Le 13 mai, nous célébrons la mémoire de la Sainte Martyre GLYCERIE et de Saint LAODICIOS le geôlier
La
première année du règne d'Antonin le Pieux (138) vivait à Trajanopolis
une jeune chrétienne, fille d'un officier romain de haut rang, qui se
consacrait à confirmer les Chrétiens du lieu dans la foi.
Le jour d'une fête païienne, elle marqua sur son front le signe de la
Croix, et s'avança vers le gouvemeur Sabin présent dans le temple, en se
confessant ouvertement servante du Christ.
Comme
Sabin lui ordonnait de sacrifîer aux dieux, elle se dirigea vers les
idoles et abattit la statue de Zeus par l'invocation du Sauveur, puis
elle la mit en pièces.
Les païens se précipitèrent avec rage sur elle et essayèrent de la lapider, sans que les pierres ne puissent l'atteindre.
On
la pendit alors par les cheveux et on lui déchira la chair avec des
ongles de fer, puis elle fut jetée en prison et laissée sans vivres ni
boisson pendant de nombreux jours.
Mais un Ange du Seigneur lui apporta de la nourriture et la fortifia dans l'espérance des biens futurs.
Aussi,
quand le gouvemeur la convoqua de nouveau, c'est avec stupéfaction
qu'il vit la Sainte apparaître devant lui en bonne santé et rayonnante
de confiance en Dieu.
Devant quitter la cité pour se rendre à Héraclée de Thrace, Sabin se fit accompagner par Glycérie.
Elle fut reçue avec déférence par l'Evêque Domitius et par les Chrétiens, qui avaient été informés de son valeureux combat.
Après
une nouvelle séance au tribunal, elle fut condamnée à être brûlée vive,
mais une rosée céleste éteignit la fournaise dans laquelle elle avait
été jetée.
Le juge lui fit alors arracher le cuir chevelu, puis on la conduisit en prison dans l'attente de nouveaux supplices.
Cette fois encore un Ange vint à son secours.
Devant de tels signes divins, le geôlier Laodicios se convertit et fut aussitôt condamné à la décapitation.`
Finalement
la Sainte fut livrée aux bêtes sauvages. Une lionne s'élança, furieuse,
sur elle, mais elle s'arrêta soudain dans son élan et vint lécher
tendrement ses pieds.
Une
autre lionne bondit à son tour et d'un léger coup de dent, sans lui
provoquer la moindre blessure, permit à Sainte Glycérie de rejoindre
dans la joie son Epoux céleste.
Le
juge périt peu après misérablement, tandis que l'Evêque allait
ensevelir le corps de la valeureuse athlète du Christ non loin de la
cité. On édifia ensuite en ce lieu une vaste et magnifique église, où
Sainte Glycérie était vénérée par tous les habitants de la cité dont
elle était devenue la Sainte patronne (1).
Par la suite son corps fut transféré à Lemnos.
Cependant,
de son crâne, resté à Héraclée, continuait de jaillir un Saint Baume
qui, telle une source d'eau vive, procurait la guérison à de nombreux
pèlerins.
La
première année de l'empereur Antonin, lorsque Sabinus était gouverneur
de la Grèce, une grande union régnait entre les habitants chrétiens de
Trajanopolis.
Chaque
jour ils s'assemblaient en un même lieu, et mettant en commun les
efforts de leur zèle, ils demandaient à Dieu la paix ; car, cette
société de pieux fidèles craignant le Seigneur était peu nombreuse.
L’empereur
Antonin était attaché aux superstitions des Grecs ; il sacrifiait à
toutes ces idoles décorées faussement du nom de dieux, mais surtout à
Jupiter, qu'il honorait d'un culte particulier ; et sa vie semblait se
passer tout entière dans ces pratiques sacrilèges.
Or,
un jour, dans le temple de ce même Jupiter, il tint conseil avec des
prêtres odieusement impies, et porta un édit qu'il fit publier dans
toutes les villes et dans toutes les provinces, ordonnant aux citoyens
de se réunir pour sacrifier aux dieux et surtout à Jupiter.
