Vénérable Marguerite du Saint Sacrement
Une « Fondatrice » de six mois
Le 7 février 1619, à Beaune, Jeanne Bataille, épouse de Pierre Parigot, donne naissance à son 5eenfant. Elle en aura encore deux.
Ce couple profondément chrétien vit confortablement des revenus de la terre et de la vigne.
La petite Marguerite est baptisée le jour même .
Six
mois plus tard, un événement d'importance se produit : des religieuses
du Carmel de Dijon fondé en 1605, après bien des démarches et des
difficultés, ouvrent un Carmel à Beaune.
Le
Chanopine qui cède au Carmel le Prieuré Saint Etienne n'est autre que
le grand-oncle de Marguerite. Aussi pose-t-il une condition à cette
cession : que sa nièce soit reçue au Monastère, quand elle en aura l'âge
en qualité de fondatrice !
Comme les mariages, qui étaient arrangés, ainsi sont préparées les vocations.
Marguerite
pourrait se révolter d'avoir été ainsi destinée au Cloître ! Et
pourtant, l'Esprit Saint va fondre sur cette âme d'enfant et la conduire
précocement à une étonnate maturité spirituelle.
A 5 ans, le Saint Sacrement l'attire comme un aimant et elle fait à Dieu, dans le secret de son cœur, l'offrande d'elle-même.
Parfois,
le froid la saisit au point qu'elle pense s'évanouir dans l'église,
mais l'Esprit-Saint la revêt d'une douce chameur et elle peut continuer
sa prière.
Précoce
aussi, et surnaturelle, est son attirance vibrante de tendresse pour
les pauvres, si nombreux en ces temps de guerres et d'épidémies.
Elle accompagne sa mère dans ses visites aux malades et vainc ses répugnances en changeant les pansements souillés.
Le
dépouillement de Jésus qu'elle aime contempler dans la Crèche fait
naître en elle le dégoût de la richesse, des vêtements recherchés, des
mets délicats.
« Ne pas montrer nos souffrances »
Tout
semble sourire à la petite Marguerite : menue, un visage fin, un
caractère doux et aimable, un sourire délicieux, elle charme tous ceux
qui la connaissent.
Mais elle souffre d'accès de mélancolie, de tristesse, elle voit des monstres, entend des cris.
Ses crises de convulsions font pleurer d'inquiétude sa mère, qui à chaque fois, l'emporte devant le Saint Sacrement.
De ce déséquilibre nerveux, Marguerite ne guérira jamais complètement.
Au milieu des pires souffrances morales et physiques, Marguerite garde la paix et la sérénité.
Elle résiste aux tentations et aux assauts du désespoir, son secours est la prière, de jour comme de nuit.
Elle écrit à l'âge de 10 ans cette réflexion étonnante qui explique son égalité d'humeur : « Quand
le Bon Dieu nous envoie des souffrances, nous devons nous efforcer de
les cacher en nous et de ne pas les montrer aux autres qui ne sont pas
chargés de les porter. »
La mort de Madame Parigot vient mettre un terme brutal à l'enfance de Marguerite.
Sur son lit de mort, sa mère la console et lui promet qu'elle sera Carmélite.
Marguerite
anéantie, court à l'église Notre-Dame. Prosternée devant la statue de
la Vierge, elle la supplie de lui tenir lieu de mère et comprend dans
son cœur qu'elle est exaucée.
« Enfermée » dans l'Enfance de Jésus
Le soir même des obsèques, Marguerite, dans sa robe de deuil, est conduite au Carmel par son père.
Malgré
son chagrin, elle est aussitôt inondée de joie. Elle est accueillie par
Mère Elisabeth de la Trinité, Prieure et mère Marie de la Trinité,
Maîtresse des Novices.
Deux
heures durant, la pensionnaire de 11ans et demi va entretenir les
saintes femmes de commentaires enfflamés sur le Saint Sacrement.
Dès le lendemain, elle est admise à faire sa première Communion et entend Jésus l'appeler : « Ma petite épouse. »
Cette fillette, dont la sagesse et le sérieux coupaient des autres enfants, s'adapte très rapidement à la vie de la communauté.
Elle
découvre la dévotion à l'Enfant-Jésus, prospère au Carmel depuis Sainte
Thérèse d'Avila et prônée par l'Ecole Française, alors en plein essor.
Marguerite fait sien, sans peine, le vocabulaire bérullien : « L'Enfant Jésus m'a enfermée dans les douze années de Son Enfance. »
Mais une fois tombée l'exaltation des premières découvertes, les tentations reprennent le dessus.
