Saint Dorothée de Gaza (6ème s.)

Saint Dorothée de Gaza (6ème s.)

Anachorète en Égypte

 

Saint Dorothée de Gaza. Anachorète en Egypte (6ème s.)

Fresque représentant saint Dorothée de Gaza, monastère de Dionysiou au mont Athos, 1547


 

Dorothée de Gaza (Δωρόθεος τῆς Γάζης) ou Dorothée l'Archimandrite, né vers 500 et mort entre 565 et 580, est un saint de la région de Gaza et l'un des pères spirituels du désert palestinien.

Moine, fondateur entre 540 et 543 d'un monastère et auteur, il est fêté le 13 août pour l'Église de Jérusalem et l'Église de Grèce et aussi en Occident le 5 juin selon le calendrier grégorien, et le 5 juin pour l'Église orthodoxe russe selon le calendrier julien.

Histoire et tradition

Dorothée de Gaza, natif d'Ascalon au sein d'une famille fortunée, et venu dans sa jeunesse à Gaza était disciple de Procope de Gaza qu'il accompagna pendant dix ans, puis il instruisit saint Dosithée de Gaza.

Il refusa de devenir higoumène, mais d'autres moines se joignirent à lui au fil du temps, si bien qu'il devint abbé (abba) d'un monastère près de Gaza, jusqu'à sa mort.

Il y écrivit ses sermons et ses lettres, notamment celles destinées à Jean de Gaza et Barsanuphe de Gaza. Ce sont aujourd'hui des classiques de la littérature ascétique.

Œuvres

Il a laissé :

  • des Sermones de vita recte instituenda, trad. en français par l'abbé de Rancé1686. Nouvelle trad. Dionysii monachi de Vita sacerdotali recte instituenda liber, édit. In bibliopolio Heringiano, 121 p., (ASIN B001CB8VAW).
  • des Lettres, en grec et en latin.
 


Notre Saint Père Dorothée était né à Antioche, au sein d'une famille chrétienne et fortunée.

Il reçut une bonne éducation, tant ecclésiastique que dans les sciences "du dehors" Il montrait d'ailleurs une telle ardeur à l'étude, qu'il en oubliait nourriture, boisson et sommeil, ce qui porta préjudice à sa santé qui resta délicate.

N'ayant de goût que pour la lecture, notamment des livres médicaux, il évita les mauvaises fréquentations et les dérèglements de la jeunesse, et il pouvait dire plus tard : « Si pour la science profane on ressent une telle soif et une telle ardeur du fait qu'on en acquiert l'habitude, combien plus pour la vertu ! »

Renonçant de bonne heure au monde, il entra au monastère d'abba Séridos, près de Gaza, et s'abandonna en toute confiance aux deux Saints Vieillards, Barsanuphe et Jean.

Bien qu'il désirât un détachement total, les Anciens, tenant compte de sa faiblesse et de son état de santé, lui laissèrent la disposition d'une petite propriété de famille et la possession des livres qu'il avait apportés au Monastère.

Comme il ne pouvait entreprendre de grandes mortifications et se trouvait assailli par des pensées d'impureté, Saint Barsanuphe lui prodigua consolation et conseils.

Il lui recommanda de ne pas se laisser gagner par le désespoir, qui ferait la joie du diable, et lui permettant l'usage d'un peu de vin, il lui prescrivit de faire son possible pour retrancher la volonté de la chair, en portant tous ses efforts sur l'ascèse intérieure du cœur, afin d'acquérir les vertus les plus précieuses : l'humilité, l'obéissance, la componction, la compassion envers tous les hommes et le souvenir continuel de Dieu.

Encouragé par les Anciens et assisté par la grâce du Christ, Dorothée put ainsi écraser tous ses ennemis.

Il enseignait par la suite que le retranchement de la volonté propre est le raccourci qui permet de parvenir au terme de la perfection.

En effet, en s'habituant à renoncer à sa propre volonté, d'abord dans les petites choses, puis en toute activité, on obtient le détachement, et du détachement on parvient, Dieu aidant, à une parfaite impassibilité.

Et il répétait fréquemment cette parole des Pères : « Quiconque est parvenu à retrancher la volonté propre est parvenu au lieu du repos ».

 

Un jour qu'il était assailli par une tristesse écrasante et intolérable qui venait du démon, et qu'il se tenait dans la cour du Monastère, découragé et suppliant Dieu de venir à son secours, Dorothée vit soudain un mystérieux personnage, ayant l'aspect d'un Evêque, entrer dans l'église.