Voici la teneur de cet édit qui, aussitôt après le conseil, promptement
promulgué par toute la terre, jeta l'effroi en tous lieux : «Quiconque
refusera de sacrifier aux dieux, qu'il meure dans d'affreux tourments.»
L'Europe ne fut point exceptée de ces ordres cruels.
Lorsque
le gouverneur les reçut, il offrit tout d'abord un sacrifice dans un
temple de Maximianopolis ; mais ce jour-là il se contenta de montrer la
loi de l'empereur et ne contraignit encore personne.
Le lendemain, dès le matin, il partit pour Trajanopolis, montra de même
la loi aux habitants de cette ville, et fit en conséquence publier le
décret suivant : «Sabinus, le très puissant et très illustre gouverneur,
à tous les peuples et à tous les pays de son glorieux gouvernement,
salut. Aimés tous d'une même pensée et d'un même sentiment, nous nous
réunirons dans trois jours ; et, après nous être purifiés, nous
entrerons dans le temple de Jupiter, pour y célébrer par un sacrifice au
grand Dieu le jour de la naissance de l'empereur. Quiconque aura refusé
d'obéir et ne viendra point un flambeau à la main offrir son sacrifice,
sera condamné à mourir dans d'affreux tourments.»
Aussitôt, tous les chrétiens de la ville se mirent en prières pour demander à Dieu la paix.
Mais
une vierge romaine, nommée Glycère, qui habitait Trajanopolis et dont
le père, Macarius, avait été trois fois consul, se rendait chaque jour,
et presque à chaque heure, à la pauvre maison où se réunissaient les
chrétiens ; et là, payant à Dieu et à son Christ la dette sacrée de sa
foi, elle disait : «Vous tous, mes frères et mes sœurs, mes fils et mes
pères, et vous, qui que vous soyez, qui me tenez lieu de mères, veillez
et tenez-vous sur vos gardes. Considérez avec soin quel est le véritable
empereur dont nous portons-le caractère, quel sceau il a imprimé sur
nos fronts, de quel Nom enfin nous avons reçu l’inscription. Et parce
que nous connaissons la grandeur de nos titres, livrons-nous avec zèle à
l'observation des Préceptes du Seigneur, afin de jouir du salut auprès
de ce Roi éternel, gardant pour cela pur de toute tache le caractère
dont Il nous a marqués.»
Quand
elle eut ainsi parlé, tous d'une commune voix s'écrièrent : «C'est
notre désir à tous de jouir des grands biens dont tu parles». Glycère
alors reprit : «Demandez-le donc à Dieu dans de ferventes prières.»
Trois
jours après la proclamation de l'édit, les habitants de la ville, dans
les transports d’une aveugle folie, couraient au temple, des torches à
la main. Glycère y vint aussi ; elle portait tracée sur son front la
croix du Christ, afin que ce signe fût comme un phare lumineux pour sa
pensée.
Elle
courait au gouverneur, et quand elle fut devant lui : «Très illustre
Sabinus, lui dit-elle, je viens commencer les sacrifices qui vont être
offerts à Dieu. J'ai droit à cet honneur, et parce que j’arrive ici la
première, et parce que mon père a été trois fois consul à Rome.
— Mais, reprit le gouverneur, où est le flambeau qui m'indique que tu veux sacrifier ?
—
Mon flambeau, dit Glycère, je le porte sur mon front, et rien ne peut
l'éteindre ; il éclaire et consacre les sacrifices sans tache que nous
offrons à Dieu, le Roi éternel.»
Alors le gouverneur, qui ne comprenait rien à ce langage, lui dit : «Approche, et sacrifie.
—
Le Roi éternel, Dieu, dit Glycère, n'a pas besoin de la fumée de vos
flambeaux ; ordonnez de les éteindre, afin qu'ils ne souillent pas mon
sacrifice.»
