Notre-Dame de Laghet
La chapelle
Une
chapelle, perchée sur un petit éperon rocheux, "Laghet" (le lieu aigu,
telle est une des origines probables du mot) : c'est ici qu'au XVIIe
siècle, Marie a marqué sa présence au cœur de la Côte d'Azur.
La dévotion d'un prêtre pour une humble chapelle
Depuis
plus de 25 ans, un prêtre d'Èze, Don Jacques Fighiera, s'occupait avec
amour de cette chapelle remontant aux siècles passés, (le XVe au moins,
peut-être même le XIe) devant laquelle il passait pour desservir le
village de l'Ariane (aujourd'hui La Trinité). Il l'avait même fait
réparer, à ses frais, vers 1628-1629, et depuis, on venait à nouveau y
invoquer Marie.
Des prodiges
Coup sur coup, aux premiers jours de 1652 des "prodiges".
Casanova
atteint de la lèpre, qui obtient sa guérison en demandant
l'intercession de la Vierge Marie aussitôt après qu'on lui eut parlé de
cette petite chapelle.
Peu
après de Monaco aussi, une veuve, décide, sur les conseils d'une
servante de La Turbie, d'aller à Laghet, neuf jours de suite, demander
la libération de son fils unique tombé aux mains des pirates. Avertie en
songe dès le second jour, de fait, elle voit son fils de retour avant
même la fin de la neuvaine.
C'est
une famille de La Turbie qui bénéficie du 3ème prodige. Jacques Aicard,
a une fille, Marie, complètement perturbée, épileptique et possédée du
démon. Il supplie Don Fighiera de venir prier pour elle à Laghet, le
prêtre vient et, aussitôt, la petite est guérie.
Un
lépreux guéri, un captif libéré, une possédée délivrée : ces épisodes à
l'authentique saveur d'Évangile assurent définitivement la réputation
du lieu.
La statue de Notre-Dame de Laghet
Dans
un tronc de sorbier, la famille Fighiera avait fait sculpter une statue
de la Vierge Marie par un artiste parisien Pierre Moïse ; placée dans
l'église d'Èze, elle avait été bénie par l'évêque, Mgr de Palletis en
1645.
Don
Jacques Fighiera, fortement ému par ce qui venait de se produire et
voyant les foules se presser à Laghet, décide d'y amener cette statue
pour remplacer l'ancienne statue.
Le 24 juin 1652 les Pénitents blancs d'Èze l'apportent dans la chapelle de Laghet en procession solennelle.
À partir de ce jour, les "prodiges" se succédèrent dans cette humble chapelle.
Chaque année, le 24 juin, les paroissiens d'Èze commémorent l'évènement en montant à pied à Laghet.
Enthousiasme du peuple, vigilance des pasteurs
Les
pèlerins accourent en nombre de Nice, Monaco, Vintimille, San Remo,
Oneille. L'évêque, Mgr de Palletis, fidèle au Concile de Trente
(1545-1663), demande à une commission de théologiens assistés d'un
avocat et d'un médecin d'examiner les "faits de Laghet".
22
des 36 faits allégués en 16 mois, ont ainsi été reconnus comme avérés
et accompagnés ni d'excitation malvenue, ni de pratique douteuse.
Le culte est officiellement approuvé le 26 décembre 1653.
Le
16 avril 1654, l'évêque préside un premier pèlerinage officiel conduit
par les Consuls de Nice, lesquels, comme en témoigne une belle
inscription latine, avaient offert 100 écus pour amener l'eau d'une
source et aménager la fontaine qui rafraîchit aujourd'hui encore les pèlerins.
De nouveaux "prodiges" méritent à la Bienheureuse Vierge Marie un nom nouveau, un culte nouveau..."
L'inscription
au sommet de l'arc au-dessus du chœur dit bien ce qui avait conduit à
poser dès la Toussaint 1653 la première pierre d'une nouvelle chapelle.