Il le suivit et le vit se tenant en prière, les mains tendues vers le ciel. Quand il eut achevé sa prière, l'homme se tourna vers le jeune moine, qui était rempli d'effroi, et lui frappant la poitrine, il répéta à trois reprises le verset psalmique : « J'ai attendu ardemment le Seigneur, et Il m'a prêté attention, Il a exaucé ma supplication... » (Ps. 39). Aussitôt le personnage disparu, le cœur de Saint Dorothée se trouva rempli de lumière, de joie, de consolation et de douceur, et depuis cette heure, il ne fut plus jamais assailli par l'acédie, la tristesse ou la crainte2. Inquiet de cette paix, qui semblait contredire la Sainte Ecriture enseignant qu'il faut passer par bien des tribulations pour parvenir au Royaume de Dieu, il s'en ouvrit à Jean le Prophète, qui le rassura en disant: « Tous ceux qui se livrent à l'obéissance des Pères, possèdent cette insouciance et ce repos »3.

En effet, Saint Dorothée ne manquait pas de rapporter toute pensée aux Anciens. Et dès qu'il inscrivait une pensée pour la leur soumettre, il en ressentait déjà soulagement et profit4

 

Assigné à la garde de la porte du Monastère et à la réception des hôtes, il fut en plus mis au service d'abba Jean le Prophète.

Pouvant ainsi désormais interroger directement l'Ancien, il tira grand profit de ses enseignements pour progresser dans la connaissance des mouvements de l'âme.

Après quelque temps, on lui confia la tâche difficile et accaparante d'installer et d'administrer l'infirmerie du Monastère, qui avait été construite grâce aux dons de son frère selon la chair.

Admirablement préparé à cette fonction par ses études médicales, il s'y adonnait avec zèle et complet renoncement.

Du matin jusqu'au soir, il se trouvait sollicité non seulement par le soin des malades, mais aussi par toutes sortes d'autres affaires qui le divertissaient du souvenir de Dieu et de l'hésychia.

Il fut tenté à plusieurs reprises de quitter le Monastère pour aller mener la vie érémitique, mais Saint Jean l'en dissuada, lui disant que celle-ci était pour certains occasion d'orgueil et de chute, et que ce qui lui convenait était la "voie moyenne" de l'obéissance et de la charité : "en gardant l'humilité dans l'hésychia et la sobriété dans les tracas des affaires5. Il ajouta: « Avoir un commandement et s'appliquer à le garder, c'est à la fois soumission et souvenir de Dieu »6.

 

Saint Barsanuphe avait promis à Dorothée que s'il observait ses commandements de fuir les plaisirs, la liberté de langage, les vaines conversations, et de garder la charité envers tous ainsi que le souvenir de Dieu, il prendrait sur lui ses fautes et ses manquements pour qu'il soit compté parmi ses "vrais enfants qui sont sous la protection divine"7.

On lui confia la formation spirituelle du jeune Dosithée, qui grâce aux recommandations de Dorothée parvint rapidement à la perfection, avant de remettre son âme à Dieu.

 

Après la mort de Jean le Prophète et d'abba Séridos, et la réclusion complète de Saint Barsanuphe, Saint Dorothée alla fonder, avec l'aide de Dieu, son propre monastère entre Gaza et Maïouma.

Il y dirigea ses disciples dans l'esprit qu'il avait reçu de ses Pères, Barsanuphe et Jean, avec délicatesse, discernement et charité, en insistant davantage sur le retranchement de la volonté propre et l'humilité, que sur les grandes ascèses corporelles.

C'est là que ses disciples recueillirent par écrits ses Instructions Spirituelles, dans lesquelles il joignait la sobriété de l'expression à une si grande sagesse, que ce traité est considéré comme un des ouvrages fondamentaux de la tradition monastique orthodoxe.

Il est aussi la seule relique qui nous reste du Saint, dont on ignore la date précise de la mort et le lieu de la sépulture.

 

Saint Dorothée exhortait sans relâche ses moines à demeurer unis les uns aux autres par la charité, et leur donnait cette image : « Supposez un cercle tracé sur la terre, c'est-à-dire une ligne tirée en rond avec un compas, et un centre. Imaginez que ce cercle, c'est le monde ; le centre, Dieu ; et les rayons, les différentes voies ou manières de vivre des hommes. Quand les Saints, désirant approcher de Dieu, marchent vers le milieu du cercle, dans la mesure où ils pénètrent à l'intérieur, ils se rapprochent les uns des autres; et plus ils se rapprochent les uns des autres, plus ils s'approchent de Dieu. Et vous comprenez qu'il en est de même en sens inverse, quand on se détourne de Dieu pour se retirer vers l'extérieur: il est évident alors que plus on s'éloigne de Dieu, plus on s'éloigne les uns des autres, et que plus on s'éloigne les uns des autres, plus on s'éloigne aussi de Dieu »8

 

1. Nous utilisons ici largement l'introduction à ses Œuvres spirituelles dans la série Sources Chrétiennes (SC 92, 9-29).
2. Instructions V, 67 (SC 92, 263-265).
3. Id. 1, 25 (SC 92, 185).
4. Une centaine de ses lettres sont conservées dans la Correspondance de Sts Barsanuphe et Jean (Lettres 252-338) et constituent un admirable témoignage sur la formation spirituelle d'un moine.
5. Lettre 315.
6. Lettre 328.
7. Lettre 273.
8. Instructions VI, 78 (SC 92, 287).

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