Caen
L'église Saint Étienne
Vue générale
L'église Saint-Étienne de Caen ou abbatiale Saint-Étienne de Caen est un lieu de culte catholique situé à Caen en Normandie. Construite à partir du XIe siècle
par Guillaume le Conquérant comme abbatiale de l'abbaye aux Hommes, ou
abbaye Saint-Étienne, elle est devenue église paroissiale après la
Révolution française.
Elle ne doit pas être confondue avec l'église Saint-Étienne-le-Vieux située à proximité.
Au cœur du très bel ensemble architectural de l'abbaye construit entre les XIe et XVIIIe siècles, son impact est essentiel sur l'histoire de l'art en Normandie et en Angleterre.
Elle fait l’objet d’un classement au titre des monuments historiques par la liste de 1840.
Histoire
L'église Saint-Étienne de Caen, SANCTUS STEPHANUS CADOMEUSIG
donne son nom à l'abbaye Saint-Étienne ou abbaye-aux-Hommes, de l'ordre
de Saint-Benoît, du diocèse de Bayeux, de la province ecclésiastique de
Rouen.
Tombe de Guillaume le Conquérant
Charte de donation du monastère et de la construction de l'église Saint-Étienne par Guillaume le Conquérant
Les
ducs de Normandie sont marqués par un profond besoin spirituel et
Guillaume le Conquérant dans son programme politico-financier choisit
Caen comme deuxième capitale de son duché.
Il s'engage avec sa femme à y fonder deux monastères qui vont être déterminant pour l'architecture normande.
À
sa mort il a construit 17 couvents de moines et 6 de religieuses. Il
veut que les édifices auxquels il attache son nom surpassent en
magnificence ceux qui s'élèvent de tous côtés.
Il
meurt le 9 septembre 1087 à Saint-Gervais de Rouen et choisit d'être
inhumé dans le chœur de son église Saint-Étienne de Caen.
Les causes religieuses et politiques
Vers
1051 ou 1052, Guillaume le Bâtard épouse Mathilde de Flandre qui est sa
parente à un degré interdit par le droit canonique.
En
1053, le mariage est condamné par le pape. Lanfranc de Pavie, écolâtre
de l'abbaye du Bec, principale personnalité intellectuelle de Normandie
fait la liaison entre le duc et le pape qui lève les sanctions en 1059
contre l'engagement de Guillaume et Mathide de construire chacun une
abbaye.
Il
faut combler le vide laissé par les invasions des Vikings dans cette
région où de nombreux établissements préromans n'ont pas survécu, et où
les fondations nouvelles tardent à s'épanouir.
La stabilité de l'État normand et la fermeté des institutions permettent la création de nouvelles constructions.
Le duc doit affirmer son autorité, les bâtiments témoignent de sa
grandeur et de sa noblesse et incarnent la majesté de son pouvoir.
La fondation
Vers
1063, Guillaume décide la fondation d'une abbaye bénédictine dédiée à
Saint-Étienne au centre d'un quartier nouveau à l'Ouest de Caen, Le bourg-l'Abbé
qui se trouve sur des terrains de paroisses appartenant à la cathédrale
de Bayeux qui les cède à la reine Mathilde de sorte que les moines de
l'abbaye aux Hommes se trouvent sous la dépendance spirituelle de
l'abbesse de Caen. C'est pour se soustraire à cette dépendance qu'ils
construisent l'église Saint-Nicolas de Caen pour les paroissiens du Bourg-l'Abbé.
Le
18 juin 1066, l'abbaye est dédicacée une première fois en présence des
principaux barons de Normandie, de l'archevêque de Rouen, des évêques de
Bayeux, Lisieux, Avranches et Évreux, des abbés du Bec, de Fécamp, de
Saint-Ouen de Rouen, du Mont-Saint-Michel, de Saint-Wandrille de
Fontenelle, de Saint-Vigor, de Lonlay et d'Évron.
Le
25 décembre 1066, Guillaume le Conquérant est couronné roi
d'Angleterre, Caen se trouve placé entre les deux moitié de l'État
anglo-normand. Les armoiries de Saint-Étienne mi-parti d'Angleterre et Normandie en garde la mémoire.
Le financement
La façade Ouest de l'église Saint-Étienne
L'extraordinaire
réussite matérielle des Normands parait dans l'église Saint-Étienne et
si le plan ambitieux a sans doute été conçu avant la conquête de
l'Angleterre, le succès foudroyant de 1066 a permis son exécution rapide
car Guillaume n'a pas hésité à spolier au profit des abbayes de Caen la
principale fondation de Harold, à Waltam en Essex, et elles ont pu
recueillir pendant trois siècles, les redevances de nombreux villages
anglais et du quartier de la City de Londres.
Dans
les chartes de fondations qui sont complétées par ses principaux
barons, Guillaume le Conquérant prouve l'attachement qu'il porte à cette
réalisation.
Il
donne en l'honneur du bienheureux Saint-Étienne premier martyr pour
assurer les besoins du culte : Cheux, Rots, Fleury-sur-Orne, Étavaux,
Ifs, Hubert-Folie, Bourguébus, Bras, Dive et Cabourg avec les hommes,
les moulins, les eaux, les prairies, les pâturages, les forêts, les
revenus et les coutumes, toute la partie de Bourg-l'Abbé depuis le mur
de l'Ouest en suivant la route du Vieux-Saint-Étienne à Bayeux et celle
de Bretteville-sur-Odon, ainsi que toutes les terres et les droits
coutumiers.
Il ajoute le lit du Viel Odon depuis Venoix jusqu'à l'Orne, les forêts
de Maupertuis, de Torteval, de Foulogne et du Quesnay avec les eaux,
terres et toutes les dépendances, un marché à Baupte, une foire de trois
jours à Caen, un cellier sur la Seine à Rouen quitte de tous droits, le
droit de juger les hommes avec la basse et la haute justice et le pape
accorde sa protection et le privilège d'exemption.
Il
donne en Angleterre les manoirs de Northam, Frampton, Welles,
Biencomer, Pansfeld, l'église de Cosham avec les territoires et les
dîmes, l'église de Morton, une maison et des terres à Londres. Aux dons
du duc s'ajoute celles de Roger de Montgomery qui donne le bois de Trun
et une forêt, Robert de Mortain, frère du duc la ville d'Hutteville ...
Tout
est en place pour construire: les territoires capables d'apporter le
bois des charpente et des échafaudages, les paroisses avec des carrières
de pierre à Fleury-sur-Orne et Bretteville-sur-Orne car la mise en
œuvre des nouvelles techniques comme le mur épais normand nécessite une
grande quantité de pierre, les revenus pour payer les ouvriers et la
justice pour gérer les litiges.
