Verdelais Notre-Dame de Verdelais

Verdelais 
Notre-Dame de Verdelais


Verdelais : Notre-Dame de Verdelais

En 1009, le Chevalier Géraud de Graves de retour de la Première Croisade a ramené une statue sculptée et installée dans la forêt du Luc suite à un vœu de construire un oratoire en l'honneur de Notre-Dame alors qu'il était tombait dans une embuscade.  

Vers 1295, pendant la guerre contre les Anglais, la chapelle est pillée, incendiée...  La statue est cachée et enfouie dans une fosse maçonnée...

Un jour, vers 1390 selon la tradition, la Comtesse de Foix, en allant visiter ses terres et passant au milieu des bois, aurait trouvé la cache de la statue.

« La mule qui portait la Comtesse de Foix s’arrêta sans pouvoir avancer ou reculer, et enfonça un de ses pieds de la profondeur de 4 ou 5 pouces dans une pierre fort dure où elle imprima la figure de son fer. »

« Cette dame, surprise d’un tel prodige, descendit aussitôt et fit lever cette pierre dessous laquelle se trouva la statue en bois, bien conservée, sans altération… »

Ayant retrouvé la statue au pas de la mule, la Comtesse fit restaurer la chapelle.

Vers 1558, pendant les guerres de religion, la chapelle est à nouveau pillée, incendiée, et la statue jetée au milieu des flammes sans être endommagée !...

Des voisins emportent la statue et la cachent dans un tronc d’arbre, mais sans donner d’indication sur le lieu de la cachette…

Selon la tradition, en 1605, la statue est retrouvée grâce au mugissement d’un bœuf !

"Un bœuf qu’on faisait paître dans les prés s’écartait tous les soirs et se tenait agenouillé comme s’il eut été prosterné au pied d’un arbre, poussant des gémissements.
Le maître du bœuf qui en fut averti ainsi que plusieurs autres personnes qui l’avaient vu et entendu, trouvèrent la statue de la Vierge dans le tronc de l’arbre."

La statue est retrouvée une 2ème fois.

Les villageois l'apportent dans les ruines de la chapelle.

En 1792, c’est la spoliation des biens de l’Église.

En 1793, le sanctuaire est pillé. Le couvent est vendu aux enchères, les ornements liturgiques sont brûlés, le mobilier est démoli…

En 1794, le maire, M. Grenouilleau, veut faire descendre la statue de la Vierge pour la brûler et l’enlever à la dévotion des fidèles. M Jean Michel, sacristain, refuse de la descendre.

M. Gassies, maçon, est alors préposé pour réaliser cette action ; il répond au maire :

« Fais-le toi-même, citoyen maire, et monte si tu l’oses ! Pour moi : jamais ! »

M. Grenouilleau applique aussitôt l’échelle contre le retable. Il monte. Sa main va saisir la statue.
Mais son visage, affreusement pâle, trahit l’épouvante.
Ses yeux se ferment, ses genoux tremblent d’un mouvement convulsif:

« Soutenez-moi, murmure-t-il, je n’y vois plus. »

Et il tombe dans les bras de l’officier municipal.
Il se contente de prescrire la fermeture de l’église
et défend à quiconque d’y entrer sans permission écrite.
Le sacristain cache la statue.

La statue est sauvée une 3ème fois !

Les opinions sont partagées sur l'origine du nom de Verdelais, donné à l'un des pèlerinages les plus célèbres de la Guienne. Selon les uns, il signifie Verte-Forêt, ce que sa charmante situation au milieu d'une campagne verdoyante semble justifier ; selon les autres, il a tout simplement été substitué à la longue au mot bordelais, avec lequel il a beaucoup de ressemblance.

Les historiens les plus dignes de foi font remonter la fondation de la chapelle et du monastère de Verdelais au commencement du XIIe siècle.
Les religieux de Grandmont y vécurent en paix jusqu'à l'époque où Louis le Jeune, roi de France, ayant, malgré les conseils de Suger, son ministre, répudié sa femme Eléonore d'Aquitaine, cette princesse porta en dot au roi d'Angleterre son beau duché de Guienne.

A cette époque, si fatale pour la France, la guerre éclata en Guienne, et le sanctuaire de Verdelais eut tant à souffrir, que, quand les Grandmontains vinrent en reprendre possession, en 1295, le chapitre général ayant frappé d'une taxe toutes les maisons de l'ordre, ils ne purent fournir que la vingtième partie de ce qu'ils avaient payé vingt ans plus tôt. 

Peu d'années après, Assalhide de Bordeaux, captalesse de Buch, répara ces désastres et mérita le titre de fondatrice de Notre-Dame de Verdelais.

Mais le calme dura peu. Le pays, ne pouvant s'habituer à la domination anglaise, se soulevait à chaque instant ; le prince de Galles accourait et faisait tout rentrer dans le devoir ; mais à peine s'éloignait-il, que les villes se débarrassaient de leurs garnisons et arboraient le drapeau français.

Jean de Grailly, époux d'Assalhide de Bordeaux, combattait pour les Anglais ; c'était un grief impardonnable aux yeux de la population demeurée française par le cœur, et la vengeance atteignit Verdelais, dont il était_le bienfaiteur. Quand du Guesclin chassa les Anglais de la Guienne, après une lutte acharnée, les religieux grandmontains s'éloignèrent, après avoir enterré, pour la soustraire à toute profanation, l'ancienne image de la Vierge, qui était en grande vénération dans le pays. L'événement prouva qu'ils avaient été bien inspirés ; car l'église et le monastère furent pillés et livrés aux flammes. 

Jean de Grailly étant mort, en laissant son héritage à son neveu Archambault, le captal épousa Isabelle de Foix, et s'engagea à prendre le nom et les armes de cette illustre famille, dont Isabelle était le dernier rejeton. Mais pendant plusieurs années on put croire que cette précaution serait inutile, la noble dame n'ayant pas d'enfants. C'était pour elle un cruel chagrin ; aussi promit-elle de consacrer un de ses fils à Dieu, s'il daignait lui en donner quatre, et de bâtir une église à la vierge Marie.
Bientôt après, elle devint mère ; elle eut même cinq fils, au lieu de quatre qu'elle demandait, et la Providence prit soin de lui indiquer l'endroit où elle devait, pour accomplir la seconde partie de son vœu, élever un temple à Notre-Dame.

Un jour qu'elle se rendait de Landon à Civrac, à travers la prairie, sa mule s'arrêta tout à coup, et le pied de l'animal s'enfonça dans la pierre qu'il avait heurtée.

Isabelle ordonna qu'on soulevât cette pierre, et elle découvrit avec autant de joie que de surprise une belle statue de la Vierge que les gens du voisinage reconnurent pour celle qu'ils avaient si longtemps invoquée dans l'église de Verdelais.

Cette découverte fut regardée comme miraculeuse, et la pierre qui portait l'empreinte du sabot de la mule tut déposée dans la chapelle à peine reconstruite.

Toutefois, on peut expliquer ce fait d'une manière naturelle, en supposant que les religieux, pour retrouver la statue qu'ils confiaient à la terre, avaient imprimé sur la dalle qui la cachait une espèce de croissant ou de fer à cheval.

Les personnes les plus pieuses ne combattent pas cette opinion, Notre-Dame de Verdelais ayant opéré trop de prodiges pour qu'on doive beaucoup tenir à l'authenticité de celui-là.

Isabelle rappela les religieux, elle fit restaurer le monastère et elle orna magnifiquement l'église de Verdelais.

On y voit encore deux grands tableaux, dont l'un représente la comtesse de Foix offrant un de ses fils à la Vierge, et l'autre la statue vénérée reprenant possession de son antique sanctuaire.

