Les symboles chrétiens
L'arbre de Jessé
L’arbre
de Jessé est un motif fréquent dans l'art chrétien entre le XIIe et le
XVe siècle : il représente une schématisation de l'arbre généalogique
présumé de Jésus de Nazareth à partir de Jessé, père du roi David.
Origine
Albâtre, XVe siècle, classé Monument historique 1,
Notre-Dame-des-Fleurs (Plouharnel)
Il
semble que l'origine de ces iconographies remonte à une formule du
livre du prophète Isaïe Is 11,1, « Puis un rameau sortira du tronc
d’Isaïe2, et un rejeton naîtra de ses racines ».
Les
artistes combinent cette phrase avec la généalogie de Jésus Christ
telle qu'elle apparaît dans l'évangile selon Matthieu (I, 1) :
Généalogie de Jésus Christ, fils de David, fils d'Abraham ou selon Luc
(3, 23-38). À propos de l'arbre de Jessé, une démarche analogue est
souvent faite pour Marie de Nazareth.
La
plus ancienne représentation connue du motif de l'arbre de Jessé date
de 1086. Elle apparaît dans le Codex Vyssegradensis, évangile du
couronnement de Vratislav II de Bohême. L'arbre de Jesse n'est pas
utilisé pour porter un ensemble de figures, comme habituellement. À leur
place, un phylactère décrit le passage tiré de la prophétie d'Isaïe de
manière litérale. Le prophète s'approche de Jessé, entre les pieds de
celui-ci un arbre s'élève; Isaïe entoure Jessé d'une banderole contenant
les mots : « un petit rameau sortira de Jessé et donnera une fleur
splendide ».
Iconographie
Arbre de Jessé, avec Jessé assis
Jessé
est d'abord représenté couché ou à demi couché, puis assis. Dans le
livre de chasse de Gaston Phébus par exemple, Jessé, d'ordinaire endormi
allongé, somnole assis en chaire. Les noms des grands ancêtres
bibliques de la généalogie du Christ sont inscrits sur la corolle d'où
émergent, en buste, les deux plus proches; les plus importants sont Noé,
le grand ancêtre (et « inventeur » de la vigne) et David (le roi modèle
par excellence). Jessé est souvent endormi, la tête soutenue par une
main6. Cette position du dormeur est parfois associée à un songe
prophétique concernant la descendance du dormeur. Le Moyen Âge
connaissait l'épisode du Songe d'Astyage. Astyage, grand-père de Cyrus
le Grand, avait vu en rêve une vigne sortant du ventre de sa fille
Mandane.
De
même, dans la Vie de Géraud d'Aurillac d'Odon de Cluny, on trouve le
récit d'un songe fait par le père de Géraud : « Alors qu'il dormait, il
lui fut donné avis d'avoir commerce avec sa femme : un fils lui naîtrait
car il lui fut mandé également, ajoute-t-on, de lui donner le nom de
Géraud, et il lui fut dit, en outre, que cet enfant serait du tout
premier mérite. » L'art roman montre Jessé allongé sur le sol en plein
air, mais dans l'art gothique il apparaît plus souvent dans un lit,
voire dans un cadre assez luxueux comme dans l'église Saint-Étienne de
Beauvais dont le vitrail date de 1520.
De
son flanc ou de son ventre, parfois de son dos5,8 ou plus rarement de
sa bouche, sort un arbre dont les branches portent les ancêtres supposés
de Jésus, notamment David reconnaissable à sa harpe, jusqu'à Marie. Le
vitrail de la cathédrale de Chartres représente de bas en haut David,
Salomon, Roboam, Abia, Marie et enfin Jésus. S'y ajoutent selon les
artistes, les textes qu'ils utilisent et la place dont ils disposent,
des personnages de l'Ancien Testament, notamment les prophètes dont les
exégètes du Moyen Âge pensent qu'ils ont annoncé la venue du Christ. Ils
sont quatorze sur le vitrail de Chartres (leurs noms sont dans les
phylactères) : à gauche de bas en haut Nahum, Samuel, Ézéchiel,
Zacharie, Moïse, Isaïe, Habacuc, à droite de bas en haut Osée, Amos,
Michée, Joël , Balaam, Daniel, Sophonie. Au sommet se trouve Jésus,
parfois sur la croix, parfois enfant sur les genoux de sa mère Marie,
parfois en majesté, comme sur le vitrail de Chartres. Une colombe tout
en haut peut représenter l’Esprit: à Chartres et dans d'autres vitraux,
sept figures de colombe entourent Jésus, représentant les sept dons
attribués au saint Esprit.
