L'adoration eucharistique
Saint Vincent de Paul
Zèle de saint Vincent de Paul pour la fréquente communion.
Dans
ses grandes maladies, lorsqu'il ne pouvait point marcher ni se soutenir
pour célébrer la sainte Messe, il avait la consolation de communier
tous les jours, s'il ne survenait quelque empêchement insurmontable qui
le privât de cette consolation ; et dans ses communions journalières il
apportait de si parfaites dispositions et témoignait un tel respect et
une telle affection envers Celui qu'il adorait et recevait en ce
Sacrement, qu'il semblait être comme transporté et ravi hors de
lui-même.
Sur
ce sujet, parlant un jour aux siens des effets que ce divin Sacrement
opère en ceux que le reçoivent avec les dispositions convenables, il
leur dit : « Ne ressentez-vous pas, mes frères, ne ressentez-vous pas ce
feu divin brûler dans vos poitrines, quand vous avez reçu le corps
adorable de Jésus-Christ dans la communion ? »
C'était
de l'abondance de son cœur que sortaient ces paroles, qui faisaient
assez connaître ce que par sa propre expérience il goûtait et ressentait
en ses communions.
C'était
aussi ce qui le portait à exhorter les fidèles à se bien disposer pour
recevoir dignement et fréquemment la sainte communion du corps de
Jésus-Christ : car il n'approuvait pas qu'on s'en éloignât sans de
graves raisons ; et une personne de piété, qui prenait conseil de lui,
s'étant une fois abstenue de recevoir ce Sacrement pour quelque peine
intérieure qui lui était survenue, voici ce qu'il lui en écrivit le même
jour, dans un billet :
"Vous
avez un peu mal fait de vous être aujourd'hui retirée de la sainte
communion pour la peine intérieure que vous avez ressentie ; ne
voyez-vous pas que c'est une tentation, et que vous donnez par ce moyen
prise à l'ennemi de ce très-adorable Sacrement ? Pensez-vous devenir
plus capable et mieux disposée de vous unir à Notre-Seigneur en vous
éloignant de lui ? Oh ! certes, si vous aviez cette pensée, vous vous
tromperiez grandement, et ce serait une pure illusion."
Pieuses pratiques de saint Vincent de Paul.
Une
des plus grandes et des plus particulières dévotions de saint Vincent
de Paul a été la très-sainte Eucharistie, considérée non-seulement comme
sacrifice, mais aussi comme sacrement, sous les espèces duquel le Fils
de Dieu se rend réellement présent dans nos églises, et accomplit, d'une
manière aussi véritable que merveilleuse, la promesse qu'il a faite de
demeurer avec nous jusqu'à la consommation des siècles.
Cette
dévotion de saint Vincent de Paul s'est manifestée premièrement par le
très-grand respect avec lequel il se comportait dans les églises où
reposait ce sacrement très-adorable, et par l'affection très-vive qu'il
avait pour ces saints lieux que Jésus-Christ honorait de sa présence.
Voici
ce qu'un personnage de très-grande vertu en a témoigné : « J'ai
remarqué plusieurs fois, dit-il, lorsque saint Vincent de Paul était en
prières devant le saint Sacrement, qu'on pouvait aisément reconnaître en
son extérieur la véritable et sincère dévotion de son intérieur ; il se
tenait toujours prosterné à deux genoux, avec une contenance si humble,
qu'il semblait qu'il se fût volontiers abaissé jusqu'au centre de la
terre pour témoigner davantage son respect envers la majesté de Celui
qu'il reconnaissait présent.
Et
certes, en considérant cette modestie respectueuse qui paraissait en
son visage, on eût pu dire qu'il voyait de ses yeux Jésus-Christ, et la
composition de son extérieur était si dévote et si religieuse, qu'elle
était capable de réveiller la foi la plus endormie et de donner aux plus
insensibles des sentiments de piété envers cet adorable mystère. »
Or
ce n'était pas seulement en offrant ses prières qu'il faisait paraître
son respect et sa dévotion envers le très saint Sacrement, mais, toutes
les fois qu'il se trouvait dans les églises où il reposait, pour quelque
occasion que ce fût, il se tenait toujours dans une très-grande
modestie, et, autant qu'il lui était possible, il évitait de parler à
personne en ces saints lieux ; que s'il se trouvait en quelque nécessité
de rompre le silence, il tâchait de faire sortir hors de l'église ceux
qui lui voulaient parler, ce qu'il observait aussi envers les personnes
les plus qualifiées et même envers les prélats, sans toutefois rien dire
ni faire qui pût blesser le respect qui leur était dû.
