Saint Dominique de Guzman († 1221)
Fondateur de l'Ordre des Frères prêcheurs
Carte postale de Saint Dominique


Domingo Núñez de Guzmán, plus connu sous le nom de saint Dominique (né vers 1170 en Espagne dans un milieu aisé et mort le 6 août 1221 à Bologne), est un religieux catholique, fondateur de l'ordre des frères prêcheurs appelés couramment « dominicains ».
Canonisé par l'Église en 1234, il est célèbre sous le nom de saint Dominique.
Autrefois fêté le 4 août puis le 6 août jour de sa « naissance au ciel », il est fêté le 8 août depuis le Concile Vatican II.
Biographie
La
vie de Dominique est principalement connue par des Vitæ, Légendes et
miracles, textes hagiographiques au fort pouvoir apologétique écrits
entre 1221 et la fin du XIIIe siècle, et dont l'historicité des récits est interrogée par la critique historique.
Enfance

Vision de la mère de Dominique
Dominique
est né à Caleruega, village austère dans l'actuelle province de Burgos,
dans la Vieille-Castille à 80 kilomètres de Burgos.
Dans
la source la plus ancienne relative à la vie de saint Dominique, le
Libellus de principiis Ordinis Prædicatorum (Petit livre sur les débuts
de l’ordre des Prêcheurs, récit hagiographique du dominicain Jourdain de
Saxe), le nom de ses parents n’est pas indiqué.
L’absence
de cette mention peut s’expliquer par le fait que Jourdain de Saxe ne
prétend pas donner une biographie du saint mais plutôt, comme le titre
de l’œuvre l’indique, exposer l’histoire des débuts de l’ordre
dominicain.
Le second biographe de saint Dominique, Pierre Ferrand (parfois identifié à Petrus Hispanus (en)), auteur d’une Legenda Sancti Dominici, se borne à indiquer que son père se nommait Felix et sa mère Jeanne (Juana).
Rodrigue
de Cerrato précise, dans sa Vita sancti Dominici (vers 1275) que Felix
est un riche propriétaire et que Juana est une femme vertueuse.
Ce n’est qu’au début du XVe siècle
qu’apparaît l’indication selon laquelle Dominique aurait appartenu à la
prestigieuse famille des Guzman, ducs de Medina Sidonia.
Cette
information est contenue dans un récit de Pero Tafur, Andanças e Viajes
(Voyages et Aventures, 1435-1439), qui est lui-même dédié à Don
Fernando de Guzman, commandeur de l’ordre de Calatrava.
L’auteur,
passant à Bologne, indique que le saint y est enterré et qu’il était de
la famille des Guzmân par son père, Félix de Guzmân.
Le
rattachement de saint Dominique à cette lignée nobiliaire n’est pas
autrement prouvé mais cette tradition n'est pas improbable.
La tradition dominicaine grandit également sa naissance par sa mère, Jeanne d'Aza qui serait de haute noblesse.
L'hagiographie du dominicain Thierry d'Apolda (en) précise que le couple Guzmân a trois fils connus (dont Manés) qui deviennent tous prêtres.
Selon
une légende analogue à celles de plusieurs naissances de saints (saint
Isidore, Jean Chrysostome), après avoir été en pèlerinage à l'abbaye
Saint-Dominique de Silos, la mère de Dominique (Dominicus en latin, ce
qui signifie « celui qui appartient au Seigneur ») aurait vu en songe,
pendant sa grossesse, un chien tenant une torche allumée dans la gueule
pour éclairer le monde.
Ce
songe résume la vie du futur saint dont le prénom a été choisi en
référence à l'abbé Dominique de Silos vénéré par sa mère, avec de plus
un calembour en latin sur les futurs dominicains, dominicanes, assimilés
à des chiens du Seigneur.
L'hagiographe
Jourdain utilise dans ses récits édifiants de nombreux autres topoi
hagiographique : lune que sa mère aurait vue sur le front du petit,
abeilles qui se seraient posées sur les lèvres du nouveau-né.
Dominique est le troisième de la fratrie après Antoine et Manés. Tous trois deviendront prêtres.
Études et entrée en religion
À
sept ans, il est confié à un oncle maternel ecclésiastique vivant à
Gumiel de Izán, où il effectue des études de lettres, notamment le latin
pour en faire un lecteur.
Dominique est envoyé à quatorze ans à l'université de Palencia pour étudier la théologie et la philosophie.
Repéré
par le prieur du chapitre des chanoines réguliers d'Osma, il entre à
l'âge d'environ 25 ans, en 1196, comme chanoine dans cette communauté en
plein réforme à l'époque de la part du prieur qui veut y imposer la
Règle de saint Augustin.
Selon l'hagiographie dominicaine, il se distingue de bonne heure par la
ferveur de son zèle et par son talent pour la prédication :
« Aussitôt
celui-ci se mit à briller parmi les chanoines comme l'étoile du berger,
le dernier par l'humilité du cœur, le premier par la sainteté. Il
devint pour les autres le parfum qui conduit à la vie, semblable à
l'encens qui embaume dans les jours d'été. Chacun s'étonne de ce sommet
si rapidement et si secrètement atteint dans la vie religieuse ; on le
choisit pour sous-prieur, jugeant qu'ainsi placé sur un piédestal élevé,
il verserait à tous les regards sa lumière et inviterait chacun à
suivre son exemple ».
Dominique apparaît effectivement dans une charte datée du 13 janvier 1201 avec la qualité de sous-prieur du chapitre d'Osma.
En
1203, Dominique accompagne son évêque, Diego de Acebo, chargé par le
roi Alphonse VIII de Castille d'une ambassade auprès du roi de Danemark
afin d'obtenir une princesse en mariage pour l'infant.
Contre l'hérésie des « bons hommes » ou « bons chrétiens »

