Bordeaux
En dépit de bien des difficultés, l’abbé Noailles avait fondé la Sainte-Famille, en 1820.
Le
3 février l822, comme il était retenu par son ministère, à la paroisse
Sainte-Eulalie. L’abbé Delort le remplaça pour donner la Bénédiction du
Saint Sacrement, dans la chapelle des Sœurs, rue Mazarin, à Bordeaux.
Pendant
20 minutes. les participants purent contempler, se substituant à
l’hostie exposée pour l’adoration, le buste d’un homme jeune, au visage
lumineux, très beau, s’inclinant avec bonté vers l’assemblée recueillie
et paisible.
Milady Peychaud ne vit rien, mais entendit Quelqu’un lui dire : "Je suis Celui qui suis..."
Avec
la prudence des Autorités religieuses, à l’annonce de pareils
événements, Mgr d’Aviau, archevêque de Bordeaux, réservant son opinion,
chargea le vicaire général Barrés de procéder à l’enquête la plus
minutieuse. Les témoignages recueillis, sincères, humbles, concordants,
l’inclinèrent à reconnaître l’authenticité du prodige.
Fortifiée
par la manifestation visible de la présence divine dans l’Eucharistie,
et la paix succédant aux angoisses des débuts, la Sainte-Famille se
développa rapidement. Attentive aux appels du Seigneur, elle essaya de
faire face aux innombrables nécessités de l’après-Révolution française.
Aujourd’hui,
la Famille de Pierre-Bienvenu Noailles est une famille spirituelle et
apostolique : la vocation baptismale de ses membres s’épanouit et
s’exprime dans des formes diverses. Elle comprend : des Religieuses
contemplatives et apostoliques, des Séculières consacrées, des Prêtres
et des Laïcs associés. La Sainte-Famille de Bordeaux est présente en
Afrique, en Amérique, en Asie et en Europe.
Le témoignage de l'abbé Delort
M.
Delort, ancien curé de Barie et prêtre habitué de la paroisse de
Sainte-Eulalie, a consigné le souvenir du fait miraculeux survenu à
Bordeaux en 1822.
Voici sa déposition :
«
Je soussigné, ancien desservant de la paroisse de Baffe, et maintenant
prêtre habitué de la paroisse Sainte-Eulalie à Bordeaux, n'ayant
d'autre intention que celle de me conformer à la volonté de Dieu, en
publiant la faveur insigne qu'Il a daigné accorder à l'établissement
des Dames de Lorette, ayant été moi-même témoin de ce prodige, malgré
mon indignité, j'atteste et j'affirme devant le Seigneur, mon Dieu, la
vérité des faits contenus dans la présente déclaration.
«
M. l'abbé Noailles, fondateur des Sœurs de la Sainte-Famille et
supérieur de l'Institut de Lorette, n'ayant pu aller lui-même donner la
bénédiction à la communauté de Lorette, et m'ayant prié de le
remplacer à ce sujet, je me suis rendu dans la maison de ces Dames, le 3
de ce mois, le dimanche de la Septuagésime, à quatre heures du soir.
Dès que je fus arrivé, je me disposai à donner la bénédiction. À cet
effet, j'exposai le Saint-Sacrement. Mais à peine avais-je terminé le
premier encensement, qu'ayant porté les yeux sur l'ostensoir, je
n'aperçus plus les saintes Espèces que j'y avais placées, mais au lieu
des apparences sous lesquelles Notre-Seigneur daigne Se cacher, je Le
vis Lui-même au milieu du cercle qui Lui servait de cadre, comme un
portrait peint en buste, avec cette différence que la personne
paraissait vivante.
«
Sa figure était très blanche et représentait un jeune homme d'environ
trente ans, extraordinairement beau. Il était revêtu d'une écharpe de
couleur rouge foncé. Il s'inclinait de temps en temps à droite et
devant. Frappé de ce prodige, et ne pouvant en croire mes yeux, je crus
d'abord que ce n'était qu'une illusion, mais le miracle continuant, et
ne pouvant plus rester dans cette incertitude, je fis signe à l'enfant
qui tenait l'encensoir de s'approcher de moi. Je lui demandai s'il
n'apercevait rien d'extraordinaire. Il me répondit qu'il avait déjà
aperçu le même prodige et qu'il l'apercevait encore. Je l'engage alors à
faire prévenir la Supérieure. Il en parla à la sacristine qui, frappée
elle-même de ce spectacle et absorbée par les sentiments qu'il lui
inspirait, ne put s'acquitter de la commission qui lui était donnée.