Au
XIIIe siècle, l'arbre se développe verticalement, et au XIVe siècle il
se ramifie latéralement4. Le XIIIe siècle est une période faste pour
l’Arbre de Jessé en France. Une période de ralentissement lui succède
qui dure une bonne partie du XIVe siècle et se caractérise par l’arrêt
de la production dans le vitrail et la sculpture et sa raréfaction dans
le manuscrit. Puis l’arbre de Jessé réapparaît au début du XVe siècle,
se développe progressivement dans la première moitié du siècle et
connaît un nouveau succès dans le troisième quart du XVe siècle, avec
une production intense et standardisée dans le vitrail et les
incunables. Ce dynamisme perdure pendant toute la première moitié du
XVIe siècle dans le vitrail et s’étend aux autres supports. Rien que
dans la France du Nord, du XIVe siècle au XVIIe siècle siècle, Séverine
Lepape, dans la présentation de sa thèse, mentionne d'en avoir dénombré
environ 300, sous forme d'enluminures, gravures, vitraux, sculptures, la
peintures murales, tapisseries, textiles et arts graphiques, pour une
époque où les arbres de Jessé se faisaient plus rares.
Une
modification de l’emplacement de l’arbre de Jessé accompagne cette
diversification. Tout d’abord utilisé comme illustration du début de
l’évangile de saint Matthieu, le motif s’oriente, à partir du
XIVe siècle, vers un contexte de plus en plus marial, avec le Speculum
humanae salvationis ou les livres d’heures. L’arbre de Jessé dans le
vitrail connaît souvent un emplacement de choix, chœur de l’édifice ou
chapelles mariales. Les protagonistes de l’arbre de Jessé évoluent.
Jessé passe parfois de la position allongée à assise. Le Christ et la
Vierge qui, au XIIIe et XIVe siècle, étaient présentés individuellement,
forment, à partir du début du XVe siècle, un couple indissociable. Le
nombre de rois passe d’un petit nombre à douze. Les prophètes, après une
relative disparition, réapparaissent ponctuellement aux côtés de Jessé.
Le saint Esprit n’est pratiquement plus représenté. Enfin, l’arbre de
Jessé se fait progressivement envahir par d’autres personnages, comme
ceux de la sainte parenté.
La
place qu’occupe la Vierge est déterminante et, au fur et à mesure que
l’importance de la Vierge se concrétise, l’arbre de Jessé apparaît comme
une généalogie de la Vierge, où ses parents et sa lignée sont
représentés.
Encore
présent dans l'iconographie chrétienne du XVe siècle et au début du
XVIe siècle, le motif décline ensuite et se raréfie, en France, après la
Contre-Réforme. Il continue à fleurir en Europe, en Allemagne ou en
Autriche. Il retrouve le goût du temps avec le néoroman et néogothique
de la fin du XIXe siècle.
Les supports
L'arbre
de Jessé a été un motif populaire dans tous les arts plastiques. On en
trouve des exemples dans les manuscrits enluminés, la gravure, le
vitrail6, la sculpture monumentale, les fresques, les tapisseries, la
peinture, les écussons, autels, retables ou la broderie.
Les manuscrits
Bible des Capucins, Bibliothèque nationale de France, vers 1180
Psautier de Scherenberg, Strasbourg, vers 1260
Miniature montrant 43 générations
Les
arbres de Jessé apparaissent dans des bibles, des psautiers, des livres
d'heures. Le motif apparaît dans plusieurs bibles romanes, dont la
Bible de Lambeth, sous forme d'une majuscule décorée au début du Livre
d'Isaïe ou de l'évangile de Matthieu. La bible de Saint-Bénigne de
Dijon, qui date du XIIe siècle, est une des plus anciennes qui nous soit
parvenue. Elle montre Jessé et les sept colombes représentant les sept
dons du Saint-Esprit.