Saint Dominique recevant le rosaire des mains de Notre-Dame, Lorenzo Gramiccia
Traversant
ce qu'on appelle aujourd'hui l'Occitanie, Dominique y rencontre
l'hérésie des « bons hommes » ou « bons chrétiens » ou « cathares ».
Certains des éléments qui serviront de prétexte à la Réforme protestante sont déjà présents à cette époque.
La
richesse de l'Église, en particulier, fait scandale parmi des chrétiens
qui finissent par se laisser séduire par les idées des vaudois et des
« bons hommes ».
Jusqu'à la fin du XIIe siècle,
les papes avaient tenté d'enrayer le phénomène sur deux plans : des
campagnes militaires menées par des évêques dont les victoires
sanglantes restaient sans lendemain et des prêches menés avec faste par
les cisterciens avec saint Bernard à leur tête comme ce fut le cas à
Albi en 1145. Ici aussi sans résultat.
L'Église
ne parvient pas, à cette époque, à contrer l'hérésie adoptée par une
partie du peuple tandis que les théologiens adverses allient à leur
culture religieuse un style de prêche qui touche les petites gens.
L'hérésie est finalement condamnée en 1184, confondant les deux mouvements pourtant distincts.
À
son retour du Danemark, après un deuxième voyage en 1205, Dominique
passe par Rome et Cîteaux, puis s'arrête en Languedoc, apparemment
résolu à combattre l'hérésie à la demande du pape Innocent III.
Alors
qu'il voulait avec son évêque Diego de Acebo évangéliser les Coumans
d'Ukraine, il aurait reçu l'ordre du pape d'assister les cisterciens qui
tentaient en vain de rechristianiser les albigeois.
Pour
concurrencer une institution cathare comparable, Dominique établit à
Prouille dès 1206 le premier monastère de femmes (noyau des futures
dominicaines), en utilisant l'ancienne église et quelques dépendances,
dont la majeure partie est donnée par Guillaume et Raymonde Claret.
En
1207 Dominique fait partie du colloque de Pamiers, appelé aussi
« colloque de Montréal » qui est le dernier débat contradictoire entre
les cathares et l'Église.
Le
légat Arnaud Amaury lui fixe une « diète », territoire à évangéliser
autour de Prouille, avec notamment les places fortes cathares de
Fanjeaux et Montréal.

Saint Dominique recevant le rosaire des mains de Notre-Dame
Une légende dont la source semble être le Rosarium (long poème marial composé par un dominicain au milieu du XIVe siècle)
attribue à Dominique l'apparition de la Vierge en 1208 à Prouille qui
se montre à lui sous le vocable de Notre-Dame du Rosaire.
Le dominicain Alain de La Roche propage au XVe siècle le rosaire, méthode de méditation sur la vie du Christ.
L'assassinat
du légat du pape, le cistercien Pierre de Castelnau, imputé à Raymond
VI de Toulouse, déclenche en 1209 la croisade des albigeois et Dominique
suit les croisés dans les places conquises cherchant à obtenir des
conversions.

