Sainte Colette de Corbie
Sainte Colette de Corbie est née à Corbie (Picardie) en 1381.
Religieuse franciscaine clarisse elle introduisit dans son Ordre une réforme qui rétablissait la rigueur primitive.
Elle mourut à Gand en 1447.
Liturgiquement elle est commémorée le 6 mars.
Un contexte politique et religieux troublé
Statue de sainte Colette à Corbie par Albert Roze
Au
XVe siècle, le Grand Schisme d'Occident divisa profondément l’Église.
Ceux qui reconnaissaient le pape de Rome s'opposaient à ceux qui
reconnaissaient celui d'Avignon.
À
cette époque, l'ordre franciscain connut, en son sein, des dissensions
entre partisans de l'observance stricte de la règle de Saint François
d'Assise et partisans d'une règle moins rigoureuse.
En
1263, le pape Urbain IV, accorda aux couvents de la branche féminine
(les clarisses) l'autorisation de posséder des biens en commun ce qui
était une sérieuse entorse à la règle primitive de pauvreté.
En
France, aux XIVe et XVe siècles, la situation politique était
extrêmement troublée par la guerre de Cent Ans, la folie du roi Charles
VI et la guerre civile entre Armagnacs et Bourguignons.
La peste noire apparue en 1348 sévissait dans une grande partie de l'Europe.
Biographie
Une vocation précoce
Colette était issue d’une famille modeste, habitant à Corbie en Picardie.
Son
père, Robert Boellet, maître menuisier de l'abbaye de Corbie et sa
mère, Marguerite Moyon, étaient très pieux et charitables.
La
légende rapporte que les années passaient et ils n’avaient toujours pas
d’enfant. Aussi prièrent-ils saint Nicolas de leur donner une
descendance. Et à 60 ans, Marguerite mit au monde une fille le 13
janvier 1381. Au baptême elle reçut le prénom de « Nicolette » par
reconnaissance envers saint Nicolas mais elle fut couramment appelée
« Colette », diminutif de son prénom. C'est sous ce nom qu'elle passa à
la postérité.
Colette
reçut une éducation religieuse accordant une grande place à la Passion
du Christ sur laquelle l’entretenait fréquemment sa mère, femme très
pieuse qui se confessait et communiait chaque semaine.
Colette de Corbie aurait eu dès son plus jeune âge une vie édifiante, empreinte de prière et de mortification.
Dès sa plus tendre enfance, à 4 ans, Colette vécut de prière perpétuelle et aida les pauvres.
Elle
se mortifia, se priva de nourriture pour redistribuer son repas aux
pauvres, pria très longuement et alla même jusqu'à rendre son sommeil
difficile en mettant des morceaux de bois sous son matelas.
Elle
reçut durant ses jeunes années des grâces divines telles que des
guérisons miraculeuses, une croissance subite (elle était très petite)…
À l’âge de sept ans, elle assistait clandestinement aux matines chantées par les bénédictins.
À
l'âge de neuf ans, elle reçut la révélation de l'esprit de l'ordre
franciscain et de la nécessité de le réformer. En plus de cela, elle
apprit à lire et à écrire.
En
1399, alors qu’elle avait 18 ans, ses parents moururent. Son père
l'avait confiée avant sa mort à Raoul de Roye, abbé de Corbie.
Elle refusa le mariage que celui-ci lui présentait et se dépouilla de tous ses biens en faveur des pauvres.
Peu
après, elle fit la connaissance de Jean Bassand, prieur du couvent des
Célestins d'Amiens et lui fit part de son désir d'embrasser la vie
religieuse.
Les hésitations d'une religieuse
Elle
intègre alors les béguines de Corbie. Elle y resta un an. Mais ne
jugeant pas cet ordre assez rigoureux, elle décida d’entrer au couvent
des bénédictines de Corbie.
Cependant,
cela ne lui convint toujours pas. Elle se dirigea alors vers les
clarisses urbanistes de l'abbaye du Moncel près de Pont-Sainte-Maxence
où elle se présenta comme servante, se jugeant indigne d’y être
religieuse.
Mais là encore, elle trouva que les conditions de vie étaient trop douces.
Elle
retourna alors à Corbie où elle rencontra le père Jean Pinet, gardien
du couvent d'Hesdin en Artois, fervent franciscain désireux de faire
revivre l’ordre d’après la Règle primitive.
Il proposa à Colette de vivre en recluse sous la règle du tiers-ordre franciscain.
L'abbé
de Corbie accorda en 1402 son autorisation. Colette fut emmurée pendant
trois ans dans un reclusoir attenant à l'église paroissiale, y menant
une vie de prière et de charité, recevant la visite d'habitants venant
lui demander prières et conseils, mais, ce cheminement n'était que
provisoire…
Vision et mission de Colette
Dans
son reclusoir, elle eut des visions de saint François d'Assise qui la
présentait à Dieu comme la réformatrice de son ordre.
