Notre-Dame de Bon Espoir
(Dijon)
Il
existe à Dijon une si remarquable église, que le célèbre Vauban, une
des gloires du siècle de Louis XlV, disait qu'il ne manquait rien à cet
édifice, sinon une boîte pour le conserver.
Soufllot,
l'architecte de Sainte Geneviève de Paris, n'admirait pas moins ce
temple auguste ; il en avait fait faire une copie en bois, afin d'avoir
toujours sous les yeux ce que l'art religieux avait, à son avis, produit
de plus beau.
Cette
église, dédiée à Notre-Dame de Bon-Espoir, date du XIIIe siècle ; elle
offre la plus heureuse disposition de lignes et l'ensemble le plus
majestueux.
Mais
ce qu'on regarde surtout comme un chef-d'œuvre, c'est sa voûte, qui
semble se soutenir d'elle-même. On croirait, dit un auteur, qu'elle est
portée par les anges, tant il est difficile de saisir le secret de sa
solidité.
Une
chapelle, également voûtée, haute de près de sept mètres et couronnée
d'une galerie, reçut la statue de la Vierge, en l'honneur de laquelle
l'église avait été construite. Cette statue, en bois noir, assez
grossièrement travaillée, mais remarquable sous le rapport de
l'expression, avait été longtemps honorée dans la chapelle du Marché,
lorsqu'on résolut de lui bâtir un sanctuaire plus digne de la haute
réputation que ses bienfaits lui avaient acquise.
Bientôt
on y vint en pèlerinage de toutes les parties de la Bourgogne ; les
grands et les petits l'invoquèrent avec une égale confiance et un égal
succès.
La
chapelle se remplit d'ex-voto de toutes sortes, depuis l'humble bouquet
de la paysanne jusqu'à l'écusson des chevaliers et la bannière des
ducs.
Philippe
le Hardi, un de ces puissants princes, fit don à l'église de Notre-Dame
de la fameuse horloge du Flamand Jacques Marc, qu'il avait enlevée à
Courtrai, après la bataille de Rosbecque. Cette horloge, placée dans la
tour, à droite de la façade, lui a fait donner le nom de Jacquemar.
Après
la mort du dernier duc de Bourgogne, Charles le Téméraire, le seigneur
de la Roche-Nolay, gouverneur de la Bourgogne, ne montra pas moins de
dévotion à Notre-Dame de Bon-Espoir que l'ancienne dynastie.
Il la choisit pour sa patronne et fit graver sur ses armes la devise : Tant vaut.
Puis,
au retour d'une guerre où il avait été fait prisonnier par les Turcs,
et où il avait dû, pour racheter sa liberté, se mesurer contre un lion,
il fit hommage à la Vierge d'un tableau représentant cette victoire,
qu'il reconnaissait devoir à sa protection.
Au siècle suivant, la ville de Dijon tout entière reconnut Notre-Dame pour sa libératrice.
Les Suisses avaient envahi la Bourgogne, ils assiégèrent cette capitale, qui jeta vers Louis Xll un long cri de détresse.
Mais
le roi, occupé à détendre la frontière du Nord contre l'empereur et le
roi d'Angleterre, obligé de veiller en outre sur la Guienne, menacée par
les Espagnols, ne put envoyer à Dijon que six mille hommes sous la
conduite de la Trémouille.
La
place n'était pas en état de défense, et, malgré la valeur des gens de
guerre, malgré le patriotisme des bourgeois, les murailles, battues sans
relâche depuis quatre jours, commençaient à s'écrouler.
C'était
le 11 septembre 1513. La Trémouille, désespérant de sauver la ville,
demande à capituler ; mais les conditions qu'on lui propose sont telles,
qu'il n'y répond qu'en recommen çant le feu. On s'attendait le lendemain à un assaut général.
La population consternée, n'espérant plus rien des hommes, tourne ses regards vers le ciel.
On
se réunit dans l'église de Notre-Dame, la Vierge de Bon-Espoir est
portée en triomphe ; les officiers, les soldats, le général, prient
comme les citoyens ; et à peine la procession est-elle terminée, que
l'ennemi accepte les propositions qu'il avait rejetées.
Un
traité est signé, la ville est sauvée, et l'on suspend, dans le
sanctuaire de Marie, comme un monument de reconnaissance, plusieurs des
boulets recueillis dans la place.
Pendant
plus de deux cents ans, l'anniversaire de la délivrance de la ville fut
célébré par une procession solennelle, et l'hôtel de ville conserve
précieusement une tapisserie, longue de dix mètres, sur laquelle est
représentée celle qui fut faite pendant que les Suisses se croyaient
déjà maîtres de Dijon.
Dans
toutes les calamités publiques, Notre-Dame de Bon-Espoir était
invoquée, comme dans toutes les nécessités privées, et jamais sa bonté
ne faisait défaut à personne.