«
Pour moi, anéanti et prosterné contre terre, je ne levais les yeux que
pour m'anéantir davantage en la présence du Seigneur. Je versais des
larmes de joie, de reconnaissance et de confusion. Le prodige subsista
durant tout l'hymne du Saint-Sacrement, le Domine salvum fac,
le cantique, les oraisons. Et lorsque le cantique fut fini, montant à
l'autel, je ne sais comment (car il me semble que je n'aurais plus ce
courage en ce moment), je pris l'ostensoir dans mes mains, et donnai la
bénédiction, contemplant toujours notre divin Sauveur, que je tenais
visiblement entre mes mains. Ayant donné aux Dames de Lorette cette
bénédiction qui sera sans doute bien efficace pour leur établissement,
je posai l'ostensoir sur l'autel; mais lorsque je l'ouvris, je ne vis
plus que les saintes Espèces dont Notre-Seigneur venait de S'envelopper
dès que la bénédiction avait été donnée. Tout tremblant et versant
encore des larmes, je sortis de la chapelle, étonné du calme qui s'y
était observé durant un prodige si long, mais que j'ai attribué depuis
à l'état d'anéantissement où chacun, ainsi que moi-même, avait été
plongé, comme à l'incertitude que devait causer un spectacle trop
extraordinaire pour qu'on ne craignît pas l'illusion.
«
À peine fus-je hors de la chapelle, que toutes les personnes de la
maison m'environnèrent, me demandant si j'avais vu moi-même le prodige
qui les avait frappées, et me faisant plusieurs questions à ce sujet.
Je ne pus leur dire que ces mots :
-
Vous avez vu Notre-Seigneur, c'est une faveur insigne qu'Il vous a
accordée, afin de vous rappeler qu'Il est réellement avec vous, de vous
porter à L'aimer davantage et à pratiquer toutes les vertus qui vous
ont attiré une si grande grâce.
« Je me retirai chez moi, et durant toute la nuit, je ne pus que songer au prodige dont je venais d'être témoin.
«
Le lendemain lundi, étant allé à la paroisse Sainte-Eulalie et y ayant
trouvé M. l'abbé Noailles, je lui fis part, ainsi qu'à quelques autres
personnes, de ce miracle, quoique j'eusse résolu de n'en parler à qui
que ce fût. Mais l'enfant qui encensait, et quelques personnes
étrangères qui se trouvaient dans la chapelle de Lorette, ayant rendu
compte de ce qu'ils y avaient vu ainsi que moi, j'ai pensé que le
Seigneur voulait que j'appuyasse leur témoignage. Quelques-uns ont
ajouté foi à mon récit; quelques autres m'ont traité de visionnaire.
«
Quoi qu'il en soit, je déclare ce que j'ai vu, ce que j'ai, pour ainsi
dire, touché de mes propres mains, et quoique mon témoignage soit de
peu de poids, je me regarderais comme le plus ingrat et le plus coupable
des hommes, si je le refusais pour attester la vérité.
« En foi de quoi, Bordeaux, le 5 février 1822 :
« Delort, prêtre, Docteur en théologie, doyen de la Faculté de théologie de Bordeaux. »
On
s'empressa d'instruire de ce fait le vénérable archevêque de Bordeaux,
Mgr d'Aviau du Bois de Sanzay. Le prélat fut profondément touché de ce
récit ; mais ne consultant que sa sagesse, il invita les religieuses à
témoigner vivement leur reconnaissance au Seigneur, tout en
s'abstenant de faire connaître dans le public cette inestimable faveur.
Il ordonna néanmoins une enquête dont les résultats l'obligèrent à
ajouter foi au prodige. Il voulut même en perpétuer la mémoire en
permettant toujours, chez les Sœurs de la Sainte Famille, l'exposition
du Très Saint Sacrement et un salut solennel au jour anniversaire de
cette bénédiction miraculeuse donnée par Notre-Seigneur aux premiers
membres de leur congrégation.
Le
modeste ostensoir qui servait alors existe encore et a été transporté,
comme une relique, au couvent des Sœurs Agricoles à Martillac.
Bordeaux, le 5 février 1822
Tiré de : l'Abbé J. Millot, Allons à Jésus, courtes instructions et histoires, Paris, Lethielleux, 1911, p. 466-471.Attestation de l'enfant de chœur Jean DEGRETEAU
Ayant
coutume d'aller à Lorette, le dimanche, pour servir le prêtre qui donne
la Bénédiction, j'y suis allé le dimanche de la Septuagésime ; lorsque
le prêtre eut mis le Saint Sacrement sur l'autel, je vis que l'ostensoir
était tout brillant là où l'on met l'hostie : l'hostie n'y était plus,
mais à la place je vis un buste et une tête qui s'approchait de la
vitre.
