C'est ainsi que le moscovite Pavlov a pu reconnaître la sainte relique.
En
1922 les bolcheviks confisquèrent tous les objets précieux de la
chapelle, l'icône fut transposée dans l'église de la Résurrection du
quartier Sokolniki de Moscou, sans, bien sûr, sa parure de perles.
Mais revenons à l'histoire de l'icône trouvée à Paris.
Les
émigrés firent venir dans l'échoppe des experts qui examinèrent la
surface du bois, prélevèrent des échantillons de vernis et de peinture.
Ils
conclurent qu'il s'agissait selon toute probabilité de l'icône disparue
de Moscou en 1812 et qu'il avait été depuis impossible de localiser.
La Providence Divine avait fait que l'icône s'était à nouveau manifestée.
Le
brocanteur, M. Cohen, ne mit pas longtemps à comprendre qu'il se
trouvait possesseur d'une pièce rarissime et c'est en conséquence qu'il
en fixa le prix.
Il en voulait 250.000 francs de l'époque (un salaire mensuel de 200 francs était considéré comme satisfaisant).
Un
Comité fut crée pour le rachat de l'icône et, assez rapidement, la
colonie russe réussit à réunir la somme indispensable pour pouvoir
verser des arrhes.
L'icône pu provisoirement être retirée de la boutique.
Elle
fut solennellement apportée dans la cathédrale Saint Alexandre de la
Neva, rue Daru où devant une immense foule de fidèles le métropolite
Euloge (Guéorguievsky) dit à l'issue d'un office de grâces : "Que cette
image de la Reine des Cieux nous soit un symbole d'unité et nous trace
le chemin du retour dans notre patrie qui souffre tant".
A
partir de ce jour l'icône va de ville en ville partout en France, on
prie devant la Vierge Iverskaya dans les cathédrales orthodoxes de Nice
et de Cannes.
Les
Russes émigrés se réjouissaient de l'apparition miraculeuse de l'icône,
la collecte des fonds indispensables pour la racheter se poursuivait.
Malgré
la générosité des donateurs la somme nécessaire ne put être réunie dans
les délais fixés par le marchand. Il fallut donc lui rendre l'icône !
A.N.
Pavlov, le découvreur l'icône, était au désespoir et en été 1931 il
vint demander conseil à l'évêque Benjamin (Fedtchenkov), le fondateur de
l'église des Trois Docteurs.
Cette nouvelle paroisse, comme de nombreuses autres ouvertes par la diaspora russe à l'époque, se situait dans un ancien garage.
Le
sous-sol en avait été aménagé en une grande salle, un réfectoire et
quelques cellules avaient été installés au premier étage.
Cette
paroisse relevant du patriarcat de Moscou venait d'être crée, les
moyens manquaient pour acquérir des objets du culte et des icônes.
Les
murs de pierre n'étaient pas recouverts de crépi, l'iconostase était en
contre plaqué, les chasubles du clergé avaient été cousues par des
paroissiennes…
Mais
que d'amour et de sollicitude avaient été investies dans ces travaux.
C'est à cette époque et dans le même quartier que la mère Marie
(Skobtzoff) avait crée sa première église.
Voici
comment le métropolite Antoine (Bloom) décrit la paroisse des Trois
Docteurs de l'époque : "L'argent manquait pour acheter la nourriture
indispensable aux cinq moines qui vivaient auprès de l'église.
Ils ne se nourissaient que ce que les paroissiens leur apportaient dans des cartons qu'ils disposaient aux portes des cellules.
Lorsque
il m'arrivait de venir à l'église tard le soir je voyais l'évêque
Benjamin enroulé dans son manteau monacal couché sur le plancher de
ciment tandis qu'un mendiant dormait dans son lit, le matelas était mis à
la disposition d'un autre indigent, un troisième était allongé sur un
vieux tapis. L'évêque n'avait pas d'endroit où dormir".
Mgr Benjamin prêta une oreille attentive au récit de Pavlov et il le perçut comme un signe envoyé par le Ciel à sa paroisse.
L'évêque
se rendit sur le champ dans la boutique pour y apprendre avec horreur
que l'icône venait d'être descendue à la cave en tant "qu'article
invendable".
Le propriétaire permit à Mgr Benjamin de descendre.
Il y aperçut Notre Dame d'Ivérie enfouie dans un capharnaüm indescriptible… sa Face était tournée vers le bas !
Cette attitude blasphématoire du brocanteur était abominable aux yeux de l'évêque.
Son visage ruisselait de larmes et il était au désespoir de manquer de moyens pour remédier à la situation.
Subitement il entendit une voix : "Comment peux-tu douter ? Où est ta foi ?"
La réaction de l'évêque, le fait qu'il s'était mis a genoux pour prier impressionnèrent profondément le brocanteur.
A la suite d'un bref entretien il accepta de réduire son prix et même d'étaler les paiements.
Il alla jusqu'à permettre de prendre immédiatement possession de l'icône et de l'emporter.
Bien que doutant de pouvoir réunir la somme voulue Mgr Benjamin se mit à envoyer des lettres partout en France.
Les
émigrés russes, aisés ou miséreux, ceux qui mettaient de coté pour
payer leur sépulture ou disposer d'une petite réserve en cas de besoin
envoyèrent des mandats.
C'est grâce au don de la paroissienne Nadejda Soboleff que la transaction a pu être conclue.
Cette dame mit en vente son unique bague sertie d'une émeraude.
Quelques
années plus tard elle apporta ses vœux, prit le voile et alla finir ses
jours en Estonie, dans le monastère de Pioukhtitzy.
La somme fut réunie en janvier 1932.
Mgr
Benjamin dit un office d'action de grâce, ce après quoi il ordonna que
pendant un mois les portes de l'église restent ouvertes de jour comme de
nuit.
De
partout les fidèles affluaient pour vénérer la Vierge Iverskaya qui
avait enfin trouvé son lieu dans le centre de Paris à l'église des Trois
Docteurs.
L'église devint peu à peu un véritable musée de l'iconographie russe.
Ses
murs servent de support à d'admirables fresques peintes dans les années
cinquante du dernier siècle par Léonid Ousspensky et le père Georges
Krug.
Jusqu'à
présent chaque mercredi soir des fidèles orthodoxes de nationalités
diverses se réunissent dans cette église pour y chanter un acathiste à
l'icône miraculeuse de la Vierge d'Iverie.
Fête le 12 février.
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