Reliques du Saint lait

Reliques du Saint lait



Les reliques de la grotte du Lait de la Vierge furent importées durant des siècles dans toute l'Europe.
Par leurs propriétés, elles correspondaient un peu à l'eau de Lourdes de nos jours, un « souvenir » ramené d'un lieu saint, aux vertus réputées curatives.

Récits de pèlerins


Grotte du lait

Voici plusieurs siècles tout le monde ne pouvait aller en Terre Sainte, mais on connaissait des lieux par les récits de pèlerins et de voyageurs : le premier récit qui nous soit parvenu de la visite de la Grotte du Lait est celui de Philippe de Busseriis au XIIIe siècle.
Le récit de François Quaresmius, gardien des lieux saints, est le plus connu, enfin on possède aussi celui de Marcel Ladoire, frère mineur de passage en Terre Sainte, ainsi que celui de très nombreux autres franciscains et pèlerins.

Vertu de cette grotte

 
Grotte du Lait

La légende

La légende rapporte que la roche de la grotte a contracté cette vertu, depuis que la Vierge Marie, s'y étant un jour retirée, donna le sein à l'Enfant Jésus, et laissa tomber quelques gouttes de son lait sur une anfractuosité de la grotte : une source en aurait aussitôt jaillit, et la roche serait immédiatement devenue tendre et blanche comme une masse de lait, et la grotte serait alors devenue entièrement blanche : les gouttes de lait de la Vierge Marie se seraient mélangées à la poussière du sol. Depuis lors la terre calcaire blanche de la Grotte du lait s’appela « lait de la Vierge ». Les reliques du saint lait étaient donc des morceaux de pierre de la grotte du lait appelée par extrapolation « reliques du saint lait de la Vierge ».
«  Non loin de l'église de la Bienheureuse Vierge Marie se trouve l'église Saint-Paule, noble dame romaine qui fit pénitence avec sa fille Eustochium, vierge consacrée et religieuse. Sous cette église se trouve une crypte et une chapelle. On raconte que la Vierge Marie quelquefois y demeura avec son fils unique Jésus-Christ Notre Seigneur, et on raconte que la Madone laissa tomber de ses mamelles, en les pressant, un peu de lait sur la terre, et à cause de cela la terre devint si blanche, que l'on pouvait la prendre pour du lait. On raconte aussi que pour ce motif une femme ayant similairement perdu son lait, mit une peu de terre sur un peu d'eau et la but et immédiatement retrouva son lait  »
— Fr. Philippe de Busseris, OFM , Liber Peregrinationum (1285-1291)
«  On dit que tandis qu'on massacrait ces petits enfants, vous vous cachâtes en une grotte trois jours et trois nuits, lorsque vous eûtes une si grande abondance de lait en vos sacrées mamelles, que vous en répandîtes en cette grotte: à cause duquel la terre d'icelle porte médecine voire plus qu'une « terra sigillata », de sorte que si les nourrices, voire les brebis et autres animaux qui n'ont plus de lait, prennent de cette terre détrempée en eau, le lait leur vient en abondance. c'est pourquoi les Maures et les Turcs en portent vendre en Perse et en Éthiopie, lesquels sachant toutefois d'où vient cette vertu, ils l'attribuent au naturel du terroir.  »
— F.J. Benedicti, La somme des péchés et le remède d'iceux, 1587

«  A peu de distance de la grotte de la Nativité et de l'église de la sainte Vierge, à Bethléhem se trouve un souterrain dans lequel sont creusées trois grottes ; dans celle qui est au milieu, le saint sacrifice de la messe a été souvent célébré en mémoire du miracle qui s'y est opéré : on l'appelle communément la grotte de la Vierge ou l'église de Saint-Nicolas. Une bulle du pape Grégoire XI (mort en 1378) mentionne cette chapelle de Saint-Nicolas à Bethléem, et permet aux franciscains d'y bâtir une maison avec clocher et cimetière. » On lit encore dans un ancien manuscrit sur les lieux saints : « Item, l'église de Saint-Nicolas, où est la grotte dans laquelle, suivant la tradition, la sainte Vierge s'est cachée avec l'Enfant-Jésus. » Quaresmius, après avoir rapporté la tradition vulgaire sur cette grotte, ajoute que la terre de cette grotte est naturellement rouge ; mais qu'étant réduite en poussière, lavée et séchée au soleil, elle devient blanche comme la neige, et que, mêlée avec de l'eau, elle ressemble parfaitement à du lait. La terre ainsi préparée s'appelle lait de la sainte Vierge. On en fait une potion salutaire pour les femmes qui ne peuvent pas nourrir, et on l'emploie aussi avec succès contre d'autres maladies. Même les femmes turques et arabes en retirent une telle quantité de terre pour l'employer ainsi, que ce qui était autrefois une seule grotte en forme trois aujourd'hui. Les reliques qui, dans plusieurs lieux de pèlerinage, portent le nom de Lac beatæ Virginis, et donnent lieu à beaucoup de moqueries, ne sont le plus souvent que de la terre de cette grotte de Bethléem dont parle Catherine Emmerich.  »
— D'après Frère Franciscus Quaresmius (en) 1632

«  Ce Turc mit la main sur son turban, me jurant par son Mahomet, que je pouvois m'y fier , qu'il nous conduirait en toute dureté dans la grotte, qu'il nous ramenerait de même dans nôtre Convent, & qu'il s'engagezit de ne voir ses femmes de quinze jours, s'il nous arrivait la moindre chose de fâcheux. Quand nous vîmes qu'il persistzit a ne vouloir pas parler plus avant nos truchements , nous nous déterminâmes à retourner sur nos pas, ne nous souciant pas de son jurement turquesque : avant d'entrer dans le Convent, nous entrâmes dans la grotte de Lait, qui fe nomme ainsi , parce que selon diction , la sainte Vierge y entra pour fe cacher pendant que faint Joseph étoit allé à la ville prendre quelques provisions four leur voyage d'Egypte , où un Ange lui avait ordonné de la part de Dieu de fuir avec l'Enfant Jesus et sa sainte Mère ; &: comme durant le peu de tems qu'elle fut obligée de fe tenir cachée dans cette grotte , elle donnait à têter à son Enfant divin, elle répandit quelques gouttes de son lait virginal fur la terre, qui en a contracté la vertu de faire venir du lait aux nourrices quand elles l'ont perdu , & d'en donner à celles qui en ont peu : non seulement les femmes Chrétiennes profitent de ce bienfait, mais les Infidèles , & qui plus est, les bêtes elles-mêmes participent à cette faveur extraordinaire , quand on leur fait boire de l'eau dans laquelle on a mis détremper un peu de cette terre : cette grotte est dans un rocher, pour y descendre on allume des bougies , la porte est basse & étroite.  »
— Frère Marcel Ladoire O.F.M., Voyage fait a la Terre Sainte en l'année, 1719

La roche calcaire

La roche de cette grotte est très friable, une craie blanche (tuf) qu'on réduisait en poudre : on en faisait de petits pains qu'on envoyait dans tout le pays. Cette roche, serait du lait de lune ou de microcristaux, composée de minéraux, principalement de carbonates, tels que le soufre, le calcium, la silice, le carbone, la craie et qui, au contact avec de l'eau, forme une substance épaisse et crémeuse blanche ou sèche, une poudre blanche de poussière calcaire. Un phénomène tout à fait naturel, dans certaines conditions géologiques, en la présence de cours d'eau souterrains, créa ça et là un peu partout, de véritables « rivières de lait », de l'Italie à l'Espagne au Canada et, plus précisément au Moyen-Orient, ce qui pourrait expliquer les nombreuses reliques du Saint Lait dispersées dans toute l'Europe par les anciens combattants de retour des Croisades. En plus de cette craie, on recueillait dans des fioles la substance liquide dont les murs de la grotte suintaient durant les temps humides, sous le nom de lait de la Vierge.

