Saint Arnoul de Metz († 641)
29ème évêque de Metz
Arnoul de Metz, Arnould, Arnoulf, Arnulf, Arnulfus, dit saint Arnoul, né vers 582 à Lay-Saint-Christophe et mort probablement en 640 ou 641 au Saint-Mont de Saint-Amé, était le 27e évêque de Metz.
Il gouverna dans les faits avec Pépin de Landen le royaume d'Austrasie, puis devint moine au Saint-Mont.
C’est le fondateur de la dynastie des Arnulfiens, alliée des Pépinides. Père d’Ansegisel, aïeul de Pépin de Herstal, quadrisaïeul de l’empereur Charlemagne, il est l'ancêtre de la dynastie carolingienne.
C'est un saint chrétien fêté localement le 18 juillet.
Arnoul
apparait comme une des personnalités les plus attrayantes du royaume
d’Austrasie : homme politique très influent, évêque de Metz à l’immense
réputation, ermite et religieux mort en odeur de sainteté. Cette vie si
bien remplie à « trois temps » — à peu près d’égale longueur — très
intense peut donc être très intéressante pour l’historien puisqu’elle
recouvre trois dimensions essentielles de l’époque : la Puissance sur la
société, sur l’église, et sur le sacré. En dépit de la difficulté des
sources à produire des récits historiques précis et fiables, nous
pouvons rester attentifs à ce qu’il veut nous dire même pour les temps
actuels.
Biographie
Saint Arnoul, chapelle Sainte-Glossinde à Metz
L’ascendance d’Arnoul fait débat depuis le IXe siècle.
Les
documents contemporains le disent de la plus haute noblesse franque,
tandis que des généalogies ultérieures lui attribuent pour père soit
Arnoald évêque de Metz, soit Bodogisel, ambassadeur franc à
Constantinople.
Article détaillé : Origine des Arnulfiens.
Il
appartient donc à une grande famille de la noblesse franque située dans
la Woëvre et dont les biens s’étendaient entre Metz et Verdun.
On
possède sur Arnoul deux Vita Arnulfi, la première écrite peu de temps
après sa mort par un moine, la seconde par un certain Ummo au Xe siècle.
D’après ce second texte, il est né sous Maurice Ier, dans la villa Layum probablement Lay-Saint-Christophe près de Nancy.
Sa naissance remonterait donc entre 582 et 590. Il reçut l’enseignement qui était alors en vigueur dans les familles aisées.
Notable influent, leude à la cour royale
Possédant
naturellement les aptitudes à encadrer, commander, diriger, protéger,
décider, (1), qualités que l’on reconnait aux nobles dans le monde
franc.
Arnoul
devient ainsi un personnage important, peut être « le plus illustre
représentant de l'autorité royale en Austrasie », au point ou le Roi lui
confie l’administration de six provinces à lui seul .
Le résistant et l'intrigant
Tous
les historiens anciens et modernes soulignent le rôle important que
tint Arnoul (avec Pépin et Romaric) dans le mouvement de résistance et
d’opposition à la célèbre Reine Brunehaut ou Brunehilde (les deux
appellation reste correctes), mêlant le goût de la tactique et de la
stratégie souterraine, des intrigues de Palais, autant pour se maintenir
aux meilleures places que par un fort sentiment identitaire austrasien.
Il travaille ensuite au palais d’Austrasie auprès de Gundulf, son grand-oncle, qui exerçait au poste de chef du palais et de conseiller du roi.
Puis il entre, pendant une douzaine d’années, au service du roi Thibert II dont il est un temps intendant des domaines royaux.
Il songe à se retirer pour mener une vie ascétique mais sa famille parvient à le marier vers 610 à Dode avec qui il aura deux fils Chlodulf († 697) et Ansegisel († av.679).
Par
sa position de leude à la cour, il entre dans l’opposition contre
Brunehilde et, associé à Pépin de Landen, fait appel au roi de Neustrie
Clotaire II, qui vainc et fait exécuter la vieille reine.
Arnoul
et Pépin marient ensemble leurs enfants respectif Ansegisel et Begga,
donnant ainsi naissance à la dynastie carolingienne.
L'évêque célèbre
Hôtel de Ville de Sarrebruck
(Rathaus St. Johann), Peinture de Wilhelm Wrage dans la salle de
banquet (Rathausfestsaal): Saint Arnoul de Metz inaugure la première Chapelle de St. Jean
Dans
une recherche d'unité et de restructuration, le roi Clotaire II voulut
contrôler la structure hiérarchique du clergé, et dans ce mouvement,
Arnoul fut élu puisqu'il appartenait à l'élite austrasienne.
Sa nomination pouvait aussi être considérée comme une récompense à la fidélité au roi dans le renversement de la reine Brunehaut.
Arnoul
cumula ainsi les fonctions administratives et religieuses, l'Évêque
étant à cette époque un personnage très important pour l'Église et la
cité, prestigieux et influent. Jean Euclin précise dans son ouvrage op. cit.,
à la page 18 que " il était normal de se disputer le poste d'évêque,
car une fois parvenu, on jouissait d'une fortune assurée".
