur le soir, en compagnie de deux ou trois hommes, apportant chacun un fagot de bois.
Arrivés non loin de la chapelle de Romay, ils aperçoivent quelque chose de lumineux qui semble s'avancer.
Ils précipitent leurs pas ; mais à Survaux, Lécué dépose son fagot et retourne seul sur ses pas pour s'assurer de ce que ce peut être.
Une voix se fait entendre distinctement, lui adresse quelques reproches, lui recommande de mettre ordre à son âme ; que le lendemain, à sept heures précises du soir, il doit mourir.
Il laisse son fagot de bois, annonce en rentrant la funèbre nouvelle.
Le lendemain, il fait venir un ennemi avec lequel il se réconcilie ; se confesse et fait les plus vives instances pour recevoir le saint viatique et l'extrême-onction. Il va demander le pardon et la dernière bénédiction de ses parents, les avertissant , de la part du spectre, qu'ils eussent à vivre chrétiennement. Il  passe la journée en œuvre de piété tant à la maison qu'à l'église.
 Le soir arrive ; il conjure son beau-frère de ne pas le quitter, que le moment s'approche ; qu'il est six heures et demie, et qu'à sept heures il mourrait.  Il lui fait ses adieux ainsi qu'à sa femme.  Il entend » sonner les sept heures ; il se lève, va à son lit, au pied duquel il tombe mort.   Le fait et les circonstances sont exacts. On n'a pas manqué de trouver beaucoup de merveilleux dans cet événement.
Le passage que nous citons ici est tiré textuellement d'un rapport officiel envoyé à l'Académie de Mâcon le 10 avril 1808 par M, membre de cette société, et le médecin le plus renommé de l'arrondissement.
S'adressant à une académie, il ne pouvait présenter sur la cause du fait et sur le fait même que, des observations scientifiques.
Mais, homme éminemment religieux, il ne désavouerait point notre récit traditionnel.
Un laps de 56 ans n'a fait que confirmer l'opinion que le doigt de Dieu est là, qu'il y a eu là beaucoup de merveilleux.
A Domino factum est istud et est mirabile in occulis nostris.
Et cependant, loin d'accréditer cette opinion et de chercher à la faire prévaloir, les ministres de l'Église, tout en constatant le fait à leur tour, cherchent dès l'origine à détourner l'idée d'une action surnaturelle dans le registre de la paroisse où nous lisons que Lécué est mort après s'être confessé le matin, comme ayant un pressentiment de sa mort, à raison des mouvements de sang qu'il éprouvait quelquefois, et notamment ledit jour, et qu'il a été inhumé en présence d'un grand concours de fidèles.
Certes, qui pourra admettre que les mouvements quelconques du sang puissent nous dire tant à l'avance l'heure précise de notre mort ? Lécué a vu, il a entendu, sans savoir au juste qui lui parlait ; ce qui a pu faire dire que c'était peut-être l'ombre de son frère mort au service. Mais le lieu et la manière de l'apparition n'ont point échappé à l'instinct populaire, et nous aimons, avec toutes les âmes pieuses de notre pays, pendant un demi-siècle, à voir là une chose très-ordinaire dans l'ordre des faits et gestes de la Reine du ciel, si désireuse du salut de tous, et qui, pour des raisons connues d'elle, s'est plue à faire éclater sa grande miséricorde en faveur du pauvre couvreur.
  VIII
En attribuant ces bienfaits à Notre-Dame de Romay, nous ne faisons que rendre à la Vierge immaculée les hommages qui lui sont dus, non que nous croyions qu'en ses images de pierre se trouve quelque chose de divin, quelque vertu intrinsèque, méritant le culte qui n'est dù qu'à la Vierge seule ; non qu'il faille adresser à cette image elle-même quelque prière ou mettre en elle sa confiance de la même manière que les païens mettaient jadis leurs espérances dans les idoles ; mais parce que le culte qui est rendu à l'image se rapporte à la personne même qu'elle représente.
C'est donc la mère de Dieu qui est le but de ces hommages, comme elle est l'auteur de ces bienfaits.