Maison Seilhan (7, place du parlement, Toulouse)
Le
25 avril 1215 il s'établit à Toulouse, avec quelques proches, dans des
bâtiments donnés par Pierre Seila (ou Pierre Seilhan), visibles
aujourd'hui au 7, place du Parlement.
L'installation
dans une ville a pour premier but d'étudier, Dominique bénéficiant des
leçons d'un maître, son ordre accompagnant la création de l'université
de Toulouse.
Foulques,
évêque de Toulouse, collaborateur de Dominique depuis 1206, les
autorise à prêcher dans tout le territoire de Toulouse.
Au
mois de novembre, Dominique et Foulques sont à Rome, au IVe concile du
Latran : là, avec le pape Innocent III, ils projettent l'établissement
d'un ordre des Prêcheurs, moines qui s'engagent à la pauvreté et la
prédication mais après une solide formation doctrinale pour mieux
réfuter les hérésies.
À
la même époque, Simon de Montfort, à la tête d'une armée de croisés,
extermine les albigeois par le fer et par le feu (1205-1215).
Dominique
opère un grand nombre de conversions par la seule persuasion ; il ne
prend aucune part à la guerre, ne voulant d'autres armes que la
prédication, la prière et les bons exemples.
Fondation de l'ordre des Prêcheurs

Lorenzo Lotto, Prédication de saint Dominique à Recanati
Ainsi,
et peut-être inspiré par le tout récent ordre mendiant de François
d'Assise, Dominique fonde en 1216 l'ordre des Prêcheurs, mieux connu
aujourd'hui sous le nom de dominicains qui seront, à l'inverse des
franciscains invités à s'instruire sans relâche.
Un an avant la constitution officielle de l'ordre, Innocent III demande à Dominique de s'inscrire dans une tradition existante.
Une
règle inspirée de celle de saint Augustin sera choisie, et c'est le
pape suivant Honorius III, qui autorise l'établissement de l'ordre en
décembre 1216 selon certains ou en janvier 1217.
Le
15 août 1217, Dominique disperse ses seize premiers frères qui se
fixent dans les villes universitaires (Bologne, Paris, Toulouse, Oxford,
Cologne) où la qualité de leur enseignement leur permet de briguer
rapidement les chaires de faculté.
Il
répond ainsi à la recommandation du quatrième concile du Latran qui
invite les évêques à doter leurs diocèses de prédicateurs instruits.
Au chapitre de Bologne (1220), Dominique donne ses premières structures à l’ordre des frères prêcheurs.
À sa tête est placé un maître général auquel sont soumis tous les prêcheurs.
Un chapitre général est réuni tous les ans, élaborant les règlements de l’ordre et disposant du pouvoir judiciaire.
La règle de l’ordre est celle des chanoines de saint Augustin.
Elle accorde une large place à la prière liturgique et à la méditation.
L’ordre ne doit avoir ni revenus, ni propriétés, et doit pratiquer la mendicité conventuelle.
Seule est admise la possession du couvent par la communauté et de livres par chacun des frères.
Chaque couvent se transforme en maison d’étude (studium) et chaque province dispose de centres d’études biblique et théologique.
Il
emploie ses dernières années à répandre son institut, qui bientôt
compte de nombreux couvents en France, en Italie, en Espagne.
Le 6 août 1221, Dominique meurt à Bologne après une longue maladie.
Il
est canonisé le 3 juillet 1234 par Grégoire IX, qui fixe sa fête au 4
août (un an avant que l'ordre fondé par Dominique ne soit impliqué par
le pape dans une nouvelle méthode de lutte contre l'hérésie :
l'Inquisition), la date du 6 août étant réservée à la fête de la
Transfiguration et celle du 5 à la fête de Notre Dame des neiges.

Fig. 1.Basilique saint Dominique, Bologne
Son
sépulcre (arca di San Domenico en italien) se trouve dans la basilique
qui porte son nom dans la ville de Bologne (fig. 1), plus précisément
dans une chapelle qui lui est dédicacée (fig. 2).

