Bienheureux Guerric d'Igny († 1157)
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Guerric d’Igny, né entre 1070 et 1080 à Tournai dans le comté de Flandre et décédé le 19 août 1157 à l’abbaye d’Igny dans le comté de Champagne (royaume de France), est un moine cistercien, abbé d’Igny.
Ami et disciple de Bernard de Clairvaux, il est considéré comme un des pères de la spiritualité cistercienne, surtout par son culte marial.
Déclaré bienheureux, son culte est reconnu en 1889 ; liturgiquement, il est commémoré le 19 août par l'église catholique.
Biographie
Formation et premières années
Né à Tournai le jeune Guerric reçut sa première éducation à l’école cathédrale de Tournai, presque certainement sous la direction d’Odon de Tournai qui de 1087 à 1092 en était l’écolâtre.
Il est possible que Guerric ait été lui-même écolâtre à Tournai entre 1121 et 1125.
Attiré par un style de vie plus solitaire, Guerric se retire dans une petite maison près de l’église de Tournai.
Il passe son temps à la lecture, la prière et la méditation. Par un ami il entend parler de Bernard de Clairvaux, passé récemment en Flandre.
Cela le décide à faire un voyage à Clairvaux.
Il ne semble pas que sa première intention ait été d’y entrer comme novice.
Bernard le convainc cependant à rester à Clairvaux (1126).
Dès son noviciat, il est remarqué par Saint Bernard comme moine de vertu éminente, qui mentionne le nom du novice Guerric dans plusieurs lettres.
Abbé d’Igny
En 1138 Guerric devient abbé d’Igny, une fondation de Clairvaux dans le diocèse de Reims.
Il en est le deuxième abbé. Même s’il est ‘régulièrement’ élu par la communauté (comme le veut la Carta Caritatis), il semble bien que l’influence de Saint Bernard n’ait pas été pour rien dans le choix fait par la communauté d’Igny.
S’il a une grande expérience spirituelle, d’abord comme ermite ensuite comme disciple de Saint Bernard à Clairvaux, Guerric n’en est pas moins assez âgé - sans doute plus de 60 ans - et se lamente dans un de ses sermons de ce que sa condition physique chancelante ne lui permet pas de participer pleinement au travail manuel communautaire que demande la règle de saint Benoît.
L’abbaye d’Igny est florissante sous la direction de l’abbé Guerric ; son prestige religieux personnel est grand.
Certains de ses écrits circulent. Les vocations affluent, des dons sont reçus et une nouvelle fondation monastique est faite : c’est l’abbaye de Valroy en 1148, dans le diocèse de Reims.
Reliques de Guerry d'Igny
Guerric meurt dans son abbaye le 19 août 1157.
Vénération et souvenir
En 1876, lors de la restauration de l'Abbaye Notre-Dame d'Igny son corps est exhumé et identifié.
Son culte, de temps immémorial dans l’ordre de Cîteaux, est officiellement reconnu par l’Église en 1889.
Liturgiquement la fête du Bienheureux Guerric d’Igny se célèbre le 19 août.
Doctrine
- Seuls 54 sermons (un genre littéraire prisé à son époque) de Guerric d’Igny nous sont parvenus. Ils sont publiés dans la Patrologie latine de Migne. Il semble que par respect pour une décision du chapitre général des cisterciens (en 1151 ?) Guerric ait fait brûler le volume de ses sermons. Ceux qui circulaient déjà hors du monastère d’Igny nous sont parvenus.
- Les sermons eurent une grande influence dans le développement de la spiritualité cistercienne et furent réimprimés de nombreuses fois, jusque et y compris durant le XXe siècle.
- Dans la ligne de Saint Bernard, son maître spirituel, Guerric développe une forte spiritualité mariale :
- Marie nous régénère. Telle est sa maternité spirituelle : « Marie forme son Fils unique en tous ceux qui sont fils par adoption » Elle est la nouvelle Eve qui donne une nouvelle vie à ceux qui étaient devenus vieux par le péché.
- Marie est image de l’Église : cette maternité est celle de l’Église qui pareillement exerce sa maternité à notre égard.
- Plus étonnant et audacieux : nous avons à partager la maternité de Marie par rapport à son Fils. Marie est type de l’âme : « l’Enfant-Jésus est né non seulement pour nous mais en nous. Nous avons à ‘concevoir’ Dieu en notre cœur » (sermon de la Nativité).