Un poète s'est chargé d'expliquer ces deux sujets, par des vers plus que médiocres.

La peinture n'est pas non plus digne des scènes qu'elle rappelle, et ces tableaux n'ont d'autre mérite que d'être un naïf témoignage de la reconnaissance de la noble dame.

Dès que l'église de Verdelais fut sortie de ses ruines, on y accourut de toute la province ; car la reine du ciel y manifestait à chaque instant sa puissance et sa bonté.

Ce pèlerinage était en grande faveur, quand, au XVIe siècle, la Guienne fut le théâtre des dévastations opérées par les calvinistes.

La chapelle fut profanée et pillée. La statue, livrée aux flammes, fut sauvée et cachée dans le creux d'un arbre, où elle demeura longtemps, et où elle était tout à fait oubliée, quand un pâtre, auquel un de ses bœufs avait servi de guide, la retrouva intacte.

On transporta la sainte image dans l'église à demi ruinée, et ce fut seulement en 1609 que le cardinal de Sourdis, archevêque de Bordeaux, entreprit de reconstruire cet asile, que la mère de miséricorde s'était choisi.

Il y appela des Célestins, qui exerçaient envers les pèlerins tous les devoirs de l'hospitalité.

Mais en 1789, quinze maisons de Célestins furent supprimées, et les terres de celle de Verdelais, affectées d'abord au petit séminaire de Bordeaux, ne tardèrent pas à passer entre les mains des acquéreurs de biens nationaux.

Toutefois l'église avait peu souffert, quand un membre du comité révolutionnaire, irrité de voir encore la statue de la Vierge occuper la place où elle avait reçu tant d'hommages, ordonna au sacristain de la faire disparaître.

Celui-ci répondit courageusement qu'il n'en ferait rien.

Un maçon, chargé d'abattre l'image bénie, s'y refusa de même, et le prétendu patriote, insistant et menaçant, au nom de la loi, ce brave artisan, nommé Étienne Gassies, lui dit :
- Tu peux l'abattre toi-même, si tu le veux ; quant à moi, je ne le ferai jamais.

« Tout furieux de ce double refus, dit M. O'Relly, dans son Histoire de Verdelais, notre jacobin applique lui-même une échelle, pour consommer son projet sacrilége ; mais, à mesure qu'il monte pour atteindre la statue, un vertige s'empare de lui, ses genoux tremblent, fiéchissent ; les assistants l'entourent et l'empêchent de s'écraser dans sa chute. »

Cependant, le sacristain, craignant qu'une nouvelle tentative ne privat Verdelais de son précieux trésor, s'avisa d'envelopper la statue d'une tapisserie et de la coucher sur le côté, au bas de son piédestal.

L'agent du comité, satisfait de ce semblant d'obéissance, fit fermer les portes de l'église, et publier une défense expresse d'y venir prier ; mais combien de fois cette défense fut bravée !

Les malades, les infirmes, les affligés profitaient des ténèbres de la nuit pour venir s'agenouiller sur le seuil du sanctuaire, et quelquefois, cédant à leurs instances, le sacristain leur permettait d'y pénétrer.

Les églises se rouvrirent en 1802 , et celle de Verdelais fut aussitôt fréquentée comme avant la Révolution ; mais ce fut seulement en 1820 que commença l'œuvre de restauration de cet antique pèlerinage.

Un pieux prélat, Mgr d'Aviau , acheta les ruines du monastère et en fit une maison de retraite pour les prêtres infirmes, et ces vénérables ecclésiastiques desservirent d'abord Notre-Dame de Verdelais.

Le cardinal de Gheverus y attacha en 1830 les missionnaires diocésains. Son successeur, Mgr Donnet, aujourd'hui cardinal, y établit en 1838 des religieux Maristes puis en 1843, une maison de soeurs de la Présentation.

« Le pèlerinage de Notre-Dame de Verdelais est, dit M. l'abbé Pouget, dans son Histoire des principaux Sanctuaires de la Mère de Dieu, un des plus agréables qu'on puisse entreprendre dans la belle saison. On s'embarque à Bordeaux sur un bateau à vapeur, et l'on remonte la Garonne l'espace de dix lieues. Le navire vole sur l'onde semblable à une flèche lancée par un bras vigoureux, et suivant les sinuosités d'une riante vallée, fermée par un double rang de collines qui s'élèvent en amphithéâtre, et qui présentent, comme à l'envi, les richesses et la variété des plus fertiles productions.

A travers les superbes maisons de campagne, les villages et les bourgs, à l'aspect si gracieux, les bosquets et les vertes prairies qui se déroulent et fuient, comme par enchantement, sous les yeux du voyageur, ou arrive avec une promptitude merveilleuse à la Garonnelle, petit port le plus voisin de Verdelais.

De là, le pèlerin a encore une demi-lieue de chemin à faire à pied, par un chemin large, presque toujours uni, au milieu d'une campagne délicieuse.

A peu de distance du rivage, ce chemin se partage en deux. On ne saurait cependant être indécis sur le sentier que l'on doit prendre : sous un berceau de verdure se présente une gracieuse madone ; d'une main elle tient un enfant Jésus, qui sourit au pèlerin, et de l'autre elle montre la route de son sanctuaire, touchant emblème du ministère que Marie remplit à l'égard de l'exilé d'Éden, errant dans cette vallée de larmes et demandant vainement, partout sur son passage, la voie qui conduit au bonheur.

Cette statue est un monument public de la reconnaissance d'un vénérable pasteur de Bordeaux, qui, affligé d'une désolante surdité, recouvra l'ouïe à la suite d'une neuvaine que ses ouailles firent pour lui à Notre-Dame de Verdelais.

« La nouvelle route serpente sur un plan incliné, enfermée dans des allées d'aubépine et d'acacias qui, dans la belle saison, remplissent la campagne d'un parfum suave et balsamique. Au sommet de la colline, on aperçoit une statue de la sainte Vierge, blanche comme la corolle d'albâtre de ce liseron qui mêle ses fleurs avec celles des roses sauvages.

Sur la base, on lit cette inscription : Je vous protége. L'âme s'ouvre à la douceur de ces paroles, qui sont pour elle comme un son harmonieux répété par les échos d'un monde meilleur, et l'on arrive, sans s'en douter, au terme du voyage.

L'église de Verdelais n'est pas très-grande ; mais elle est convenablement décorée. Elle forme une croix latine, et le maître-autel en marbre occupe le centre de l'abside demi-circulaire. En avant de cet autel, on remarque deux magnifiques candélabres, en marbre du Languedoc, dont le piédestal est orné d'une belle mosaïque.

C'est dans une niche entourée d'une guirlande de chêne, merveilleusement déchiquetée, que se trouve la Vierge bénie. Elle est assise et tient l'enfant Jésus, occupé à donner à manger à un jeune corbeau, comme pour nous exciter à la confiance, en nous rappelant que Dieu prend soin de toute la nature et que les petits du corbeau même sont l'objet de sa sollicitude.
Source : Livre "Les pèlerinages de France" par Eugène Rosary

Un des pèlerinages les plus agréables qu'on puisse entreprendre dans la belle saison, est, sans contredit, cela de Notre-Dame de Verdelais.
On s'embarque à Bordeaux sur un bateau à vapeur, et l'on remonte la Garonne J'espace de dix lieues.

Le navire vole sur l'onde, semblable à une flèche lancée par un bras vigoureux, en suivant les sinuosités d'une riante vallée, formée par un double rang de collines qui s'élèvent en amphithéâtre, et qui présentent, comme à l'envi, les richesses et la variété des plus fertiles productions.