Et le gouverneur les fit éteindre.
Aussitôt
après, Glycère, dont le cœur était armé de la force des vierges, lève
les yeux au ciel, et, étendant la main vers le peuple : «Voyez-vous,
dit-elle, sur mon front briller cet éclatant flambeau ?»
En même temps, elle montrait la croix du Christ.
«Dieu
tout-puissant, continue-t-elle, Toi à qui tes serviteurs offrent la
gloire et la louange par la croix du Christ, c'est Toi qui T’es montré
aux trois bienheureux enfants et les as délivrés de la fournaise, Toi
qui as arrêté la fureur des lions ; assuré la victoire à Daniel ton
serviteur, renversé Belus, tué le dragon, et détruit l'image des démons.
0 Jésus Christ, très pur Agneau de Dieu, viens; j'implore ta Puissance,
secours ma faiblesse ; brise ce démon que la main des hommes a élevé ;
dissipe, anéantis les sacrifices nouveaux et insensés que ce peuple veut
offrir».
Tout à coup un éclat de tonnerre ébranle le temple, et la statue de Jupiter est renversée et brisée.
À cette vue, le gouverneur et tous les prêtres avec lui sont saisis de fureur; il ordonne de lapider Glycère.
Aussitôt
une multitude d'hommes pervers s'empressent et font voler sur la sainte
une grêle de pierres ; mais ces pierres d'elles-mêmes viennent se
ranger autour de Glycère, comme si on les eût disposées avec art, et ne
la touchent pas.
Les
bourreaux ne comprirent pas que c'était la main de Dieu qui la
protégeait; ils dirent qu'elle était magicienne, et qu'à cause de cela
les pierres ne pouvaient l'atteindre.
«Vous dites vrai, reprenait Glycère, je suis magicienne; et ma magie
c'est la vertu du Christ qui opère par moi ces merveilles, confond vos
erreurs, et écarte les coups dont vous voulez m'accabler.»
En
entendant ces paroles, le gouverneur dit : «Qu'on l'enferme et qu'on la
garde en prison jusqu'à demain, au grand jour ; de peur que, par ses
artifices, elle ne nous échappe, prétendant que son Dieu l'a secourue,
et par là n'en séduise un grand nombre.»
Glycère
répondit : «0 aveuglement insensé d'une âme souillée ! Tu ne vois pas
que je suis enchantée par les Préceptes de mon Dieu et attachée à sa loi
par des liens que rien ne saurait rompre. Ces liens sont indissolubles ;
mais en même temps ils brisent les chaînes des superbes et dissipent
les conseils de ceux qui résistent à Dieu.»
En
achevant ces mots, elle se dirigeait vers la prison. Le prêtre
Philocrate s'étant approché d'elle, Glycère lui dit : «Marque-moi du
caractère du Christ ; orne mon âme par l'effusion du précieux chrême de
la vérité, et recommande-moi à Dieu, à ce grand Empereur dans la milice
duquel tu sers et dont tu portes les armes; afin que, fortifiée par ce
caractère, je triomphe des assauts de l'esprit du mal.»
Le
prêtre Philocrate répondit : «Reçois donc le caractère du Christ, et
qu'il comble tes désirs; que la glorieuse onction du Seigneur fasse
descendre sur toi les grâces que ton cœur demande.» Il dit, et, après
lui avoir souhaité la paix, il s'éloigna.
Dès
le matin du jour suivant, le gouverneur se rendit au prétoire pour
faire comparaître une seconde fois Glycère, et lui demander si elle
consentirait à sacrifier aux dieux ; que si elle refusait, il était
résolu à épuiser sur elle tous les tourments, et enfin à la condamner à
mort.
Glycère
fut donc amenée ; la joie de son âme se peignait sur son visage. Le
gouverneur lui dit : «Es-tu encore obstinée à ne pas sacrifier au grand
Jupiter, à qui l'empereur lui-même sacrifie ? — Comment, répondit
Glycère, sacrifierais-je à un dieu qui a été renversé et réduit en
pièces ? Il n'a pu se secourir lui-même; et tu veux que je lui sacrifie !