Une
représentation des 43 générations est donnée dans une miniature du
Maître de Jacques de Besançon11. La page est extraite de la Légende
dorée de Jacques de Voragine, traduite par Jean de Vignay12. Le dernier
couple, dans cette généalogie, est formé des parents de Marie, Anne et
Joachim.
La
Bible des Capucins13 (dernier quart du XIIe siècle) conservée à la
Bibliothèque nationale de France en est un autre exemple, l'arbre de
Jessé décorant l'initiale L majuscule du mot Liber generationis dans
l'évangile de Matthieu. L'initiale occupe, c’est dire son importance par
rapport au texte, les deux tiers de la page. Son emplacement est à la
jonction de l’Ancien et du Nouveau Testament, de l’Ancienne et de la
Nouvelle Alliance. L'arbre de Jessé endormi montre, surgi de son flanc,
les rois d'Israël représentés par un personnage barbu qui est peut-être
Melchisédech puis le roi David, témoins d’une promesse inscrite sur
leurs phylactères : « Le Seigneur l’a juré : « tu es prêtre pour
l’éternité, à la manière de Melchisédech » » et « L’amandier (dont la
floraison avant le printemps annonce le temps du renouveau) fleurira, la
sauterelle s’alourdira, le fruit du câprier éclatera ». Au-dessus d'eux
Marie, dont le phylactère contient le texte : « Toutes les générations
me diront bienheureuse », et enfin le Christ adolescent entouré de sept
colombes, symboles des sept dons de l'Esprit. Il tient un phylactère qui
reproduit le verset (2.,1) du Cantique des Cantiques : « Je suis le
narcisse de la Plaine, le lys des vallées ». Dans les médaillons situés
de part et d'autre sont représentés dans des rinceaux, des prophètes
porteurs de phylactères annonçant la venue du Messie. qui ont annoncé la
venue du Messie. Leurs regards et gestes convergent vers Jésus. Le
choix, parmi les quarante-deux protagonistes contenus dans la généalogie
de Matthieu, de deux rois seulement donne une place de choix à la
Vierge qui pourtant n'est pas évoquée dans le texte de l'Évangile. Ceci
illustre le fait qu'elle est devenue prépondérante. Les deux médaillons
du haut qui entourent le Christ signifient l'acceptation ou le refus de
l'incarnation du Messie : à sa droite, aux côtés de saint Pierre,
l'Église des baptisés (traduction du phylactère « Qui croira et sera
baptisé sera sauvé ». À sa gauche, en détournant le regard du Christ, et
malgré la présence de Moïse, la Synagogue des circoncis (traduction du
phylactère « Qui ne sera pas circoncis sera exclu »).
Le
roi David étant considéré comme l'auteur des Psaumes, les psautiers
étaient souvent illustrés d'un arbre de Jessé, où l'arbre de Jessé
s'enroule autour du B majuscule du texte latin Beatus Vir au début du
premier psaume. Un des premiers exemples en est le psautier de
Huntingfield, qui date de la fin du XIIe siècle. La British Library
possède un très beau psautier du XIVe siècle, dit de Gorleston. Dans ces
deux exemples Jessé est allongé au pied de la lettrine B. On peut
également citer le psautier de Macclesfield (Fitzmuseum, Cambridge) et
le psautier et livre d'heures de Bedford.
Certains
manuscrits consacrent une page entière au motif, en ajoutant des
personnages, par exemple la Sibylle de Cumes dans le psautier
d'Ingeburge vers 1200 (Musée Condé, Chantilly). Dans un manuscrit
conservé à Douai, on trouve un arbre simple avec, de part et d'autre du
tronc central, des personnages portant leur nom. Le somptueux
frontispice du psautier de Tickhill en est un autre exemple.
Le vitrail
Le
vitrail est le support de prédilection, avec les manuscrits, pour la
présentation des arbres de Jessé. La forme de la lancette s'y prête
particulièrement.