A travers les superbes maisons de campagne, les villages et les bourgs à l'aspect si gracieux, les bosquets et les vertes prairies qui se déroulent et fuient, comme par enchantement, sous les yeux des voyageurs, on arrive avec une promptitude merveilleuse à la Garonnelle, petit port, le plus voisin de Verdelais. De là, le pèlerin a encore demi-lieue de chemin à faire à pied, par un chemin large, presque toujours uni, au milieu d'une campagne délicieuse.

A peu de distance du rivage, ce chemin se partage en deux : on ne saurait cependant être indécis sur le sentier que l'on doit prendre : sous un berceau de verdure, se présente une gracieuse Madone.

D'une main, elle tient un enfant Jésus qui sourit au pèlerin, et de l'autre, elle montre la route de son sanctuaire ; touchant emblème du ministère que Marie remplit à l'égard de l'exilé d'Eden, errant dans cette vallée de larmes, et demandant vainement partout sur son passage la voie qui conduit au bonheur !

Cette statue est le monument public de la reconnaissance d'un véritable pasteur de Bordeaux, qui, affligé d'une désolante surdité, recouvra l'ouïe à la suite d'une neuvaine que ses ouailles firent pour lui à Notre-Dame de Verdelais.

On tombe à genoux sur une marche de gazon, on récite une prière pour remercier la charitable indicatrice, et l'on prend le chemin désigné.

La nouvelle route serpente sur un plan incliné, enfermée dans des allées d'aubépine et d'acacias qui, dans la belle saison, remplissent la campagne d'un parfum suave et balsamique.

Au sommet de la colline, on aperçoit une autre statue de la Vierge, blanche comme la corolle d'albâtre de ce liseron qui mêle ses fleurs avec celles des roses sauvages.

Sur la base, on lit cette inscription : Je vous protège.

L'âme s'ouvre à la douceur de ces paroles, qui sont pour elle comme un son harmonieux répété par les échos d'un monde meilleur, et l'on arrive, sans s'en douter, au terme du voyage.

Nous voici au bourg de Verdelais, qui nous offre, à l'extrémité d'une avenue, naguère plantée de si beaux arbres, son antique chapelle.

A gauche, on longe les bâtiments de l'ancien monastère ; ils sont fort grands, mais en mauvais état.

Des missionnaires en habitent une partie qui a été restaurée ; le reste étale de déplorables ruines, ou sert à abriter les pélerins.

A droite, une colline qui s'élève entre le voyageur et le superbe bassin de la Garonne, semble l'inviter à éloigner de lui toute pensée profane, et à concentrer ses regards et les affections de son âme sur le sanctuaire de Marie.

Mais d'où vient ce nom de Verdelais donné au sanctuaire de la Vierge qui va recevoir nos prières ?

L'étymologie ou l'origine de ce vocable est, entre les savants, un objet de discussion.

On convient assez que ce saint lieu porta d'abord le nom de Notre-Dame du Luc, du mot latin lucus, bois sacré, et dans les titres latins il est en effet appelé Sancta Maria de Viridi luco.

Deux mots de l'idiome populaire, traduction fidèle de viridi luco, désignent encore, dit-on, l'antique sanctuaire : Berde ou Verde et laiye ou lais, qui forment, par leur réunion, Berdelaye ou Verdelais, verte forêt.

Et assurément, quand on promène un œil ravi sur les alentours de la chapelle de la Vierge, quand on contemple ces tapis de verdure et de fleurs que le printemps déroule autour d'elle, ces bosquets qui couronnent les hauteurs environnantes, ces vignes aux rameaux vigoureux qui couvrent le flanc des côteaux voisins, et qu'on la voit élever sa flèche modeste au milieu de cette belle corbeille de verdure qui l'entoure de tous côtés, on n'est pas étonné qu'elle ait reçu son titre de cet emblème de l'espérance et qu'elle ait été saluée du nom de Notre-Dame de la Verte-Forêt.

Il est cependant des auteurs qui donnent à la chapelle de Verdelais une étymologie moins poétique, mais aussi naturelle.

Le concours des fidèles qui venaient, disent-ils, honorer la Vierge dans ce lieu, lui fit donner le nom de Notre-Dame des Bordelais, d'où, par la facilité qu'ont les peuples limitrophes de l'Ibérie de confondre le b et le v, on a fait, dans le laps des temps, Notre-Dame de Verdelais.

Il nous suffit de relater les sentiments divers ; à d'autres le choix.

Une question plus importante que celle de l'étymologie de Verdelais, est celle de sa première origine.

On a beaucoup écrit sur ce propos, sans faire rayonner sur la discussion une pleine lumière : il sort cependant du débat, et il demeure à peu près constant que la fondation de la chapelle et du monastère remonte aux premières années du douzième siècle, c'est-à-dire à l'an 1105 , et qu'on doit en faire honneur aux ancêtres d'Assalhide de Bordeaux, dont la famille des Candale a recueilli l'opulente succession.

C'est là comme la conséquence des anciens documents ; c'est le sentiment du P. Salé, successeur du P. Proust, à Verdelais, et éditeur de l'histoire de Verdelais, composée par le pieux Célestin.

Selon le P. Salé, des jours calmes et d'une prospérité toujours croissante, se levèrent sur le dévot sanctuaire pendant près de deux siècles, de 1105 à 1295.

A cette époque fatale à cause du mariage d'Eléonore, qui apporta pour dot au roi d'Angleterre le duché de Guienne, la contrée se trouva en proie aux horreurs d'une guerre longue et cruelle, et le sanctuaire de Marie en ressentit les tristes conséquences. Les Religieux de Grandmont, à qui le soin en avait été confié, se virent contraints de l'abandonner.

La paix ayant succédé aux horreurs de la guerre, les Grandmontains revinrent en toute hâte au lieu de prière d'où ils ne s'étaient éloignés qu'en gémissant.

Ils y trouvèrent sans doute bien des ruines à réparer, bien des pertes à déplorer, et leur maison dut se ressentir longtemps des suites du fléau qui venait de la frapper.

Elle était tellement déchue de son ancienne splendeur, que le chapitre général de l'ordre s'étant assemblé en 1295, et ayant frappé d'une taxe les maisons de l'ordre, Verdelais ne fut imposé qu'au vingtième de ce que ses religieux avaient payé, dans une circonstance semblable, cent ans auparavant.

Au commencement du siècle suivant, les désastres que Verdelais avait soufferts, furent réparés par la piété d'Assalhide de Bordeaux, dame de Puy-Paulin et de Castelnau en Médoc, captalesse de Buch et unique héritière des vastes propriétés de Pierre de Bordeaux.

Le titre de fondatrice qui s'attache à son nom comme une brillante auréole, permet de supposer qu'elle n'a pas cru pouvoir faire de ses trésors un meilleur usage que de les consacrer à réparer les maux que des rivalités et des haines internationales avaient faits au sanctuaire de Marie, et à le décorer avec plus de magnificence.

Le mariage qu'elle contracta, en 1307, avec Pierre de Grailli, petit-fils de Jean de Grailli, premier vicomte de Bénauge, fit entrer la famille des Grailli en participation de la gloire que lui assurait l'antique et brillant patronage qu'elle avait reçu de ses aïeux, et qu'elle exerçait avec tant de générosité sur la chapelle et le monastère de Verdelais.

Le calme ne devait pas être de longue durée.

La guerre se ralluma en 1327 et promena le ravage dans la contrée : les Anglais et les Français se poussaient, se pressaient comme les flots qui, au milieu de la tempête, paraissent et disparaissent sur le rivage qu'ils couvrent de débris.