La construction
Lanfranc
Les
moyens pour construire mis en place, il faut trouver des intellectuels
capables d'avoir la culture nécessaire, une vision complète du projet et
des détails dans le respect de la règle de Saint Benoît, la
connaissance de la géométrie, l'exacte disposition des bâtiments
conventuels autour de l'église chœur de l'abbaye, du langage de
l'architecture qui se développe dans toutes ses parties, de transmettre
oralement la typologie du bâtiment le plus important : l'église avec son
plan bénédictin que l'on retrouve dans de nombreuses églises de France,
Italie, Allemagne et Angleterre.
Il
y avait certainement dans tous les grands Ordres, des religieux
spécialisés de la construction des églises en plus de moines capables de
diriger les ouvriers spécialisés et l'ensemble du chantier.
Les
clercs italiens comme Guillaume de Volpiano, Lanfranc de Pavie, Anselme
de Cantorbery mettent grâce à leurs disciples normands, les apports
lombards et bourguignons, l'appui indéfectible des ducs, le duché au
premier rang de la civilisation intellectuelle et architecturale des XIe siècle et XIIe siècle du monde occidental.
Le
duc confie en 1063 la construction à Lanfranc qui avait donné son avis
au bienheureux Herluin pour la reconstruction de l'abbaye Notre-Dame du
Bec puis le nomme abbé de Saint-Étienne en 1066 et archevêque de
Canterbury en 1070 où il reconstruit la cathédrale de Canterbury
détruite par un incendie trois ans auparavant. L'église Saint-Étienne
est construite entre 1065 et 1083.
Ce
n'est cependant que le deuxième abbé de Saint-Étienne, Guillaume
Bonne-Âme qui assiste en 1077 à la dédicace de l'église. La solennité
est présidée par l'archevêque Jean d'Avranches, entouré des évêques ses
suffragants et d'un grand nombre d'abbés et de seigneurs. Elle a lieu en
présence du roi et de la reine Mathilde, de leur fils Robert, de
Lanfranc, archevêque de Canterbury et de Thomas, archevêque d'York. On
place sur l'autel la grande charte de fondation et les autres chartes
des vassaux qui avec leurs nouvelles richesse dues à la conquête
ajoutent de nouveaux dons.
XIIIe et XIVe siècles
L'église Saint-Étienne vers 1820
L'église Saint-Étienne sur le plan de Caen de 1657 avant les constructions Mauristes
L'église Saint-Étienne avec les nouveaux bâtiments Mauristes du XVIIe siècle
À
la fin mai 1204, le roi de France Philippe-Auguste occupe Caen. Les
abbayes caennaises conservent leur patrimoine anglais jusqu'au début du XVe siècle, où Henri IV les confisquent pour subventionner la reprise de la guerre de Cent ans.
En
1256, lors de sa visite du 9 novembre, l'archevêque de Rouen, Eudes
Rigaud y trouve 63 moines, tous prêtres sauf trois et fait des
remontrances sur le comportement.
En
1315, le 4 décembre, fondation de la chapelle Halbout dédiée à
Notre-Dame à laquelle sont attachés quatre chapelains à la nomination de
l'abbé. Le roi Jean ordonne la continuation des travaux de l'abbatiale
et du monastère.
La guerre de Cent ans
Le
4 septembre 1414, Henri V s'empare de Caen, la trahison d'un moine de
l'abbaye de Saint-Étienne joue un rôle décisif dans cet épisode, mais
préserve les tours de façade de l'abbatiale de la destruction qu'avait
projeté les défenseurs français. Le 11 juin 1450, le roi de France
Charles VII réoccupe Caen.
Le régime de la commende
En
1485, le régime de la commende est instituée au bénéfice de Charles de
Martigny, évêque de Chartres et désormais, les abbés seront des grands
seigneurs, favoris royaux, peu présent et soucieux d'encaisser de gros
bénéfices. La vie des moines devient plus séculière que religieuse, Le
pouvoir effectif et l'influence à la fois spirituelle et temporelle sur
leurs destins passe aux mains des prieurs.
Vers
1490, l'abbé Charles Ier de Martigny évêque d'Elne construit le logis
abbatial, son somptueux tombeau est élevé dans la chapelle de la Vierge,
derrière le chœur par son neveu Charles de Martigny, évêque de Castres
qui fonde huit des seize chapelles du chœur. En 1531, Pierre de
Martigny, XXIXe
abbé de Saint-Étienne, évêque de Bayeux est inhumé près de son oncle
précédemment abbé du même monastère. Ces tombeaux sont détruits par les
Huguenots en 1562. Ces prélats ont rempli des missions politiques
importantes et se sont signalés par leur magnificence et par le goût
éclairé des Arts.
Les guerres de religions
En
1562 et 1563, pendant les guerres de religion, l'église est pillée par
les troupes de Montgommery puis abandonnée. Les vitraux, les orgues et
le mobilier sont détruits. Le tombeau de Guillaume le Conquérant,
magnifique mausolée en marbre, surmonté d'un gisant, et qui fut édifié à
la demande de son fils Guillaume le Roux, roi d'Angleterre est profané
en 1562 par les protestants. Les restes sont confiés à un moine de
l'abbaye, Michel de Cemallé. Mais en 1563, une nouvelle intrusion des
protestants provoque la fuite des moines et les ossements sont dispersés
à l'exception d'un seul os, sauvé par Charles Toustain de La Mazurie,
le poète ami de Jean Vauquelin de La Fresnaye. Cet os est replacé dans
le tombeau en 1642 par le prieur Jean de Baillehache, après la
restauration du chœur. En 1742, les moines obtiennent du roi Louis XV
l'autorisation non seulement de déplacer le tombeau dans le sanctuaire
mais aussi de le réduire à un simple caveau recouvert d'une pierre
tombale. Ce fémur gauche aurait été retrouvé lors de l'ouverture d'un
caveau maçonné se trouvant dans le chœur de l'abbatiale, le 22 août
1983. À Pâques 1563, les couvertures de plomb de l'église sont enlevées.
La tour-lanterne s'écroule en 1566 et entraîne la chute des voûtes du
chœur par la faute d'un sénéchal de l'abbaye Jean Laurent dit Le Goullu
qui fait couper des sommiers qui en tombant ébranlent la tour,
l'escalier s'écroule et entraîne avec lui les voûtes du chœur.
Le culte est interrompu dans l'abbatiale pendant 63 ans.