En vertu de cette toute puissance de supplication qui lui a été donnée, elle ouvre l'abîme de la divine miséricorde quand elle veut, comme elle veut, en faveur de qui elle veut.
Car telle est la volonté du Seigneur.
La volonté de Marie ! voilà, et elle suffit, la seule raison que nous puissions donner du choix qu'elle fait de certains lieux, de certaines images, pour se manifester au monde d'une manière plus sensible.
La volonté de Marie ! voilà la raison d'être de Notre-Dame de Romay ; voilà la cause de cette onction divine, de cette vertu cachée et toute-puissante qui semble venir de l'image de la mère de Dieu.
A Romay, cette douce image est en pierre assez grossièrement travaillée, mais sans avoir rien de rebutant.
Peu importe à la Vierge sans tache la finesse ou la grossièreté de la formule destinée à fixer son amour rendu sensible ! La mère et l'enfant sont d'un seul et même bloc. Les têtes seules et les mains sont à découvert. L'enfant et la mère reçoivent couronnes et vêtements plus ou moins riches, selon les degrés fixés par la liturgie sacrée.
 Nous ne savons point à quelle époque précise appartient ce groupe bénit : mais il est très-ancien, et nous devons recueillir ici les témoignages qui en font vraiment une image miraculeuse.
Déjà entourée du respect et de la confiance universels au temps du vandalisme protestant, la statue aimée, pour être soustraite à la fureur barbare de nouveaux Iconoclastes, dût être à la hâte cachée en terre dans la prairie qui s'étend devant la chapelle. Il était temps ! Les sectateurs de Calvin approchaient et allaient, pour quelque temps, imposer par la terreur à notre ville ses dissolvantes doctrines.
Quand parurent des jours meilleurs, on se prit à regretter l'image de Notre-Dame de Romay.
Mais celui qui l'avait soustraite à la profanation n'était plus, et son secret avait disparu avec lui.
Cependant on remarquait chaque jour les bœufs de la prairie qui venaient avec leurs pieds de devant gratter la terre en un certain endroit et semblaient, en quelque sorte, s'agenouiller. N'avait-on pas vu déjà le bœuf rendre hommage à l'Enfant-Dieu ? On creuse à l'endroit si singulièrement signalé. Que voit-on ? Notre-Dame de Romay conservée intacte et sans mutilations. (1)
(1) C'est peut-être l'origine de la fontaine réputée miraculeuse dont chaque pèlerin de Romay veut boire de l'eau. -

Les dégâts causés dans le sanctuaire par les huguenots n'ayant pu encore être réparés, les R. P. Jésuites sont heureux de placer la pieuse image dans la chapelle de leur collège, peut-être non sans quelque espoir d'y fixer les honneurs et le concours de Romay. Mais l'image disparaît, et se trouve soudainement dans son sanctuaire d'élection. On la rapporte ; elle disparaît encore, et s'en retourne chez elle.
Force fut bien de se soumettre à une volonté si hautement manifestée.
Quoi qu'il en soit de cette légende, on ne peut s'empêcher d'y reconnaître au moins cette vérité, que, par des moyens aujourd'hui ignorés, la Vierge céleste sut manifester et faire respecter sa volonté de faire toujours de Romay le trône de ses grandes miséricordes sur nous.
VIII
En des temps plus rapprochés de nous, la fureur impie du philosophisme se montra menaçante à son tour pour l'inoffensive et douce image.
Notre-Dame de Romay, en 1793, n'échappa à la destruction que par le beau dévouement d'une jeune fille.
Comme tous les autres objets sacrés, son image avait été apportée dans le cloître profané des Bénédictins.
On était à la veille du jour fatal qui vit incendier et détruire tant d'objets d'un irréparable regret, à la plus grande gloire de l'esprit moderne.
Mlle Catherine Rouiller ne peut supporter cette cruelle attente. Elle sait innocemment s'y prendre pour arriver jusqu'à la clef qui garde tous ces trésors.
Secondée par un frère digne d'elle, elle pénètre pendant la nuit dans la prison de Notre-Dame. Le jeune homme prend sur ses robustes épaules le groupe aimé, traverse avec sa sœur les deux bras de la rivière, on ne sait comment, en face du monastère.