Le comte de Daby et le prince de Galles venaient successivement reconquérir et châtier les villes qui avaient secoué le joug de l'Angleterre.
C'était un torrent qui dévastait tout sur son passage.

A peine s'étaient-ils éloignés, que les places humiliées relevaient la tête ; le drapeau français flottait dans les airs ; les villes, les campagnes devenaient le théâtre d'affreuses réactions.

Le monastère de Verdelais fut livré au pillage et aux flammes ; et cette paisible solitude était d'autant plus exposée à ressentir les coups de l'orage, que les religieux Grandmontains étaient connus pour avoir épousé trop vivement la cause des Grailly, partisans des rois d'Angleterre.

Dans les expéditions de Duglesclin contre les Anglais en 1377, Verdelais fut encore foulé et broyé sous les pas du démon de la guerre.

La lutte était si acharnée, la fureur de détruire portée à un tel degré d'excitation, que les Grandmontains craignirent non-seulement pour la modeste chapelle et le monastère qu'elle abritait, mais encore pour la Statue qui, depuis tant de temps, était en vénération dans la contrée, et qui passe pour être contemporaine de l'Eglise primitive.

Ils la cachèrent donc dans une ouverture faite en terre, maçonnée tout autour, et recouverte de la pierre qui lui servait de piédestal.

Dans ces expéditions, ou dans celles qui suivirent, le couvent et l'église furent dévastés et livrés aux flammes, et, à la vue des ruines amoncelées sur le lieu saint, les pieux cénobites comprirent qu'ils avaient obéi à une inspiration d'en-haut, lorsqu'ils avaient soustrait l'Image vénérée à des profanations sacrilèges.

Cependant, le calme succéda à l'orage ; la paix se fit, et la Guienne vit encore se lever ; sur elle des jours de prospérité.

Isabelle, comtesse de Foix, épousa Archambault, neveu et héritier de Jean de Grailly, lui imposant, en lui donnant sa main, l'obligation de prendre le nom et les armes de Foix et de faire revivre une famille si riche de glorieux souvenirs.

Le ciel la soumit pendant quelques années à l'épreuve la plus affligeante pour une mère : elle était stérile et elle craignait qu'avec elle s'éteignit à jamais un nom si célèbre dans nos annales.

Elle a recours au Ciel, elle fait, vers l'an 1384, le double vœu de consacrer au service des autels un de ses fils, si le Seigneur daigne lui accorder quatre enfants mâles, et de bâtir une église en l'honneur de la Mère de Dieu.

Bientôt après elle eut le bonheur d'être mère, et dans quelques années elle vit cinq enfants mâles croître et s'élever autour d'elle comme de jeunes oliviers autour d'une tige féconde.

Par un nouveau témoignage de sa bonté maternelle, Marie daigna lui indiquer l'endroit où elle devait accomplir la seconde partie de son vœu.

Elle se rendait en 1390, de sa seigneurie de Langon, à son château de Civrac, à travers les prairies qui tapissaient la vallée de Verdelais.

La mule qui la porte s'arrête tout-à-coup et enfonce un de ses pieds dans la pierre contre laquelle elle a buté.

Surprise d'une telle rencontre, la noble dame descend aussitôt, et fait lever cette pierre.

On trouve dessous l'Image de Marie, que la piété des fidèles avait autrefois entourée d'hommages, et que les Grandmontains avaient cachée dans cet endroit pour la soustraire à l'orage, qui dans peu allait éclater sur son sanctuaire et le réduire en poussière.

Cette pierre se voit encore à Verdelais et elle porte toujours l'empreinte d'un croissant ou d'un fer à cheval ; ses bords sont échancrés par l'empressement qu'ont eu depuis les pèlerins d'en enlever des parcelles.
Les anciens chroniqueurs de Verdelais et les traditions populaires ont vu dans cet évènement une manifeste intervention de la Vierge puissante, un véritable prodige.

Cette mule qui s'arrête devant le trésor caché, ce pied qui s'enfonce dans la pierre en y laissant son empreinte profondément gravée, cette statue qui paraît au jour si à propos pour rappeler à la comtesse le vœu qu'elle a formé et lui offrir l'occasion de l'accomplir, leur présentent une chaîne d'évènements providentiels dont le premier anneau remonte jusqu'au ciel, au trône même de la Vierge sainte.

Les historiens modernes expliquent la chose naturellement.

Selon eux, ce fer à cheval, ou ce croissant sculpté sur la pierre qui recouvrait la Statut, n'aurait été qu'un indice destiné à faire retrouver et reconnaître, en des temps meilleurs, l'antique Image ; qu'ensuite la monture y ait enfoncé son pied, ce ne serait qu'un évènement simple et naturel.

Cette explication n'est pas dépourvue de vraisemblance, et nous ne combattrons point ceux qui l'adoptent ; il nous semble cependant qu'en excluant le prodige proprement dit, elle suppose toujours une intervention bien visible de cette Providence sans laquelle rien n'arrive dans le monde, et qui fait servir souvent les évènements les plus fortuits et les plus ordinaires à l'accomplissement de ses desseins.

Deux grands tableaux qui ornent encore l'église de Verdelais, sont comme deux belles pages d'histoire qui racontent ce fait aux pèlerins.
S'ils ont peu de valeur aux yeux de l'art, ils en ont beaucoup à ceux de la piété.

On y voit Marie apparaissant dans un lointain radieux, et devant elle, la comtesse de Foix qui lui offre, entourée de sa famille et des religieux de Grandmont, un des cinq enfants que le Ciel lui a donnés.

Un prélat replace sur son antique base de pierre la Statue vénérée depuis tant de siècles.

Les deux inscriptions suivantes indiquent les sujets des deux tableaux ; et l'on peut appliquer ici, en comparant le poète et le peintre, ce mot d'Horace : Ut pictura poesis, l'un ne révèle pas plus de talent que l'autre :

Cette image qu'on voit et que cachait la pierre,
Cette mule arrêtée et son fer imprimé,
Sont comme autant de voix qui, sortant de la terre,
Font souvenir de Foix du vœu qu'elle a formé.
La comtesse de Foix, cette pieuse dame,
Admirant sous ses pas ce prodige nouveau,
Pour accomplir son vœu sent redoubler sa flamme,
Et construit à Marie un autel riche et beau.

Isabelle fut donc la restauratrice et comme la fondatrice de Verdelais.

Elle contribua puissamment à la restauration ou à l'agrandissement des bâtiments ; elle y rappela les pieux cénobites accoutumés à s'abriter à l'ombre du sanctuaire de Marie et à faire fleurir son culte dans le désert ; elle leur donna, pour leur subsistance, des fonds considérables situés dans les environs ; et bientôt, par l'effet de leur zèle et de ses pieuses libéralités, le culte de la Vierge de Verdelais reprit sa première célébrité.

On venait de loin y implorer des faveurs qu'on était sûr d'avance d'obtenir de la bonté facile de la Mère de miséricorde : les malades y retrouvaient la santé, les pécheurs le salut.

Le quinzième siècle coula ainsi paisible et heureux pour les populations qui environnaient le dévot sanctuaire, sans laisser d'autres traces de son passage que le souvenir des bienfaits de Marie et le récit des guérisons que la prière et la confiance avaient obtenues à ses pieds.

Le seizième siècle fut, pour la Guienne, une ère de désolation et de deuil ; les protestants avaient pris les armes, et ils faisaient également la guerre aux enfants de Dieu et aux monuments du vrai culte.

La chapelle et le monastère de Verdelais furent en butte à leur fureur en 1558, sans être cependant voués alors à la destruction.