Le sauvetage
L'église
doit sa restauration dans le respect de l'existant au prieur claustral
Jean de Baillehache qui se bat toute sa vie pour rétablir l'église et la
discipline altérée par toutes ces années de troubles.
En
1600, il reste 14 religieux profès et deux novices. Le Parlement de
Rouen oblige le fermier de l'abbaye à fournir 1000 écus par an pour les
réparations de l'église. Le premier février 1601, il ordonne que le
rond-point du chœur et les chapelles en ruines soient démolies. Les
échevins de Caen veulent les pierres pour renforcer les fortifications
de la ville.
Jean
de Baillehache obtient le 8 mai 1601 un arrêt portant défense de
démolir le chœur, le rond-point et les chapelles et de reconstruire à
l'identique les deux piliers de la tour-lanterne. En 1603, le roi Henri
IV voit les ruines. En 1619, Jean de Baillehache fait saisir sur le
fermier général 12 000 livres pour l'achat de cloches, d'objets de
culte, chasubles et parements d'autels. Il présente une requête pour
faire travailler sans discontinuité aux réparations de l'église. Le
nombre de religieux passe à 27 dont cinq novices.
Le 17 mai 1626, l'église est à nouveau consacrée et rouverte au culte.
Le 17 mai 1626, l'église est à nouveau consacrée et rouverte au culte.
Mais
pendant toutes ses années, la discipline s'est relâchée et Jean de
Baillehache écrit au cardinal De La Rochefoucauld, archevêque de Rouen
pour qu'il fasse venir quelques moines de la Congrégation de Saint-Maur.
En 1663, les religieux mauristes s'installent dans l'abbaye est
reconstruisent les bâtiments conventuels dans le style classique.
L'église est aussi restaurée.
La Révolution
En 1777, avec l'abbé Arthur de Dillon, archevêque et Primat de Narbonne, les orages de la Révolution arrivent, il est le 45e abbé et sera le dernier.
Les ordres monastiques ont depuis longtemps perdu toute espèce de prestige.
L'influence
des idées philosophiques traversent toutes les couches de la société et
les privilèges ne sont plus compatibles avec les principes d'égalité
qui commencent à prévaloir.
L'église
Saint-Étienne qui est d'une magnificence incroyable dans ses
décorations avait cessé d'être le témoin d'extases de l'âme et
d'ardentes prières.
Elle assiste à sa propre décadence et se laisse emporter.
Le
17 mai 1790, l'Assemblée Nationale supprime les ordres monastiques et
ordonne la déclaration des revenus : plus de 300 000 livres dans 60
paroisses correspondant à un capital de plus de huit millions de livres.
Il reste le prieur, 18 religieux prêtres, un serviteur perpétuel, un commis menuisier.
Le 1er mai 1790, les bénédictins se retirent en déclarant leur attachement à leur Congrégation.
Dans
la grande église bâtie par Guillaume le Conquérant, le clergé exercera
avec plus d'autorité que jamais son influence dans le domaine religieux.
1063-1790
En 1790-1791, l'abbaye aux Hommes est affectée au département. Les tombes royales sont démolies en 1793, l'église Saint-Étienne est transformée en temple dédié au culte de la Raison et de l'Être suprême.
À la suite de l'entrée en vigueur en 1802 du Concordat de 1801, le culte catholique est rétabli dans l'ancienne abbatiale, mais cette dernière devient église paroissiale et les religieux ne font pas leur retour à l'abbaye.
L'ordonnance du 12 juillet 1791, qui réduit le nombre des paroisses caennaises de treize à sept, incorpore à la paroisse Saint-Étienne celle de Saint-Martin, de Saint-Nicolas, de Saint-Germain-la-Blanche-Herbe et de Saint-Ouen, les deux dernières conservant la qualité de succursale.
L’église Saint-Étienne-le-Vieux est désaffectée et l'ancienne abbatiale devient paroissiale.
En 1802, le préfet Dugua rétablit la tombe de Guillaume le Conquérant.
Architecture
L'impact de l'église Saint-Étienne sur l'histoire de l'art en Normandie et en Angleterre est essentiel.
Le plan échelonné se répand très vite des deux côtés de la Manche.
On trouve le système de coursière initié à l'abbaye de Bernay mais étendu à Saint-Étienne à tout l'édifice repris à l'abbaye de Cerisy et dans de très nombreuses églises anglo-normande, la cathédrale de Winchester, la cathédrale d'Ely et la cathédrale de Norwich par exemple.
La façade harmonique est adoptée très tôt en Angleterre, et notamment à la cathédrale de Canterbury vers 1070 et on peut y voir le rôle joué par Lanfranc dans les deux constructions.
Les recherches de voûtement de l'abbaye de Lessay et la cathédrale de Durham ont eu pour conséquence de couvrir un grand nombre d'églises couvertes de charpente et avec l'aide des piliers faibles et forts de couvrir de voûtes sexpartites sur croisée d'ogives la nef de Saint-Étienne. Encore lourdes, elles annonce les voûtements de la première architecture gothique.
Chronologie de la construction
Période romane
XIe siècle
L'abbaye est construite hors des murs de la ville où il n'existe aucun bâtiment sauf une chapelle.
Pendant
les quatre années de l'abbatiat de Lanfranc, de 1066 à 1070 avant
d'être nommé archevêque de Canterbury, il achète des terrains et des
carrières.
On
trouve trois dédicaces, en 1073, 1077 et 1081 qui pourraient
correspondre au chœur, à la croisée du transept et aux deux travées Est
de la nef, mais une construction par tranches horizontales, tout au
moins pour les deux derniers niveaux est plausible.
L'extrême
régularité et l'ampleur du parti architectural de l'église
Saint-Étienne suggère que Lanfranc a fait appeler l'un des meilleurs
architectes de son temps et voulu le caractère grandiose de l'édifice.
Mais il serait imprudent d'aller au-delà de ces considérations
d'ensemble : l'édifice marque l'aboutissement des recherches régionales
antérieures dont l'abbaye de Bernay et l'abbaye de Jumièges
Les
portions qui restent de l'église Saint-Étienne sont semblables en plan
et en arrangement aux portions correspondantes de la cathédrale de
Canterbury : même nombre de piliers, des tours à l'Ouest, des transepts
sans ailes, une tour centrale, un pilier portant une voûte à l'extrémité
de chaque croisillon du transept, les dimensions entre les murs sont de
73 pieds anglais à Saint-Étienne, 74 à Canterbury, la distance de la
tour centrale à la façade Ouest et la longueur du transept identiques,
187 et 127 pieds anglais.