Je ne connais de grand que le Dieu qui a son trône dans les cieux ;
c'est Lui qui m'a secourue et qui a confondu votre criminelle puissance.
C'est à Lui que je dois des sacrifices et l'hommage de ma
reconnaissance.» Le gouverneur à ces paroles lui dit : «Sacrifie avant
que j'emploie contre toi les tourments.»
Glycère
reprit : «Mon Dieu Lui-même me châtiera, si j'écoute tes conseils. — Eh
quoi ! dit le gouverneur, tu veux donc mourir ?» Glycère répondit :
«J'ai hâte à remédier aux plaies de mon âme par les souffrances de mon
corps ; c'est mon plus grand désir.»
Alors
le gouverneur ordonna de suspendre Glycère par les cheveux, et dans cet
état de la faire mourir, en déchirant ses membres. Quand elle fut ainsi
suspendue : «Gloire Te soit rendue, s'écria-t-elle, ô Dieu
tout-puissant, qui n'as pas voulu que ce gouverneur insensé imaginât
contre moi d'autres tourments que ces cheveux dont ta Bonté avait fait
l'ornement de ma tête. Il en fait l'instrument de mon supplice, mais ils
condamneront sa cruauté ; car ta Providence me les avait donnés comme
un vêtement pour mon corps ; leur beauté faisait ta Gloire, et voilà
qu'ils sont aujourd'hui mon arme pour combattre un impie, l'ennemi des
créatures que Tu as formées, et dont Tu as reconnu la bonté.»
À peine elle avait achevé ces paroles, que le gouverneur ordonna de déchirer ses membres.
Or,
pendant que sa chair tombait en lambeaux sous les coups, la
bienheureuse martyre disait : «Cruel ministre du démon, qui t'inspire
toute sa malice, tes tourments ne sont rien, je ne les sens pas ; car
j'ai pour soutien le Dieu, Seigneur de toutes choses, qui déjà , par
Jésus Christ, m'a sauvé la vie. Prépare donc de plus grands supplices;
jusqu'ici, je le répète, tu n'as rien fait.»
Ainsi parlait Glycère ; et les bras des bourreaux, à force de frapper, tombaient déjà de lassitude.
Le gouverneur, se voyant vaincu, la fait descendre à terre et ordonne qu'on la frappe au visage.
«0
Dieu, s'écrie alors Glycère, le Christ est ma Lumière et mon Appui ;
c'est Lui dont la Bonté fortifie les pensées de sa servante. Seigneur,
je T’en conjure, que ta divine Clarté se répande sur mon visage, et
qu'elle me prépare à recevoir ces nouveaux coups. Que ta Patience, ô
Dieu, soit ma force; car Tu es le Dieu qui, par notre Seigneur Jésus
Christ, aimes à communiquer les trésors de ton Esprit saint à ceux qui
d'un cœur généreux et ferme savent confesser ton Nom. C'est Toi qui as
secouru dans leurs combats tous tes saints qui m'ont appris à Te
connaître ; par eux, j’ai embrassé ta foi avec amour; exauce donc
aujourd'hui ta servante; car c'est pour la gloire de ton Nom que je
demande à échapper aux pièges du diable et à la gueule du dragon.»
Pendant qu'elle parlait ainsi, les bourreaux frappaient.
Mais l'ange du Seigneur descendit tout à coup pour l'assister, il renversa ces barbares qui parurent comme frappés de mort.
Alors le gouverneur dit : «Pourquoi, Glycère, n'obéis-tu pas à l'empereur ?»
Glycère répondit : «À quel empereur veux-tu que j'obéisse ?
— À celui, dit le gouverneur, qui tient dans ses mains les rênes du monde et qui a porté la loi.»
Glycère reprit : «Et moi, c'est à Dieu, le souverain empereur de l'univers, que j'obéis ; c'est sa loi que j'observe.»