Le mal fut bien plus grand vers l'an 1562 : tout fut livré aux flammes, et la Statue elle-même qui avait reçu les hommages de tant de siècles, fut jetée dans un vaste bûcher qui dévorait les ornements, les livres et les meubles de cet ancien établissement.

Fiers et triomphants d'avoir accompli l'œuvre de destruction, les nouveaux iconoclastes se retiraient sans songer que la justice divine allait leur demander compte de leur conduite sacrilège : Montluc les surprit près de Targon, et leur fit payer cher leurs abominables excès.

Et cependant la Statue était sortie intacte de l'embrasement.

Les fidèles qui avaient coutume de la vénérer s'en étant aperçus, la cachèrent dans un trou d'arbre, au bas de la fondrière, contiguë à l'emplacement de l'ancienne chapelle.

Mais soit qu'ils n'eussent pas eu la précaution de laisser quelque indication de l'endroit qui recélait ce trésor, soit que les années qui suivirent n'offrissent point assez de garanties de calme pour qu'on pût s'occuper de rétablir son ancien culte, le souvenir s'en perdit dans la contrée, et, après la mort de ceux qui avaient dérobé l'Image à la profanation, on ne sut plus ce qu'elle était devenue.

Mais la Providence qui l'avait préservée de l'ardeur des flammes, devait enfin la tirer de l'abime de l'oubli.

La tradition porte que, par un prodige dont l'histoire des pèlerinages nous offre plus d'un exemple, un bœuf qu'on faisait paître dans le voisinage, s'écartait tous les soirs du troupeau, et prenant, dans la fondrière, une sorte d'attitude respectueuse, poussait des mugissements qui retentissaient dans tous les environs.

Le gardien, s'avançant dans ce lieu solitaire, aperçut bientôt la tête de l'Image, et s'empressa de raconter à ses amis ce qu'il avait vu.

Les voisins accourent en foule, on retrouve l'ancienne Statue, dont l'antique gloire se transmettait dans la contrée comme un héritage de famille, et on la transporte avec le plus grand respect dans les décombres de la chapelle, que l'épaisseur de ses murs avait préservée d'une entière destruction.

Il n'est peut-être pas de sanctuaire de Marie qui ait été exposé à plus de vicissitudes que celui de Verdelais, pas de monument religieux qui ait été renversé plus souvent, et que la piété ait dû plus de fois relever de ses ruines.

Voilà ce qui explique le découragement des peuples voisins et le peu d'empressement qu'ils montrèrent pour rétablir la chapelle, après que l'antique Statue fut revenue s'abriter sous ses voûtes entr'ouvertes et ruineuses.

La guerre avait sans doute aussi diminué leurs ressources ; et, de plus, l'église paroissiale de St-Maurice d'Aubiac n'était pas fort éloignée, et elle suffisait à la population.

Mais Marie, du haut des cieux, abaissait sur la verte vallée des regards de prédilection, et elle avait résolu d'y faire jaillir encore, pour le salut de son peuple, cette source abondante de faveurs célestes qui avaient fait bénir son nom dans les générations qui avaient précédé.

Le cardinal de Sourdis fut l'instrument dont elle se servit pour accomplir ses miséricordieux desseins.

En 1609, il faisait la visite du diocèse de Bordeaux, confié à sa vigilante sollicitude.

On lui parle de Verdelais et de ses souvenirs traditionnels ; il s'y rend, il prie sur les pierres dispersées du sanctuaire, vénère l'Image du Sauveur et de Marie dans cette autre Bethléem, et se sent inspiré de rétablir l'ancienne dévotion.

Les travaux commencés à ses frais sont poussés avec activité ; la chapelle est restaurée, et elle s'agrandit d'un porche et d'un sanctuaire qui ne contribuent pas peu à son embellissement.

Le duc d'Epernon, allié à la famille des comtes de Foix et la baronne de Civrac s'associèrent à l'œuvre de reconstruction entreprise par le cardinal.

La Mère de miséricorde s'empressa, ce semble, de récompenser son zèle, et de montrer combien l'œuvre de sa pieuse munificence lui était agréable.

En 1623, une femme paralytique, qu'on dit avoir été l'épouse du greffier de Saint-Macaire, fut inspirée de se faire transporter dans le célèbre sanctuaire.

Elle invoque en ce lieu de prière le secours de la Vierge, et elle éprouve tout-à-coup une étrange douleur dans ses membres : c'était un moment de crise, précurseur de la grâce si désirée.

Elle sent bientôt circuler dans ses membres une nouvelle vigueur, et elle recouvre une santé parfaite.

Le cardinal ayant constaté la vérité du fait, se rend sur les lieux pour y offrir à la Vierge sainte l'hommage de sa piété et de sa reconnaissance.

Plein de zèle pour la gloire de ce sanctuaire, il songe à placer dans le voisinage des religieux qui, protégés par son ombre salutaire, rendent aux pèlerins tous les services que réclame leur empressement.

Les Grandmontains paraissaient en avoir abandonné le soin et abdiqué la possession.

Un seul d'entre eux, le P. Antoine de Garcies, faisait les honneurs de ces lieux ; rarement l'on y disait la messe.

Le cardinal appelle des Bénédictins de la Congrégation de Saint-Maur, et, sur leur refus, il a recours aux Célestins.

Six de ces Pères prennent possession de Verdelais au mois de mai 1625 ; et, non contents d'accueillir avec la plus affectueuse charité les pèlerins que l'instinct de la foi conduit à Verdelais, ils deviennent les apôtres du pays, et vont réveiller les populations voisines plongées dans un sommeil d'indifférence.

Dès-lors le pèlerinage recouvra son ancien éclat et fut même fréquenté par un concours de fidèles plus considérable qu'à la première époque de son établissement.

La Vierge sainte récompensait la confiance de ses serviteurs par les grâces les plus signalées, comme on peut s'en convaincre en parcourant l'histoire de Notre-Dame de Verdelais, composée par le P. Claude Proust, religieux célestin, homme de piété et d'érudition, imprimée plusieurs fois avec le précis des faveurs les plus remarquables accordées par l'intercession de la Mère de Dieu.

Puisque nous avons nommé le P. Proust, nous ne pouvons nous empêcher d'ajouter quelques lignes en l'honneur d'un vertueux cénobite, dont le nom est inséparablement uni à celui de Verdelais.

C'est lui qui contribua le plus effectivement à l'embellissement du saint lieu ; grâce à sa constance et à son habileté reconnue, le désert s'embellit et la nature y étala ses richesses.

C'est lui qui fit fermer l'ancienne porte ogivale du côté méridional, et ouvrir une porte ornée d'une nouvelle façade, avec un porche voûté du côté de l'allée.

Cette allée fut plantée de ses mains, l'esplanade élargie, les abords de la chapelle, jusqu'alors comme impraticables, rendus faciles et agréables.

Sur les flancs de la montagne voisine qui sépare Verdelais du bassin de la Garonne, il établit, à l'ombre d'un bosquet verdoyant, des stations qui rappelaient au pèlerin ému de la tendresse et de la miséricorde de Marie, les excès de l'amour de l'Homme-Dieu, et, le pénétrant de douces et religieuses émotions, lui inspiraient le désir généreux de rendre au Sauveur et à sa sainte Mère, amour pour amour, sacrifice pour sacrifice, vie pour vie.

Hélas ! ces grottes mystérieuses, le pèlerin les regrette encore, et l'avenir n'offre point sous son horizon, quelque reculé qu'il soit, de main qui puisse un jour relever l'œuvre trop peu durable du bon Célestin !