Selon
le récit de Suger dans le De administratione, le vitrail de l'arbre de
Jessé commençait la série des vitraux de chœur de l'abbatiale de
Saint-Denis. Ce vitrail endommagé au moment de la Révolution a été
restauré par Eugène Viollet-le-Duc. Il ne subsiste que 4 panneaux
anciens datant de 1140-114418. La verrière N° 49 de la cathédrale de
Chartres, exécuté entre 1145 et 1155, s'inspire de celle de Saint-Denis
en est un exemple. Elle est le premier vitrail qui contient la
généalogie complète. La cathédrale de Troyes en possède également un
entier. La Cathédrale du Mans en possède plusieurs. On trouve en fait
des vitraux d'arbres de Jessé dans toute l’Europe. La Cathédrale d'York,
Cathédrale de Cantorbéry sont d'anciens exemples anglais. Dans l'église
Saint-Étienne de Beauvais, il y a un vitrail réalisé par Engrand
Leprince. L'église Saint-Godard de Rouen contient un vitrail réalisé par
Arnoult de Nimègue en 1506 pour la chapelle de la Vierge.
Chartres
Troyes
Nuremberg (de)
Bernkastel-Kues (de)
Beauvais
Hasselt
Des
vitraux modernes continuent à être créés. Georges Braque a créé un
vitrail représentant un arbre de Jessé de l'église paroissiale
Saint-Valery de Varengeville-sur-Mer en 1954. Dans la cathédrale
Notre-Dame de Reims, les vitraux contemporains les plus célèbres sont
trois fenêtres de Marc Chagall de 1974, situées dans la chapelle axiale,
dont un arbre de Jessé.
La sculpture
Arbre de Jessé, calcaire, XVIe siècle, Musée de l'Hospice Saint-Roch à Issoudun.
Arbre de Melchisédech, calcaire, XVIe siècle, Musée de l'hospice Saint-Roch à Issoudun
Les
sculptures, en général en pierre, sont moins répandues. On les trouve
sous la forme de haut-reliefs, soit en angle, comme à Issoudun, soit le
long de piliers, ou encore en tympans.
Le
tympan du grand portail de la Cathédrale Notre-Dame de Rouen, réalisé
par Pierre des Aubeaux - parfois orthographié « Alobeaux » ou
« Desobeaux », en est un splendide exemple. L'église Saint-Étienne de
Beauvais possède un tympan dont les têtes ont disparu. La cathédrale de
Worms en possède également un.
La
chapelle Saint-Roch, intégrée dans le musée de l'Hospice Saint-Roch
contient dans une vaste salle deux arbres de Jessé exceptionnels,
exécutés probablement au moment de la restauration de la chapelle sous
Pierre de la Chèze, maître de l'hôtel-Dieu de 1499 à 1510. Ces
sculptures de fine pierre calcaire mesurent 5,70 m de haut pour une
envergure de 3 m. Elles sont taillées en ronde bosse et en haut-relief
et étaient à l'origine polychromes. Dans la représentation, Jessé est
couché, un tronc sort de ses côtes, et le premier personnage,
reconnaissable à la harpe, est David. En haut, au centre, se trouve
Marie, tenant Jésus dans ses bras. Le deuxième arbre est un arbre de
Melchisédech. D'après Jules Chevalier, les deux arbres de Jessé sont les
arbres généalogiques Jésus-Christ, le premier comme roi, le deuxième
comme prêtre, car d'après les prophètes, le Messie promis doit être à la
fois de race royale et souverain prêtre.
La
sculpture qui est à droite dans la chapelle justifie l'ascendance
royale, la sculpture de gauche présente Jésus comme l'héritier du grand
prêtre Melchisédech et du souverain pontife Aaron, frère de Moïse. Les
sculptures s'étendent du sol au plafond. Le socle en pierre représente
un rocher, et sur chacun des rochers repose, couché et endormi, un
personnage vêtu de riches habits et de la poitrine duquel sort un tronc
d'arbre. Les rameaux s'étalent en espalier sur le mur. Sur l'arbre de
droite est un figuier. Au pied, il y a Jessé (son nom est inscrit sur la
banderole qu'il porte), la tête appuyée sur la main droite. Les
personnages sur les rameaux sont les uns couverts d'une armure, l'épée à
la main, d'autres portent un sceptre et un manteau royal. On ne voit
plus les traces des noms inscrits sur les banderoles qu'ils tiennent,
mais ces personnages représentent les seize rois des Hébreux depuis
Jessé jusqu'à la captivité de Babylone. L'autre arbre est un chêne, aux
branches chargées de glands, « arbre cosmique qui transmet les messages
célestes à la terre ». Il reproduit la filiation sacerdotale du Christ
(Dans d'autres compositions, les deux généalogies sont confondues sur
une même tige, alors qu'ici, les deux groupes figurent dans deux arbres
séparés). Le personnage au pied de l'arbre, à la longue barbe, est le
grand prêtre Melchisédech. Sa coiffure est une sorte de bonnet pointu.