Vertu de cette grotte

La roche de cette grotte est très friable, une craie blanche (tuf) qu'on réduisait en poudre : on en faisait de petits pains qu'on envoyait dans tout le pays. Cette poudre aurait la vertu favoriser la lactation, de rendre le lait aux femmes qui l'ont perdu par quelque maladie, ou de l'augmenter à celles qui en ont peu : selon la légende, grâce à la Vierge Marie qui retrouva là son lait. On la donnait à toutes les nourrices qui manquaient de lait. La roche est blanche. Comme la poussière de cette roche empêchait les nourrices de perdre leur lait, mélangée la la nourriture, ou bien dans la boisson, eau, bouillon ou vin blanc, les femmes et les pèlerins de toute confession et nationalité (grecs, arméniens, russes, musulmanes, juives ou chrétiennes, venaient chaque jour en emporter un peu après avoir récité une prière dans la grotte qui était continuellement creusée par les habitants et s'était agrandie au fil du temps. Les Turcs et Arabes en en faisaient grand commerce et en emportaient en Afrique, en Syrie, et en Turquie. On en envoyait dans tous les pays d'Europe, Russie, Portugal, Grèce (Lemnos), Arménie, dans de petits paquets ou sachets avec le sceau de Bethléem qu'on portait parfois sur la poitrine.... Sainte Véronique en aurait emporté un morceau ce qui donnait son nom à Soulac - sous le lait - c'est-à-dire la dernière goutte de lait de la Vierge, selon la légende... On disait qu'elle avait contractée cette vertu, depuis que la Sainte Vierge s'y étant un jour retirée, donna le sein au petit Jésus, et laissa tomber quelques gouttes de son lait sur une anfractuosité de cette roche : une source en aurait aussitôt jaillit, ou bien la grotte serait devenue entièrement blanche. Cette terre blanche portait le nom de Lait de la Vierge.

La terre sacrée de la Grotte du lait

La terre calcaire blanche de la Grotte du lait s'appelait Lait de la Vierge.
Les reliques du saint lait étaient des morceaux de pierre de la grotte du lait appelée par extrapolation « reliques du saint lait de la Vierge »
Ces reliques étaient, pour les croyants, le signe visible de l'incarnation du Verbe fait chair dans un petit enfant  : Dieu venu sur la terre, but, comme tous les nourrissons, le lait de sa Mère, Marie.
Les chrétiens découvrirent cette Grotte lors des croisades pour la délivrance des Lieux Saints, comme le montre le miracle du pèlerin et de l'aubépine, lorsqu'il étaient fait prisonniers par les sarrasins, et lors de l'acquisition de la Grotte par les franciscains, ou par les voyages et pèlerinages en Terre sainte.
Ils rapportèrent en Europe, ces sachets de poudre blanche vénérée sous le nom de « lait de la Vierge », qui est le nom donné à Bethléem à cette poudre quoiqu'on ne absolument soit pas certain qu'elle ait réellement allaité l'enfant Jésus en cette grotte.
Selon la légende la grotte du lait serait devenue blanche et cette craie ressemblait mystérieusement à du lait coagulé : tous les témoignages rapportent que ses propriétés de rendre de lait aux nourrices étaient réelles, et ces vertus continuaient dans les paroisses et cathédrales où ces reliques étaient rapportées : on en fit donc le commerce dans toute l'Europe et en Afrique.
Il était plus difficile de critiquer cette relique que les autres dans la mesure où il s'agissait de véritables souvenirs de la Grotte du Lait.
On raconte en effet que Saint Bernard reçu un trait du Lait de la Vierge : trois gouttes de son lait l'aurait aidé à écrire la prière du Salve Regina . Rien ne dit que ce fut dans la grotte du lait ; cette histoire était cependant très populaire et souvent représentée.

Collégiale de Montevarchi, autel et relique du saint Lait
Fichier:Sfilata.ogv Procession religieuse autour d'une relique du Saint Lait

Ses vertus curatives

 
Relique de la terre de la Grotte du Lait

La « terra sigillata » de la grotte du lait fut donc employée pour ses vertus pharmaceutiques sans doute bien avant le Moyen Âge jusqu'au XXe siècle,et aujourd'hui encore sans doute, par exemple comme complément nutritionnel, comprennent des oligo-éléments :potassium, zinc et magnesium. La géophagie ou le fait de manger de la terre pour guérir, est une pratique courante dans le monde arabo-musulman. Berthold Laufer (en) rapporte que Ibn-al-Baytar en décrivit cinq formes dans son traité pharmacologique : la terra sigillata, la terre égyptienne, la terre samienne, la terre de Chios, la terre « cimolite » , l' « ampelitis » (Pline, XXXV, 56) ou pharmakitis de Séleucie en Syrie, la terre d'Arménie et la terre de Nishapur. Les Suisses connaissent le lait de lune, près du Lac de Pilate Quaresmius mentionne un miracle après que saint Paul a rejeté une vipère qui l'avait mordu à la main lorsqu'ils firent escale en l'île de Malte ( Actes des Apôtres. XXIX), il n'y avait plus sur l' île, ni serpents, ni animaux venimeux, et la terre de Malte elle même, serait devenue un contre-poison ; puis remarque-t-il : « Si une telle vertu a été donnée à cette terre à cause de saint Paul, pourquoi refuserions-nous de croire que Dieu, pour honorer la Vierge mère, a communiqué une vertu semblable et encore plus grande de cette grotte, sanctifiée par la présence de Jésus et de Marie » ! F. ; de Mély enenelim et 'Azufaraquid en hébreu.
Article détaillé : Géophagie. 
Repas dans une habitation modeste
Cette poudre aurait la vertu de favoriser la lactation, de rendre le lait aux femmes qui l'ont perdu par quelque maladie, ou de l'augmenter à celles qui en ont peu : selon la légende, grâce à la Vierge Marie qui retrouva là son lait. On la donnait à toutes les nourrices qui manquaient de lait et les témoignages de son efficacité étaient innombrables surtout chez les femmes et nourrices infidèles. Comme la poussière de cette roche empêchait les nourrices de perdre leur lait, mélangée la nourriture, ou bien dans la boisson, eau, bouillon ou vin blanc, les femmes et les pèlerins de toute religion et nationalité (grecques, arméniennes, russes, musulmanes, juives ou chrétiennes) venaient chaque jour en emporter un peu après avoir récité une prière dans la grotte, qui était continuellement creusée par les habitants et s'était agrandie au fil du temps.

 
Bethleem, en 1898

Cette craie ressemblait mystérieusement à du lait coagulé et en certains endroits du monde comme Murcie ou Naples, se liquéfierait mystérieusement comme du vrai lait, les jours de fête. De plus tous les témoignages rapportent principalement, que ses propriétés de rendre de lait aux nourrices étaient réelles, et ces vertus continueraient peut-être dans les paroisses et cathédrales où ces reliques étaient rapportées, et là où on vénérait une statue : En France, à Nantes, la statue de la « Chapelle du Créé-Lait » (aujourd'hui Chapelle Notre-Dame-des-Champs) passait ainsi également pour avoir le pouvoir de favoriser une lactation abondante chez les nourrices et les femmes qui allaitent. On vénérait une fois par semaine solennellement cette relique dans la Chapelle du saint-Lait de Reims.

 
Calcaire blanc de la Grotte du lait à usage pharmaceutique

 
terra sigillata, reliques de la Grotte du lait

C'était une relique royale : tous les pèlerins, en particulier les franciscains, racontaient au retour leur voyage et décrivaient cette grotte « blanche comme la neige » et la merveilleuse propriété de sa roche, liqueur favorisant une abondante lactation à toutes les femmes, turques, arabes, maures, ou chrétiennes. En 1612 au XVIIe siècle William Lithgow visita lui aussi la grotte du Lait, acheta alors pour un pound de cette terre, et en offrit à la Reine Anne d'Angleterre avec d'autres reliques.