Le P. Proust, mort vers l'an 1720, les travaux qu'il avait commencés furent poursuivis et continués par suite du zèle et de l'activité qu'il avait su communiquer à tout ce qui l'entourait.

Verdelais était un des sanctuaires où la Mère de Dieu se plaisait à répandre le plus abondamment ses faveurs, et où elle recevait les hommages les plus empressés des fidèles.

Ce pieux échange de vœux et de bienfaits, de supplications et de témoignages de bonté dura jusqu'aux jours orageux de la révolution.
Avant même cette époque, un nuage de tristesse et de deuil, présage d'un plus complet désastre, enveloppa l'antique sanctuaire.

Quinze maisons de Célestins furent supprimées par lettres patentes du 5 août 1778, à l'instigation de M. et Brienne, contre les vives réclamations du pieux archevêque d'Arles, Mgr Dulau.

Quelques années après, le 1er janvier 1789, ils durent quitter Verdelais.
Pie VI consentit à la suppression de ce monastère, à condition que ses biens seraient consacrés à d'autres usages pieux.

Ils se retirèrent donc, à la réserve d'un seul, le P. Richard, que plusieurs vieillards se souviennent encore d'avoir vu, n'emportant avec eux que les insignes d'une noble pauvreté, les regrets de tous les gens de bien et les vœux non encore exaucés qu'on faisait pour leur prompt retour.

Les possessions des religieux furent d'abord affectées par Mgr de Rohan, archevêque de Bordeaux, au petit séminaire de son diocèse.

La première révolution les adjugea, dans la suite, à une foule d'acquéreurs.
La chapelle, devenue tout-à-coup église paroissiale, dut sa conservation à la conduite prudente du secrétaire de la mairie ; mais cet homme de tête et de cœur ne put empêcher la spoliation des trésors qu'elle renfermait en offrandes précieuses, en riches ornements : ils furent enlevés par les patriotes du temps.

Cependant, même en 93, le Christ était resté sur le tabernacle, et l'antique Statue occupait toujours sa niche.

Un révolutionnaire s'en étonne, et il ordonne au sacristain, père de celui qui exerce aujourd'hui les mêmes fonctions, de faire disparaître ces monuments d'un autre âge : mais ses ordres, comme ses offres et ses menaces, ne peuvent rien obtenir de cette âme généreuse.

Il appelle un maçon et lui commande de les abattre.

Celui-ci s'y refuse. L'agent républicain s'emporte et menace.
"Je te l'ordonne, dit-il, au nom de la loi."
— Et moi, répond Etienne Gassies, car Verdelais n'a pas oublié le nom de l'honnête et pieux artisan, "moi je te dis de le faire toi-même, si tu veux ; pour moi, je ne le ferai jamais."
— Tout furieux de ce double refus, notre jacobin applique lui-même une échelle pour consommer son projet sacrilège ; mais à mesure qu'il monte pour atteindre la Statue, un vertige s'empare de lui, ses genoux tremblent, fléchissent ; les assistants l'entourent et l'empêchent de s'écraser dans sa chute. Il rentra honteux chez lui, en proie peut-être à des remords. 

Cependant l'Image de la Vierge ne pouvait, sans braver trop ouvertement le triomphe momentané de l'impiété dans nos contrées, demeurer plus longtemps dans cet état.

Le généreux sacristain le comprit bien, et pour accorder quelque chose aux menaces et aux sommations de personnages influents, il s'avisa de l'envelopper d'une tapisserie et de la renverser sur le côté, au bas de son piédestal.

L'autorité fit fermer les portes, et fit défense à qui que ce fût de venir implorer la faveur du Ciel dans le lieu de prière ; pour y pénétrer seulement, il fallait une permission écrite.

On sait tout ce qu'on avait à risquer, dans ce temps de liberté, d'enfreindre ces prohibitions vexatoires ; et cependant telle était la confiance qu'inspirait, dans ces jours mauvais, la Vierge de Verdelais, tel était le besoin que des cœurs oppressés se sentaient de venir secrètement déposer leurs peines dans son sein, que des fidèles ne cessaient, dans ces jours d'orage, de solliciter du brave sacristain la faveur de pénétrer dans le sanctuaire connu, et celui-ci, cédant de temps en temps à leurs instances, leur permettait d'y faire leurs prières dans le silence et l'ombre de la nuit.

Les ruines s'amoncelaient de plus en plus à Verdelais.

Le Calvaire avait disparu : le beau monastère des Célestins, avec ses deux grands cloîtres, avait été aliéné comme bien ecclésiastique.

Le propriétaire qui l'avait acheté, pour s'épargner les frais d'entretiens et diminuer le chiffre des impositions, avait trouvé un expédient, celui de renverser une partie des bâtiments.

Mais la Providence ne voulait point permettre que l'antique monument de la foi de nos pères, ce témoignage de leur dévotion à Marie, que tant de siècles et de révolutions n'avaient pu broyer entièrement, cessât de protéger et d'embellir le sol bordelais.

Le génie du mal fut refoulé dans les abîmes par la main puissante d'un conquérant qui devait être si grand tant qu'il mériterait la faveur des cieux ; la religion se leva sur la France comme une aurore vivifiante et vint guérir ses plaies multipliées ; des pasteurs choisis de Dieu pour cette époque de régénération sociale furent, dans les différentes églises, les instruments de ses miséricordes.

Celle de Bordeaux ne cessera jamais de bénir Mgr d'Aviau, qui fut pour elle l'homme de la Providence.

Ce digne prélat acheta les ruines de Verdelais en 1820, pour en faire une retraite à l'usage des prêtres vieux et infirmes ; et dès ce moment commença l'œuvre de la restauration ; mais elle allait doucement, surtout dans le principe : il y avait tant à faire ! Douze ans de révolutions irréligieuses avaient tant accumulé de ruines et de décombres sur notre malheureuse patrie !

Cependant il n'est pas besoin de dire que, longtemps avant cette époque, dès qu'il avait été permis de pénétrer dans l'église, de généreux chrétiens y étaient accourus.

Le bon sacristain reçut une digne récompense de la prudence et du courage qu'il avait déployés dans la tourmente révolutionnaire, quand découvrant l'antique Image et l'offrant aux regards de ces chrétiens dont les cœurs débordaient de gratitude et de ferveur, il recueillit de toutes les bouches des témoignages d'admiration, des paroles de félicitation et de bonheur.

Depuis que la chapelle a été rendue au culte, elle a été fréquentée par le pieux concours des fidèles, comme elle l'était avant les jours désastreux de la révolution.

Le Petit-séminaire gratuitement sacrifié à des préjugés et à des passions, par les ordonnances du 16 juin 1828, n'a pas peu contribué à faire connaître et à faire refleurir cet antique pélerinage.

Les élèves mettaient au nombre des jours les plus fortunés de leur vie ceux où il leur était permis de s'y rendre avec un appareil religieux : c'était la plus flatteuse récompense qu' on pût accorder à leur application et à leur bonne conduite.

Tantôt le pensionnat entier et tantôt l'élite seule des élèves qui formaient la Congrégation, se rendait à Verdelais sur un bateau frété pour l'établissement.

Des exercices de piété, des chants où ils célébraient les louanges de Marie, les sons d'une musique religieuse remplissaient l'intervalle qui séparait le point de départ du terme du voyage.

Dans le sanctuaire vénéré, ils priaient pour eux, pour des parents dont le souvenir se mêlait à tous leurs exercices pieux, ils s'approchaient de la sainte table, ils offraient à Marie leurs cœurs non encore souillés de la fange du siècle, avec une ferveur et une ingénuité qui faisaient dans l'âme de ceux qui en étaient témoins les plus durables impressions.