Le gouverneur, insista : «Obéis et sacrifie aux dieux.»
Mais
Glycère reprit encore : «Non, je ne consentirai point à offrir le
sacrifice dont tu veux me faire une loi ; car ce n'est qu’une sacrilège
vanité. Mais j'offrirai à mon Dieu le sacrifice qu'Il nous demande par
son divin Esprit, Celui d'Abraham notre père, qui par l'immolation de
son fils Isaac fut si agréable au vrai Dieu, qu'il mérita en récompense
de devenir le, père de nombreuses nations.
—
Encore une fois, dit le gouverneur, fais ce que j'ordonne et sacrifie ;
de peur que, pauvre femme tristement trompée, tu ne périsses victime
d’une mort honteuse et cruelle.»
Elle
répondit : «Le Christ est le Chef qui préside à notre combat ; et, dans
le stade spirituel, Il couronne glorieusement non seulement les hommes,
mais encore les femmes qui luttent contre le diable ton père ; car le
stade de la vérité est ouvert à tous ceux qui veulent y courir. »
Le gouverneur la fit reconduire en prison, et défendit de lui donner aucune nourriture.
Pleine de joie à cet ordre, elle quitta le prétoire et entra dans la prison, en chantant les louanges de Dieu.
Le geôlier qui la gardait était saisi d'une grande crainte.
Pour
elle, elle répétait avec un pieux enthousiasme : «Tu es béni, Seigneur
Dieu de nos pères ; car Tu T’es fait connaître aux saints, observateurs
de ta loi ; Tu T’es montré à saint Pierre, quand il allait quitter Rome,
et par lui Tu as confondu ton ennemi, le magicien Simon ; comme
autrefois Tu as sauvé David et terrassé sous ses pieds Goliath, son
superbe adversaire. 0 Toi, Dieu de pureté, digne de tous les hommages,
exauce-moi; sois avec ta servante et arrache-la aux mains d'un
gouverneur pervers.»
Trois
jours après, le gouverneur dit à un tribun : «Prends cet anneau, va, et
scelle la porte de la prison où l'on tient enfermée la magicienne.»
Le tribun alla donc, et entrant dans la prison, il trouva Glycère occupée à chanter les louanges de Dieu.
Du reste, on la gardait avec le plus grand soin.
Il imprima le sceau sur les portes et ordonna qu'on redoublât encore de vigilance autour de la prison.
Mais Glycère ainsi renfermée glorifiait Dieu, et les anges lui apportaient sa nourriture.
Quelques
jours après, le gouverneur, sur le point de partir pour Héraclée, se
transporta à la prison ; il venait pour donner l’ordre qu'on fît marcher
Glycère à sa suite.
Quand il vit les portes scellées encore, après un si long temps, il pensa qu'elle était morte.
Mais
lorsqu'il eut ouvert, il vit la bienheureuse déliée de ses chaînes, et
devant elle une table sur laquelle étaient du pain, du lait et une coupe
pleine d'eau.
Frappé
d'étonnement, mais ne comprenant pas que c'était Dieu qui la
nourrissait, il la fit sortir. Elle fit alors à Dieu cette prière :
«Seigneur mon Dieu, Tu nous as enseigné la science de la vérité ; ta
Providence infinie s'étend sur le peuple qui est à Toi ; par ton ange Tu
as donné à Daniel sa nourriture, et Tu as fait trouver au saint
prophète Élie son repas dans le torrent ; Tu ramènes ceux qui s'égarent
et Tu éclaires les aveugles. Aujourd'hui, ô mon Dieu, Tu T’es ressouvenu
de ton indigne servante; Tu l'as exaucée, et Tu as répandu sur elle de
nouveaux bienfaits que Tu as puisés à la source intarissable de ton
Trésor.»
Ainsi priait Glycère ; sans interrompre ses louanges au Seigneur, elle marcha vers Héraclée.