Au XIXe siècle encore, les franciscains distribuaient des tablettes faites de terre de la grotte, moulées dans des petits moules et transformées en terra sigillata, en forme de pastilles de Vichy, demandant aux pèlerins auxquels ils les donnaient de la mélanger à de l'eau et de la boire, homme et femme ensemble et de réciter durant neuf jours le troisième mystère joyeux du rosaire, la Nativité : ces tablettes avec pilules de sainte Colette guérissant la stérilité, faisaient partie de la « pharmacie franciscaine ». Et de nos jours encore cette tradition se perpétue, mais les femmes viennent surtout chercher un bon remède à la stérilité. De nombreuses photos de nourrissons, nés après la consommation de terre de la grotte par leurs parents, après le pèlerinage, ornent désormais ce lieu.
Les reliques de la grotte auraient également été bonnes pour l'ophtalmie.

Des reliques

Ces reliques étaient, pour les croyants, le signe visible de l'incarnation du Verbe fait chair dans un petit enfant : Dieu venu sur la terre, but, comme tous les nourrissons, le lait de sa Mère, Marie. Les chrétiens découvrirent cette Grotte et ses parois avec le calcaire lors des croisades pour la délivrance des Lieux Saints, comme le montre le « miracle du pèlerin et de l'aubépine », faits prisonniers par les sarrasins, lors de l'acquisition de la Grotte par les franciscains, ou par les voyages et pèlerinages en Terre sainte : Ils rapportèrent alors en Europe, ces sachets de poudre blanche

 
Andrea Pisano : «La Vierge-Mère enfante le Fils saintement ; elle donne le lait à celui qui nourrit le genre humain ; elle soutient sur ses genoux celui qui soutient tout ; elle est vierge, et elle est mère ! Mais qu'est-ce donc qu'elle n'est pas ? » (saint Ephrem).

«  Les gens râclaient la poudre blanche de nitrate des parois et la latérite du sol. Ensuite ils égrugeaient cette dernière, la lavaient et l'exposaient au soleil jusqu'à ce qu'elles devienne blanche. Les croisés et les pèlerins la rapportaient tantôt en poudre dans des fioles, tantôt en tablettes en Europe.  »
— Jure Mikuž


Innombrables les récits de visite de la Grotte du lait et des mystérieuses reliques qu'on en rapportait :
«  Nous sommes allés à la Grotte du Lait, bien sûr, une caverne où Marie se cacha un certain temps avant la fuite en Égypte. Ses murs étaient noirs avant qu'elle y soit entrée, mais en allaitant l'Enfant, une goutte de son lait tomba sur le sol, et instantanément changea l'obscurité des parois en sa propre teinte neigeuse. Nous avons pris beaucoup de ces petits fragments de pierre avant de partir d'ici, car il est bien connu dans tout l'Orient qu' il suffit à une femme stérile de les toucher des ses lèvres et cette infirmité s'en ira. Nous avons pris beaucoup de spécimens en vue d' apporter du bonheur à bien de nos foyers.  »
— Mark Twain, The Innocents Abroad; Or, The New Pilgrim's Progress

Son commerce

Les Turcs et Arabes en en faisaient grand commerce et en emportaient en Afrique, en Syrie, et en Turquie. On en envoyait dans tous les pays d'Europe, Russie, Portugal, Grèce (Lemnos), Arménie, dans de petits paquets ou sachets avec le sceau de Bethléem qu'on portait parfois sur la poitrine.
Article détaillé : Grotte du lait. 

Les reliquaires

On trouvait des reliques dans des coffres aux reliques, mélangées à d'autres reliques, du Christ, des saints, qui faisaient l'objet d'un inventaire détaillé les accompagnant, ou séparé : on trouve par exemple au XIe siècle trois inventaires de reliques. Elles étaient sinon, placées et mises en valeur dans des précieux reliquaires.

 
Jeanne d'Evreux, épouse du roi Charles IV le Bel, avait en 1339 offert à l' abbaye de Saint-Denis sa couronne, une châsse contenant un échantillonnage des reliques de la Sainte Chapelle et une statuette reliquaire de la Vierge à l'Enfant. La Vierge tient à la main une fleur de lys d'orfèvrerie et de cristal dans laquelle étaient enfermées les reliques : vêtements, cheveux et lait de la Vierge. (Musée du Louvre )

 
Croix-reliquaire de l'église Saint-Hilaire d'Orval, comportant aux quatre extrémités, des capsules de cristal, pour abriter la relique de la poudre dite « du Lait de la Vierge » venue de la Grotte du lait, et au centre, une épine de la sainte Couronne d'épines du Christ donnée par Saint Louis

Elles étaient conservées dans la chapelle des cathédrales, dite « chapelle du saint Lait », enchâssées dès le XIe siècle dans
  • des reliquaires,
  • des autels (Cîteaux, 1193),
  • des statuettes de la Vierge,
  • des croix-reliquaires, comme la Croix impériale d' Isaac II Ange empereur de Constantinople, au XIIe siècle, qu'il abandonna en prenant la fuite lors de la bataille contre Asen Ier, ou la Croix de l'église Saint-Hilaire d'Orval
  • des colombes, des ostensoirs, qui constituaient de véritables œuvres d'art, trésors d'orfèvrerie, faits d'or, d'argent, de cristal, de pierres précieuses (améthyste, diamants), de perles fines, rappelant que Marie et Joseph et l'enfant Jésus, le « roi des juifs » qui venait de naître, avaient alors reçu les présents des rois mages. Reliquaires dont en France on ne retrouve plus que de rares vestiges, tel le reliquaire du Saint-Lait de Sainte-Radegonde-des-Pommiers, découvert dans la paroi de l'église paroissiale. En Belgique, la « croix reliquaire de Robermont », en argent repoussé et gravé, contenait six habitacles ovales, contenant des reliques dont celle du lait de la Vierge, et de sa chemise. En Espagne et en Italie, les reliquaires rivalisaient de splendeur. L'utilisation des pierres précieuses était courante au Moyen Âge et Hildegarde de Bingen leur attribuait de nombreuses vertus.

Emplacement des reliques du Saint Lait

On trouvait des « reliques du Saint - Lait », rapportées de Terre sainte, dans tout le monde chrétien : dans les cathédrales et les grandes villes, Amiens, Aix-en-Provence, Fécamp, Lille, Laon, etc..., Noyon, Orléans, Paris, Reims, Tournay, Toulon, Maastricht, dans des abbayes, comme l'Abbaye Sainte-Croix de Poitiers de Poitiers, Avignon chez les Célestins, dans des églises.
Un sanctuaire très connu était la Collégiale San Lorenzo de Montevarchi (it) en Italie. On trouvait aussi des fioles en Italie à Rome dans plusieurs églises, à Saint-Nicolas in Carcere, à Sainte Marie in Campitelli, Sainte Marie du Peuple, et Saint Alexis, à Padoue, à Venise dans la Basilique Saint-Marc, pour les nourrices et à Gênes où elle guérissait les maux de seins, et enfin à Saint Louis de Naples, comme le sang de saint Janvier, il devenait liquide les jours de fêtes de la sainte Vierge et mais il restait caillé le reste du temps. Enfin à Guimaranès, au Portugal.
On vénérait à Chartres une fiole du lait de la Vierge recueilli en Judée pendant qu’elle allaitait l’Enfant-Jésus et un autre vase de lait encore plus miraculeux ramassé sur les joues desaint Fulbert. A Reims c'était un véritable Trésor, orné de pierres précieuses : Du « précieux laict do la Sainte Vierge, enchâssé dans une Nostre-Dame d'argent. » On les mettait souvent dans un reliquaire en cristal, vase, colombe et un précieux parchemin sur lequel était écrit en latin : « LAC VIRGINIS MARIAE » attestait parfois son authenticité. Elles étaient mélangées aux innombrables reliques médiévales. Une relique en fut vendue à saint Louis par la roi Baudoin de Jérusalem et placée en la Sainte-Chapelle. À chaque fois il s'agissait probablement de la terre de cette Grotte du Lait mais de pieux auteurs laissèrent entendre qu'il s'agissait du vrai lait, d'origine miraculeuse.