De la main droite, il montre le tronc de l'arbre. L'arbre est surmonté
d'un oiseau qui abrite et nourrit ses petits. Les personnages sont
debout ou assis, le regard tourné vers le centre où se trouvait une
figure qui a disparu. Dans le premier rang, on reconnait Aaron au
centre, et à sa droite Moïse avec devant lui les tables de la loi.
D'autres portent les attributs qui les identifie comme prêtres :
l'éphod, grande écharpe tenue par une fibule, et le pectoral du grand
prêtre.
Arbre de Jessé de la Basilique Saint-Jean-Baptiste de Chaumont
Musée Carnavalet, Arbre de Jessé, en bois (détail)
La
Basilique Saint-Jean-Baptiste de Chaumont contient un exemple
remarquable d'arbre de Jessé en haut-relief datant du premier quart du XVIe
siècle. Le haut-relief en calcaire mesure 4,50 mètres de haut sur 3,20 m
à sa base. On y voit Jessé assis, endormi. L'arbre lui-même porte une
douzaine de personnages, et est couronné d'une Vierge à l'Enfant. Sur la
première branche, à gauche, on reconnaît David à la harpe qu'il porte.
Au sol gît l'énorme tête de Goliath. À droite, le personnage débout est
le prophète Isaïe.
Au
Musée Carnavalet, à Paris, on peut voir un arbre de Jessé en bois, très
haut, et en assez mauvais état. Il est installé dans la cour dite
d'Henri IV, qui jouxte les salles d'enseignes. Elle mesure 9 mètres de
hauteur et a une largeur de 37 cm et date de la fin du XVe
siècle. À l'origine, cette colonne en chêne, se trouvait à l'angle de
la rue Saint-Denis et de la rue des Prêcheurs. Elle représente divers
patriarches ou rois, sur des tiges bien reconnaissables ; les têtes des
personnages ont été détruites. Des représentations sous forme de
pilastres ou colonnes sont par exemple le pilastre de la salle
capitulaire (chapter house), Abbaye de Westminster, ou encadrement du
portail nord du baptistère de Parme : sur son montant droit est sculpté
un arbre de Jessé, sur le montant gauche une généalogie aboutissant à
Moïse.
Arbre de Jessé de l'Église de Saint-Aignan (Morbihan)24
En
Bretagne, on rencontre un autre type d'arbre de Jessé, plus tardif.
Comme fréquemment, c'est la Vierge à l'Enfant qui est la figure
centrale. Jessé est couché, mais il n'est pas seul. Il lui est associé
un deuxième personnage, féminin, à l'allure fantastique. Elle est
couchée soit tête-bêche, soit au-dessus de Jessé, elle a la même taille,
est cornue, a la poitrine nue et le bas du corps, couvert d'écailles,
se termine par une longue queue qui se love autour du tronc de l'arbre.
Dans une main, elle tient une pomme, l'autre bras également couvert
d'écailles se termine par une main griffue à quatre doigts. En haut
relief ou en statue, ces arbres de Jessé sculptés en bois, et
polychromes, se rencontrent à Saint-Aignan (Morbihan), Saint-Thégonnec,
Cléguérec, ou à Trédrez-Locquémeau. Il y a au moins quinze arbres
sculptés en Bretagne; treize introduisent la figure d'une démone,
cornue, à la poitrine dénudée, tenant une pomme, et allongée. Ce sont
ceux de Cléguérec, Duault, Guimaëc, Loc-Envel, Locquirec, Ploerdut,
Plounevezel, Plourin-Morlaix, Saint-Aignan, Saint-Thégonnec,
Saintt-Tugdual, Saintt-Yvi et Trédrez. Ils datent du XVIe siècle, hormis
cinq arbres datant du XVIIe siècle.