Le gouverneur, dès son arrivée, avait voulu offrir un sacrifice dans le temple de Jupiter.
Cependant
les chrétiens de la ville, instruits des combats de la bienheureuse
martyre, vinrent au-devant d'elle, avec leur vénérable évêque Dométius,
jusqu’à une distance de trois milles.
En
la voyant, l'évêque s'adressant à Dieu : «0 Christ, dit-il, Lumière qui
ne T'éteins jamais, Soleil de justice qui éclaires ceux qui sont dans
les ténèbres et diriges ceux qui s'égarent, Toi qui as conduit Moïse et
précipité Pharaon dans la mer, sois Toi-même, nous T’en conjurons, le
Défenseur et le Guide de ta servante dans la confession qu'elle va faire
de votre Nom.»
Après cette prière de l'évêque, la sainte martyre du Christ, Glycère, entra dans la ville.
Le lendemain, le gouverneur se la fit amener, ordonnant qu'elle fût brûlée, si elle ne voulait pas sacrifier aux dieux.
Quand elle fut devant son tribunal, il lui dit : «Glycère, as-tu enfin pris une résolution ?»
La
bienheureuse répondit : «Il est écrit dans la loi : «Vous ne tenterez
pas le Seigneur votre Dieu;» et encore : «Que votre parole soit : Oui,
oui; non, non.»
Or,
je t'ai dit que j'étais unie à mon Dieu, et que j'avais renoncé au
diable dont tu t'es fait l'esclave. Comment donc, épouse du Christ,
pourrais-je jamais me séparer de Lui, et au lieu de la vie choisir la
mort ? Fais ce qu'il te plaira ; car pour moi, je suis prête à mépriser
tout ce qui est petit et éphémère, pour m'assurer la jouissance des
biens du ciel.»
Alors le gouverneur ordonna qu'on la jetât dans une fournaise ardente.
Les
feux étant allumés, la sainte martyre s'arma du signe de la croix, et
dit : «Seigneur, Dieu tout-puissant, je Te bénis et je célèbre la gloire
de ton Nom; parce que Tu as préparé à ta servante ce jour et cette
heure pour être le gage d'une éternelle joie. La confession que j'ai
faite de ton Nom, Tu l'as écrite sous les yeux des anges et des hommes,
afin qu'elle ne périsse pas. Remplissez le désir de mon âme, et montrez à
ce gouverneur injuste et impie que Tu es mon soutien.»
Elle
dit, et à peine on l'eut jetée dans la fournaise, qu’aussitôt une
abondante rosée tomba du ciel, éteignit la flamme, et la sainte parut au
milieu de la fournaise comme un innocent agneau.
Elle
se tenait debout et chantait : «Tu es saint, ô mon Dieu, Toi qui du
ciel as envoyé un Secours divin à Glycère, ton indigne servante, afin
que les flammes apprissent que tout est soumis à ta Volonté. Ces
torrents de flammes n'ont pu résister à la puissance de tes Ordres; ils
ont fui et maintenant ils dévorent la conscience criminelle du
gouverneur.»
En achevant ces mots, elle sortit de la fournaise, sans que les feux l'eussent touchée.
Alors le gouverneur : «Quel est donc le secours sur lequel tu comptes, pour ne pas sacrifier ?»
Glycère répondit : «Le Secours de mon Dieu et de son Christ.»
Le gouverneur dit : «Cesse d'employer des paroles artificieuses, qui trompent le peuple.»
Glycère
reprit : «Ce n'est point par des paroles artificieuses, mais par les
discours et les actions de la piété que je rends à tous témoignage de ma
foi.»
Le gouverneur ordonna qu'on lui enlevât la peau de la tête jusqu'au front.
Et aussitôt les bourreaux, après lui avoir fortement lié les pieds et les mains, se mirent à exécuter cet ordre barbare.
