Rome
La basilique Saint Clément du Latran
Clocher (XVIIe siècle) et façade (XVIIIe siècle)
La Basilique Saint-Clément-du-Latran (en italien : Basilica di San Clemente al Laterano) est une basilique religieuse catholique, située à Rome en Italie et dédiée à Clément Ier.
Sur
le site, se trouve un complexe de bâtiments sur plusieurs niveaux, dont
trois sont dégagés : le niveau archéologique inférieur date de l'empire
romain, avec un mithraeum, dédié à Mithra et un autre bâtiment.
Au-dessus, une église du Ve siècle,
détruite par les Normands. L'église actuelle est construite par-dessus
cette dernière, peu avant l'an 1100 au cours du Haut Moyen Âge.
Histoire
Le titulus Clementis et la basilique de Saint-Clément
Article détaillé : Tituli chrétiens à Rome.
La désignation titulus Clementis (littéralement propriété de Clément)
apparait pour la première fois dans les actes de l'évêque de Rome
Sirice (384-398) et désigne le lieu de culte correspondant à la future
basilique de Saint Clément. Le titulus Clementis fait alors partie des 25 tituli, églises existant à l'intérieur de Rome, identifiées lors des conciles romains de 499 et 595.
La
basilique antique est le lieu de conciles présidés par les papes
Zosimus (417) et Symmaque (499). En 533, Mercurius, prêtre du titulus Clementis est élu pape, et prend le nom de Jean II (533-535).
Le
dernier événement majeur ayant lieu dans la basilique inférieure est
l'élection en tant que pape du cardinal de Saint-Clément, Rainerius,
sous le nom de Pascal II, en 1099.
En
1084, Rome est mise à sac par les troupes du normand Robert Guiscard.
L'ancienne basilique est endommagée et menace ruine. Anastase, cardinal
titulaire de Saint-Clément, décide en 1100 de la reconstruire. Après
récupération des éléments de décor en marbre, les anciennes nefs sont
comblées de remblais et une nouvelle basilique est reconstruite
par-dessus les vestiges. Ensevelie, l'ancienne basilique tombe dans
l'oubli pour sept siècles, jusqu'aux fouilles menées par le père Joseph
Mullooly (en).
La tradition qui veut qu'une communauté de Bénédictins ait desservi Saint-Clément à partir du VIe siècle
se fonde sur une lecture erronée des Dialogues de Grégoire le Grand
(590-604). Ce n'est qu'en 1403 que le pape Boniface IX confie
Saint-Clément à la Congrégation Augustinienne de Saint Ambroise de
Milan, dite plus simplement des moines ambrosiens. Après la dissolution
de cette congrégation en 1643, Saint-Clément est confié aux Dominicains
de Saint Sixte, puis cédé en 1667 en propriété perpétuelle à l'Ordre
dominicain. En 1677, Saint-Clément est donné aux Dominicains d'Irlande,
lorsque l'Angleterre proscrit l'Église catholique irlandaise et expulse
l'ensemble des membres du clergé. Le pape Urbain VIII leur donne refuge à
Saint-Clément, où ils s'installent, gérant une résidence pour l'étude
et l'enseignement des prêtres à Rome. La basilique est depuis cette date
gérée par des Dominicains irlandais.
À partir de 1857, le père Joseph Mullooly (en)
dégage le bas-côté nord de l'ancienne basilique, jusqu'au mur ouest. De
là, en contournant les fondations de l'abside, il atteint l'ancienne
nef sud en 1861, puis réussit à déblayer entre 1862 et 1870 toute la
partie centrale de la basilique souterraine et, à un niveau inférieur
d'époque romaine, une partie du bâtiment contenant un mithraeum.
L'annexion des États pontificaux par Victor-Emmanuel II en 1870 et
l'inondation permanente du niveau romain interrompirent ces fouilles,
qui ne purent reprendre qu'après le creusement par le père Louis Nolan
d'un tunnel de drainage entre 1912 et 1914. Vingt-cinq ans plus tard, le
père Pius O'Daly dégagea une partie des pièces du bâtiment romain situé
sous l'ancienne basilique. Enfin en 1945, le père Raymond Dowdall
reprit les dégagements le long de la nef nord de la basilique
inférieure.
Article détaillé : mithraeum de San Clemente.