J'étais
bien surpris; quand M. Delort me demanda si je voyais, je lui dis que
oui. Je vis bien que c'était un miracle et j'étais tout tremblant. Ça
dura toute la bénédiction; quand M. Delort sortit de la chapelle, tout
le monde vint lui demander ce que c'était, et il dit que c'était
Nôtre-Seigneur. Je lui ai demandé s'il ne tremblait pas, il me dit que
ça lui donnait de la force. J'ai dit tout à maman et à M. Renaud le soir
même; j'étais tout tremblant.
(signé) Jean DEGRETEAU Bordeaux, le 8 février 1822.
Jean
Degreteau devint marin et négligea la foi chrétienne. Cependant, à 40
ans, il répondit avec énergie à qui doutait du miracle de 1822 : "Ce que
j'ai vu, je l'affirmerai toujours."
Attestation de la supérieure de la maison de Lorette
Attestation de la supérieure de la maison de Lorette
Je
soussignée, Supérieure indigne de la Maison de Lorette, atteste que le
dimanche de la Septuagésime, troisième jour de ce mois; ayant eu le
bonheur de recevoir la bénédiction dans la chapelle de Notre-Dame de
Lorette, et ayant osé. contre mon ordinaire, porter mes regards sur la
sainte hostie, je m'aperçus que les espèces étaient remplacées par
Nôtre-Seigneur Jésus-Christ lui-même : je ne voyais que sa tête et son
buste; il était comme encadré dans le cercle de l'ostensoir, mais il se
penchait de temps en temps du côté où j'étais, et alors son visage
semblait sortir hors du cercle qui l'environnait.
J'ai
vu en outre des lumières éclatantes de chaque côté, et à peine les
eus-je aperçues qu'elles tombèrent en gerbes et se dissipèrent;
préoccupée de cette vision pendant l'hymne du Saint Sacrement, le
"Salvum fac regem", les oraisons et le cantique, et sentant au dedans de
moi une grande ferveur, je me disais : Oh ! que je serais contente si
c'était réellement mon Dieu qui voulût se montrer à découvert! Que je
serais heureuse de le voir!... Mais comme j'avais souvent formulé ce
désir, je craignais que ce ne fût une illusion, et cependant je voyais
toujours Nôtre-Seigneur sous la même forme. J'étais si occupée de sa
présence que je n'ai aperçu ni l'effet qu'elle produisait sur le prêtre
et sur les autres, ni le mouvement que l'on se donnait pour me faire
savoir ce qui se passait. ni la démarche de la sacristine que l'enfant
avait prévenue et qui ne me fit aucun rapport.
Je
me retirai dans ma chambre sans avoir parlé à personne ; étant
descendue un moment après, plusieurs personnes m'ayant environnée pour
me raconter ce qu'elles avaient vu, je connus bien alors que je ne
m'étais pas trompée et je bénis Nôtre-Seigneur de la grâce qu'il venait
d'accorder à notre pauvre maison, bien résolue d'en profiter pour
l'aimer davantage et pour le servir avec plus de zèle que je ne l'avais
fait; car je me suis rendue bien coupable devant Dieu et surtout par la
manière dont je me suis comportée envers Lui dans le Sacrement de son
amour.
J'atteste
toutes ces choses en présence de Jésus, Marie et Joseph, afin que nos
sœurs conservent le souvenir d'une si grande faveur, qu'elles s'excitent
à une grande dévotion envers notre Sauveur et qu'elles aient un grand
courage pour travailler à leur œuvre, bien persuadées que Nôtre-Seigneur
est toujours avec nous sous les espèces eucharistique. Si quoique nous
ne puissions pas toujours le voir des yeux du corps, comme il m'a fait
la grâce de le voir, malgré que j'en fusse bien indigne.
En foi de quoi;
(signé) A; NOAILLES/ Supérieure de la Maison de Lorette;
Bordeaux, le 6 février l822.Témoignage de Marie-Louise-Françoise-Milady Peychaud (1774-1838), en religion : Sœur Marie de Jésus.
Moi, Marie-Louise-Françoise Peychaud, en 1822, lorsque l’apparition de Notre-Seigneur dans la chapelle des Dames de Lorette, rue Mazarin, eut lieu, le 3 février, dimanche de la Septuagésime, je me rendis, comme les autres, pour recevoir la bénédiction. A peine fus-je à ma place, qu’on mit la sainte hostie dans l’ostensoir; je me sentis aussitôt profondément recueillie et j’entendis une voix intérieure qui me dit: «Je suis Celui qui suis et il n’y a que Moi qui sois.» Surprise, comme une personne aveugle qui voit la lumière pour la première fois, je perdis à peu près l’usage de mes sens; du moins il me fut impossible d’en faire usage. J’étais dans l’usage de faire le second dessus; je voulus le faire pour me conformer à l’obéissance qui l’exigeait de moi; mais il me fut impossible d’ouvrir la bouche. Dans cet état, je ne pouvais écouter que la voix divine; effectivement, c’était elle qui se faisait entendre, je ne pus en douter. Elle continua et me dit: «Les honneurs et l’estime des hommes ne sont que de la fumée, et Je suis Celui qui suis; leur amitié n’est que de la poussière, et Je suis Celui qui suis. Les richesses et les plaisirs ne sont que de la boue, et Je suis Celui qui suis, et il n’y a que Moi qui sois.»