Toute
la tradition hagiographique a insisté sur la sainteté et la conduite
irréprochable de cet homme de pouvoir et de gloire, équilibrant la vie
mondaine superficielle de la Cour de Metz par des séjours en ermitage,
empli de nostalgie de solitude et de méditations...
Elle
nous montre la vocation d'Arnoul à la vie érémitique dès sa jeunesse,
démontrant une grande charité et une attention aux plus pauvres, et les
« miracles » du saint Évêque tendent à protéger et édifier la Cité dont
il a la lourde responsabilité.
En 613, Clotaire II devient maître de tout le royaume et récompense ses fidèles.
Le roi Clothaire II l’invite expressément à accepter le siège épiscopal de l’évêché de Metz qui est la capitale du royaume d’Austrasie.
Il est ainsi le 29e évêque de Metz de 613 à 628, et fait preuve d’un dévouement dans l’accomplissement de ses attributs.
Il est pour cela très apprécié et Clotaire II continue à l’associer au gouvernement de l’Austrasie.
Il a donc tenu un rôle très important, tant dans la vie de l’église que dans la gestion du royaume d’Austrasie.
Clotaire II le nomme précepteur de son fils Dagobert Ier, dernier grand roi mérovingien.
Il est domesticus, c’est-à-dire conseiller de celui-ci. Lorsque Clotaire II nomma Arnoul évêque de Metz, son épouse Dode entra au couvent puisqu’un évêque ne peut être marié.
Selon
l’historiographie en 629, lorsque meurt Clotaire II, il se retire et
entre dans les ordres, malgré la détermination de Dagobert Ier qui menaçait de faire tuer ses fils pour le forcer à rester à son poste.
Quand on sait que Dagobert écarte Pépin de Landen
de la mairie du palais, les menaces de Dagobert avaient plus
probablement pour objet de faire partir Arnulf de ses charges, afin
d’éloigner des deux principaux chefs de l’aristocratie austrasienne.
Le saint ermite
Le Saint Arnoul après la renonciation de ses bureaux, vers 1680
Il
put enfin répondre à cet appel si puissant vers la sainte solitude en
se retirant sur le versant d'une montagne boisée (le "Morthomme") à
proximité du mont Habend, lieu de la fondation d'un monastère de femmes
par Romaric son ami de toujours, et dont le premier abbé fut saint Amé
après un passage à Luxeuil, monastère fondé par saint Colomban).
Arnoul créa alors son propre ermitage, accompagné de quelques
moines-serviteurs, à l'écart cependant de la vie monastique
communautaire traditionnelle, œuvrant dans un saint dévouement pour
soigner les lépreux de cette époque qui cherchaient un refuge.
Cette vie de prière et de méditation, de charité et d'abnégation, dura une dizaine d'années environ.
Il
eut sans doute de forts échanges avec son ami Romaric, qui entre-temps
était devenu l'abbé du monastère du mont Habend (et son arrivée dans la
montagne voisine coïncide avec la date du décès de saint Amé : ainsi
Romaric a-t-il été toujours assisté spirituellement dans sa tâche par
deux personnalités attirées par la solitude absolue).
Cette vie d'ermite effacé et discret, à l'opposé de sa vie antérieure, se termina vers l'an 640.
Son corps fut transporté et déposé au monastère du mont Habend.
C'est
au bout d'une année environ que son corps fut ramené à Metz, et cette
translation fut entourée et accompagnée de signes et de prodiges que la
tradition hagiographique aime à détailler pour démontrer la sainteté
éclatante de l'ancien évêque de Metz.
Ses restes sont transférés à Metz dans l’église des Saints-Apôtres, qui prit le nom de Saint-Arnoul en 717.
Celui-ci
fut largement célébré au cours des siècles suivants dans la ville qu'il
avait servie avec tant de dévouement, et qui conserva ses reliques et
entretint sa légende.
On
peut ici citer le mot de l'historien P. Riche dans son ouvrage les
Carolingiens, une famille qui fit l'Europe : « à sa mort, déjà considéré
comme un saint, ce qui n'est pas sans importance pour le prestige futur
de sa famille […] ».
Ainsi
par sa vie, Arnoul put-il donner des lettres de noblesse à toute la
dynastie mérovingienne et carolingienne, davantage qu'en s'accrochant à
une plus haute distinction humaine et une place riche et éphémère…
En
effet, par la référence à sa sainteté et à la vénération de ses
reliques, il demeura en pleine gloire dans sa ville, bien plus que s'il
était resté un seigneur actif dans le politique et le gouvernement
éphémère du Royaume d'Austrasie.
Les chanoinesses de Remiremont ont eu quelques dévotions en célébrant la date de sa mort et de la translation de ses reliques.
Charlemagne
lui-même serait venu à Remiremont en sa mémoire, et il subsista quelque
temps un pèlerinage et une chapelle au massif du Morthomme (l'ermitage
de Saint-Arnoul au XVIIe siècle était encore malgré tout honoré et perpétuait son souvenir, entretenu par les chanoines de Remiremont.