La première étape de Notre-Dame fut dans le creux de la rivière, mais attachée à une corde du côté de la prairie ; la seconde, au fond d'une fosse de la tannerie voisine où travaillait le jeune homme ; la troisième, au chevet de la jeune libératrice, dans une sorte de niche cachée seulement par les rideaux du lit.
Les recherches furent soudaines, minutieuses, prolongées.
On conçut des soupçons bien fondés.
Une perquisition eut lieu dans la maison et dans la chambre qui recelait le palladium sacré. On frappa, on fouilla partout, excepté au seul endroit périlleux.
Et Notre-Dame de Romay continua à recevoir en ce lieu les hommages de la jeune fille et de son frère jusqu'au jour où la lumière put sortir des ténèbres, et le vrai culte, des modernes catacombes.
Et quand le grand orage fut passé, les mêmes mains qui l'avaient sauvée la revêtirent avec amour, et Notre-Dame de Romay était solennellement replacée sur son trône rustique, plus glorieux et plus solide que celui des rois.
Pendant une bonne partie du chemin, et dans toute la longueur de la ville, du faubourg aux vieux platanes, la douce image était portée sur les bras de la jeune fille qui, depuis, répéta souvent qu'elle ne lui avait pas paru plus lourde qu'une plume. Etait-ce l'effet de son amour pour Marie ? N'était-ce pas plutôt un merveilleux témoignage de tendresse et de gratitude donné par la Vierge céleste ?
 Notre-Dame de Romay, avant cette dernière tribulation, avait à la main un chapelet artistement sculpté et dont chaque Pater était un petit reliquaire à jour. Souvenir du dernier prieur de la chartreuse de Beaune, dom Grizard, à un de ses frères, qui était au service depuis le règne de Louis XV, il avait été donné en ex-voto à Notre-Dame de Romay par ce brave officier qui tournait toujours vers elle ses pensées et son cœur à l'heure des batailles.
Devenu la récompense de celle qui avait sauvé Notre-Dame, ce chapelet est aujourd'hui aux mains de son fils auquel il portera bonheur.
 
IX
Le cachet de la vraie dévotion, le titre authentique des choses surnaturelles, c'est l'approbation de la sainte Église.
Cette garantie environne le sanctuaire de Romay.
Et si la tradition des antiques faveurs accordées à ce pèlerinage s'est perdue au milieu de nos révolutions qui ont tant brûlé et détruit de choses précieuses, un nouvel ordre de choses a recommencé ; et la voix apostolique des Pontifes romains s'est élevée à la louange de Romay.
Leurs mains chargées de grâces se sont étendues vers nous.
Par un rescrit valable à perpétuité, donné à Rome le 4 février 1846, et publié pour le diocèse d'Autun, par Mgr du Trousset d'Héricourt, le 22 juillet de la même année, quarante jours d'indulgences à gagner une fois le jour sont accordées à tout fidèle qui viendra prier devant l'image de Notre-Dame placée dans la chapelle de Romay, et y récitera sept Ave Maria, priant aux intentions du souverain Pontife.
Dix ans plus tard, deux pieux pèlerins de notre ville allaient s'agenouiller au tombeau des saints apôtres. L'un, le bon M. Théodore d'Alais, signalait son séjour de six mois dans la ville sainte par ce zèle infatigable et cette charité active qui ont rempli sa vie ; puis il s'en revenait mourir, avant la fin de son pèlerinage, dans le palais et entre les bras de son ami Mgr Darcimoles, archevêque d'Aix. L'autre, aujourd'hui vicaire général archidiacre du diocèse, avait annoncé avec un rare succès la parole évangélique à la colonie française dans notre église de Saint-Louis.
Ils ne pouvaient, ni l'un ni l'autre, oublier la Vierge de Romay ; et c'est à leurs instances que les plus grandes faveurs sont venues enrichir son sanctuaire et l'élever officiellement au rang des premiers autels de Marie : les indulgences stationnales lui étaient accordées.




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