Abbaye de Clairvaux
L'ancienne abbaye de Clairvaux
située à Ville-sous-la-Ferté, dans l'Aube (région Champagne-Ardenne), à
quinze kilomètres de Bar-sur-Aube, était un monastère cistercien fondé
en 1115 par Bernard de Clairvaux et quelques compagnons, envoyés par
Étienne Harding, abbé de Cîteaux.
La
personnalité de saint Bernard lui donna un rayonnement considérable.
Avec La Ferté, Pontigny, et Morimond elle forme le groupe des quatre
filles « majeures » (premières fondations)
de Cîteaux, toute première abbaye de l'ordre cistercien. C'est de loin
la plus prolifique, avec quatre-vingts abbayes-filles.
Elle est supprimée lors de la Révolution française (1789).
En 1804, ses bâtiments sont transformés en une institution pénitentiaire française, la maison centrale de Clairvaux.
Histoire
Fondation
Saint Bernard écrivant, Philippe Quantin
La fondation de Clairvaux remonte aux temps de la toute première extension de l'ordre cistercien.
En 1115, l'abbaye-mère de Cîteaux a fondé deux abbayes-filles, La Ferté et Pontigny.
Au
moment de la fondation de Morimond, des pourparlers semblent être en
cours pour une nouvelle fondation qui serait située sur les terres de
Hugues de Troyes, comte de Champagne, dans le diocèse de Langres.
C'est ainsi que l'abbaye de Clairvaux (clara vallis, « vallée claire »)
est fondée le 25 juin 1115 : cette date doit cependant être relativisée
car la Charte de fondation de l'abbaye conservée à la Bibliothèque de
Troyes est un faux établi probablement au XVIe siècle par deux érudits cisterciens espagnols pour établir une hiérarchie entre les quatre filles « majeures » de Cîteaux.
Suivant la coutume cistercienne, le futur abbé Bernard de Clairvaux est accompagné de douze moines.
Le terrain réservé à l'implantation de l'abbaye est choisi avec précaution dans une clairière isolée, le Val d'Absinthe.
La localisation préférentielle des abbayes cisterciennes est en effet
au fond des vallées, sur un site qui dispose d'un cours d'eau
(nécessaire pour des questions d'hygiène, mais aussi pour pouvoir
implanter un moulin).
Ce
terrain offert par un proche parent de Bernard comprenait ces éléments
essentiels à l'organisation d'une abbaye cistercienne.
En
effet, les cisterciens se doivent de respecter la règle de saint Benoît
qui stipule la vie en autarcie et le respect du vœu de stabilité.
L'abbaye médiévale
De fait, l'architecture cistercienne, tant à Clairvaux qu'à Fontenay par exemple, répond à ces nécessités.
Il
y a des bâtiments de vie (bâtiments des moines et des convers), des
communs (moulins, cuisines, etc.) et l'abbatiale réservée à la prière.
Les bâtiments se regroupaient autour du cloître.
L'abbaye de Clairvaux était ainsi organisée d'après les sources écrites et autres vues cavalières et cela jusqu'au XVIIIe siècle.
Le rayonnement de Clairvaux
L'abbaye
de Clairvaux est, de loin, la plus féconde de toutes les abbayes
cisterciennes, en raison principalement du charisme de Saint Bernard.
Elle
fonde ou incorpore à l'ordre cistercien quatre-vingts abbayes filles
directes (et plus trois cent cinquante abbayes filles en tout) à travers
toute l'Europe :
En France
- 007 - Trois-Fontaines
- 012 - Fontenay
- 018 - Foigny
- 029 - Igny
- 031 - Reigny
- 037 - Ourscamp
- 044 - Cherlieu
- 051 - Longpont
- 058 - Vaucelles
- 077 - Vauclair
- 084 - La Grâce-Dieu
- 085 - Hautecombe
- 086 - Buzay
- 099 - Balerne
- 102 - Aulps
- 106 - Noirlac
- 109 - Auberive
- 131 - Bénisson-Dieu
- 144 - Larrivour
- 145 - Clairmarais
- 185 - Belleperche
- 195 - Belloc
- 203 - Grandselve
- 213 - La Prée
- 238 - Savigny
- 233 - Val-Richer
- 294 - Fontmorigny
- 295 - Aubepierre
- 298 - Loos
- 302 - Longuay
- 303 - Boulancourt
- 334 - Clermont
- 338 - Moreilles
- 343 - La Peyrouse
- 345 - Mores
- 606 - Valence
- 718 - Charité
En Suisse
- 045 - Bonmont
En Allemagne
En Espagne
- 054 - Moreruela
- 154 - Oseira (de)
- 164 - Sobrado (de)
- 170 - Melón (de)
- 180 - Meira (de)
- 272 - Santa Espina (de)
- 335 - Valparaíso
- 342 - Montederramo (de)
- 477 - Oya
- 591 - Acibeiro (de)
En Angleterre
En Italie
- 093 - Chiaravalle
- 111 - Chiaravalle della Colomba
- 151 - Tre Fontane
- 143 - Casamari
- 304 - Cabuabbas (de)
- 564 - Santa Maria delle Paludi (de)
- 584 - San Pietro della Canonica (de)
Au Portugal
En Belgique
- 127 - Les Dunes
- 216 - Villers-la-Ville
- 273 - Aulne
- 287 - Cambron
Au Pays de Galles
En Irlande
- 173 - Mellifont
En Suède
Au Danemark
Aux Pays-Bas
En Hongrie
- 464 - Zirc
En Croatie
Le XVIIIe siècle
Plan général du site de Clairvaux
Au XVIIIe siècle, la communauté monastique de Clairvaux est restée prospère avec ses 20 000 hectares de forêts, de vignes et de terres labourables.