Le plan primitif,
dont il reste au niveau du chœur peu de traces, avait deux bas-côtés
comportant deux travées terminées par une abside en arc de cercle à
l'intérieur et un chevet plat à l'extérieur. Ces bas-côtés ne
communiquaient pas avec le chœur par des arcades mais par un mur percé
d'une porte à la seconde travée. Des ressauts reliaient l'absidiole à
l'abside principale. Le sol était à un niveau inférieur de 52 cm par rapport au dallage actuel.
Il est probable que le chœur comportait deux travées et que sa largeur était la même que celui qui lui a succédé au XIIIe siècle, que son abside était épaulé par des contreforts plats.
L'église
Saint-Étienne appartenait à la série des plans dits bénédictins adopté
auparavant par l'abbaye de Bernay et l'église Sainte-Trinité de l'abbaye
aux Dames, mais avec le chevet à déambulatoire avec ou sans chapelles
rayonnantes qui prévalaient ailleurs. Elle devait probablement ce plan à
l'abbaye du Bec qui avait fourni ses premiers moines et le popularisa
en Normandie et en Angleterre.
Dans la nef, les voûtes reconstruites au XVIIIe siècle
reproduisent les voûtes primitives. Les bas-côtés étaient disposés pour
recevoir des voûtes d'arêtes comme celles des croisillons du transept.
Les piliers forts et faibles de la nef que l'on trouve aussi à la
collégiale Notre-Dame de l'abbaye de Jumièges étaient probablement
disposés pour recevoir des voûtes d'arêtes sur plan carré.
La
travée de façade, bien que paraissant avoir fait partie des
constructions primitives, a dû être construite après coup, mais semble
avoir fait partie du plan original, car les départs des tours existent
sur une hauteur d'environ 1,50 m
sur la tour Nord-Ouest et sur un étage pour accrocher les bâtiments
claustraux sur la tour Sud-Ouest. Cette travée a été bouchée au XVIIIe siècle pour la construction de l'orgue. Le corps carré des clochers est de construction romane.
XIIe siècle
Les premières années du XIIe siècle
sont marquées par un changement dans la technique de construction
visible par l'épaisseur des joints. Le chœur fut très probablement voûté
d'arêtes comme l'église Sainte-Trinité de l'abbaye-aux-Dames et
l'église Saint-Nicolas.
Dans
la nef, les piliers forts et faibles se concilient mal avec des voûtes
d'arêtes mais s'accordent très bien avec des voûtes sexpartites sur
croisée d'ogives. Ce projet change complètement l'aspect du triforium
dont il reste toutes les constructions antérieures dans la nef sauf une
colonne par travée.
Dans le transept, les colonnes qui portaient l'arcade du XIe siècle
sont noyées dans un mur relié à celui de l'extérieur à l'endroit de la
poussée des voûtes et les croisillons du transept sont voûtés en voûtes
d'arêtes à nervures. Dans la tour centrale, quatre colonnes sont
ajoutées pour porter la voûte de la lanterne. Dans la travée de l'orgue,
l'arc géminé est remplacé par un arc unique entouré d'une fresque
crénelée. La tourelle de l'escalier du croisillon Nord du transept porte
la portion octogonale du XIIe siècle sur la base carré primitive.
La période romane
L'élévation romane à trois niveaux
La nef romane, vue vers l'Est
La nef romane, vue vers l'Ouest
Période gothique
XIIIe siècle
À la fin du XIIe siècle,
l'église est entièrement terminée, les voûtes sont à peine achevées que
l'abside n'est déjà plus en rapport avec les changements qui se sont
introduits dans les dispositions du chœur des grandes églises.
L'autel
qui était près de la croisée du transept est reporté plus à l'est et un
déambulatoire construit autour du chœur donne accès à de nombreuses
chapelles.
Il
y a controverse sur la construction du chœur qui aurait eu lieu pendant
l'abbatiat de Simon de Trévières de 1316 à 1344, mais qui serait plutôt
du commencement du XIIIe siècle, voire de la fin du XIIe siècle si on prend en compte les caractéristiques architecturales.
XIVe siècle
La grande chapelle au bas de la nef sur le côté nord est fondée en 1315 par Philippe Halbout.
XVe et XVIe siècles
Peu de travaux, en partie à cause de la perte des revenus anglais de l'abbaye.
XVIIe siècle
Reconstruction
des voûtes et restauration par le prieur Jean de Baillehache des
destructions des guerres de religions et de la chute de la tour centrale
en 1566.
XVIIIe siècle
Les deux flèches de la façade sont foudroyées, celle du Nord est reconstruite en 1706 et à nouveau en 1806.
XIXe siècle
Travaux de restauration.
La période gothique
Le chœur gothique du XIIIe siècle
L'élévation à trois niveaux et le déambulatoire gothique
Le maître-autel
Architecture extérieure
La
haute façade ne comporte presque aucune décoration, si ce n'est de
minces voussures autour des portails et une croix sculptée.
La façade de l'abbatiale, qui frappe d'abord par son épure et sa rigueur, est le premier exemple d'une formule appelée à dominer la construction des plus grandes églises d'Occident : la « façade harmonique normande ».
Celle-ci consiste en deux tours occidentales d'élévation identique plantées sur la première travée des collatéraux, alignées sur la porte principale de la nef, de sorte à créer une façade rectiligne.
Les trois niveaux inférieurs de la façade forment un bloc carré, contribuant à l'aspect massif de l'ensemble.
Excepté quelques ornements géométriques aux voussures des trois portails et au pignon de la nef, la nudité de ce bloc est frappante : l'impression d'ensemble est soumise aux lignes architecturales, aux quatre contreforts massifs d'abord, qui accompagnent le regard du sol vers les tours ; aux dix grandes fenêtres ensuite, dont la base est prolongé par des cordons saillants.
Les tours se divisent en trois étages de hauteur égale dont la progression accentue l'élan du regard vers le ciel.
L'étage inférieur est aveugle et compte sept arcatures étroites sur chaque face.
Le second niveau est plus orné et moins dense : cinq arcatures dessinées par des demi colonnes jumelées.
Le troisième niveau, enfin, est plus aéré et largement décoré : deux grandes baies comportent chacune deux baies séparées par une colonne ; les écoinçons sont décorés et les archivoltes moulurées.
Deux flèches gothiques au XIIIe siècle (hauteur 80 et 82 mètres coiffent ces deux tours romanes.
Elles consistent en deux octogones effilés posés sur des bases carrées, garnis de huit clochetons eux-mêmes octogonaux pour la tour Nord (triangulaires pour la tour Sud).
Les tours symétriques sont de plus en plus richement décorées à mesure de leur élévation.