Elle
voit la main du Diable, des animaux affreux, des fléaux à venir ; elle
perd le sommeil et ne peut prendre aucune nourriture tandis que les
convulsions atroces tordent ses membres, suivies de longs
assoupissements, de crises de frayeurs, de larmes.
Les
médecins parlent d'épilepsie, intrigués pourtant par la lucidité, la
modestie et la douceur dont le jeune patiente ne se départit pas.
Le
6 juin 1631, à 12 ans, épuisée et amaigrie, Marguerite reçoit l'habit
de Novice ; deux jours après, elle est trépanée, assise en toute
conscience sur une petite chaise de paille.
Elle
pense au couronnement d'épines, exhale un léger soupir et se laisse
faire, tandis que les médecins qui cherchent une tumeur dans le crâne,
découvrent un cerveau parfaitement sain. Les crises se succèdent
jusqu'au 31 juillet où l'apparition de l'Enfant-Jésus, assis au bord
d'un puits, guérit Marguerite.
L'esprit d'enfance et la grâce de la Croix
Marguerite peut commencer son noviciat.
En août, Jésus l'invite à être « participante à l'état de Son Enfance. »
Pendant 6 mois, elle va se trouver « comme dans un état de paradis perpétuel. »
Ses sœurs la voient parfois « lavée de pureté, embaumée de chasteté », le visage brillant d'une blancheur éclatante, s'abstenant un temps de toute nourriture.
Ce
sont ses vertus surtout qui frappent ses compagnes et ses supérieures :
une humilité souvent mise à l'épreuve, une obéissance qui prend le pas
sur sa nature entière et indépendante.
Le 7 février 1632, Jésus l'encourages à la pénitence : « Il faut que tu apprennes maintenant la science de Ma Croix. »
Comme la Petite Thérèse de Lisieux deux siècles plus tard, Marguerite est chargée du « poids des pécheurs ».
Maladies,
souffrances, infirmités ne la quittent plus. Avertie des péchés et des
désordres qui se produisent dans un monastère ou dans la personne d'un
Prêtre, elle ressent amertume et angoisse, elle souffre pour les
orgueilleux et les impurs, pour les âmes vaniteuses, pour les paresseux
et les balsphémateurs.
C'est à l'Epiphanie 1632, qu'elle signe son acte de Consécration : « L'épouse du Saint Enfant Jésus en Sa Crèche. »
Elle
fait sa profession solennelle le 24 juin 1635 ; Jésus lui apparaît sous
la forme d'un enfant, lui remettant anneau, couronne et robe avec cette
promesse : « Je ne refuserai rien à tes prières. »
L'année 1636 est effroyable pour la France : guerres, invasions, sièges. Jésus confie à Marguerite : « C'est par les mérites du Mystère de Mon Enfance que tu surmonteras toutes les difficultés.
Marguerite
crée alors la « Famille du Saint Enfant-Jésus » dont les
« domestiques » vivront des vertus de l'Enfance et réciteront la Petite
Couronne.
Cette
dévotion quitte très vite les limites du cloître. L'armée ennemie se
retire et la Bourgogne va connaître deux siècles de paix.
L'arrivée du Petit Roi
Le
15 décembre 1637, tandis que toute la France prie pour la naissance
d'un héritier au trône de Louis XIII, Marguerite est avertie de la
grossesse de la reine, avant Anne d'Autriche elle même ! Devenu Roi de
France, Louis XIV viendra au Carmel de Beaune en 1658 remercier les
sœurs de leur prières.
Mais c'est un autre Roi qui va faire son entrée au Monastère. En effet, la renommée de Marguerite est parvenue aux oreilles d'un gentillhomme normand, le Baron Gaston de Renty.
Il se rend au Carmel en 1643 sans voir Marguerite qui vit de plus en plus retirée.
Il lui envoie, en novembre, la statue qui deviendra le cher Petit Roi de Grâce.
Suite à un malentendu, cette statue arrive, humblement, avec le courrier : « J'ai été bien étonné, écrit M. de Renty un mois plus tard, quand
j'ai su que le petit Jésus a été porté par la poste. Mon Dieu ! Comment
se fait-il que tout n'ai été brisé à être secoué près de cent lieues
durant ! »
Marguerite
avait eu quelques années auparavant l'inspiration de faire construire
une chapelle dédiée à l'Enfant-Jésus ; elle sera consacrée le jour de
Noël 1639.