Quelques villes :
  • en Anjou Notre-Dame de Cunault
«  L'étymologie de ce mot Cunault vient, à ce qu'on prétend, de Cuna, Cunarum, berceau, parce qu'on y révère la sainte Vierge dans ses couches ; aussi garde-t-on dans cette église une relique précieuse du lait de la Sainte Vierge, dans une petite fiole de cristal de roche ; les nourrices et les mères sèches, qui n'ont point de lait, et celles qui en ont de trop, viennent invoquer la sainte Vierge, pour le leur faire venir ou pour le faire régler ; elles en reçoivent des secours merveilleux. »
(Grandet, Notre-Dame angevine, début du XVIII° s.)
  • Soulac
«  La chapelle de Soulac, érigée par Saint-Martial à la Vierge Marie, reçut son nom de ce que le lait de la Mère de Dieu était la seule relique que Véronique y déposa... véritable. On tient par tradition et selon quelques auteurs, que Sainte-Véronique y estant décédée, y avoit laissé du lait de la Très-Sainte-Vierge, et qu'elle avoit coustume de dire que ce précieux trésor lui suffisent pour toute richesse. Sufficit mihi, disaitelle, Solum lac.  »
  • Chelles
  • Dombasle
  • Berre... -en-Provence

Témoignages historiques

Les chrétiens s'en servirent au Moyen Âge pour se donner du courage au combat : « Les infidèles, enorgueillis, s'assemblent au nombre de quarante » mille, pour chasser les chrétiens de leur territoire, et réunissent tous leurs bagages à Ascalon. Les chrétiens, n'espérant qu'en Dieu, commandent, à l'exemple des Ninivites, un jeûne aux deux sexes. Les enfants à la mamelle sont privés du sein de leurs » mères et les troupeaux même de leur pâturage. On arrête le jour du combat. Les chrétiens s'avancent au nombre de trois » mille au plus, tant cavaliers que piétons. Les princes marchent » à leur tête. Le patriarche portait la croix du Christ pour étendard ; Ponce, qui avait été abbé de Cluny, tenait la lance qui perça le flanc du Seigneur. L'évêque de Bethléem avait en main un vase où était renfermé du lait de la Sainte-Vierge : Episcopus Bethleemi in pixide « lac Sanctœ Mariœ Virginis ». Les croisés durent rapporter en Occident, à Rome surtout, une relique si précieuse à leurs yeux.»
Guibert de Nogent, parlant du lait de la Vierge, conservé, de son temps, en l'église de Laon, dans une colombe de cristal, ne croyait pas qu'il pût être naturel et son argumentation ne manque point de vigueur il y fait allusion dans un traité intitulé De Pignoribus sanctorum (1124) : « Quod si objicitur beatam Virginem matrem » id potuisse servare et quasi superstitiosa ipsius posterorum cutui voluisse traducere, ita suspicietur, sicut Laudini apud nos lac ipsius benedictae, in columba cristallina hue usque retineri dicitur. Quando quantum a vero et etiam a verisimili exorbitet, facili argumento liquet : quia neque ipsa asservavit ; praesertim cui nunquam in Jesu infantia tanlum otii, tantumque securitatis exstilit, ut sui memoriam tanti penderet, quatenus de sui in futura secula lactis produclione curaret, cui vix intra natale lateresolum, vix vivere tune liceret. »
Fulbert de Chartres fut guéri par le lait de la Très-Sainte Vierge, dont il s'était montré le fidèle disciple.
Guillaume de Malmesbury fait également allusion au Lait de la Vierge.

Reliquaire du Saint Lait, Massimiliano Soldani-Benzi

La Réforme

Lors de la Réforme et de la critique du catholicisme, Calvin se moqua de cette coutume de conserver une relique du lait de la Vierge, dans son Traité des Reliques et la tourna en dérision. Le cas de Reims montre qu'il s'agissait probablement de la poudre de la « Grotte du Lait » et qu'on vénérait un souvenir de la Grotte et non du lait véritable : mais il semble qu'on le faisait parfois passer cette craie pour le véritable lait de la Vierge et pour un miracle, ce qui était peut-être du Lait de Lune ! Dachery explique ainsi que nombre d'auteurs sérieux pensaient que le Saint-Lait conservé jusqu'à nous, cette liqueur d'une blancheur éclatante, avait été épanchée par la Très-Sainte Vierge, reine des cieux, en faveur de ses plus fervents serviteurs » tel Saint Bernard, à preuve les miracles que cette relique effectuait.
Erasme dans ses Colloques conte l'histoire de Guillaume pèlerin à Constantinople et grand amateur de reliques qui crut soudain être « plus riche de Crésus » lorsqu'on lui confia ce précieux trésor.

Autour d'une relique du Lait de la Vierge

Emplacement des reliques du Lait

Une évocation des « reliques du lait » est faite par Nicéphore Calliste : l'impératrice Pulchérie au Ve siècle en aurait obtenu pour le Monastère des Hodèges de Constantinople, avec le fuseau de la Vierge et les langes de l'Enfant Jésus.
On retrouve ensuite au Moyen Âge ces reliques du lait de la Vierge dans (au moins) soixante-neuf sanctuaires européens.
Mais nos reliquaires d'aujourd'hui ne sont pas représentatifs de la réalité : il y avait sans doute d'innombrables petits pains de terre de la grotte du lait dans toute l'Europe, -autant que de pèlerins-, comme les petites bouteilles d'eau de (la grotte de) Lourdes de nos jours.

En Allemagne

  • Cologne, couvent des frères prêcheurs.

En Angleterre

  • La plus ancienne liste de reliques faisant allusion au lait de la Vierge Marie, la « liste de Bath», conservée à Cambridge (Corpus Christi manuscript) , date de la seconde moitié XIe siècle.
  • Glastonbury.
  • Walsingham : première mention est faite sous Édouard Ier de la relique du lait de Marie ( « lac beate Mariae »), incluse dans le grand autel.
  • Westminster.

En Italie


 
Reliquaire, Musée de la Collégiale San Lorenzo de Montevarchi

On trouvait aussi des fioles en Italie à Rome dans plusieurs églises, au couvent de Saint-Damien des religieuses clarisses à Assise, à Saint-Nicolas in Carcere, à Sainte Marie in Campitelli, Sainte Marie du Peuple, Saint-Clément-du-Latran, saints Côme et Damien, Saint-Alexis et Saint Chrysogone ; à Padoue, à Venise dans la Basilique Saint-Marc, pour les nourrices et à Gênes où elle guérissait les maux de seins, à Sainte Patricia et Saint-Louis des Minimes de Naples (comme le sang de saint Janvier, il devenait liquide les jours de fêtes de la sainte Vierge et mais il restait caillé le reste du temps) et plusieurs autres églises de cette ville, enfin en Sicile à Agira, amenée de Palestine par les moines du couvent saint Philippe au XIIe siècle.