Traditions hagiographiques
Selon
la vision traditionnelle de l'histoire des débuts du christianisme à
Rome, les premiers chrétiens célébraient le culte dans des maisons
privées, appelées « églises domestiques » par les spécialistes. Ces
anciens lieux de culte auraient évolué au fil des siècles, d'églises
domestiques dans une maison privée, en église, puis en basilique,
reflétant l'émergence officielle de l'Église à partir du IVe siècle, tandis que le nom des propriétaires se serait conservé depuis le Ier siècle dans celui des tituli.
Selon cette vision, le titulus Clementis était une maison appartenant à un certain Clément, chrétien du Ier siècle
et martyr. Certains érudits attribuèrent cette maison au consul romain
Titus Flavius Clemens, cousin de l'empereur Domitien et exécuté en 95
pour « impiété, athéisme et mœurs juives ». Par ailleurs, Jérôme de
Stridon mentionne en 392 dans sa Vie de Clément, troisième ou
quatrième évêque de Rome, l'existence d'une église construite à Rome qui
porte encore son nom. On a aussi suggéré que cet évêque de Rome aurait
été un esclave de la maison de Flavius Clément. Sa vie et sa mort sont
inconnues, on ignore même s'il fut martyr, mais une tradition tardive et
apocryphe rapporte qu'il fut exilé en Tauride, et noyé dans le
Pont-Euxin. Ses reliques présumées ont été ramenées de Tauride à Rome
par saints Cyrille et Méthode en 867, et enterrées dans la basilique
Saint-Clément.
Interprétations du titulus Clementis
Les
découvertes archéologiques du niveau antique ayant été menées par des
Dominicains, leur interprétation refléta la vision hagiographique en
vigueur, ils identifièrent donc le bâtiment du Ier siècle sous la basilique ancienne comme le titulus Clementis, l’habitation particulière d’un chrétien du Ier siècle nommé Clément. Mgr Edouard
Junyent qui publie cette thèse en 1932 réfute toutefois l'attribution
de cette possession à l'évêque de Rome Clément Ier, dont le culte ne fut
associé à Saint-Clément que plus tard, et se refuse faute d'éléments
probants à l'attribuer à Flavius Clemens.
Plus récemment, Charles Pietri a réfuté ces raisonnements qui rajeunissaient les tituli pour les dater du Ier siècle et correspondre ainsi à la théorie, montrant la fragilité de leurs présupposés. La notion de titulus à caractère chrétien n'apparait pas avant le IVe siècle,
probablement lors des restitutions de propriétés confisquées lors des
dernières persécutions, et les fouilles ont démontré que ces tutili/églises
s'établissaient en superposition d'édifices antérieurs aux fonctions
les plus diverses, et rarement des habitations. Dans le cas de
Saint-Clément, le titulus Clementis et la basilique furent édifiés par-dessus un bâtiment industriel constitué d'une série d'ateliers, désaffectés à la fin du IIIe siècle.
La première basilique
Les fouilles réalisées par le père Joseph Mullooly à partir de 1857 révèlent la première basilique oubliée sous la basilique du XIIe siècle. Un escalier construit en 1866 permet d'y descendre.
Les
écrits de saint Jérôme en 392 témoignent d'une église dédiée à saint
Clément. Après que le christianisme est devenu religion d'état à Rome en
390, la petite église est agrandie par l'acquisition de l'insula
adjacente et d'autres immeubles voisins. Les architectes travaillent sur
un complexe de salles et de cours, construisant une nef centrale sur le
site de l'église primitive et une abside débordant sur l'ancien
mithraeum. La nouvelle église est consacrée à Clément Ier, troisième ou quatrième évêque de Rome.
Des
restaurations sont entreprises après le tremblement de terre de 847 et
vers 1080-1099. L'une des plus grandes collections de peintures murales
du Moyen Âge précoce, après celles de l'église Sainte-Marie-Antique, se
trouve dans la basilique basse de Saint-Clément. Vers la fin du Xie siècle,
la famille de Rapiza offre deux fresques qui décorent le narthex. L'une
représente la survie miraculeuse d'un enfant surpris par la marée dans
la mer d'Azov, où selon la tradition fut noyé Saint Clément ; la famille
du donateur est figurée en dessous. La deuxième fresque illustre le
transfert à Saint Clément des reliques recueillies par Cyrille et
Méthode. Parmi les fresques de la nef centrale, une raconte la légende
d'Alexis de Rome, une autre, la plus connue, montre Saint Clément disant
la messe, et illustre l'épisode l'opposant aux serviteurs du noble
Sisinus dont il avait convertit l'épouse. Sisinus et ses serviteurs qui
tentent d'expulser Clément s'interpellent en italien médiéval, ce qui
constitue un des témoignages les plus anciens du passage entre le latin
et l'italien.