Le chevet est construit au XIIIe siècle par un certain maître Guillaume (GVILLELMVS) dont la pierre tombale portant une inscription en lettres gothiques se trouve sous le mur gouttereau.
Il est reconstruit au XVIIe siècle après l'effondrement, en 1566 de la flèche de la tour-lanterne.
Les quatre clochetons surmontés de flèches lui donnent cet aspect original que l'on retrouve à Coutances et Bayeux.
L'extérieur présente l'humble élévation suivante : le mur collatéral est rythmé par une succession de baies et de larges contreforts, l'étage supérieur, plus élaboré, propose une bande continue d'arcatures plaquées, deux étroites arcatures aveugles séparant les baies les unes des autres.
Le chevet, entièrement remanié à la période gothique, est coiffé par deux couples de clochetons qui, une fois de plus, participent à l'incroyable impression d'élan vertical, donné aussi de ce côté de l'église.
Les deux collatéraux se rejoignent au niveau de l'abside en un déambulatoire qui donne sur treize chapelles absidiales.
Dans les années 1720, le terrain à l'est de l'abbaye a été remblayé de 25 pieds afin d’aménager les jardins (actuelle esplanade Jean-Marie Louvel).
Le pied du chevet a donc été légèrement enterré.
L'extérieur de l'église Saint-Étienne
Façade occidentale
Chevet depuis l'esplanade
Vue depuis le cloître
Architecture intérieure
La nef est longue de 56 mètres, elle constitue un parfait exemple du style roman normand.
Chacune des huit travées, dont la première est occupée par l'orgue, comprend trois niveaux : celui des grandes arcades du rez-de-chaussée, celui des tribunes au premier étage, celui des fenêtres hautes (la claire-voie) au second étage.
Aux niveaux inférieur et intermédiaire, les arcades sont en plein cintre, à double rouleau (la voussure externe est moulurée) ; les fenêtres hautes offrent, pour deux travées, quatre arcatures décorées, symétriques deux à deux. L'unité élémentaire de cette élévation est de deux travées, subtilement délimitées par l'alternance des supports (pile faible constituée d'une simple demi colonne, recevant l'arc-doubleau de la voûte ; pile forte constituée d'une demi colonne reposant sur un dosseret, supportant un doubleau et deux ogives). L'étage des tribunes a pour but, par sa voûte en demi-berceau, de soutenir les murs de la nef. Au niveau des fenêtres, une galerie, la « coursière » permet de faire tout le tour de l'abbatiale.
À l'origine couverte d'une charpente en bois (plafond plat ou voûte en berceau comme dans la nef du Mont-Saint-Michel ?), la nef a reçu, à partir de 1115, des voûtes sexpartites, sur croisée d'ogives en plein cintre. Ces voûtes seraient, après celles de la cathédrale de Durham en Angleterre et l'abbaye de Lessay (Manche) édifiées autour de 1115-1120, les plus anciennes voûtes sur croisées d'ogives de France. La tribune nord est occupée par une horloge comportant l'inscription : « Dérigée par Fierville commis, exécutée par Gautier à Caen 1744 ».
Les bas-côtés sont voûtés d'ogives, les tribunes sont voûtées en demi-berceaux, la nef est voûtée d'ogives sexpartites, chaque groupe de deux travées ayant reçu une croisée d'ogives aux nervures moulurées retombant sur de courtes colonnettes raccordées aux dosserets des piles fortes.
Le transept comporte deux croisillons au fond desquels se trouvent une tribune et donnant sur une absidiole voûtée d'arêtes, la croisée supporte une tour-lanterne carrée à deux niveaux supportant une voûte sur croisée d'ogives, d'où courent des arcatures dessinées au premier étage par des colonnes cylindriques.
Un jubé séparait autrefois le chœur de la nef. Construit en 1724, il est détruit pendant la Révolution.
Le
chœur de l'église abbatiale Saint-Étienne de Caen est le premier
édifice construit après l'annexion de la Normandie au domaine royal
(1204) quoique certains historiens pensent qu'il pourrait avoir été
commencé en 1195, mais cette thèse est discutée. Il témoigne de
l'introduction timide du style gothique dans la région et des
résistances du style normand. La décoration de petites roses, trèfles et
quatre-feuilles est typiquement normande. Il y a treize chapelles
rayonnantes.
La technique normande du mur épais
Coupe
La coursière périphérique dans l'épaisseur du mur
La
technique normande du mur épais dont l'abbaye de Bernay semble porter
le prototype et dont l'influence de la cathédrale Saint-Bénigne de Dijon
est vraisemblablement à l'origine de cette première application
normande du principe de la coursière se retrouve plus tard dans le
transept de l'église Saint-Étienne de Caen et sera ensuite
systématiquement utilisé dans les constructions du monde anglo-normand.
Ce
système de renforcement du mur par d'énormes arcs ou des armatures
d'aspect plus ornemental, mais jouant un rôle certain de raidisseurs est
constant dans le domaine normand. Les arcatures qui, conformément à
l'ordre colossal, enserrent les deux niveaux du mur extérieur des
collatéraux à l'église Saint-Étienne de Caen, s'inscrivent dans la même
tendance et renforcent les départs des demi-berceaux intérieurs des
tribunes, bâtis dès le XIe siècle, lors de la première campagne de construction.
Cette
association d'un allègement visuel de la paroi avec un renforcement de
fait de la structure est une des réussites majeurs des constructeurs
normands. Elle favorisera le lancement de voûtes encore lourdes même si à
Bernay et à l'église Saint-Étienne de Caen, il n'y eut pas d'intention
de voûtement à l'origine. La conception même des murs est parfaitement
adaptée à un voûtement ultérieur
Les voûtes sexpartites
Les piliers forts et faible de la nef romane à l'origine des premières voûtes sexpartites sur croisée d'ogives
Le
chantier de l'église Saint-Étienne s'inscrit dans la continuité des
évolutions techniques apportées par les Normands Il y a peu de
controverse pour considérer que les premières voûtes d'ogives
parfaitement constituées sont celles du monde anglo-normand. La
cathédrale de Durham en Angleterre construite vers 1093 par l'évêque
Guillaume de Saint-Calais, conseiller des ducs de Normandie et rois
d'Angleterre Guillaume le Conquérant et Guillaume le Roux offre des
supports assez maladroitement conçus pour recevoir les nervures, mais la
complexité des moulures et la perfection des formes montrent qu'elle a
bénéficié d'essais antérieurs. Les étapes suivantes sont connues, vers
1110 les voûtes quadripartites sont lancées sur le chœur mais ont
disparu.