La collégiale San Lorenzo de Montevarchi

 Autour d'une relique du Lait de la Vierge

Un sanctuaire très connu du Saint Lait (it) était la Collégiale San Lorenzo de Montevarchi (it) en Italie province de Arezzo dans la région Toscane, avec une fraternité du Saint Lait (it) érigée au XIIIe s. suite au don de la relique par Charles frère de saint Louis, et encore aujourd'hui, une procession est organisée le 8 septembre. On peut aussi visiter le Musée de la Collégiale. (article détaillé : Sacro Latte : Saint Lait de Montevarchi (it))


Support du reliquaire du saint Lait,
manufacture toscaneXVIIIe siècle


Collégiale de Montevarchi, autel et relique du saint Lait

Procession religieuse autour d'une relique du Saint Lait


don d'une relique du lait par le comte Guido Guerra VI prieur de l'église Saint Laurent de Montevarchi. (Montevarchi, Collegiata di San Lorenzo Museum)


Andrea della Robbia, petit temple pour les reliques du saint lait, XVe siècle. Les chapelles du saint lait formaient une extension "hors les murs" du territoire sacré de la grotte du lait en Terre Sainte, dans toute l'Europe : on ramenait la relique, mais aussi, la présence du sacré.

Espagne

 
Musée de la cathédrale de Murcie, « Vierge du lait », retable de Modène

 
L'Arca Santa d'Oviedo, contenant une des plus anciennes reliques du Lait

Selon le témoignage de Mariano de Sicile on trouvait ces reliques à Oviedo et Tolède mais aussi à Murcie, dans la cathédrale: la relique est conservée dans une fiole de verre ornée d'une étoile d'or, et protégée dans un ostensoir en argent et diamants. Le lait reste coagulé toute l'année, jusqu'à ce que le miracle de la liquéfaction se produise, devenant liquide tous les 15 août, durant la fête de l'Assomption. Le musée de la Cathédrale de Palma de Majorque contient un magnifique reliquaire, ampoule de cristal enchassée dans de l'or, avec deux anges.
À Oviedo, on sait que dans son récit de l'ouverture solennelle du coffre aux reliques, l' Arca Santa, qui eut lieu le 13 mars 1075, l'évêque d'Oviedo Pelayo mentionna avec la chasuble d' Ildefonse de Tolède et les autres reliques dont une très ancienne inscription faisait l'inventaire, le lait de la Vierge : « De lacte sancte Marie, de Cruce Domini, de Corona spinea, de lapide Sepulcri ... ».

 
El Greco, La Sainte Famille

La légende voulait qu'elle date d'un temps très ancien, rapportée de Terre-Sainte aux premiers siècles.
À Tolède, les reliques furent également envoyées par le roi Louis IX comme on peut le lire dans cette Lettre au Clergé de Tolède :
«  Louis par la grâce du Roi de France à nos chers amis en Jésus Christ les chanoines et tout le clergé de l' Église de Tolède, salut et dilection. Ayant le dessein d enrichir votre Église d'un excellent Trésor, en considération de notre très cher ami et vénérable D. Jean Archevêque de Tolède qui nous en a fait de très humbles et de très instantes prières, nous vous envoyons avec plaisir quelques parties considérables des saintes reliques que nous avons eues du Trésor de l 'Empire de Constantinople, tirées de nos sacrés et précieux Sanctuaire; ces reliques sont une partie du bois de la Croix de Notre Seigneur, une épine de sa sainte couronne, un peu de Lait de la sainte Vierge, des morceaux de la robe de pourpre dont le Seigneur fut couvert, du linge dont il se ceignit lorsqu' il lava les pieds de ses Apôtres, du Suaire avec lequel il fut enseveli, et mis dans le Sépulcre, et des langes de son Enfance. Nous prions donc votre charité, et nous vous demandons au nom de Notre Seigneur, que vous receviez et gardiez avec le respect qui est dû ces susdites saintes reliques, nous vous conjurons encore de vouloir bien vous souvenir de nous dans vos messes et dans vos prières. Donné à Étampes au mois de mai de l' année mil deux cent quarante huit.  »

Portugal

Autrefois précieusement conservées à : Alcacer do Sal, Aviz, Belver, Coimbra, Constantim, Guimarães, Lisbonne.

En Belgique

 
Colombe d'or, reliquaire du saint-Lait, « Trésor d'Hugo d'Oignies », TreM.a (Musée provincial des Arts anciens du Namurois -Trésor d'Oignies)

« Placard de Tongres », inventaire des reliques du trésor de Tongres Sur le coin gauche inférieur (cliquer pour agrandir), une statuette de la Vierge dont l'inscription mentionne qu'elle contient une relique du lait de la Vierge

  • Bruges, Eglise Notre-Dame de la Poterie (nl) Légende du reliquaire volé.
  • Trésor du Prieuré d'Oignies, colombe d'Or d' Hugo d'Oignies.
  • Grammont.
  • Louvain.
  • Maastricht
  • Tongres.

En France

On trouvait des  reliques du précieux lait de la Vierge rapportées de Terre sainte, dans tout le monde chrétien, renfermées dans de précieux reliquaires, conservées dans les trésors, parfois une colombe d'or ou d'argent : dans les cathédrales et les grandes villes, Amiens, Arras, Aix-en-Provence, Besançon, Châlons, Chelles, Compiègne, Coutances, Dombasle, Douai, Entremont, Fécamp, Lille, Laon, Le Puy, Loudun, Nantes, Noyon, Orcival, Orléans, Paris, Pouilly-en-Auxois, Reims, Remiremont, Rodez, Rocamadour, Saint-Omer, Sainte-Radegonde-de-Pommiers, Semur en Bourgogne, Sisco, Soissons, Tournay, Toulon, Verdun, Viviers : on en trouvait aussi dans les abbayes, comme l'Abbaye Sainte-Croix de Poitiers, Avignon chez les Célestins, à Troyes au couvent des Jacobins, conservée dans un cristal tenu par l'Enfant Jésus de la statue de N.D. du Rosaire, aux monastères de Cîteaux, chez les carmes de la Place Maubert à Paris, et bien en d'autres endroits encore.

 
Paris, Sainte-Chapelle, chapelle basse, abside, côté nord

  • Paris : dans la Sainte Chapelle se trouvait une relique du saint Lait, vendue avec la Couronne d'épines et un certains nombre d'autres reliques supposées par Baudouin II de Courtenay empereur de Constantinople, à Louis IX, dont un morceau fut donné comme un en cadeau, par Charles frère de saint Louis, et amenée en Italie où elle fut accueillie en grande pompe, dans la collégiale de San Lorenzo de Montevarchi.
  • Chartres : On vénérait à Chartres une fiole du lait de la Vierge recueilli en Judée pendant qu’elle allaitait l’Enfant Jésus et un autre vase de lait encore plus miraculeux ramassé sur les joues de saint Fulbert.
Cette église conserve une fiole de poussière de la grotte de la Nativité qui aurait contenu du lait de la Vierge Marie
« L'étymologie de ce mot cunault vient, à ce qu'on prétend, de cuna, cunarum, « berceau », parce qu'on y révère la sainte Vierge dans ses couches ; aussi garde-t-on dans cette église une relique précieuse du lait de la Sainte Vierge, dans une petite fiole de cristal de roche ; les nourrices et les mères sèches, qui n'ont point de lait, et celles qui en ont de trop, viennent invoquer la sainte Vierge, pour le leur faire venir ou pour le faire régler ; elles en reçoivent des secours merveilleux. »
Comme à Bethleem, y viennent en pèlerinages les femmes et les nourrices n’ayant pas assez de lait, ou trop de lait.