Une autre fois, c'était un arbre mystérieux qui croissait et poussait ses rejetons jusque dans sa cellule.
Refusant de croire à ces visions, elle fut frappée de cécité et de mutisme.
Acceptant enfin sa mission, elle guérit et se mit à écrire ce qui lui avait été révélé.
En
1406, une bulle pontificale délia Colette de son vœu de réclusion et
l'autorisa à fonder un couvent réformé dans les diocèses d'Amiens, de
Noyon ou de Paris.
Colette put s'appuyer, pour son œuvre, sur le Père Henri de Baume, franciscain, fervent partisan d'une réforme de l'ordre.
Il gagna à la cause de Colette, la comtesse Blanche de Genève, puis Isabeau de Rochechouart, baronne de Brissay.
Colette,
le Père de Baume et la baronne de Brissay rencontrèrent à Cimiez près
de Nice le pape Benoît XIII qui nomma Colette, abbesse, dame et mère de
toutes les personnes qui se rangeraient sous sa réforme.
Il
l'autorisa à accueillir dans le couvent qu'elle allait fonder des
religieuses venues de couvents étrangers ou du tiers ordre franciscain.
Elle retourna à Corbie voulant faire de sa ville natale le berceau de la renaissance franciscaine.
Cependant elle n’y trouva qu’hostilité et dut quitter la Picardie après un nouvel échec à Noyon.
Elle trouva refuge en Franche-Comté dans le manoir d'Alard de Baume frère du père Henri, à Baume-le-Frontenay.
Trois
Corbéennes l'accompagnèrent : Guillemette Chrétien, Marie Sénéchal et
Jacquette Legrand. Elles furent les premières moniales de l'ordre
réformé.
En 1410 ayant reçu confirmation du pape Alexandre V, elles s’établirent à Besançon où Colette fonda son premier monastère.
Au total dix-sept couvents furent fondés de 1410 à 1447 et d'autres réformés :
- Besançon (1410)
- Auxonne (1412)
- Poligny (1415-1417)
- Seurre (1421-1423)
- Decize (1419)
- Moulins (14221-1425)
- Aigueperse (1422-1425)
- Le Puy-en-Velay (1425-1432)
- Vevey (1422-1425)
- Orbe (1426-1427)
- Montbéliard (1430)
- Lézignan-Corbières (avant 1431)
- Castres (avant 1443)
- Béziers (avant 1443)
- Heidelberg (1438)
- Pont-à-Mousson (1431-1447)
- Hesdin (1437-1440)
- Amiens (1442-1444)
- Gand (1437-1442)
Elle échoua, une fois encore, à créer un couvent à Corbie, en 1445.
La
réforme colettine s'infiltra aussi dans l'ordre masculin. Les couvents
de Dole, Chariez, Sellières, Saint-Léger-sous-Beuvray, Murat, Castres et
Azille l'adoptèrent.
Une mystique thaumaturge
Il serait vain de comptabiliser les nombreux miracles et guérisons accomplis par ou grâce à Colette de Corbie.
Colette connut des extases, la lévitation, des effluves odoriférantes émanant de sa personne et de ce qu'elle touchait.
Elle eut connaissance de l'état des âmes du purgatoire, des dons de clairvoyance et de prophétie.
Elle avait le goût de la pénitence, des mortifications, des jeûnes, de la pauvreté totale…
Une femme politique
Colette
de Corbie œuvra pour l'extinction du schisme qui déchirait la
Chrétienté occidentale. elle obtint des papes et antipape la
confirmation de ses pouvoirs.
Elle
rencontra Vincent Ferrier à Auxonne puis à Poligny en avril 1417.
Colette agit auprès de l'antipape Félix V pour qu'il abdique sans succès
de son vivant.
Colette
réussit à passer outre les divisions politiques de la France,
s'attirant la bienveillance de la Maison de Bourgogne et de la Maison de
Bourbon pourtant ennemies. Elle réussit également à se concilier les
Maisons rivales de Savoie et de Genève.
Elle
mourut à Gand dans le couvent de Bethléem où elle fut inhumée. Puis ses
ossements furent transportés à Poligny, son couvent de prédilection, en
1783.
La réforme colettine
À
Orbe en 1430, Colette fixa dans un texte, Sentiments de Sainte-Colette,
remanié en 1432 à Besançon, sa réforme de l'ordre des clarisses. Ce
texte fut approuvé, en 1434, par Guillaume de Casal, ministre général de
l'ordre franciscain.
Colette a fixé en quinze chapitres les détails de sa réforme. Parmi les points essentiels on peut relever :
- Ne sont admises au couvent que les sœurs capables de soutenir l'austérité de la règle (les infirmes et malades ne peuvent donc y entrer).