Au sortir du saint lieu, les vertes pelouses de Verdelais, ses bosquets embaumés, ses sites enchanteurs leur offraient un agréable contraste avec ces bancs, ces salles, ces classes qui ne leur parlaient si bien de la belle nature que pour leur inspirer le regret de ne la voir jamais.

Au pied des autels ils se croyaient presque des anges, dans la verte campagne ils se retrouvaient écoliers.

Cependant, au signal donné, les jeux étaient suspendus ; la troupe obéissante, comme un navire qui, sur un simple signal du pilote, à changé la direction de ses voiles, regagnait silencieuse le saint lieu et disait adieu à Marie.

Au retour, les chants étaient plus bruyants, la joie plus expansive, et le souvenir de ce qu'on avait vu, entendu, éprouvé aux pieds de Notre-Dame de Verdelais, était un bouquet mystérieux dont le parfum ranimait dans la suite la piété et l'amour du travail.

Cet exemple a été imité depuis : des pensionnats, des congrégations, des essaims pieux de jeunes gens se sont transportés plus d'une fois au pèlerinage de Verdelais et y ont recueilli de semblables bénédictions.

Des ecclésiastiques respectables, vétérans du sacerdoce et débris précieux de l'ancien clergé, avaient eu d'abord soin de l'église de Verdelais.

Le cardinal de Cheverus, archevêque de Bordeaux, par une ordonnance de 1830, y attacha les missionnaires diocésains : parmi eux se trouvent des noms illustres qui ont répandu au loin ce parfum de piété qu'ils avaient puisé à Verdelais, MM. Goudelin, supérieur, Laborde, économe, Dupuch, plus tard évêque d'Alger, etc. Après la révolution de juillet 1830, la mission fut dissoute, et. Verdelais compta au nombre de ses curés MM. Laborde, Daon, Dagret, aujourd'hui vicaire-général d'Alger.

Cependant, Mgr Donnet avait été chargé de l'administration du vaste diocèse de Bordeaux.

En 1837, il se transporte à Verdelais et il y réclame la protection toute puissante de Marie pour le pasteur et pour le troupeau.

Une pensée se présente à son esprit, c'est que des religieux seuls peuvent succéder à des religieux et rendre à Verdelais les services que le célèbre pèlerinage reçut durant tant d'années des pieux Célestins.

Il fait appel à la charité des fidèles et demande d'abondants secours pour l'entière restauration et l'embellissement de ce qui reste encore des anciens bâtiments.

Il ne se propose rien moins dans ses vues larges que d'établir à Verdelais un corps de Missionnaires toujours disposés à recevoir les pèlerins qui viennent révérer l'Image miraculeuse ; de plus, un établissement de religieuses destinées à former des institutrices pour la campagne ; et enfin, une maison de retraite pour les étrangers qui voudraient consacrer quelques jours à la méditation des vérités éternelles.

Le prélat voit déjà les pensées de son zèle en grande partie réalisées : des Maristes, membres d'une société vouée spécialement au culte de Marie, ont été mis, dès l'année 1838, en possession de l'église et du couvent de Verdelais : les sœurs de la Présentation ont accepté, en 1843, l'établissement qu'on leur offrait, à l'ombre du sanctuaire de la Vierge de Verdelais ; elles visitent les malades, élèvent les enfants et se disposent à créer un pensionnat.

Les retraites publiques ont commencé, à côté des appartements qu'elles occupent, en faveur des personnes du sexe qui désirent passer quelques jours dans la solitude, aux pieds de Marie.

L'église se restaure et s'embellit avec une activité et un discernement qui ne font pas moins admirer les ressources inépuisables de la charité des fidèles, que celles du zèle du Prélat qui, nouveau Moïse, a frappé le rocher d'où coule le ruisseau de bienfaisance chrétienne qui fait fleurir la solitude.

Croirait-on que dans le court espace de trois ans près de cent mille francs, provenant de souscriptions entièrement étrangères à la commune de Verdelais, ont été consacrés à cette belle œuvre ?

C'est que la dévotion à Notre-Dame de Verdelais a jeté des racines bien profondes dans la contrée qu' elle couvre de sa prédilection depuis tant de siècles.

Veut-on connaître plus en détail la dévote chapelle ? En voici la topographie, que nous empruntons à l'élégant historien qui vient de recueillir et de vivifier les souvenirs de l'antique pèlerinage.

« L'église de Verdelais est petite ; elle peut avoir à peu près 33 mètres de long sur 6 mètres et demi de largeur ; sa forme est celle d'une croix latine, et son abside demi-circulaire. L'intérieur est propre, tout y est entretenu avec ordre ; mais on n'y voit que bien peu de traces de sa haute antiquité. Les murs jusqu'à une certaine hauteur, (4 mètres à peu près) sont revêtus d'une boiserie que surmonte une corniche élégante et denticulée : des tableaux qui figurent tout autour, à une certaine hauteur, en guise de panneaux, rappellent les différentes scènes de la vie de Marie ; le bas est occupé par des confessionnaux adaptés à des niches. La chaire est élégante et en pierre du pays ; on y remarque quelques rares incrustations de marbre et des sculptures admirables. Au centre de l'abside s'élève le maitre-autel à la romaine, simple et modeste, mais régulier et en marbre. Le tabernacle est petit, en marbre blanc, et charmant par sa gracieuse simplicité. Sur le tombeau, on remarque une pièce de beau marbre de Sicile : à en juger par la coupe onduleuse des morceaux qui la composent, on dirait qu'elle provient d'une colonne torse qu'on aurait sciée en feuilles. En avant de l'autel s'élèvent deux magnifiques candélabres en marbre de Languedoc, de 2 mètres 10 centimètres à-peu-près de hauteur. Sur le marchepied en marbre, on voit un ouvrage en mosaïque qui représente le chiffre de Marie, encadré dans un cercle où sont représentés le soleil dans tout son éclat, la lune au-dessous et sur une banderolle qui flotte aux vents, ces paroles de l'Apocalypse : Signum magnum apparuit in cœlo.... Mulier amicta sole et luna sub pediûis ejus. De chaque côté de l'autel se trouvent trois colonnes de marbre aux veines rouges, surmontées de chapiteaux très-élégants et de proportions régulières. Dans l'entrecolonnement extérieur, de chaque côté on voit deux personnages debout.... un pape et un évêque ou un abbé (apparemment saint Pierre Célestin et saint Benoit)...

Au pied du sanctuaire, se voit une niche taillée dans le mur, avec un cadre de marbre blanc et rouge : une magnifique guirlande, sur laquelle sont sculptés avec un goût exquis des glands et des feuilles de chêne, lui sert de bordure.

C'est là que se trouve l'Image de Marie, entourée de mystère, cachée modestement sous un voile blanc et un manteau d'or, sur lequel on voit briller une multitude de cœurs qui se pressent les uns sur les autres, comme des abeilles autour de la ruche hospitalière....

La Vierge est représentée assise, ayant sur la tête une couronne radiale.... Sa main droite semble se diriger sur le cœur, et de la gauche elle supporte l'Enfant Jésus, qui donne à manger à un corbillat qu'il tient à la main, emblème attendrissant de la Providence divine.... qui n'oublie pas même les petits du corbeau, et procure à tous les oiseaux leur pâture quotidienne. 

Nous pourrions rapporter, d'après les historiens anciens et modernes de Verdelais, bon nombre de faveurs merveilleuses par lesquelles la Vierge sainte a témoigné combien le culte qu'on lui rend en ce lieu lui est agréable.
Nous nous contenterons d'en indiquer brièvement quelques traits.