Les
voûtes d'ogives de l'abbaye Sainte-Trinité de Lessay, en Normandie,
dans le département de la Manche, que l'on peut dater avec certitude
d'avant 1098 par l'inhumation dans le chœur de l'abbatiale d'Eude au
Capel fils du fondateur et sénéchal de Guillaume le Conquérant, les
maladresses attestent des recherches un peu empiriques car c'est en
cours de construction que la volonté de voûter le transept est prise en
insérant très maladroitement la retombée des nervures. Les deux
chantiers ont dû s'inspirer de réalisations antérieures et sans doute
bien différentes.
À
l'église Saint-Étienne de Caen de l'abbaye aux Hommes, au cours d'un
remaniement vers 1115, l'architecte innove en lançant des voûtes
sexpartites sur la nef de l'édifice bâti au XIe siècle
avec l'alternance des supports que l'on trouve aussi à l'abbatiale
Notre-Dame de l'abbaye de Jumièges et qui ont facilité cette solution.
Ce type de voûte mène à la série des cathédrales à voûtes sexpartites du
premier art gothique et forme un jalon majeur dans l'histoire de
l'architecture.
L'évolution des voûtes dans le Monde anglo-normand
Abbaye de Lessay, croisillon sud du transept voûté d'ogives
Cathédrale de Durham, entièrement voûtée d'ogives
Abbaye aux Hommes de Caen, premières voûtes sexpartites
Dimensions
- Dimensions extérieures
Longueur totale de l'édifice : 111 m ; largeur de la façade avec tours : 28,30 m ; largeur de la façade sans les tours : 8,60 m ; largeur du transept : 42,10 m ; largeur de la nef : 26,70 m ; hauteur de la tour Nord : 82 m ; hauteur de la tour Sud : 80 m ; hauteur de la façade avec pignon : 27,30 m ; hauteur de la façade sans pignon : 24,50 m.
- Dimensions intérieures
Longueur total de l'édifice : 107 m ; longueur de la nef : 56 m ; longueur du chœur, avec le transept : 40 m ; largeur de la nef : 11,45 m ; largeur totale nef plus bas-côtés : 22,35 m ; largeur total du transept : 38 m; largeur d'un bas-côté : 5,45 m ; largeur du chœur : 11,25 m ; largeur du déambulatoire : 5,60 m.
Profondeur
d'une chapelle de la partie droite du chœur: 4,80 m, longueur de la
chapelle du Saint-Sacrement: 16,70 m, largeur de la chapelle du
Saint-Sacrement: 6,70 m, longueur de la chapelle Halbout: 16 m, largeur
de la chapelle Halbout: 9 m, hauteur de la nef sous voûte: 20,80 m,
hauteur de la tour-lanterne sous voûte: 31,20 m, épaisseur du mur de la
façade: 2,16 m, épaisseur du mur de la nef: 1,65 m, largeur des arcades
du rez-de-chaussée: 3,60 m, largeur des arcades de la tribune: 4 m
Sculpture
Le décor est très limité. Les chapiteaux ont été restaurés aux XVIIe et XVIIIe siècles
mais l'analyse des détails est très intéressante car elle prouve, par
les dimensions et les proportions des blocs, par la présence de
chapiteaux à bustes, que les sculpteurs de la cathédrale de Bayeux se
sont transportés sur le chantier de l'église Saint-Étienne de Caen vers
1070. Les chapiteaux à feuilles dérivés du corinthien sont omniprésents
dans la première campagne.
Les œuvres du XIIe siècle
avec des corbeilles à entrelacs sont marqués par de probables apports
italiens dans les vanneries très régulières et d'exemples
anglo-scandinaves par les petits dragons terminant des entrelacs
filiformes et désorganisés, des dragons serpentins perlés et d'autres
thèmes variés comme un avare pendu par sa bourse.
Si
on compare ces sculptures avec d'autres ensembles, on peut avancer une
date relativement précoce, vers 1115-1120, ce qui permet aussi de
déterminer la date de construction des voûtes sur croisée d'ogives.
Serpent
Engoulant
Engoulant
Cheval-lion et autres animaux fantastiques
Une oie
Tombeau de Guillaume le Conquérant
Tombe de Guillaume le Conquérant dans le chœur
Le
tombeau de Guillaume le Conquérant (mort le 9 septembre 1087) était
placé au milieu du chœur (peut-être sous la tour-lanterne).
Son fils, Guillaume le Roux, fait construire un monument en marbre, surmonté d'un gisant.
Ce monument est détruit en 1562 par les huguenots.
En 1742, le tombeau est réduit à un simple caveau recouvert d'une pierre tombale situé dans le sanctuaire.
À
la Révolution, la pierre tombale du duc Guillaume est à nouveau
détruite.
Elle est remplacée en 1802 par la pierre tombale visible actuellement.
Elle est remplacée en 1802 par la pierre tombale visible actuellement.
Elle porte, en latin, l'inscription suivante :HIC
SEPULTUS EST • INVICTISSIMUS • GUILLELMUS • CONQUESTOR • NORMANNIÆ DUX •
ET ANGLIÆ REX • HUJUSCE DOMUS • CONDITOR • QUI OBIIT ANNO • MLXXXVII
qui peut être traduit par :
« Ici
repose l'invincible Guillaume le Conquérant, duc de Normandie et roi
d'Angleterre, fondateur de cette maison, qui mourut l'année 1087 ».
Orgue
L'orgue de tribune
Le
buffet de l'orgue de tribune construit par les frères Lefebvre date de
1741 ; il repose sur deux cariatides du sculpteur rouennais Gouy. Ce
buffet fait l’objet d’un classement au titre objet des monuments
historiques par la liste de 1840.
L'orgue de soixante jeux d'origine a été remplacé en 1885 par un orgue
de cinquante jeux conçu en 1882 par Cavaillé-Coll inauguré en 1885. La
partie instrumentale fait l’objet d’une inscription au titre objet des
monuments historiques depuis le 15 janvier 1975.
Sa composition est la suivante :
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Titulaires de l'orgue
- Albert Peschard - seconde moitié du XIXe siècle, Docteur en droit, savant, inventeur, avec Charles Spackmann Barker, du système électro-pneumatique de traction adapté à l'orgue appelé Machine Barker)
- ? - 1901 : Achille Dupont (Père de Gabriel Dupont)
- ca 1901 - ca 1920 : Jules Marie
- ca 1920 - 1950 : Léon Guillaume (précédemment Titulaire du G.O. de Saint-Pierre de Caen ca 1915 ca 1920)
- 1950- ca 1963 : Jules Friley (compositeur, précédemment Titulaire du G.O. de Saint-Pierre de Caen ca 1920 à 1944). 1er Professeur d'orgue au Conservatoire de Caen, lors de la création de la classe d'orgue.