Si
on conserve encore sa mémoire vive à Metz, sur la montagne qui
l'accueillît pour la dernière période de sa vie, il ne reste plus rien
de l'ermitage, et seules y subsistent une croix de fer et une pancarte
de métal qui indique avec éloquence aux rares passants et randonneurs :
« Cette croix rappelle la chapelle dédiée à saint Arnould, ancêtre de Charlemagne, précepteur du roi Dagobert 1er,
maire du palais d'Austrasie, évêque de Metz. Après avoir abandonné sa
charge, est venu rejoindre saint Romaric au Saint-Mont, puis s'est
retiré ici soigner les lépreux jusqu'à sa mort le 16 aout 640. ».
Légende et culte
Patron des brasseurs
L'anneau d'or du saint Arnoul dans le trésor de la cathédrale de Metz
Son nom reste associé à un trésor de la cathédrale de Metz
qui a miraculeusement échappé à la Révolution française : un anneau, en
or fin massif, d'un travail assez grossier, comportant une agate onyx sur laquelle est gravée un poisson engagé dans une nasse autour de laquelle se noient deux autres poissons.
Cette
scène n'est pas sans rappeler le fait historique ou anecdotique lié à
cet anneau et rapporté par l'écrivain Paul Diacre, qui le tenait de la
bouche même de Charlemagne.
Selon
cet auteur, saint Arnoul passant sur un pont de la Moselle jeta dans le
fleuve ledit anneau en priant Dieu de le lui rendre en témoignage du
pardon de ses fautes.
Quelque temps après, on retrouva dans les entrailles d'un poisson l'anneau épiscopal.
« Saint Arnoul décida un beau jour de jeter son anneau dans la Moselle. Son geste est une preuve d'humilité.
En le jetant, il dit : “Je croirai que Dieu m'a pardonné mes péchés quand je retrouverai cet anneau”.
De
là est née cette fameuse légende qui laisse penser qu'un poisson avala
l'anneau et fut servi peu de temps après à la table épiscopale.
À
en croire la légende, Dieu est entré indirectement en contact avec
Arnoul qui fut lavé de ses péchés et fit de lui un représentant légitime
de Dieu sur terre. »
L'histoire est très similaire à la légende qui entoure la fondation de l'abbaye d'Orval.
C'est
en souvenir de ce fait que depuis on le portait en procession à
l'église de Saint-Arnoul le jour de la fête du saint évêque.
Enlevé en 1793 avec les vases sacrés de la cathédrale, il fut racheté par un des officiers de la monnaie.
Il fut rendu au trésor en 1846.
Sa vie, où il a laissé le souvenir d'un grand d'Austrasie, malgré son opposition à Brunehaut, mais aussi surtout sa légende, dite Légende de saint Arnoul a marqué profondément la mémoire des régions de l'est de la France.
Saint
Arnoul est le saint patron des brasseurs lorrains. Peu de temps après
sa mort, ses reliques furent rapportées de Remiremont à Metz. Arrivées
près de Champigneulles (ou de Nossoncourt selon d'autres versions de la
légende), les personnes qui les rapportaient manquèrent de bière et
prièrent saint Arnoul afin d’avoir de quoi se restaurer.
Leurs prières furent exaucées lorsqu’ils retrouvèrent miraculeusement de la bière dans leurs tonneaux vides.
Ce sujet rare a été représenté par Jean-Baptiste de Champaigne.
Généalogie
Statue de Saint Arnoul de Metz sur le portail de l´Église Saint-Jean de Sarrebruck à Sarrebruck-St. Jean
Bodogisel ambassadeur à Byzance († 589) | Chrodoara abbesse d’Amay († 611 ?) | Arnoald év. de Metz († 601) | |||||||||||||||||||||||||||||||
Arnoul évêque de Metz († 641) | Dode | Pépin l'Ancien maire du palais († 640) | |||||||||||||||||||||||||||||||
Clodulf évêque de Metz († 697) | Ansegisel domestique († 662) | Begga († 693) | |||||||||||||||||||||||||||||||
Aunulf († 697/714) | Martin comte († 680) | Clotilde Dode x Thierry III roi des Francs | Pépin de Herstal maire du palais († 714) |
Le nom de Doda n'apparaît qu'au Xe siècle, mentionné par Ummo dans la seconde Vita Arnulfi.
Des
généalogies présentent parfois un troisième fils Walchisus qui est le
père de Wandregisil, connu par la postérité sous le nom de Saint Wandrille.
C’est
en contradiction avec plusieurs autres textes, la première Vita
Arnulfi, Paul Diacre, qui précise que saint Arnoul ne laisse que deux
fils.
En
fait, cet ajout généalogique est le résultat d’une mauvaise
interprétation de la Vita Ansberti qui nomme « princeps Pipinus
Ansegisili filius » comme « consobrinus…beati patris Wandragisili »
(« le prince Pépin fils d'Ansegisel est le cousin du saint père
Wandrille »). consobrinus a été pris au sens de « cousin germain » et
les historiens on déduit une fraternité entre Ansegisel et Waldegisel,
le père de saint Wandrille.
En fait, le cousinage, un peu plus éloigné, s'explique autrement : saint Wandrille est petit-fils de Waldrade, sœur de Pépin l'ancien.
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