Un bon paysan, du côté d'Angoulême, avait un fils perclus de tous ses membres et muet depuis sa naissance.

L'affection qu'il portait à son enfant lui avait fait employer tous les moyens qui dépendaient de lui, sans pouvoir remédier à sa double infirmité.
Le bruit des prodiges de miséricorde qui s'opèrent à Verdelais, parvient aux oreilles de ce père infortuné, et répand dans son cœur le baume de l'espérance.

Il le porte à ce célèbre sanctuaire le jour de la Nativité 1715, au milieu d'une foule de cinq ou six mille personnes, accourues de diverses provinces pour célébrer l'aurore de Marie.
L'enfant était alors âgé de huit ou neuf ans.
Le père se confesse, entend la messe et se prépare à communier avec une ferveur digne d'attirer les regards de la Mère de miséricorde.
Après l'élévation, l'enfant commence à bégayer et à tendre les mains, et le père, saisi et transporté, ne peut s'empêcher, malgré toute sa foi et son respect pour le redoutable mystère des autels, de faire éclater sa joie par un cri.
La messe finie, tout le peuple curieux de connaître la cause de ce cri, s'approche du bon paysan et l'interroge avec empressement.
Celui-ci raconte ce qui s'est passé avec ce ton de candeur et de simplicité qui accompagne la vérité ; il fait lever l'enfant qui se tient debout, sans appui et tend les mains en prononçant quelques paroles non encore bien articulées : mais quelques heures après on l'entend parler distinctement, et commander au garçon qui l'accompagnait dans son pèlerinage d'aller chercher la monture.
Qu'on juge de la joie du bon paysan et de la surprise de la foule, témoin du prodige !

La déclaration en fut enregistrée par le sacristain de la sainte chapelle, le jour même de la Nativité, 8 septembre 1715.

Les faits qui suivent tirent de leur actualité un intérêt particulier.
« En 1813, Mme de Camiran, atteinte d'une toux violente, à la suite d'une affection hystérique, qui datait de plusieurs années, fit appeler le docteur Ducros de la Réole, qui prescrivit les remèdes convenables, mais sans succès.
Il se fit adjoindre le docteur Pouvereau, autre médecin distingué du pays.
Ces Messieurs voyant se renouveler outre mesure les quintes de toux, accompagnées de mouvements convulsifs, lui administrèrent des calmants, mais sans bon résultat.
Mme de Camiran tomba dans un état de faiblesse et de langueur alarmant.
Au mois de mai 1814, elle consulta, à Bordeaux, un médecin anglais très-célèbre qui s'y trouvait : elle suivit exactement les conseils pendant 3 mois ; mais, au lieu de ressentir du soulagement, elle tomba dans un marasme complet.
Depuis le 9 juin, un vomissement continuel vint ajouter à ses souffrances, et l'estomac étant devenu trop faible pour garder les aliments les plus légers, elle rejetait le lait de vache, d'ânesse et même l'eau pure, et ne semblait vivre que d'une tasse de café qu'elle prenait tous les matins et qu'elle vomissait un instant après.
En 1815, elle alla aux Pyrénées, mais les eaux thermales prises à leur état naturel ou combinées avec d'autres médicaments convenables, ne lui procurèrent pas de soulagement.
Depuis lors, jusqu'en 1819, elle n'a pris pour tout remède que quelques verrées de petit lait et un peu d'élixir américain ; mais rien ne put arrêter sa pénible et permanente vomiturition.
Enfin, exténuée par cette longue et désespérante incommodité, cette pieuse dame, consultant sa foi plutôt que l'impuissante science des médecins, résolut d'aller à Verdelais et d'y demander à Dieu sa guérison par l'intercession de la très-sainte Vierge.
Elle y arriva le 1er juin 1819, assista pendant neuf jours à la messe et aux autres exercices de piété, et le dernier jour, à la messe d'action de grâce, elle se trouva entièrement guérie de cette cruelle maladie, et jamais depuis n'en a ressenti la moindre atteinte.
La vérité de ce fait est attestée par une foule de personnes distinguées qui voyaient habituellement Mme de Camiran, et munie de l'attestation officielle des autorités civiles du pays, et entre autres de M. le sous-préfet de la Réole.
En 1833, une maison religieuse du diocèse d'Agen était menacée d'une ruine totale.
La supérieure accompagne une sœur malade qui a la dévotion de faire le voyage de Verdelais.
Elle se sent pressée d'implorer pour sa communauté le secours de la Vierge ; elle cède à l'inspiration ; elle s'engage par vœu, si sa maison recouvre une sécurité parfaite, à faire dans un an le chemin de Verdelais à pied et à porter à la chapelle un tableau de saint Joseph, marchant nu-pieds depuis le monument du bas de la côte.
Dans l'année, les choses changent de face ; le danger s'affaiblit et s'éloigne ; le chef du diocèse prend hautement la défense de la maison, qui devient plus florissante et plus solide que jamais.
Aussi la supérieure, émerveillée et confuse des bontés du Ciel, s'empresse-t-elle d'accomplir son vœu avec une exactitude qui remplit d'étonnement et d'édification tous ceux qui en sont témoins.
Accompagnée de deux de ses sœurs, elle fait à pied, par un temps froid et brumeux, un voyage de vingt-cinq lieues, et, arrivée le 8 décembre 1834, elle porte à la chapelle le tableau promis.
En 1835, une jeune dame, condamnée à mourir par la science humaine, éleva son cœur et ses espérances vers Notre-Dame de Verdelais.
Au plus fort de son mal, elle promit de déposer à ses pieds sa montre en or avec cent francs pour les pauvres, comme gages de reconnaissance pour le bienfait de sa guérison qu'elle sollicitait de sa bonté maternelle.
Marie entendit à l'instant sa prière ; et dix jours après, la malade, dans le-transport de joie que lui causait sa guérison, accomplissait son vœu. M. Ducommet, curé de Monclar, sa paroisse, certifia ces faits de sa main, le 5 octobre 1835.
Peu de surprises aussi agréables que celle d'un Monsieur de Bordeaux que la dévotion conduisait à Verdelais, au mois d'octobre 1836.
Il avait rencontré, au sortir de l'église, une famille distinguée qui venait, avec M. le curé de Cenon-la-Bastique, d'accomplir son pèlerinage.
Après l'échange des premières civilités, il la console de l'affliction qu'elle a dû éprouver, l'année précédente, en perdant l'aînée de la famille.
— Mais, s'écrie le Monsieur à qui ces paroles s'adressent, cette demoiselle que vous croyez morte, la voilà devant vous, le disputant à ses frères et sœurs par la résolution avec laquelle elle prend son déjeuner.
— Mais quoi, reprend le Bordelais, une personne bien informée m'avait appris que cette naïve enfant était atteinte d'une maladie grave ; que, retirée du pensionnat, elle n'avait pu se rétablir au sein de sa famille ; que tout espoir de guérison était perdu ; qu'elle s'en était séparée elle-même à l'instant où la jeune demoiselle allait rendre le dernier soupir.
— Oui, répond le père fortuné, tout espoir de conserver notre enfant nous était enlevé, lorsque mon épouse recourut par un vœu à Notre-Dame de Verdelais. A l'instant le mal diminua, les symptômes nous permirent d'espérer, et, en quelques semaines, à pareil jour qu'aujourd'hui, notre fille fut parfaitement rétablie. Et c'est pour célébrer ce jour anniversaire, jour de joie et de reconnaissance pour une famille à qui Marie a daigné accorder une si enivrante consolation, que nous nous sommes présentés à son sanctuaire.





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