Bienheureuse Élisabeth Verchière († 1794)
ou Madeleine de la Mère-de-Dieu
et ses compagnes
religieuses martyres à Orange
Jésus-Christ, époux des saintes âmes et « glorieux Roi des martyrs », n'a pas voulu couronner seulement, dans la phalange de nos bienheureuses, celles qui s'étaient consacrées à Lui depuis longtemps.
Il
a daigné aussi récompenser de la même couronne ses épouses de la
veille, celles qui ne lui avaient encore donné que les prémices d'une
vie dont les jours devaient être si courts, mais si glorieusement
tranchés.
Élisabeth Verchière était toute jeune professe du couvent du Saint-Sacrement, quand la Révolution éclata.
Née à Bollène le 2 janvier 1769 de Jean-Pierre Verchière et d'Élisabeth Pradelle, elle entra en 1788 le 1er novembre chez les Sacramentines, y reçut l'habit le 12 février 1789 et y prononça ses vœux le 21 février 1790.
Depuis le 13 février de cette même année les vœux de religion étaient déclarés nuls, et les Ordres religieux abolis.
Il ne semble pas que Sœur Madeleine de la Mère de Dieu – ainsi
s'appelait en religion Élisabeth Verchière – se soit beaucoup préoccupée
des décrets et des ordres de Assemblée constituante !
C'est
que Dieu lui parlait, et l'invitait à se consacrer à Lui. Pour une âme
qu'Il a ainsi appelée et choisie, par la plus magnifique des grâces, la
terre et les hommes et « le visage fugitif de ce monde » n'ont plus de
charmes ni d'attraits.
Mais
si Élisabeth s'était ainsi donnée joyeusement à sa sainte vocation,
elle ne put rester longtemps dans la maison où elle pensait l'abriter.
Au mois d'octobre 1792, elle dut sortir avec ses compagnes du couvent où elle venait de promettre de finir sa vie.
Pour
une âme moins forte que la sienne, moins trempée au feu de l'amour
divin, l'occasion était belle de rentrer dans le monde et d'y reprendre
l'existence du siècle.
Les événements s'y prêtaient à merveille, et le cloître n'avait pas
encore mis sur la jeune professe une telle empreinte qu'elle ait été
ineffaçable.
Les liens volontairement pris étaient trop récents pour être indestructibles.
Ainsi eût raisonné le monde, et la prudence humaine n'eût pas parlé autrement.
Une âme aussi généreuse que celle d'Élisabeth était capable d'entendre un tout autre langage.
Elle
quitte donc son couvent : mais pour le retrouver tout de suite, dans la
communauté si fervente et si pauvre que les Sacramentines avaient
immédiatement reconstituée.
Arrêtée
avec ses compagnes, avec elles transférée à Orange, elle se montra dans
sa prison, l'émule de ses aînées en piété, et en fidélité à la règle
par toutes consentie.
Sa jeunesse attendrissait sans doute jusqu'à ses geôliers, mais elle ne la rendait pas incapable d'héroïsme.
On
le vit bien, quand le 13 juillet, elle comparut devant ses juges.
Accusée, comme les cinq religieuses jugées avec elle, de refuser
obstinément le serment ordonné par la loi, de propager le plus dangereux
fanatisme, dans l'intention d'appeler l'anarchie... elle ne se laissa
pas ébranler par les interrogations insidieuses du président Fauvéty.
« Les six béates, est-il dit dans le compte-rendu des travaux de la
Commission du 14 juillet, ont déclaré qu'il n'était pas au pouvoir des
hommes de les empêcher d'être religieuses ; que le serment était
contraire à leur conscience et à leurs vœux. Nous leur avons fait
observer que parmi ces vœux, se trouvait celui de l'obéissance, que
Saint Paul lui-même avait dit, en rappelant les paroles du Christ, qu'on
devait l'obéissance au souverain, même injuste, et qu'ainsi leur refus
de serment pouvait bien être considéré comme une révolte contre le
peuple souverain ».
En vertu de cette argumentation, la sœur Verchière fut immolée le même jour. Elle avait 25 ans et 6 mois.
Abbé Méritan
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