- ca 1963-1990 : Cécile Sagot-Mauger (précédemment Titulaire à Trouville puis à Caen, notamment de l'orgue de chœur de Saint-Étienne)
- 1990 - : Alain Bouvet
- Cotitulaire : Alain Mabit
- Cotitulaire : Erwan Le Prado
Enregistrements
Parmi
les enregistrements effectués sur l'orgue de l'église Saint-Étienne de
Caen, figure l'une des dix symphonies de Charles-Marie Widor,
enregistrée par Pierre Pincemaille (Solstice SOCD 181-185).
Mobilier
L'horloge dans le transept et la tour-lanterne
L’église abrite un important mobilier liturgique dont une partie est protégée aux titres des monuments historiques :
- un lutrin ;
- deux crédences ;
- un chandelier pascal ;
- le tambour de porte du grand portail ;
- la grande horloge de la tribune du transept ;
- les stalles du chœur ;
- la clôture de la sacristie ;
- la chaire à prêcher ;
- le maître-autel du chœur ;
- les chandeliers sur le maître-autel.
L'influence sur le monde anglo-normand
Transept normand avec coursive de la cathédrale de Winchester
Chapelle Saint-Jean de Londres dans la Tour de Londres, premiers chapiteaux à godrons vers 1080
De
nombreux évêques et abbés sortis de Saint-Étienne participe à la
réorganisation de l'Église d'Angleterre et apportent les savoirs
développés à Saint-Étienne par Lanfranc pour le duc-roi et qui doivent
servir de références. Le choix de ce lieu par Guillaume le Conquérant
pour en faire sa sépulture est un symbole fort de cette volonté.
Ils
ont remplacé après la conquête les églises généralement petites et
souvent construites en bois des anglo-saxons par de vastes édifices en
pierre pour marquer la supériorité et le caractère permanent de la
présence normande auprès de la population.
À
la suite de Lanfranc qui après avoir commencé la construction de
Saint-Étienne réédifie la cathédrale de Canterbury et engage Gondulphe
pour reconstruire la cathédrale de Rochester, Walchelinus nommé évêque
en 1070 commence la construction de la cathédrale de Winchester.
L'église et les bâtiments adjacent de la cathédrale Saint-Alban de St
Albans sont rebâtis avec l'aide de Lanfranc par Paul, abbé en 1077.
Gundulphe
évêque de Rochester en 1077 comme Ernulphe avait accompagné Lanfranc
depuis l'abbaye du Bec et dirigea peut-être la construction de
Saint-Étienne, construit le donjon de West Malling existant sous le nom
de Tour Saint-Léonard et qui est regardé comme le plus ancien donjon
anglo-normand. Il reconstruit la cathédrale de Malling sous les conseils
de Saint Anselme et édifie plusieurs églises dont Darenton et Dartford
et la Tour de Londres.
Ernuphe
prieur de Canterbury en 1093 détruit le chevet construit par Lanfranc
pour le remplacer par un édifice plus riche. Abbé de la cathédrale de
Peterborough en 1127, il reconstruit les bâtiments conventuels. évêque
de Rochester en 1114, il refait le dortoir, la chapelle et le
réfectoire.
Radulphe
de Vaucelles prieur de Saint-Étienne, est abbé de l'abbaye Saint-Martin
de Séez en 1088, évêque de Rochester en 1108 et archevêque de
Canterbury en 1115.
Turtin
est abbé de l'abbaye de Glastonbury en 1081, Roger, chapelain de
Guillaume, prieur de Saint-Étienne construit comme abbé de l'abbaye du
Mont-Saint-Michel la voûte qui s'écroule peu après, puis devient abbé de
Cerne (Cerve). Henri est prieur de Canterbury, Guillaume de Corbeil,
prieur de Saint-Étienne, archevêque de Canterbury en 1130 et continu les
travaux de la cathédrale, la consacre, ainsi que celle de Rochester en
1130. Il construit le donjon de Rochester.
Radulphe,
prieur de Rochester en 1107 couvre de plomb la cathédrale, complète le
mur d'enceinte et élève de nouveaux bâtiments. Il devient prieur de
Canterbury et abbé de Senlac sur le site de la bataille d'Hastings.
Herluin, abbé de Canterbury en 1090 reconstruit l'église de l'abbaye.
Guillaume
du Hommet, le dernier religieux de Saint-Étienne élevé a une haute
dignité, prieur de Frompton, abbé de la cathédrale de Westminster en
1214 parait avoir fait partie du plan du chœur. Il assiste en 1215 au
Quatrième concile du Latran puis est envoyé à la Cour de France.
L'influence
des constructions normandes et en particulier de Saint-Étienne est
généralement admise. À ce développement, un contre-courant d'Angleterre
vers la Normandie parait lui avoir succédé en particulier pour les
chapiteaux cubiques juxtaposés présents à la cathédrale de Durham qui
deviendront des chapiteaux à godrons36 comme à l'abbaye Sainte-Trinité de Lessay.
Outre
l'influence que Saint-Étienne a par ces religieux, il est évident aussi
qu'elle en a exercé une plus grande sur les évêques et abbés qui sans
être d'anciens religieux de Saint-Étienne, durent souvent prendre pour
modèle l'œuvre du duc-roi en particulier à l'abbaye de Fécamp, l'abbaye
Saint-Ouen de Rouen, à l'abbaye Sainte-Trinité de Lessay, l'abbaye
Saint-Étienne de Fontenay, l'abbaye de lonlay, l'abbaye de
Saint-Pierre-sur-Dives et l'abbaye de Savigny.
Influence sur l'art gothique normand
L'église
Saint-Étienne de Caen est la construction originelle du gothique
normand: toute la réflexion architecturale ultérieure en Basse-Normandie
et pour une bonne part en Haute-Normandie en découle.
On
découvre d'évidents échos du chevet de l'église Saint-Étienne de Caen à
l'abside de la cathédrale de Coutances comme dans le chœur de la
cathédrale de Bayeux.
Les bâtiments monastiques
Le cloître et les bâtiments Mauristes au Sud de l'église Saint-Étienne
Quand
les Mauristes ont repris l'abbaye, ils ont reconstruit les bâtiments
dans le même style classique et le même fonctionnement que l'on retrouve
dans toutes leurs réalisations en respectant les contraintes de
conception de la Règle de Saint-Benoît qui impose la clôture monastique
autour d'un cloître desservant le chœur eucharistique de l'église avec
un accès facile aux dortoirs pour les offices de nuit, une vision
directe depuis le cloître de la salle capitulaire pour que personne
n'ignore une assemblée de la communauté, les lieux de vie: le réfectoire
et le chauffoir, les lieux l'étude, le scriptorium. La zone ouverte sur
l'extérieur comprend les fonctions d'accueil et de gestion de l'abbaye.