Mais
la sainte, pendant ce supplice, faisait à Dieu cette prière : «Seigneur
mon Dieu, qui donnes à la lumière son éclat, et fais fleurir la
justice, je Te demande, ô mon Dieu, par ce tourment, de montrer à
l'impie Sabinus que tous ceux qui ont mis en Toi leur confiance n'ont
d'autre désir que de mériter par les plus grands supplices la couronne
du martyre. C'est pourquoi je Te rends grâces; cette peau qu'on arrache à
ma chair est un voile qui se déchire, afin qu'éclairée de ta Lumière,
je puisse dire : «Enlève de dessus mes yeux le voile qui les recouvre,
et je considérerai les merveilles de ta Loi.»
Le
gouverneur, impatient de ces reproches faits à sa cruauté, la fit
reconduire en prison pour y être gardée jusqu'au lendemain ; il ordonna
qu'on lui attachât les pieds et les mains, puis qu'on la roulât
violemment sur un lit de pierres aiguës.
C'est dans ce supplice cruel qu'il voulait la faire mourir.
Ses bourreaux lui obéirent avec une impitoyable rigueur.
Mais
au milieu de la nuit, un ange du Seigneur vint, rompit les chaînes de
Glycère, et, guérissant ses plaies, rendit à son visage la beauté
première que Dieu lui avait donnée.
Le lendemain, dès le matin, le gouverneur vint à son tour et ordonna qu'on lui amenât la sainte martyre.
Mais
quand le geôlier, ouvrant les portes de la prison, eût vu les chaînes
rompues, et sa captive tellement transformée qu'il ne la pouvait plus
reconnaître, dans un mouvement de désespoir il voulut se tuer lui-même.
«Arrête, lui cria Glycère ; épargne ton âme. Je suis cette que tu cherches.»
Le
geôlier tremblant lui dit : «Aie pitié de moi, je t'en conjure,
sauve-moi de la mort; je crois au Dieu qui t'a secourue. — Suis le
Christ, reprit GIycère; car c'est Lui qui donne le salut.»
Alors il fit sortir la sainte, et lui-même se chargeant des chaînes qu'elle portait, marchait derrière elle.
À
cette vue, le gouverneur s'écria : «Qu'est-ce donc, Laodicius ? Qu'est
devenue cette femme que je t'avais donnée à garder dans les fers ?»
Laodicius
reprit : «Tu la vois devant ton tribunal. La nuit dernière, elle a été
tout environnée d'une Lumière divine; Dieu par la main d'un ange lui a
rendu l'éclat de sa beauté, en même temps qu'Il a brisé ses chaînes. Et
ces chaînes, je les ai prises pour moi, car j'ai vu les miracles de Dieu
; je crois, et je veux partager le sort de Glycère. — Qu'on lui tranche
la tête, dit aussitôt le gouverneur; et voyons si le Christ viendra le
secourir.»
Laodicius,
au moment où la hache allait le frapper, fit cette prière : «Dieu des
chrétiens, daigne, je T’en conjure, me réunir à Glycère ta servante.»
La
sainte de son côté disait : «Père de notre Seigneur Jésus Christ, qui
as dissipé les douleurs de la mort et délivré les captifs, sauve ton
serviteur Laodicius ; qu’iI trouve sa perfection et son bonheur dans la
profession qu'il fait de croire à ton Christ, et reçois son âme clans la
paix.»
En entendant cette prière, Laodicius ajouta : «Amen!»
Et presque en même temps il fut frappé de la hache. Les chrétiens enlevèrent son corps.
Le
gouverneur ensuite dit à Glycère : «Tu sais, Glycère, quelle est la
noblesse de ta famille; ton père a été trois fois consul à Rome, et le
nom de ta mère ne lui est point inférieur en célébrité. Dis-nous donc
quel est celui qui t'a secourue ? — C'est le Christ le Sauveur du monde,
le Dieu de toute consolation, qui m’a nourrie dans la prison, a brisé
mes chaînes et rendu à mon visage sa beauté première; c'est Lui qui est
mon protecteur.»
À ces mots, le gouverneur ordonna qu'on l'exposât dans le cirque, et qu'elle y combattit contre les bêtes.