  • Soulac possède la châsse de Sainte Véronique, qui serait morte à Soulac vers l'an 70, et quelques gouttes du lait de la Vierge rapportées de Terre Sainte. Une des significations du nom de la ville de Soulac est « le lait de la Vierge » (Solum lac en latin).
«  La chapelle de Soulac, érigée par Saint-Martial à la Vierge Marie, reçut son nom de ce que le lait de la Mère de Dieu était la seule relique que Véronique y déposa... véritable. On tient par tradition et selon quelques auteurs, que Sainte Véronique y estant décédée, y avoit laissé du lait de la Très-Sainte-Vierge, et qu'elle avoit coustume de dire que ce précieux trésor lui suffisent pour toute richesse. Sufficit mihi, disaitelle, Solum lac.  »

Chapelle du Saint-Lait de Reims


La Chapelle du saint Lait, autrefois dans la cathédrale de Reims

On trouvait jadis dans la Cathédrale Notre-Dame de Reims un autel dit du Saint-Lait : la richesse de l'ornementation de l'autel et de la statue évoquait très mal la pauvreté de la naissance de Jésus mais autrefois en France et en Europe les pierreries décoraient les reliquaires et les évangéliaires.
«  Cette chapelle Saint-Lait, détruite encore par le Chapitre dans le siècle dernier ... devait son nom à une relique envoyée, suivant les uns en1155, par le pape Adrien IV, suivant d'autres en1276, par le pape Adrien V ; c'était une pâte blanche qui passait pour contenir du lait de la Vierge. Elle était renfermée dans une statuette de la Vierge, faite en or en 1278, aux frais de Blanche, comtesse de Champagne. Elle coûta cinq marcs d'or ; la sainte figure portait une couronne enrichie de diamants et de perles. On la déposait dans un élégant coffre d'argent ciselé et doré, et chaque soir on la mettait à l'abri en la reportant dans le trésor. Avant la messe du matin on lui rendait sa place. L'autel du Saint-Lait était en outre décoré d'un tabernacle de cuivre sur lequel reposait une Vierge d'argent ; derrière était une niche aussi en cuivre dont le fond s'ouvrait et renfermait différentes reliques. »
« Cette relique était un paquet renfermant une poudre blanche et fine et le papier qui l'accompagnait étaient écrits ces mots en caractères anciens : Reliques du Saint-Laict de la Très-Sainte Vierge ». D'autres reliques l'accompagnant comme la « Ceinture de la Vierge » pourrait indiquer comme dans l'histoire de Guillaume rapportée par Erasme un lien avec Constantinople.


Cathédrale de Reims
Auprès du dict tabernacle, est conservée une grande image (3) de la Vierge, qui se met les iours solemnels sur le grand-autel, ct qui est portée en processions generales, laquelle est d'argent doré, comme aussy la couronne garnie de pierres et perles, a laquelle y a deux saphyrs, et le reste sont des grenats; il y manque cinq perles et quatre pierres au pied; elle tient le petit Jésus dans son bras gauche, qui est d'argent doré, lequel tient une boulle d'argent doré, au-dessus de laquelle est une croix de Lorraine ; de même la dicte image tient un reliquaire Quand nous parlerons du trésor de l'église St-Nicaise, nous dirons un mot des difficultés longues et fréquentes qui s'élevèrent au sujet de la possession des reliques du saint entre les moines de cette abbaye et le Chapitre de Notre-Dame. On a remarqué cette croix de Lorraine au-dessus du globe terrestre. Ce fait a de l'importance : il ne s'agit pas ici d'un détail purement artistique. Au xvic siècle, époque de la confection du reliquaire, la maison de Lorraine faisait publier qu'elle était issue de Charles-de-Lorraine, le dernier descendant de Charlemagne. Sans doute MM. de Guise et de Mayenne étaient de bons catholiques, mais ils étaient aussi de grands ambitieux. sur sa main droite, dans lequel est du laict de la Vierge  ; elle est posée sur un pied de cuivre doré; l'image avec le petit Jésus, le reliquaire et la couronne avec un priant, le tout d'argent doré, pèsent vingt-deux marcs, et le pied de cuivre doré pèse trente marcs. Elle a esté donnée par Guillaume de Esternay, chanoine de Reims, comme il se voit par un écriteau qui est sur une lame d'argent émaillée, attachée au pied de la dicte image, portant ces mots : GuiUetmnes de Estanaye, canonicus Remensis quondàm prœpositus Laudunensis, dedit istam imaginent ecclesiœ Jiemensi. Orate pro eo. Au-devant de la dicte Vierge est une croix d'or remplie de plusieurs diaments faux, donnée par M. Bailly, chanoine, en l'année 1617. Et le jaseret, ou chesne d'argent doré, pour la suspendre, a esté faict aux despens de la fabrique.Monsieur Nicolas Colbert, chantre et chanoine de la dicte église et abbé de Saint Sauveur, a donné une rose de diaments, qui est attachée au devant de la dicte image ; elle est d'or, enrichie d'un gros saphyr par le milieu, d'un gros diament et de plusieurs autres saphyrs, rubis et diaments. Au tabernacle, proche des dessus dicts, se met l'image du saint Laict après que la grande messe est dicte, laquelle, depuis la messe du iour iusqu'à la dicte heure, 'est dans la chapelle du saint Laict (2), à la garde du clerc d'icelle. En l'année 1278, Blanche comtesse de Champagne et de Troyes, donna cinq marcs d'or pour faire la dicte image de Nostre-Dame, dans laquelle est enchâssé le saint Laict de la Vierge, envoyé à l'église de Reims par le pape Adrien cinquième, éleu pape en 1276, iadis cardinal Ottobon, nepveu d'Innocent A"", dernier chancelier de l'église de Reims, puis archidiacre et chanoine d'icelle. La dicte image est d'or, comme aussy la couronne, enrichie de plusieurs petits diaments et perles; le pied est d'argent doré, et le tout pèse huit marcs; elle se met dans une custode couverte d'argent doré. Dans la dicte image, outre le saint Laict, il y a aussy de la robe de la sainte Vierge, du suaire et sandale de Nostre - Seigneur ; ladite image faicte de neuf et les dictes reliques remises dans icelle, le 10 février 1653, par ordre du Chapitre La chapelle du saint Lait était une des merveilles de notre cathédrale ; l'élégance de ses sculptures en avait fait un des chefs-d'œuvre de l'art gothique. Elle était détruite bien avant la révolution. M. Louis Paris en a retrouvé le dessin ; il doit en publier l'histoire et la description

Témoignages historiques

Au Moyen Âge

  • Les deux premiers exemplaires connus de ces reliques sont celui d’Oviedo, où elles ont a été apportées au VIIe siècle ; une seconde relique apportée par Charlemagne au début du IXe siècle, fut donné à une église de Picardie.
  • En 1123, pendant le siège d’Ascalon, l’évêque Ascétin de Bethléem se rendit au camp de Baudouin II avec une relique de cette grotte.
  • Guibert de Nogent, parlant du lait de la Vierge, conservé, de son temps, en l'église de Laon, dans une colombe de cristal, ne croyait pas qu'il pût être naturel et son argumentation ne manque point de vigueur il y fait allusion dans un traité intitulé De Pignoribus sanctorum (1124) (On a retrouvé dans la cathédrale, un coffre à reliques avec une fiole, mais on ignore si elle contenait ce fameux lait de la Vierge rendu célèbre par Guibert de Nogent.)
  • Fulbert de Chartres fut guéri par le lait de la Très-Sainte Vierge, dont il s'était montré le fidèle disciple. Cependant cette célèbre légende n’a rien à voir avec les reliques de la Grotte du lait, tout comme la lactatio de Saint Bernard. Au Moyen-Age, le lait de la Vierge était mentionné, durant l'élévation de la messe chaque jour.
  • Guillaume de Malmesbury fait également allusion au Lait de la Vierge.

 
Reliquaire du Saint Lait, Massimiliano Soldani-Benzi


  • Les chrétiens s'en servirent au Moyen Âge pour se donner du courage au combat :
«  On arrête le jour du combat. Les chrétiens s'avancent au nombre de trois » mille au plus, tant cavaliers que piétons. Les princes marchent » à leur tête. Le patriarche portait la croix du Christ pour étendard ; Ponce, qui avait été abbé de Cluny, tenait la lance qui perça le flanc du Seigneur. L'évêque de Bethléem avait en main un vase où était renfermé du lait de la Sainte-Vierge : Episcopus Bethleemi in pixide « lac Sanctœ Mariœ Virginis ».
  • Cette croyance populaire de la guérison des femmes n'ayant pas de lait est mentionnée la première fois par Perdicas d’Ephèse en 1250 et c'est à partir de ce moment là que les reliques du saint-lait de la Vierge connurent une très grande diffusion.