J’avoue que je fus atterrée, ayant souvent médité ces grandes vérités, mais que je n’avais jamais bien comprises. Anéantie au dedans de moi-même, je répondis au Bon Dieu: «Quoi! Seigneur! j’ai donc toujours été dans l’illusion? Mais puisque à ce moment, je reconnais que c’est mon Dieu Lui-même qui me parle, ah! gravez si profondément dans mon esprit et dans mon cœur ce que vous venez de me dire; que je n’en perde jamais le souvenir.»
Je restai seule dans la chapelle, occupée de ce qui venait de m’arriver, ne sachant pas que Notre Seigneur eût apparu. Je l’appris au sortir de la chapelle, ce qui acheva de me rendre toute tremblante. Je fus me cacher pour pouvoir méditer, et après avoir questionné toutes les personnes qui avaient été témoins du miracle, leur naïveté, leur simplicité et leur unanimité m’assurèrent que je ne m’étais pas trompée. Il me semblait, à travers mes paupières, avoir vu la chapelle tout illuminée, car les choses extérieures n’avaient point de force sur moi, dans ce moment; aussi n’est-ce qu’un souvenir, auquel je n’ai pas donné une grande attention; cependant, cela a servi depuis à me confirmer, tant de choses réunies ne pouvant être une illusion.
L'ostensoir
On peut vénérer l'ostensoir de l'adoration à Martillac. Il a été conservé par la communauté contemplative "La solitude" de Martillac.
Moi, Marie-Louise-Françoise Peychaud, en 1822, lorsque l’apparition de Notre-Seigneur dans la chapelle des Dames de Lorette, rue Mazarin, eut lieu, le 3 février, dimanche de la Septuagésime, je me rendis, comme les autres, pour recevoir la bénédiction. A peine fus-je à ma place, qu’on mit la sainte hostie dans l’ostensoir; je me sentis aussitôt profondément recueillie et j’entendis une voix intérieure qui me dit: «Je suis Celui qui suis et il n’y a que Moi qui sois.» Surprise, comme une personne aveugle qui voit la lumière pour la première fois, je perdis à peu près l’usage de mes sens; du moins il me fut impossible d’en faire usage. J’étais dans l’usage de faire le second dessus; je voulus le faire pour me conformer à l’obéissance qui l’exigeait de moi; mais il me fut impossible d’ouvrir la bouche. Dans cet état, je ne pouvais écouter que la voix divine; effectivement, c’était elle qui se faisait entendre, je ne pus en douter. Elle continua et me dit: «Les honneurs et l’estime des hommes ne sont que de la fumée, et Je suis Celui qui suis; leur amitié n’est que de la poussière, et Je suis Celui qui suis. Les richesses et les plaisirs ne sont que de la boue, et Je suis Celui qui suis, et il n’y a que Moi qui sois.»
J’avoue que je fus atterrée, ayant souvent médité ces grandes vérités, mais que je n’avais jamais bien comprises. Anéantie au dedans de moi-même, je répondis au Bon Dieu: «Quoi! Seigneur! j’ai donc toujours été dans l’illusion? Mais puisque à ce moment, je reconnais que c’est mon Dieu Lui-même qui me parle, ah! gravez si profondément dans mon esprit et dans mon cœur ce que vous venez de me dire; que je n’en perde jamais le souvenir.»
Je restai seule dans la chapelle, occupée de ce qui venait de m’arriver, ne sachant pas que Notre Seigneur eût apparu. Je l’appris au sortir de la chapelle, ce qui acheva de me rendre toute tremblante. Je fus me cacher pour pouvoir méditer, et après avoir questionné toutes les personnes qui avaient été témoins du miracle, leur naïveté, leur simplicité et leur unanimité m’assurèrent que je ne m’étais pas trompée. Il me semblait, à travers mes paupières, avoir vu la chapelle tout illuminée, car les choses extérieures n’avaient point de force sur moi, dans ce moment; aussi n’est-ce qu’un souvenir, auquel je n’ai pas donné une grande attention; cependant, cela a servi depuis à me confirmer, tant de choses réunies ne pouvant être une illusion.
L'ostensoir
On peut vénérer l'ostensoir de l'adoration à Martillac. Il a été conservé par la communauté contemplative "La solitude" de Martillac.
Le monastère "La solitude" est situé au lieu source de la famille spirituelle de Pierre-Bienvenu Noailles.
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