Désirant
plus de confort, elle décide en 1708 de démolir une grande partie des
bâtiments médiévaux et reconstruire une abbaye monumentale de style
classique.
Le bâtiment des convers est cependant conservé, car il était devenu, entre-temps, une grange.
Ce bâtiment des convers date du XIIe siècle
et il est caractéristique de l'architecture cistercienne : le premier
niveau comprenait un cellier et un réfectoire parfaitement identifiable
de nos jours ; le deuxième niveau était occupé par le dortoir.
L'ensemble
respecte parfaitement la notion de l'art cistercien définie par saint
Bernard : la sobriété par opposition à ce qui se pratiquait alors à
Cluny.
Ce bâtiment des convers fait aujourd'hui environ 70 mètres de long sur quinze de large et comprend trois nefs de douze travées.
Il
fait l’objet d’un classement au titre des monuments historiques depuis
le 26 octobre 1981 (d'autres parties de l'abbaye bénéficient de
protections supplémentaires aux monuments historiques : inscription en
1994 et 1997, classement en 1999).
Le bâtiment des convers appartient au Ministère de la Culture depuis 2003.
À ce titre, il est l'objet de restaurations depuis les années 1970, mais surtout entre 2003 et 2013.
Celle-ci est incluse dans le Contrat de projet État-région 2007-2013 pour un montant de 5 456 392 euros.
En 2014, c'est à son tour le réfectoire chapelle du XVIIIe siècle
qui sera restauré, ainsi que la prison des enfants ; les espaces
extérieurs seront réaménagés ; enfin, le parcours de visite mis en
sécurité.
Pour
les autres bâtiments visibles au grand public, nous pouvons
mentionner : le grand cloître d'architecture classique, bâtiment réservé
aux moines du XVIIIe siècle.
Il appartient également au ministère de la culture.
La Révolution
Plan des bâtiments monastiques
En
1789, l’abbaye est vendue comme bien national à la suite du décret du 2
novembre 1789 qui met les biens de l’Église à la disposition de la
Nation.
En
1792, des industriels achetèrent le site pour y installer leurs
ateliers (une verrerie fut ainsi installée dans l'abbatiale).
Ces industriels firent banqueroute et le site racheté par l'État pour en faire une prison en 1808.
Hostellerie
Hostellerie des Dames
Chapelle Saint-Anne
Mur d'enceinte (« haut mur »)
La prison centrale de Clairvaux
Article détaillé : Maison centrale de Clairvaux.
De la Révolution à 1970
Le centre pénitentiaire de Clairvaux est un établissement pour peine établi sur le site de l'abbaye de Clairvaux depuis 1804.
La transformation d'abbayes en prisons au XIXe siècle
est courante (le Mont-Saint-Michel, Fontevraud, etc.) et est liée à la
réforme du système pénal qui instituait une nouvelle peine, la privation
de liberté instituée par Napoléon Ier en 1808.
Les abbayes, avec leurs murs d'enceinte et leurs cellules, semblaient alors idéales.
De
plus, les populations locales trouvaient ainsi un substitut à la
communauté religieuse qui leur avait procuré jusque-là une certaine
aisance économique.
L'ensemble
de l'abbaye fut ainsi occupé par la prison : le bâtiment des convers
devint prison de femmes puis manufactures (notamment de textile), les
entrepreneurs locaux utilisant la main-d'œuvre carcérale ; le grand
cloître fut voué à la grande détention masculine, notamment les insoumis
de la Grande Armée dès 1812, année au cours de laquelle l'abbatiale fut
vendue comme carrière à pierres pour honorer des dettes.
Le directeur de la prison fut révoqué suite à cela, car il n'y avait plus de lieu de culte pour les détenus.
En
1847, la prison manufacture connaît un grand scandale qui révèle que
sept cents détenus ont trouvé la mort en trente mois en raison de
mauvaises conditions d'incarcération (nourris au pain dont la mie est
blanchie à la chaux, typhus etc.) et de travail.
La prison accueille 2 700 condamnés pendant le XIXe siècle, dont Claude Gueux dont s'inspira Victor Hugo.
Une loi de 1875 rendant obligatoire la cellule individuelle, l’administration pénitentiaire installe par manque de moyens des « cages à poules » (grillages entourant des lits le long d'un couloir) utilisées jusqu’en 1970.
La prison hors de l'abbaye
Le centre de détention est hébergé dans des bâtiments du XVIIIe siècle
mais la maison centrale proprement dite bénéficie d'immeubles modernes
bâtis en 1971 à l’emplacement de l’ancienne abbatiale alors que dans les
bâtiments historiques se sont installés des services du ministère de la
justice et surtout du ministère de la culture dont les bâtiments sont
ouverts toute l'année aux visites.
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