L'enthousiasme et la générosité des pèlerins permettent d'accélérer les
travaux : on inaugure le nouvel édifice le 21 novembre 1656.
Une église qui glorifie la mère de Dieu
Elle
est construite dans le même style que les grands édifices religieux
niçois contemporains : (la cathédrale et Sainte Rita dans le Vieux Nice,
l'église de l'Escarène...), le "baroque nisso-ligure" ou, mieux, le
"style Contre-Réforme".
Il
faut entrer dans le rythme des colonnes et des pilastres : avec les
lignes des corniches, du pavement et même des bancs, ils guident nos
yeux vers le "retable" du chœur, lieu où l'univers céleste (évoqué par
les anges qui peuplent les voûtes et les arcs) rejoint le monde
terrestre. Alors s'offre à notre regard, "la Dame" de ce lieu qui nous
présente le véritable "Seigneur", non seulement Jésus dans ses bras,
mais surtout, dans le tabernacle, le Christ ressuscité.
L'Esprit
Saint en gloire a été disposé en 1964 au-dessus de la Mère de Dieu en
lieu et place d'une figure du Père céleste peu conforme à la tradition
iconographique chrétienne. Marie ayant conçu du Saint-Esprit, la gloire
du Père est manifestée par le Fils dans l'Esprit : la doctrine biblique
qui inspire Vatican II complète la théologie du Concile de Trente.
C'est
donc bien, en réalité, la doctrine catholique, -défendue, un siècle
plus tôt, par le Concile de Trente-, que ce baroque, nous offre en
spectacle : l'Église solidement établie sur les Apôtres ("ces
colonnes..." dit saint Paul) présente au monde le mystère : Dieu fait
homme qui nous est donné par Marie, le Christ mort et ressuscité que
l'Église propose dans l'Eucharistie. Voilà bien le "mystère", ce lieu où
l'amour inaccessible de Dieu nous est dévoilé.
Pèlerins
qui êtes arrivés ici, la Madone de Laghet vous dit : "Toutes les grâces
que vous venez chercher ici trouvent leur accomplissement dans mon
divin Fils".
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Un sanctuaire dédié à Notre-Dame du Mont Carmel
En 1674, des Carmes de Turin sont appelés par l'évêque Provana de Leyni, lui-même ancien provincial des Carmes.
Ils animeront ce lieu pendant plus de deux siècles.
Les
foules aimeront venir ici pour les grandes fêtes du Carmel, le 16
juillet, Notre-Dame du Mont Carmel, et le 15 octobre, sainte Thérèse
d'Avila.
On
retrouve la marque carmélitaine dans les chapelles latérales, dédiées
l'une à Thérèse d'Avila, et l'autre à Saint Joseph pour lequel le Carmel
a une dévotion particulière.
Notons
aussi l'emblème du Carmel sur l'autel majeur et le vitrail au-dessus du
chœur représentant saint Simon Stock, recevant le scapulaire des mains
de la Vierge Marie, le 16 juillet 1251.
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L'action de grâce des ex-voto
Rapidement, les fidèles ont tenu à marquer leur reconnaissance à la Vierge par les ex-voto.
Souvent réalisés par des peintres spécialisés, ils répondaient à des normes :
1) La représentation du prodige
2) En haut, la Madone de Laghet
3)
En bas, le nom du bénéficiaire du miracle avec la mention VFGA (votum
fecit, gratiam accepit : a fait un vœu, a obtenu une grâce).
En
prenant le temps de les observer dans le déambulatoire, on découvrira
la foi d'un peuple et le témoignage de ce qu'était la vie dans la région
(depuis deux siècles car malheureusement les plus anciens ont été
détruits par la Révolution française).