Au
cours des siècles suivants, Saint-Clément devient une vitrine pour les
sculpteurs et les artistes d'église profitant des largesses impériales.
Fresques de la basilique inférieure (sélection)
Vie d'Alexis de Rome (XIe siècle)
Saints Cyrille et Méthode amènent les reliques de saint Clément à Rome (XIe siècle)
Saint Clément célébrant la messe, en dessous les serviteurs de Sisinus tentent de l'expulser (IXe siècle)
La deuxième basilique
Plan de la seconde basilique
Intérieur de la Basilique Saint-Clément-du-Latran. Au fond, le chœur et le ciborium
La
basilique actuelle est reconstruite par le cardinal Anastase, vers
1099-1120, après que la première église brûle au cours du sac de la
ville par les Normands de Robert Guiscard en 1084. Aujourd'hui, c'est
l'une des églises les plus richement ornées de Rome.
Son
entrée d'origine (une entrée latérale est utilisée aujourd'hui) donne
sur une cour entourée d'un péristyle (B sur le plan), formant l'unique
atrium médiéval qui subsiste encore à Rome. Il sert aujourd'hui de
cloître entouré des bâtiments conventuels. Au fond, se trouve la sobre
façade de Stefano Carlo Fontana supportée par des colonnes antiques et
le petit campanile.
La
basilique a trois nefs divisées par des arcades sur des colonnes
antiques de granit ou de marbre, avec un pavage aux incrustations
cosmatesques. La schola cantorum du XIIe siècle
(F sur le plan) est délimitée par des panneaux en marbre blanc
récupérés de la basilique d'origine. Ils datent du Jean II (533-535),
dont ils portent le monogramme. Derrière elle, dans le chœur, un
ciborium (H sur le plan) composé de quatre colonnes gris-violet indique
l'emplacement du reliquaire de Clément et d'Ignace d'Antioche situé dans
la crypte. Le siège épiscopal se trouve dans l'abside, qui est couverte
de mosaïques sur le thème du Triomphe de la Croix, thème fort des mosaïques romaines du XIIe siècle.
On
aperçoit entre autres sur cette mosaïque les quatre évangélistes qui
entourent le Christ, de gauche à droite, Marc, Mathieu, Jean et Luc
(respectivement représentés par le lion, l'ange, l'aigle et le taureau).
Juste en dessous sont représentés saint Pierre et saint Paul
(identifiés par « agios pavlus » et « agios petrus »).
Dans la partie basse de la mosaïque, les moutons représentent les
apôtres et le Christ au centre (mouton auréolé), de part et d'autre les
villes de Bethléem et de Jérusalem.
Sur
un mur de la cour se trouve une plaque apposée par le pape Clément XI
faisant l'éloge de saint Clément: « Cette ancienne église a résisté aux
ravages des siècles ». Clément entreprend des restaurations sur la
vénérable structure, qu'il trouve en mauvais état. Il choisit Stefano
Carlo Fontana, neveu de l'architecte Carlo Fontana, qui érige une
nouvelle façade, terminée en 1719. Le plafond sculpté et à caissons doré
de la nef et des bas-côtés date de ce moment, tout comme le décor en
stuc, les chapiteaux ioniques et les fresques.
Dans
une chapelle latérale, il y a un sanctuaire avec le tombeau de saint
Cyrille qui a créé l'alphabet glagolitique et christianisé les Slaves.
Le pape Jean-Paul II y venait parfois pour prier pour la Pologne et les
pays slaves. La chapelle est conserve également une Madone de Giovanni Battista Salvi da Sassoferrato.
Porte d'entrée latérale
Nef
Pavement cosmatesque
Abside avec sa mosaïque du XIIe siècle
Mur latéral
Chapelle à la Vierge, à gauche de l'autel principal
Tombeaux et reliques
- Tombeau de Saint Clément de Rome
- Tombeau de Saint Ignace d'Antioche
- Reliques des Saints Cyrille et Méthode
Source :
Carte postale de Rome, basilique inférieure de Saint Clément
mosaïque de Saint Cyrille
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