On
ne pouvait pénétrer sans un profond sentiment de respect, sans une
religieuse émotion, dans sa chapelle, éclairée seulement par les
flambeaux qu'y allumait la piété des fidèles, et décorée d'ex-voto
depuis le pavé du sanctuaire jusqu'au point le plus élevé de la voûte.
Aujourd'hui
cette voûte a disparu, la chapelle a perdu son ombre mystérieuse ; mais
la Vierge qu'on y invoque est toujours la mère de la sainte espérance ;
elle sourit aux doux rêves de l'innocence, aux riants projets de la
jeunesse ; elle calme les angoisses de la douleur, fait rayonner aux
yeux de tous ceux qui l'implorent la fin des souffrances de cette vie et
les joies éternelles du ciel.
Source : Livre "Les pèlerinages de France" par Eugène Rosary
La statue de Notre-Dame de Bon-Espoir
Dans
l'absidiole sud de l'église est exposée, au-dessus d'un autel
d'orfèvrerie, la statue en bois appelée Notre-Dame de Bon-Espoir.
Datant du XIe ou du XIIe siècle, cette statue de la Vierge est considérée comme l'une des plus anciennes de France.
Il s'agissait à l'origine d'une Vierge assise sur un trône, tenant l'enfant Jésus sur ses genoux.
Le siège a été supprimé anciennement et le dos de la statue a été scié et remplacé par un morceau de bois.
L'enfant Jésus a disparu à la Révolution française, en 1794.
Notre-Dame de Bon-Espoir avait déjà perdu ses deux mains au XVIIIe siècle.
En revanche, son visage est presque entièrement indemne.
Depuis plusieurs siècles, la statue a été souvent présentée couronnée et habillée d'une robe.
À
partir de 1959, il fut décidé de ne pas toujours la couvrir de parures,
afin que chacun puisse voir complètement cette statue romane.
À
l'origine, les vêtements sculptés de la Vierge portaient une
polychromie romane et son visage une couleur bistre clair à peine plus
sombre que le teint naturel.
Au XVIe ou au XVIIe siècle, la statue fut peinte en noir, pour une raison inconnue.
En 1945, cette couche de peinture fut retirée, révélant la polychromie d'origine.
Cependant, une légère teinte noire fut appliquée sur le visage seul, pour ne pas rompre avec la tradition.
Depuis
l'enlèvement définitif, en 1963, de cette teinte noire qui recouvrait
le visage, la statue ne peut plus être considérée comme une Vierge
noire, puisqu'elle porte sa polychromie romane d'origine. On peut écrire
qu'elle est une ancienne Vierge noire. Elle est connue sous le nom de Notre-Dame de Bon-Espoir.
Au XVe siècle, les Dijonnais appelaient cette image de la Vierge « Notre-Dame de l'Apport », c'est-à-dire « du marché ».
Le nom de « Notre-Dame de l'Espoir » existait également. Il prévalut à partir de la délivrance de Dijon en 1513, et devint au XVIIe siècle Notre-Dame de Bon-Espoir (avec deux traits d'union), et non Notre-Dame du Bon-Espoir, qui n'a jamais existé.
On attribue à Notre-Dame de Bon-Espoir plusieurs miracles.
En septembre 1513, les armées suisses assiégeaient et bombardaient Dijon, dont la situation semblait désespérée.
Le
11 septembre, des Dijonnais firent, dans le quartier de Notre-Dame, une
procession au cours de laquelle ils portèrent la statue de la Vierge.
Deux jours plus tard, le 13 septembre 1513, les Suisses levèrent le camp de manière inattendue.
Les Dijonnais virent dans cette libération l'intervention de la Vierge.
Une tapisserie fut tissée vers 1515 pour commémorer l'événement.
Elle orna Notre-Dame jusqu'à la Révolution, époque à laquelle elle fut vendue.
Le
maire de Dijon la racheta en 1803 et la déposa à l'hôtel de ville, d'où
elle passa en 1832 au musée des Beaux-Arts de Dijon, où elle est
exposée.
En septembre 1944, Dijon était occupé par l'armée allemande, qui semblait vouloir résister à l'avancée des troupes françaises.
Le
10 septembre, lors d'une cérémonie à Notre-Dame, l'évêque de Dijon
demanda publiquement à Notre-Dame de Bon-Espoir de protéger la ville des
ravages redoutés.
Dans
la nuit du 10 au 11 septembre, les Allemands quittèrent Dijon, et les
Français y entrèrent le 11, jour anniversaire de la procession de 1513.
À nouveau, les croyants y virent un miracle.
À
l'initiative de particuliers dijonnais, une tapisserie évoquant les
deux délivrances de 1513 et de 1944 fut commandée à Dom Robert.
Confectionnée
de 1946 à 1950 à la manufacture des Gobelins, elle prit place en 1950 à
Notre-Dame, où elle est actuellement exposée sous l'orgue.
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