« Le pèlerin, l'aubépine, et le lait de Notre-Dame »


Evron, Abbaye Notre-Dame d'Évron

Une ancienne légende, sur le lait de la Vierge rendant le lait aux nourrices date du VIIe siècle du temps de Clovis II et montre que ces reliques existaient bien avant le Moyen Âge :

 
Fleur d'aubépine

«  Un pèlerin, allant visiter les saints lieux de la Judée, où le mystère de notre rédemption a été consommé, fut, en l'an 614, fait captif par un sarrasin, lequel, après 14 ou 15 ans de service, lui rendit la liberté, et, pour récompense, lui donna, quoique avec regret, une fiole de cristal, dans laquelle il assure qu'il y avait du lait de la Vierge, mère de son Dieu. Ce pèlerin, extrêmement joyeux d'un si rare présent, repassa la mer, et traversant la France, fatigué du chemin, s'endormit sur le bord d'une fontaine dans la forêt d'Évron, ayant pendu son sac dans lequel était la fiole à la branche d'une aubépine. À son réveil, il fut surpris de voir ce petit arbre grossi et haussé: il appelle un bûcheron pour l'abattre, mais inutilement, la cognée semblait retourner vers lui. Étant dans ce triste état, il apprit que le pieux Hadouin, 12e évêque du Mans, faisait la visite de son diocèse ; il va le trouver et lui conte son aventure. Ce prélat s'étant transporté sur le lieu et ayant dévotement imploré le secours du ciel, l'aubépine où était suspendu ce lait virginal reprit miraculeusement sa première forme, si bien qu'il reçut, avec vénération, cette fiole sacrée. L'évêque, par révélation divine, fit bâtir une église au même endroit, la dota de bons revenus, la dédia à la Vierge Marie, sub patronata bratae dei partane anno DCXXX et l'ayant érigée abbaye, Hadouin y établit des moines de l'ordre de St Benoît, pour vaquer à l'oraison et à la célébration du service divin. Cette église d'Évron fut ensuite visitée par un peuple nombreux, à cause des grands miracles que la main de Dieu y opérait en faveur de sa sainte mère. Ce sacré lait y a toujours été depuis révéré, par les merveilles spéciales que les femmes nourrices reçoivent en invoquant le nom et le secours de cette mère de Miséricorde.  »
  • À Évron on chantait :
« Lac gloriosœ Virginis,
Lac immensae dulcedinis,
Lac sanctum honoretur.

Lactis quo fuit alitus
Deus noster humanitus
Laus sancta frequentetur.
 »
« Honneur au lait de la glorieuse Vierge, à ce lait saint et d'une douceur immense.

Qu'on redise souvent les louanges de ce lait dont fut nourri notre Dieu dans son humanité. »
et à Paris en antienne des vêpres (Missel manuscrit de l'église Saint-Gervais)
« Lac gloriosœ Virginis,
Lac immensae dulcedinis,
Lac sanctum honoretur.

necnon et pepli portio
Ut sit Mater cum Filio
Lux presens dedicetur
 »
En savoir plus :