Autres supports
Arbre de Jessé, ivoire, Bamberg (?) vers 1200. Musée du Louvre
On
trouve des arbres de Jessé, en Autriche ou Allemagne, sculptés dans des
retables ou comme dessus d'autel, par exemple le retable de l'église
paroissiale Saint-Étienne (de) de Braunau am Inn, même si la filiation
n'y est pas clairement visible et Jessé est absent, ou le dessus d'autel
de l'église Saint-Pierre-et-Saint-Paul de Sankt Pantaleon-Erla, en
Basse-Autriche. Un autre support est choisi dans la cathédrale
Notre-Dame du Siège de Séville en Andalousie, où l'arbre figure dans la
grille du chœur. Le plus somptueux exemple est peut-être le retable de
la chapelle Sainte-Anne de la cathédrale Sainte-Marie de Burgos, une
œuvre de Gil de Siloé et Diego de la Cruz. Au sommet duquel trônent la
Vierge et l'enfant, mais au cœur de l'arbre figure la rencontre d'Anne
et de Joachim son époux. D'autres supports ont été utilisé; ainsi,
l'arbre de Jessé est blason de Het Bloemken Jesse (en français : la
Petite Fleur de Jessé), qui est une chambre de rhétorique de Middelbourg
en Zélande et qui existait déjà au XVe siècle.
Braunau am Inn
Sankt Pantaleon-Erla
Notre-Dame du Siège de Séville
Sainte-Marie de Burgos
Peintures
Les
peintures d'arbres de Jessé sont en général plus tardives. Un tableau
atrribué à Geertgen tot Sint Jans ou à Jan Mostaert, peint à l'huile sur
panneau, montre les rois David, Solomon, Rehoboam, Abia, Asa,
Jehosaphat, Joram, Uzziah, Joatham, Achaz. Hezechias et Manasse. Des
deux côtés de Jesse sont deux prophètes, probablement Isaïe et Jérémie.
La donatrice est agenouillée. Le tableau est actuellement prêté au Musée
Boijmans Van Beuningen. Une peinture murale dans l'église paroissiale
Saint-Pierre-ès-Liens de Saint-Antoine-Cumond (Dordogne). Une peinture
murale réalisée après 1453, dans l'église dite Buurkerk (en) à Utrecht.
Israhel van Meckenem (1445 - 1503) a réalisé un gravure de l'arbre de
Jessé27.
Développements
Le
succès de la représentation iconographique de la généalogie par l’arbre
de Jessé entraîne sa popularisation. Il sert de modèle pour représenter
la généalogie, des familles royales d'abord, et devient enfin le
prototype de l'arbre généalogique. À partir du XVe siècle siècle, des
communautés religieuses aussi choisissent un modèle assez proche de
l’arbre de Jessé : le fondateur est figuré donnant naissance à un arbre
qui porte les plus insignes membres de l’ordre. Chaque ordre développe
un arbre selon des modalités spécifiques : on trouve ainsi des arbres de
Franciscains et de Dominicains. L’arbre de Jessé a inspiré des arbres
de parenté féminine du Christ à partir de la fin du Ve siècle siècle,
comme l’arbre d'Anne, l’arbre d'Anne et de Joachim, ou encore l’arbre
d'Émérencie, la mère d'Anne, , et l’arbre d' Ismérie, la sœur d'Anne.
Avec
le renouveau, au XIXe siècle, du goût pour l’art roman et gothique,
l'arbre de Jessé retrouve une place notable dans les églises néoromanes
et néogothiques; en témoignent le vitrail de Notre-Dame de Paris, signé
Édouard Didron, qui date d'avant la fin, en 1864, de la campagne de
restauration confiée à Viollet-le-Duc ou le vitrail, plus modeste, de
l'église de l'Immaculée-Conception (Paris), ou encore, au centre de la
chapelle absidiale du Sacré-Cœur de l'église Saint-Pierre de Dreux, un
arbre de Jessé daté de 1877, œuvre d'Eugène Moulin. Un arbre plus
moderne est installé dans la Virga-Jessebasiliek (nl) de Hasselt sur
lequel est inscrit la date de 1989.
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