Notre-Dame des Dunes
(Dunkerque)
Notre-Dame des Dunes doit son origine a une statuette de la sainte Vierge trouvée en terre au commencement du quinzième siècle, près des dunes, lorsqu'on relevait les fortifications de la ville, que les Anglais, peu auparavant, avaient presque entièrement rasées.
Heureux de cette découverte, les habitants de Dunkerque bâtirent aussitôt une chapelle où ils placèrent la statue, et on vint en foule prier a ses pieds.
Le nautonier y demandait, au départ, une heureuse navigation, puis en rendait grâces au retour.
Les familles y priaient pour un père, un époux, une fille, exposés à la fureur des vents et des flots.
Toutes les infirmités et les maladies, même incurables, venaient y chercher leur guérison, et de nombreuses faveurs obtenues entretenaient continuellement la dévotion du peuple pour ce sanctuaire.
En 1658, pendant le siège de Dunkerque par Turenne, la petite chapelle acquit un autre genre de célébrité par la mort du maréchal d'Hocquincourt, que les Espagnols, obligés de battre en retraite, y avaient déposé mortellement blessé, et par la visite de Turenne, qui y vint recueillir ses dernières paroles, avec ses regrets de s'être jeté dans le parti ennemi, pour quelques mécontentements qu'il prétendait avoir reçus de la cour.
En 1667, Vauban, chargé par Louis XIV de refaire les fortifications, sépara la chapelle d'avec les dunes, par un rempart extérieur, et l'enclava dans une demi-lune entourée d'un fossé.
De là résultèrent deux faits dignes de remarque :
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le premier, c'est qu'on n'appela plus la chapelle Notre-Dame des Dunes,
mais Notre-Dame de la Fontaine, parce qu'une source ayant été
découverte en ce lieu, on y avait construit une fontaine adossée à un
des murs de l'église ;
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le second, c'est que les fidèles ne purent plus venir prier dans le
sanctuaire qui leur était si cher. Cependant, ils n'en continuèrent pas
moins de venir s'agenouiller au lieu qui en était le plus rapproché, et
d'y prier la Vierge, les yeux tournés vers sa chapelle qu'ils ne
voyaient plus.
En 1713, les fortifications ayant été rasées en vertu du traité d'Utrecht, on put reprendre le chemin de la chapelle ; et, en 1714, on y célébra solennellement la Nativité de la sainte Vierge.
Bientôt, l'édifice se trouvant trop petit pour le nombre de ceux qui venaient y prier, le premier échevin de la ville offrit d'en bâtir à ses frais un autre plus vaste, à condition de rentrer dans ses fonds à mesure des recettes que ferait la chapelle.
La proposition acceptée avec bonheur, les ouvriers se mirent aussitôt à l'œuvre, et, en peu de temps, grâce a leur zèle, à leur dévouement, la nouvelle chapelle fut achevée, et on put y célébrer le saint sacrifice.
Bientôt les offrandes y affluèrent ; et ce n'étaient pas seulement les riches qui apportaient leurs dons aux pieds de Marie, mais des pauvres, des paysans, des soldats, quelquefois même des Anglais ou autres étrangers, et surtout les matelots au retour de la pêche d'Islande, en septembre, octobre et novembre.
Des milliers de personnes demandaient qu'on offrît pour elles le saint sacrifice dans un sanctuaire si vénéré ; quelquefois même on y chantait des messes solennelles pour obtenir la cessation d'une sécheresse nuisible aux biens de la terre.
Toutes les fêtes de la sainte Vierge, et principalement toute l'octave de la Nativité, s'y célébraient en grande pompe, et alors un drapeau blanc était arboré à l'extérieur en signe d'allégresse.
La prospérité de la chapelle alla toujours progressant, jusqu'aux jours qui précédèrent la révolution. L'année même avant que la tempête politique éclatât, le saint sacrement resta exposé jour et nuit pendant toute l'octave de la Nativité, et les âmes pieuses s'y pressèrent, autour de l'autel, la nuit comme le jour.
La révolution arriva ; on fit main-basse sur les objets d'or et d'argent que possédait la sainte chapelle, mais sans toucher à l'image miraculeuse, qui continua de recevoir sur son autel les hommages des habitants de cette ville et surtout des marins.