L'arrivée du Petit Roi coïncide avec la mort de Mère Marie de la Trinité en décembre 1643.
En 1644, Gaston de Renty rencontre Marguerite : « Le Fils de Dieu fit une liaison si étroite de ces deux âmes que ce ne fut plus qu'un seul cour et qu'un esprit . »
Ce
saint homme qui est le directeur spirituel de la Prieure, Mère
Elisabeth de la Trinité, se remet entre les mains de la jeune Carmélite
de 25 ans : « Je m'abandonne à vous, ma très chère sœur, afin que vous me formiez selon le désir de Votre Saint Epoux. »
« Quand tout sera consommé, l'Enfant-Jésus me tirera à Lui »
En
mars 1648, on l'installe à l'infirmerie d'où elle ne sortira plus.
Alors que son corps est un abîme de souffrances, son âme est un abîme de
paix et de joie : « Il ne semblait pas que ce fut une créature mortelle, mais une âme déjà régénérée par la Gloire. »
Jusqu'à la fin, elle remercie ses sœurs et les console : « Vous me trouverez toujours au Saint Sacrement.
Elle s'éteint le 26 mai dans la matinée.
Arrivent alors au Carmel un défilé de fidèles ainsi qu'un volumineux courrier pour rendre un dernier hommage à la « petite sainte ».
Gaston de Renty, qui suivra de peu sa sœur d'âme, écrit : « Dieu a retiré au Ciel ce que la terre n'était pas digne de posséder ».
Saint Jean Eudes avait vu Marguerite peu avant sa mort : « Je
ne puis dire le respect et la dévotion que le Saint Enfant Jésus a
imprimés dans nos cœurs au regard de de sa sainte épouse ; nous avons
déjà ressenti plusieurs effets de sa charité, spirituels et corporels ».
En effet, exaucements et miracles se succèdent. Marguerite du Saint Sacrement est déclarée Vénérable en 1873.
L'enfant Jésus de Beaune
Le
« Petit Roi de Grâce », est l'un des quatres principaux « Enfant
Jésus » miraculeux avec le Santo Bambino de Rome, l'Enfant Jésus de
Prague et le Bon Jésus de Braga au Portugal.
Offerte
à Marguerite par le Baron de Renty, cette statuette de bois, haute de
58 cm, peinte et articulée, peut être habillée de vêtements somptueux
venus des quatre coins du monde.
La
dévotion au Petit Roi de Grâce se propagea très rapidement et son
rayonnement se manifesta spécialement pour les accouchements
difficiles , la guérison des nouveaux-nés, les procès, les mariages, les
vocations, les « bonnes morts ».
A
la Révolution Française, les religieuses le mirent à l'abri chez de
courageux amis, dans une armoire que l'on peut encore voir aujourd'hui.
Il
fut vénéré en secret jusqu'au 28 décembre 1873 où à l'instigation du
Curé de Saint Nicolas, une fête solennelle en présence de l'Evêque de
Dijon marqua la reprise du culte public du petit Roi.
De
nombreux témoignages nous prouvent qu'Il continue sa mission de
Miséricorde et de protection, comme l'assurait la Vénérable Marguerite
du Saint Sacrement : « Une paille de Sa Crèche, une bandelette de Ses langes, c'est assez pour tenir en respect les ennemis. »
La Petite Couronne de l'Enfant Jésus
Sœur Marguerite en reçut l'inspiration en 1636.
Elle consiste en un chapelet de 15 grains.
Sur les trois premiers on dit un Notre Père en l'honneur de Jésus, Marie et Joseph.
Sur
les 12 suivants, on récite un Je Vous salue Marie, en méditant sur les
Mystères de l'Enfance de Jésus : l'Incarnation, le Séjour du Verbe dans
le Sein de Marie, la Nativité, Sa Demeure dans l'Etable, Sa
Circoncision, l'Epiphanie, la Présentation au Temple, la Fuite en
Egypte, le Retour d'Egypte, la vie cachée à Nazareth, Ses voyages avec
Joseph et Marie, Son Séjour au Temple au milieu des Docteurs.
Comme Marguerite l'affirmait dans sa Foi pure et confiante : « Le Saint Enfant Jésus a plus soin de nos âmes et de nos besoins que nous n'en saurions avoir pour nous-mêmes. »
L'apparition de la Vierge
Le 15 août 1640, la Vierge tenant l'Enfant Jésus, lui apparaît et la libère des persécutions du démon.
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