- On peut entrer au couvent à 12 ans mais on ne peut prononcer les vœux avant 18 ans. Le noviciat dure jusque l'âge de 30 ans.
- Les sœurs vivent en clôture perpétuelle.
- Les sœurs vivent continuellement dans le silence. Elles ont accès au parloir avec l'autorisation de l'abbesse à certaines périodes de l'année.
- Les sœurs portent le voile qui doit couvrir une partie du visage qui ne peut être vu en entier.
- Les sœurs ne dorment jamais sans leur habit extérieur.
- Les sœurs ne portent pas de bas, ni chaussures, les pieds sont nus.
- Les sœurs ne peuvent posséder ni biens meubles, ni terres, ni immeubles, ni somme d'argent.
- Les sœurs font abstinence perpétuelle de viande même à Noël.
- Les sœurs jeûnent perpétuellement sauf le dimanche et à Noël.
- Les sœurs doivent assister obligatoirement et avec exactitude à l'office divin.
- Les sœurs doivent communier tous les dimanches.
- Les sœurs ne peuvent avoir d'autre confesseur que celui du couvent.
- Les sœurs n'auront aucune distraction.
- Le courrier envoyé ou reçu est lu par l'abbesse.
etc.
Le
pape Pie II approuva ses constitutions en 1458. La réforme colettine
d'abord introduite en France et en Belgique, s’étendit ensuite en
Espagne et dans toutes les colonies espagnoles du Nouveau Monde.
L’action de Colette sur l'ordre des clarisses a été considérable et
perdure jusqu'à nos jours.
Postérité
Suivant son désir, elle fut inhumée dans un tombeau, sans linceul ni bière, à même la terre, dans le cimetière de Gand.
En
1471, l’évêque de Tournai entreprit une enquête à la suite de miracles
survenus sur sa tombe. On découvrit d'autres miracles en d'autres lieux :
14 à Hesdin, 15 à Gand, 4 à Arras et encore bien d’autres à Poligny et
Auxonne.
Elle fut béatifiée en 1625 et fut canonisée par le pape Pie VII le 24 mai 1807.
Ses
attributs, dans l'iconographie chrétienne, sont le puits de la
Samaritaine (par allusion à la découverte d'eau à Poligny, au Puy, à
Hesdin, en des endroits où, avant la prière de la sainte, on ne repérait
aucune nappe aquifère) ainsi qu’une poule (allusion à l’invitation du
Seigneur à gober un œuf pour reprendre des forces). Les religieuses qui
vivent selon la règle primitive de Sainte Claire remaniée par Colette de
Corbie sont appelées colettines. Et même, si son œuvre se porta sur le
deuxième ordre franciscain, elle affecta aussi l’ordre masculin.
À
Corbie, une chapelle fut construite à l'emplacement de sa maison
natale. Une statue massive due à Albert Roze, trône à la sortie nord-est
de la ville. Dans l'abbatiale Saint-Pierre, est exposé un tableau :
Sainte Colette priant pour la délivrance d'une âme du Purgatoire de
Charles Crauk (1859). Une rue et un collège-lycée agricole privé portent
le nom de Sainte-Colette.
Galerie photographique
Habit de sainte Colette, monastère de Bethléem, Gand
Reliquaire de sainte Colette à Gand
Sainte Colette en prière par Charles Crauk, vers 1859, Corbie
Vitrail, chapelle des Franciscains, Paris 14e
Vitrail, église Notre-Dame du Rosaire, Saint-Ouen
L'apparition de la Vierge
Elle entreprend la réforme des Clarisses et fonde 17 couvents (France, Savoie, Flandres).
Cette réforme aurait pour origine une apparition de la Vierge et de saint François.
Pierre de Vaux, en 1447, rapporte une guérison miraculeuse de Colette pendant une vision.
Alors
qu'elle allait visiter quelques uns de ses couvents, sa langue, en
raison de ses douleurs extrêmes et de ses peines intérieures, se
rétracta et descendit tellement au fond de sa gorge qu'elle ne pouvait
parler ni prier vocalement.
Elle avait grande difficulté à respirer.
Au cours de cette épreuve, une jeune fille d'une grande beauté qui se montrait très douce et très bonne vint à sa rencontre.
Elle
salua la petite servante avec grande douceur, puis elle s'approcha si
près d'elle, qu'elle la prit familièrement entre ses bras et lui donna
un doux baiser sur la bouche.
A ce baiser, subitement, la langue malade fut totalement guérie et se remit en place.
Aussitôt la jeune fille si bonne, si douce et si belle disparut.
Frère
Henry de Baume, le père confesseur qui connaissait bien sa conscience,
certifiait que cette jeune fille était la Vierge Marie.
Source : Dictionnaire des apparitions de l'abbé Laurentin
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