En 93, Dunkerque ayant été assiégée par une armée anglaise sous les ordres du duc d'York, on se voyait sur le point de succomber après une courageuse résistance, lorsque, le 8 septembre, fête de la Nativité de la sainte Vierge, on vint recommander la ville à la bénie chapelle ; et, dans la nuit suivante, l'ennemi se retira, abandonnant le siège contre toute prévision. Malgré un signe de protection si frappant, la chapelle fut, pendant dix-huit jours, fermée au culte, par suite des décrets de la Convention, puis transformée en atelier de fabrication de projectiles de guerre, puis renversée par l'éclat de la poudrière qu'on y avait établie, et enfin démolie jusqu'aux fondements, par ordre du conseil de la commune, sans toutefois toucher à la statue, qu'une femme pieuse avait soustraite à l'impiété révolutionnaire.
Les choses demeurèrent en cet état jusqu'en 1812 : alors des enfants de onze a douze ans, ayant ouï raconter, dans les soirées d'hiver, l'histoire de l'antique chapelle, s'entendirent entre eux, ramassèrent des briques ça et là, et les liant entre elles avec de la terre glaise au défaut de ciment, ils élevèrent sur le lieu même de l'ancien sanctuaire un petit autel en plein vent à Notre-Dame de la Fontaine. L'autel dressé, ils y placèrent une statue de la Vierge, dont leur fit don une vieille femme du quartier touchée de leur belle action ; puis, chaque jour, ils allèrent allumer des cierges et réciter des prières devant cet oratoire improvisé. Ce fait attira d'abord la visite des curieux, puis l'intérêt des âmes pieuses, qui prirent a cœur d'orner le petit autel, et d'y faire brûler des cierges pendant tout le jour.
On ne s'en tint pas là, on conçut le projet de rebâtir la chapelle, on recueillit en peu de temps les aumônes suffisantes ; et, le 29 août 1815, on vit paraître dans les rues de Dunkerque une belle procession composée du clergé, des autorités de la ville, de ses plus notables habitants, des pêcheurs, dans leur costume traditionnel, dont deux portaient les cinq premières pierres de la chapelle sur une civière élégamment décorée, de quatre femmes de pêcheurs qui, dans leur riche et ancien costume, entouraient la civière, enfin d'un capitaine de pêche portant la statue miraculeuse.
On bénit les cinq pierres, et, depuis ce moment, les travaux furent poussés avec tant d'activité que, le 25 mars 1816, on put bénir solennellement la chapelle au bruit du canon et de toutes les cloches de la ville, etaux acclamations de la multitude qui couvrait les remparts et la plaine environnante.
Le 8 septembre, on y fêta avec la plus grande solennité la Nativité de la sainte Vierge, la foule fut immense, et les étrangers y affluèrent comme les indigènes.
Le sentiment de la reconnaissance inspira des dons considérables, à l'aide desquels on surmonta l'édifice d'une belle flèche, on couronna la Vierge et l'Enfant Jésus de couronnes de diamants, on embellit le sanctuaire d'un devant d'autel portant un médaillon d'argent massif d'un très-grand prix ; on ajouta à la porte de la chapelle une décoration extérieure, avec l'inscription : Ave, maris Stella, je vous salue, Étoile de la mer, pour faire connaître que Marie couvre les marins de sa protection spéciale.
L'an 1839 offrit un exemple mémorable de cette protection maternelle.
Alors un navire employé à la pêche de la morue sur les côtes d'Islande se trouva assailli d'une épouvantable tempête ; en peu de temps, le mal et le gouvernail furent brisés, et deux hommes engloutis dans les flots.
Alors tous les gens de l'équipage délaissés sur le pont, pendant onze jours entiers, sans apercevoir aucun moyen de salut, se jettent fréquemment à genoux, appellent au secours Notre-Dame des Dunes, et s'engagent par vœu à aller, à leur retour, pieds-nus, les yeux baissés et en silence, la visiter dans son sanctuaire, même avant de voir aucun de leurs proches ; leur vœu est entendu.
Le douzième jour, arrive un autre bateau de pêche, qui les sauve tous d'une mort imminente.
Revenus à Dunkerque, ils accomplirent leur vœu avec une religieuse exactitude ; et ce ne fut qu'après une heure passée en prière aux pieds de leur libératrice qu'ils vinrent se jeter entre les bras de leurs parents.
De nombreux ex-voto couvrent les murs de ce célèbre sanctuaire ; et a la voûte sont suspendus de petits navires et autres objets attestant les bienfaits de la Mère de Dieu.
Il est d'autres ex-voto d'or ou d'argent qui se conservent dans le trésor de la chapelle, et qu'on en retire aux jours de fête pour relever par leur éclat les autres ornements du saint lieu.
Source : Livre "Notre-Dame de France ou Histoire du culte de la Sainte Vierge en ..., Volume 2" par André Jean Marie Hamon
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