Reliques de la Sainte Vierge à Lille

  La Bonne-Fierté, renfermant le Saint Lait et les cheveux de la Sainte Vierge

Le Seigneur, qui a préservé l'âme de Marie de la tache du péché originel, n'a pas voulu que sa chair subît les suites ordinaires de la mort, de la mort, salaire du péché, et il a soustrait à la corruption du tombeau ce corps virginal où le Sauveur daigna prendre naissance Semblable au sépulcre du Fils de l'Homme, la tombe où Marie reposa trois jours n'aura rien à rendre au grand jour de la résurrection ; son corps glorifié habite les célestes demeures, avant que la trompette de l'ange ait sonné pour réveiller la cendre des morts au fond des tombeaux. La terre n'a donc rien gardé de cette nouvelle Eve, par qui le salut et la vie sont venus aux hommes ?....
De pieuses croyances nous assurent le contraire, et l'on vénère en divers lieux, des reliques de la Sainte Vierge, auxquelles les âges de foi et d'amour ont attaché le plus grand prix.
Lille s'honorait de posséder quelques-uns de ces sacrés vestiges, et le plus bel ornement de sa procession célèbre c'était la châsse qui renfermait des cheveux et du lait attribués à la Sainte Vierge.
Ces mots exciteront peut-être les réclamations de nos lecteurs, car nous n'avons plus la foi naïve de nos pères, et l'impitoyable main de la critique a desséché les sources où jadis se régénérait la piété du peuple ; elle a dépouillé la religion de ses légendes, comme elle a dépouillé l'histoire de ses récits colorés, traditions dramatiques. Peut-être a-t-elle pu réfuter quelques erreurs, abolir quelques pratiques superstitieuses, mais ne s'est-il pas englouti dans ce commun naufrage des faits dignes d'intérêt, des coutumes respectables, et méritant, tout au moins, d'exciter les curieuses recherches de l'écrivain catholique ? Nous ne pouvons, à moins de décerner à tous nos ancêtres un brevet de sottise et de niaise crédulité, condamner sans examen préalable ce qu'ils ont vénéré, brûler ce qu'ils ont adoré, fouler aux pieds ce qu'ils ont religieusement placé sur les autels. Examinons donc quelles étaient, en particulier, ces reliques qui ont obtenu, à Lille, durant six siècles, un culte si persévérant de confiance et d'amour.
Constatons d'abord que la châsse, qui faisait le principal ornement de la procession, était unanimement reconnue pour renfermer du Lait et des Cheveux attribués à la Sainte Vierge Marie. Voici ce que dit à cet égard Turbelin, prêtre de la Collégiale de Saint-Pierre, et notaire apostolique :
« La principale Fierté ou chasse portée en cette procession est celle de Notre-Dame, d'argent très richement doré et embellie de plusieurs pierreries et joyaux précieux, environnée de plusieurs nuages, aussi d'argent doré, avec une couverture pareille, faite d'artifice admirable, tenue en grand honneur et pieuse révérence de tout le peuple, pour le sacré lait de Notre-Dame, qu'elle contient en soi, si connue aussi par les cheveux de la dite Vierge, et elle est portée dessous de quelque pavillons, après le clergé, éclairée de plusieurs torches et flambeaux.
Une oraison spéciale fut composée pour honorer ces reliques, elle a été publiée plusieurs fois avec la permission de l'ordinaire.
L'Hermite dit, en son "Histoire des Saints de Lille et d'Orchies" :
« A cette église (de Saint-Pierre), sont donnés les gages de la protection de Marie, à savoir : Son lait virginal que sans doute la Mère de Dieu a distillé de son sein à quelqu'un de ses favoris, et ses cheveux d'une longueur remarquable, deux présents d'une valeur inestimable, faits à Lille par l'Empereur de Constantinople, père, oncle ou la mère de la comtesse Marguerite. Ce « lait , qui a été le nectar de Dieu même, est gardé dans une petite colombe d'argent doré, qu'un ange de même étoffe, artistement paré, tient en son sein, et la contemplant tendrement, montre à l'œil la relique divine et les cheveux précieux, tournes dans un cercle d'or. Le tout est enfermé dans une grande châsse de ce riche métal, miraculeusement travaillée par l'antiquité, avec ses statues aux environs, et repose en un lieu haut , élevé derrière le grand autel.
Enfin, le judicieux et savant historien de la Flandre catholique, Buzelin, s'exprime en ces termes :
« L'église de St-Pierre possède deux reliques précieuses de la Vierge Marie : quelques-uns de ses cheveux et un peu de son lait obtenu par miracle. Le Saint Lait se conserve dans un reliquaire d'un fort beau travail, représentant un ange qui tient dans son sein une petite colombe. Les cheveux sont renfermés dans un globe de cristal. Ces précieux objets sont contenus dans une châsse fort élégante, en vermeil, et dont le travail atteste une haute antiquité. C'est là la Fierté principale portée en la procession instituée par Marguerite de Flandre. » 
On voit, par ce qui précède, quelle origine on attribuait ordinairement à ces reliques. On croyait les devoir à la main généreuse de Marie de Champagne, qui avait suivi son époux, Bauduin IX, à la croisade, et qui succomba, à Saint-Jean-d'Acre, par suite des fatigues d'un pénible voyage et de l'émotion qu'elle ressentit en apprenant que son mari venait de recevoir la couronne impériale sous les voûtes de Sainte-Sophie de Constantinople.
C'est aux croisades, en effet, que l'Europe doit la plus grande partie des précieux trésors qu'elle vénère sur les autels. Les reliques des saints et des martyrs, et surtout celles de la vraie Croix, formaient le prix que mettaient à leurs services les princes et les barons qui combattaient pour la délivrance du Saint-Sépulcre. Suénon, prince de Suède, vint, durant la seconde croisade, rejoindre l'armée avec une troupe valeureuse et disciplinée ; il ne voulut ni terres, ni baronnies, mais il demanda un morceau du bois de la Sainte Croix. Thierry d'Alsace, comte de Flandre, consentit à laisser aux saints lieux sa femme Sybille, qui désirait se vouer au service des lépreux et des pèlerins : mais il exigea en échange de la compagne de sa vie une fiole de cristal, conservée de temps immémorial à Jérusalem, renfermant quelques gouttes du sang de Jésus-Christ, recueillies par le pieux Joseph d'Arimathie. Cette insigne relique fût confiée par Thierry à la chapelle de Saint-Basile, à Bruges, où on la vénère encore de nos jours. Quand Byzance, prise pour la seconde fois, livra aux croisés ses trésors, ses manuscrits, ses tableaux, ses statues, les soldats de la Croix ne demandaient qu'une chose : des reliques, des restes précieux de leurs pères dans la foi, qui rapportés aux églises et aux monastères de l'Occident pussent augmenter la piété des femmes, des vieillards empêchés de concourir à la guerre sainte. Les Vénitiens prirent, pour leur part de butin, le corps de l'Evangéliste Saint Marc, dont le nom fut si longtemps leur cri de guerre, dont l'image était portée sur les mers à la poupe de leurs vaisseaux. Saint Louis acheta, à haut prix, aux mêmes Vénitiens, la couronne d'épines, que l'empereur de Byzance leur avait engagée ; le saint Roi alla la recevoir pieds nus, la montra au peuple avec allégresse, et fit bâtir pour l'y déposer, cette Sainte-Chapelle, qui est encore l'un des chefs-d'œuvre légués par le moyen-âge aux temps modernes. Le même Roi adressait aux chanoines de Tolède la lettre suivante :
« Louis, par la grâce de Dieu, roi des Français, à nos bien-aimés, les chanoines et tout le clergé de Tolède, salut et dilection.
Voulant honorer et enrichir votre église par de précieuses étrennes, à la prière et par les mains de notre cher et vénérable Jean, archevêque de Tolède, nous vous faisons part des choses les plus saintes que nous ayons dans notre trésor, et que nous avons reçues de celui de l'empire de Constantinople, savoir : Du bois  de la croix de notre Seigneur, une des épines de sa couronne, du lait de la glorieuse Vierge Marie, sa Mère, d'un morceau de sa robe de pourpre et des petits drapeaux (langes) de son enfance.
On attribuait à Marie de Champagne la même généreuse piété, et on voyait dans les reliques de la sainte Vierge un souvenir des vertus de cette princesse, de ses lointains pèlerinages, et du tendre souvenir qu'elle avait conservé à la patrie de son époux.
D'autres églises, au reste, vénéraient également des reliques du Saint Lait. Venise, Soissons, Verdun, Chartres, s'enorgueillissaient de ce précieux vestige. Voici comment, dans la dernière de ces villes, la chronique rapporte l'ori gine de cette relique. Fulbert, évêque de Chartres, était un fervent serviteur de Marie. Il fit, le premier, célébrer en France la fête de la Nativité de la Sainte-Vierge, et recueillant d'abondantes aumônes, il commença, en 1020, la magnifique cathédrale qui subsiste aujourd'hui, et qui est dédiée, on le sait, sous le vocable de Notre-Dame. Il tomba gravement malade ; Marie alors daigna visiter et consoler son serviteur fidèle, et le guérit miraculeusement, en répandant sur son visage trois gouttes du lait bienheureux dont Jésus fut nourri. Ce lait, recueilli par Fulbert, fut conservé au trésor de l'église de Chartres jusqu'à la révolution.
A Reims, l'on vénérait également une relique du Saint Lait, envoyée par le Pape Adrien V, au chapitre de cette ville. Elle était placée dans une chapelle magnifique où se réunissait une foule immense de pèlerins. (Histoire de la métropole de Reims, par Don Marlot. P. 275. V. 2.)
Le bréviaire des Capucins renfermait un office pour la Fête du Saint Lait de la bienheureuse Vierge Marie, donné par elle à Saint Bernard.
D'autres églises faisaient la fête des cheveux de la très sainte Vierge, notamment celle de Bruges, le 21 mars, celle d'Oviédo, le 2 mai, celle de Saint-Omer, le 23 mai.
Les reliques vénérées de la collégiale de Saint-Pierre ont disparu dans la tourmente révolutionnaire. Toutes ont été dispersées, sauf le bois de la Vraie Croix, dont l'église de Saint-Étienne est enrichie aujourd'hui. Mais la douce Providence qui préside aux innocentes joies des serviteurs de Dieu, a permis qu'une de ces reliques perdues pour la ville de Lille fût remplacée et offrît un nouvel aliment aux affectueux sentiments des enfants de Marie. Voici, en peu de mots, l'origine de la précieuse relique des cheveux de la Sainte-Vierge, qui appartient aujourd'hui a une communauté religieuse de notre ville.
Isabelle-Claire-Eugénie, infante d'Espagne et femme de l'archiduc Albert, désirait ardemment un fils qui pût succéder à son époux dans le gouvernement des provinces belgiques, et voulant rendre le ciel même complice de ses vœux, elle entreprit le pèlerinage de Bollezeele, village situé sur le territoire de Cassel. La Vierge est honorée dans cette paroisse sous le titre de Notre-Dame de la Visitation, et les pèlerinages remontent jusqu'au XIIIe siècle. L'archiduchesse, après avoir pieusement invoqué Marie aux pieds de son image, se retira en laissant à la chapelle de riches présents, témoignages de sa visite et gages de sa confiance. Parmi ces présents se trouvait un reliquaire contenant des cheveux de la Sainte-Vierge, donné à l'infante en la sainte maison de Lorette. Cette relique insigne, reconnue à différentes époques par l'autorité diocésaine, et spécialement en 1693 par M. Delieres, vicaire-capitulaire de Saint-Omer, a été reconnue de nouveau et authentiquée, le 20 décembre 1844, par Mgr. Giraud, de vénérée mémoire.
Divers événements où l'on voit se manifester la main fin Seigneur ont permis qu'une partie de cette insigne relique fût donnée, au mois de septembre de l'année 1849, par M. le curé de Bollezeele, à la communauté des religieuses de Notre-Dame de la Treille ; cet institut, créé pour honorer la Vierge de Lille, conserve maintenant ce précieux dépôt, et les fidèles sont admis à certains jours de l'année dans la chapelle du couvent, pour y rendre leurs hommages à la relique, qui rappelle tant de pieux souvenirs et nourrit de si ferventes espérances.
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