Fig. 2.Chapelle saint Dominique
Rôle historique
S. Dominique, « Marteau des hérétiques », et l'Inquisition

Dominique présidant un autodafé, par Pedro Berruguete (1475), musée du Prado, Madrid
La
tradition lui a donné le titre de « Marteau des hérétiques », ou
« Marteau des hérésies », qu'il partage avec Antoine de Padoue.
Certains le regardent comme le premier inquisiteur, et disent qu'il fut chargé d'exercer ces fonctions dans le Languedoc.
Dans son Histoire de France, Jules Michelet, historien romantique, veut voir en lui le « terrible fondateur de l'Inquisition ».
Les
dominicains eux-mêmes, au Moyen Âge, ont accrédité cette légende :
Bernard Gui, l'un des plus célèbres inquisiteurs (actif à Toulouse de
1308 à 1322), qualifie Dominique de « premier inquisiteur » dans sa
biographie du fondateur.
Un
tableau de Pedro Berruguete montre Dominique devant un autodafé et prêt
à envoyer des hérétiques au bûcher — tableau sans doute à la gloire de
Dominique, le peintre ayant réalisé plusieurs tableaux à la demande de Tomás de Torquemada.
En réalité, Dominique est mort en 1221, date à laquelle l'Inquisition n'existait pas encore, et ne combattit jamais que par le prêche.
La première personne à porter le nom d'inquisiteur, Conrad de Marbourg, reçoit ce titre en 1231 et ses excès de zèle — illustrés par les témoins du procès en canonisation de sainte Élisabeth de Hongrie — causeront sa perte et il sera assassiné deux ans à peine après son entrée en fonctions.
La « légende noire » qui provient de cette erreur historique est, selon Michel Roquebert,
d'autant plus dommageable à Dominique qu'elle a été forgée par les
Dominicains eux-mêmes à une époque où ils s’enorgueillissaient de
combattre l'hérésie.
Dévotion au rosaire
La dévotion au Rosaire fut répandue par le bienheureux Alain de la Roche, disciple et frère de Dominique de Guzman.
Sources de sa biographie
Le
libellus de Jourdain de Saxe, successeur de Dominique à la tête de
l'ordre des Prêcheurs, est à la base de l'historiographie primitive.
Ce
libellus date probablement d'avant la canonisation qui eut lieu en
1234, et semble postérieur au 25 décembre 1231, date du décès de
Foulques de Toulouse.
Jourdain
de Saxe indique qu'aucun texte n'a été écrit avant le sien, et qu'il
s'appuie d'une part, sur « ce qu'il a vu et entendu personnellement »,
et d'autre part sur « ce qu'il a connu des commencements de l'Ordre par
la relation des frères primitifs ».
Plusieurs
frères peuvent être identifiés qui ont pu l'aider à écrire son récit,
comme Bertrand de Garrigue, Jean de Navarre, ou frère Ventura de Vérone,
prieur de Bologne.
À partir de ce libellus, Pierre Ferrand, autre dominicain, va écrire une vie de Dominique destinée à la liturgie.
Entre 1237 et 1242, il remanie le libellus et le réduit d'un tiers, en rajoutant toutefois des éléments sur l'enfance du saint.
À
partir de la biographie de Pierre Ferrand, Constantin d'Orvieto écrit
une seconde biographie, nettement plus hagiographique, à la demande du
chapitre général de l'Ordre en 1245.
Il existe également trois sources non dominicaines qui décrivent même succinctement la vie de Dominique de Guzman.
La Chronique de Robert d'Auxerre est rédigée en 1207-1208, à l'époque des événements qu'elle rapporte.
Par
contre, l'Historia Albigensis du cistercien Pierre des Vaux-de-Cernai
est écrite vers 1213, quelques années après les événements.
Enfin, Guillaume de Puylaurens écrit une Chronique des événements longtemps après, entre 1250 et 1273.
Ces trois auteurs ont une grande autorité.
Ils font ressortir des inexactitudes dans les textes de Jourdain de Saxe, qui manquait sans doute de moyens d'information.
Iconographie
Saint Dominique est souvent représenté muni d'une croix, d'un livre et d'un globe terrestre.
Une étoile lui pare le front tandis qu'un chien noir et blanc portant
une torche enflammée dans sa gueule l'accompagne et que des lys
l'entourent.
On l'associe à des qualités de prédication.
« Ce chien portant une torche vient, d'un rêve que la mère de saint Dominique fit alors qu'elle était enceinte de lui. Dans ce rêve elle enfantait d'un chien portant une torche qui embrasait le monde entier. Saint Dominique reprit donc cet emblème en disant qu'il serait ce chien qui embraserait le monde de la vérité. »
Le Mariage mystique de sainte Catherine entre saint Jean-Baptiste et saint Dominique par Niccolò di Tommaso (1346-1376), Musée Fesch, Ajaccio
Saint Dominique de Guzman est le patron des astronomes et des scientifiques.
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