Les
liaisons avec l'église se font comme dans la plupart des monastères par
le croisillon sud du transept avec l'escalier menant du dortoirs au
chœur des moines pour les offices de nuit, la sacristie en liaison avec
les autels puis la salle capitulaire donnant sur le cloître dont la
façade Nord est limitée par l'église et la façade Sud comme pratiquement
dans tous les monastères par le réfectoire. L'harmonie visuelle entre
les deux groupes de bâtiments d'époques différentes est assurée par la
belle pierre de Caen et la recherche de la simplicité et de l'efficacité
de la Congrégation de Saint-Maur.
Après
la Révolution, leurs solides constructions qui n'ont pas finies en
carrières de pierre comme à l'abbaye Saint-Georges de Boscherville ou
l'abbaye de Jumièges ont souvent été reconvertis en bâtiments
industriels comme à l'abbaye d'Aunay ou l'abbaye Saint-Martin de Séez
par François Richard-Lenoir et pour les abbayes urbaines en bâtiments
publics comme à Caen, où ils accueillent un lycée puis Hôtel de Ville.
Le
cloître, centre de la vie des moines avec au Nord l'église
Saint-Étienne, le sanctuaire lieu de l'office divin, les reliques, le
chœur des moines et dans la partie Ouest de l'église l'accueil des
visiteurs et des pèlerins, à l'Est la sacristie, la salle capitulaire
lieu de rencontre et de décision des religieux et au-dessus les dortoirs
et le scriptorium, au Sud, l'escalier d'honneur, le réfectoire, à
l'Ouest: le parloir, l'escalier Ouest et au-dessus les dortoirs et
autres lieux de vie de la clôture monastique
Article détaillé : Abbaye aux Hommes.
Liste des abbés
Article détaillé : Liste des abbés de Saint-Étienne de Caen.
Sigillographie
Les
sceaux des abbés et des prieurs sont de formes ogivales souvent de 60
mm de hauteur pour les abbés et de 40 mm pour les prieurs. Ceux des
abbés montrent l'abbé bénissant avec la mitre et la crosse, les abbés
commendataires apportent leurs armoiries et ont parfois de petits
cachets ronds de 30-35 mm.
Les
sceaux qui symbolisent l'assemblée des moines et la sénéchaussée sont
de formes rondes, de 40 à 50 mm de diamètre et représentent saint
Étienne martyr.
Les abbés
- Nicolas, abbé, 1289, ogival 35 mm, Abbé debout de trois quarts à gauche, tenant une crosse et un livre; dans le champ de dextre, un soleil, une quintefeuille, un oiseau et une fleur de lys; à senestre, une étoile, un croissant, une quintefeuille, un oiseau et une fleur de lys, SIGILLUM NICHOLAI DE MONTINEO ABBATIS SANCTI STEPHANI DE CAMODO, Contre-sceau: pierre gravée, un ange tenant une couronne et une palme, ECCE MITTEANGELUM MEUM (8574 Douet d'Arcq)
- Guillaume, abbé, 1374, ogival 62 mm, Dans une niche gothique, l'abbé debout, vu de face, mitré, crossé et bénissant; à dextre, l'écu de France, à senestre, celui d'Angleterre. SIGILLUM GUILLEMI ABBATIS STEPHANI DE CAMODO (8575 Douet d'Arcq)
- Robert, abbé, 1379, ogival 60 mm, Dans une niche gothique, l'abbé debout, vu de face, mitré, crossé et bénissant; à dextre, l'écu de France, à senestre, celui d'Angleterre. SIGILLUM FRATRI ROBERTI ABBATIS MONASTERII SANCTI STHEPHANI DE CADOMO4 (8576 Douet d'Arcq)
- abbé XIVe siècle , ogival, 60 mm, Dans une niche gothique, l'abbé debout, mitré, crossé, bénissant, accosté de deux écus, l'un semé de France, l'autre aux trois léopards d'Angleterre, SIGILLUM .....SANCTI STEPHANI DE CAMODO (Demay 2762)
Les abbés commendataires
- Pierre de Martigny, abbé, ogival 75 mm, divisé en deux par une colonne soutenant une voûte; à gauche: la Sainte Vierge et l'enfant Jésus; à droite: l'abbé à genoux et présenté par un moine tenant en sa main une coupe. Au-dessous, dans une arcade trilobée, les armes du prélat avec la crosse SIGILLUM PRT DEI GRACIA CASTREU EPISCOPI ET ABBATIS STI STEPHANI CADUM ( De Farcy)
- Alphonse-Louis Du Plessis (Richelieu), abbé, 1640, ogival 49 mm, écu portant trois chevrons, couronné, timbré d'une croix sous un chapeau archiépiscopal. (Demay 2763)
- Charles Maurice Le Tellier, abbé, 1673, ovale 39 mm, écu portant trois lézards sous un chef chargé de trois étoiles, couronné, timbré d'une croix à double traverse, sous un chapeau archiépiscopal, devant un manteau d'hermine (Demay 2765)
Les prieurs
- prieur, 1290, ogival 40 mm, Dans une niche gothique, la Vierge assise avec l'enfant Jésus, au-dessous, un priant, SIGILLUM PRIORI SANCTI STEPHANI DE CAMONO (Douet d'Arcq 9295)
Le chapitre
- chapitre, 1282, diamètre 50 mm, contre-sceau: pierre gravée, deux guerriers debout CUSTOS SIGILLI (Douet d'Arcq 8168)
- chapitre, 1379, diamètre 45 mm, la lapidation de saint Étienne dans un monument gothique SIGILLUM CONVENTUS MONASTERII SANCTI STEPHANI DE CADOMO (Douet d'Arcq 8169)
- chapitre, 1425, diamètre 46 mm, Dans une niche gothique, saint Étienne, à demi renversé entre deux bourreaux qui le lapident, en haut, la main céleste brandissant SIGILLUM CONVENTUS (Demay 2667)
Le sénéchal
- sénéchal, 1409, diamètre 40 mm, Dans une niche gothique, saint Étienne, tenant un livre, ayant deux pierres posées sur la tête et une sur l'épaule, à ses pieds, à gauche, l'abbé mitré, crossé, priant (Demay 2943)
Source :
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