L'affection
particulière qu'il avait pour les lieux honorés de cette divine
présence était telle, que les jours auxquels il n'était pas si fort
embarrassé d'affaires ni obligé, de sortir de la maison, on le voyait
aller à l'église, où il demeurait devant le très-saint Sacrement tout le
temps qu'il pouvait avoir libre et quelquefois plusieurs heures. Il
recourait surtout, comme un autre Moïse, à ce divin tabernacle dans la
rencontre des affaires épineuses et difficiles, pour y consulter
l'oracle de la vérité, et on l'a vu souvent, lorsqu'il recevait des
lettres qu'il prévoyait contenir la nouvelle de quelque bon ou mauvais
succès en chose importante, s'en aller derrière le grand autel de
Saint-Lazare, et là, mettant les genoux en terre et ayant la tête nue,
ouvrir et lire ces lettres en présence de N'otre-Seigneur, ce qu'il
faisait aussi en tous les autres lieux où il se rencontrait ; et un
jour, comme on lui présentait une lettre dans la cour du Palais, à
Paris, se doutant qu'elle lui annonçait l'événement d'une affaire fort
considérable pour la gloire de Dieu, quoique pour lors il fût fort
incommodé de ses jambes, il ne laissa pas de monter l'escalier pour
aller à la haute chapelle du Palais, où repose le très-saint Sacrement,
et, l'ayant trouvée fermée, il se mit néanmoins à genoux à la porte, et,
en cet état, il fit la lecture de sa lettre. Il en usait sans doute de
la sorte pour protester plus parfaitement de sa soumission à toutes les
dispositions de la volonté de Dieu qui lui seraient manifestées par ces
lettres, et pour lui faire un sacrifice de tous les mouvements de joie
ou de tristesse que les nouvelles qui y étaient contenues pourraient
exciter en son âme.
Quand
il sortait de la maison de Saint-Lazare, il allait premièrement se
prosterner devant Notre-Seigneur en ce très-saint Sacrement, pour
demander sa bénédiction, et, aussitôt qu'il était de retour, il allait
de nouveau se présenter devant lui comme pour lui rendre compte de ce
qu'il avait fait à la ville, le remercier des grâces qu'il avait reçues
et s'humilier des manquements qu'il pouvait avoir commis ; ce qu'il
faisait non par manière d'acquit, mais avec un véritable sentiment de
religion et de piété, se tenant chaque fois un temps assez long devant
le très-saint Sacrement, dans une posture fort humble et dévote. Il a
mis les siens dans cette pratique, disant qu'il était bien juste qu'on
rendît ce devoir au maître de la maison.
Lorsque,
allant par la ville, il rencontrait le très saint Sacrement dans les
rues, il se mettait à genoux en quelque endroit qu'il se trouvât, et
demeurait en cette humble posture autant de temps qu'il le pouvait voir ;
si ce n'est qu'on le portât le long de son chemin, car, en ce cas, il
le suivait tête nue, quoique de fort loin, ne pouvant le suivre de près à
cause de la difficulté qu'il avait à marcher.
Dans
ses voyages, il avait cette sainte coutume, passant par les villages,
si les églises se rencontraient ouvertes, de descendre de cheval pour
aller visiter et adorer le très saint Sacrement ; que, si elles se
trouvaient fermées, il y entrait en esprit et lui rendait intérieurement
les même devoirs ; et lorsqu'il était arrivé aux lieux où il fallait
s'arrêter pour dîner ou pour coucher, avant toute autre chose, il allait
à l'église rendre ses respects et ses hommages au très-saint Sacrement.
Source : Livre "Dévotion à la sainte Eucharistie en exemples, ou excellence des prières et ..." par Jean-Joseph Huguet
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