La sainte s'y présenta comme elle aurait fait au plus agréable festin. Le gouverneur était sur son tribunal.
Glycère d'un air joyeux, mais d'un pas modeste, s'avance et s'arrête au milieu du stade, attendant le Secours du Christ.
Tout
à coup l'officier préposé à la garde des bêtes lève les barrières. Une
lionne d'une grandeur prodigieuse s'élance en frémissant jusque auprès
de la vierge ; mais bientôt ce terrible animal se roule à ses pieds.
La
sainte à cette vue lève les yeux au ciel et dit : «Grâces Te soient
rendues, Dieu tout-puissant, Dieu de nos pères, Dieu des miséricordes,
qui, pour montrer la puissance de ta Divinité, as amolli la fureur des
bêtes sauvages, rendu douces et faciles les choses les plus difficiles
et les plus dures, et fait couler dans des déserts arides des eaux
abondantes. Ô Dieu, exauce-moi et rendes à ce gouverneur méchant le
juste salaire de ses desseins. À moi, je T’en conjure, donne la grâce de
faire toujours ce qui vous est agréable et d'observer vos
commandements, afin que je mérite de recevoir avec nos glorieux pères la
sainte couronne.»
Quand elle eut achevé, une voix se fit entendre du ciel et lui dit :
«J'ai exaucé ta prière; viens en paix; les portes du royaume des cieux
te sont ouvertes.»
Une
seconde lionne fut alors lancé sur Glycère. Cette bête féroce s'élança
sur la martyre et lui fit sentir sa dent meurtrière. La blessure
néanmoins aucune trace sur le corps de la vierge ; mais le saint combat
était terminé.
Glycère expira, après ce long et glorieux témoignage rendu à la vérité.
L'officier
leva de nouveau les barrières, et les bêtes rentrèrent dans leur
repaire avec tous les signes d'une douloureuse tristesse.
Pour
le gouverneur, immédiatement frappé d'une maladie subite, il mourut sur
le lieu même, privé de tout secours humain, laissant à tous un terrible
exemple.
Quand
la mort eut couronné le martyre de la bienheureuse Glycère, l'évêque
Dométius recueillit son corps et le déposa près de la ville, dans un
lieu saint.
Nous
honorons la mémoire de cette vierge avec un pieux respect, le treizième
jour de mai demandant à Dieu de nous associer à sa Gloire.
Sainte
Glycère souffrit le martyre avec Laodicius, Antonin étant l’empereur,
Sabinus gouverneur de la Grèce, et sur nous chrétiens régnant en
souverain Maître notre Seigneur Jésus Christ, à qui est la gloire avec
le Père et l'Esprit saint, dans les siècles des siècles. Amen.
Glycère (en grec moderne : Γλυκερία), ou Glycère de Trajanopolis (IIe siècle - vers 177), est une sainte martyre.
Hagiographie
Glycérie
est la fille de Macarius, un important officier romain en résidence en
Asie Mineure, puis en Grèce à Trajanopolis, sous le règne d'Antonin le
Pieux.
Elle perd ses parents très jeunes et se tourne vers la religion chrétienne.
Vers
141, le préfet de Trajanopolis, Sabinus, reçoit un édit impérial
ordonnant aux chrétiens d'offrir des sacrifices aux Dieux.
Mais le jour où les habitants de la ville doivent aller adorer Zeus, Glycérie refuse et brise la statue dans le temple.
Les prêtres ordonnent aux fidèles de la lapider, mais les pierres ne l'atteignent pas.
Elle est alors condamnée à être jetée aux animaux sauvages. Mais elle meurt avant qu'ils puissent la toucher.
Les liturgies grecques et orthodoxes l'honorent par un office complet, elle est fêtée le 13 mai.
Elle est surtout célèbre parmi les grecs du patriarcat de Constantinople à cause d'une huile sainte qui aurait suinté de son tombeau à Héraclée.
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