Écrits
Chanoine, puis écolâtre de Tournai, Guerric devait avoir passé 40 ans quand il entra à Clairvaux vers 1120. En 1138, il était envoyé à Igny, maison fille de Clairvaux, comme abbé.
- Commentaire selon Jean (Jn 17, 20-26)
Le Christ pour intercesseur
« « Père, ceux que tu m'as donnés, je veux que là où je suis, ils soient eux aussi avec moi, et qu'ils contemplent ma gloire. » Heureux disciple, qui ont pour avocat leur juge en personne, et pour intercesseur celui qu'on doit adorer au même titre que le Père auquel il adresse sa prière ! Le Père ne refusera pas de satisfaire le désir exprimé par ses lèvre (cf. Ps 20, 3), car il a avec lui une seule volonté et une seule puissance, étant un seul Dieu. Toute prière du Christ doit nécessairement s'accomplir, car sa parole est puissance et sa volonté efficacité. Toutes choses en effet existent parce qu' il a parlé, et elles ont été faites, il a commandé, et elles furent créées (Ps 32, 9).
« Je veux, dit-il, que là où je suis, ils soient eux aussi avec moi. »
Quelle sécurité pour eux qui ont la foi, quelle confiance pour les
croyants, si toutefois ils ne rejettent pas la grâce qu'ils ont reçue !
En effet, ce n'est pas seulement aux Apôtres et à ceux qui furent
disciples avec eux qu'une telle sécurité est offerte, mais à tous ceux
qui, grâce à leur parole, croiront au Verbe de Dieu. « Je ne prie pas seulement pour ceux qui sont là, dit-il, mais encore pour ceux qui, grâce à leur parole, croiront en moi. »
Le grand prêtre qui est entré en ce jour dans le sanctuaire après avoir obtenu une rédemption éternelle
(He 9, 12), et qui se tient maintenant en présence de Dieu en
intercédant pour nous, te crie : « Élevons notre cœur. » Réponds-lui
avec foi : « Nous le tournons vers le Seigneur. » »
— Guerric d'Igny. Sermon pour l'Ascension 2.5, trad. P. Deseille, Paris, Cerf, coll. « Sources Chrétiennes » 202, 1973, p. 275-281.
- Commentaire selon Jean (Jn 13, 1-20)
C'est moi qui te servirai
« « Ayez en vous les sentiments du Christ Jésus » : « lui qui est de condition divine » (Ph 2, 6), égal à Dieu par nature, puisqu’il partage sa puissance, son éternité et son être même, il a rempli l’office de serviteur « en s’humiliant lui-même et en se faisant obéissant à son Père jusqu’à la mort, et la mort de la croix » (cf. Ph 2, 8). On pourrait considérer comme négligeable qu’étant son Fils et son égal, il ait servi son Père comme un serviteur ; mieux que cela, il a servi son propre serviteur plus qu’aucun autre serviteur. Car l’homme avait été créé pour servir son Créateur ; quoi de plus juste pour toi que de servir celui qui t’a fait, sans qui tu ne serais pas ? Et quoi de plus heureux que de le servir, puisque le servir, c’est régner ? Mais l’homme a dit à son Créateur : « Je ne servirai pas. »
Eh bien, c’est moi qui te servirai ! dit le Créateur à l’homme. Mets-toi à table ; je ferai le service ; je te laverai les pieds. Repose-toi ; je prendrai sur moi tes maux ; je porterai toutes tes faiblesses. Si tu es fatigué ou chargé, je te porterai, toi et ta charge, afin d’être le premier à accomplir ma loi : « Portez les fardeaux les uns des autres » (Ga 6, 2). Si tu as faim ou soif, me voici prêt à être immolé pour que tu puisses manger ma chair et boire mon sang. Si on t’emmène en captivité ou si on te vend, me voici ; rachète-toi en donnant le prix que tu tireras de moi ; je me donne moi-même comme prix. Si tu es malade, si tu crains la mort, je mourrai à ta place, pour que de mon sang tu te fasses un remède de vie.
Ô mon Seigneur, à quel prix tu as racheté mon service inutile ! Avec quel art plein d’amour, de douceur et de bienveillance tu as récupéré et soumis ce serviteur rebelle, en triomphant du mal par le bien, en confondant mon orgueil par ton humilité, en comblant l’ingrat de tes bienfaits ! Voilà, voilà comment ta sagesse a triomphé. »
— 1er Sermon pour les Rameaux, Cerf, coll. « Sources Chrétiennes » 202, p. 165s rev.
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