Pris dans les péripéties de l'histoire
Le
sanctuaire devenant, au fil des ans, un haut lieu de l'identité
niçoise, les souverains savoyards eurent à cœur de manifester leur
intérêt pour Laghet : vœu pour obtenir la naissance d'un héritier en
1666, offrande de lampadaires, construction d'un pont en 1829, étape
recueillie de Charles-Albert en 1829, sur le chemin de l'exil après la
défaite de Novare. Monaco pour sa part, -c'était l'évidence de
l'histoire et la géographie- en fit un lieu privilégié de pèlerinage
pour la principauté.
Avec
la France, les relations sont plus mouvementées : avant la fin XVIIIe
siècle, chacune des trois guerres au cours desquelles Maison de Savoie
et Rois de France furent dans des camps opposés, fit passer l'une et
l'autre armée en pays niçois.
Les
révolutionnaires saccagèrent le sanctuaire et la statue elle-même
n'échappa au désastre que grâce à Denis Lanteri, un intendant du
sanctuaire qui sut la cacher à La Turbie.
Dernière
crise, celle de la séparation de l'Église et de l'État, aboutira à
l'expulsion définitive des Carmes en 1903 et à la vente du Monastère,
racheté d'ailleurs immédiatement par l'évêque Mgr Chapon.
Au
cours de ces trois siècles et demi d'histoire, le culte se maintint
envers et contre tout ; les frontières mêmes ne furent jamais un
obstacle à la dévotion des fidèles : lors des grands pèlerinages on put
les franchir de la Provence et de la Ligurie vers le Comté de Nice sans
aucune formalité.
Le sanctuaire de Laghet, cœur de l'Église de Nice
La puissance de l'intercession de Marie en ce lieu en a fait peu à peu le cœur du diocèse.
Il parut naturel d'y installer le petit séminaire (de 1907 à 1930).
De
même est-il devenu un lieu d'accueil spirituel, surtout depuis qu'avec
l'arrivée en 1978 des Bénédictines du Sacré-Cœur de Montmartre, outre
les messes quotidiennes, y est assurée la Liturgie des Heures ainsi que
l'adoration eucharistique et la méditation du chapelet. Tout le peuple
de Dieu se retrouve ici.
A
quelques kilomètres à peine des lieux de la Côte d'Azur, symboles de
l'argent, des loisirs, de la haute technologie, Marie a voulu que ce
lieu fût le rendez-vous, non seulement des enfants qui viennent préparer
une communion ou une confirmation, mais des humbles, des gens qui
souffrent et de ceux qui se reconnaissent pécheurs.
Cette humilité, typique de Laghet, se retrouve chez les deux saints qui y vinrent : saint François-Marie de Camporosso et le bienheureux Jean XXIII.
L'un,
un voisin, (Camporosso est à côté de Vintimille) fut guéri dans son
enfance par l'intercession de la Vierge de Laghet puis, capucin, devint
l'apôtre de Gênes qui l'honore du nom de Padre santo.
Quant
au bon pape Jean, encore nonce en France il présida les festivités du
3ème centenaire de Laghet en 1952. C'est d'ailleurs lui qui canonisa le
Padre Santo en 1962.
Une histoire qui continue
Pour
couronner le tout, à l'orée du XXIe siècle, une autre aventure
commence, puisque désormais le sanctuaire accueille pour leur formation,
les séminaristes de Nice et de Monaco.
Témoignent
de cette vitalité deux œuvres récentes, de nature et d'ampleur
différentes, mais fruits, l'une comme l'autre, de l'attachement et de la
générosité de fidèles envers la Madone en ce début de millénaire.
Les chandeliers et les pupitres
de la chapelle, ont été réalisés par Jean-Pierre Augier, artiste du
pays niçois habile à faire jaillir la prière d'outils métalliques qui
servirent au travail humain.
La couverture de l'esplanade, dessinée par Bernard Camous, évoque la parabole évangélique par sa voûte aérienne solidement ancrée dans le roc.
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Source : Brochure du sanctuaire destinée aux pèlerins.
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