Vieux Marché
Chapelle des sept saints
La chapelle proprement dite
Elle a été classée Monument historique en 1956.
Description de la chapelle
L'actuelle
chapelle des Sept-Saints a été construite entre 1703 et 1714 (« Je suis
bâtie des aumônes, et par les soins, de Yves Le Denmat, depuis 1703
jusqu’en 1714 » dit une inscription difficilement lisible située
au-dessus du porche), remplaçant un édifice antérieur devenu trop petit
en raison du succès du pèlerinage.
Elle
est en forme de croix latine avec une surélévation des ailes du
transept, l'aile sud étant construite sur le dolmen du Stivel ; une
sacristie a été construite, par souci de symétrie, sous l'aile nord du
transept.
François-Marie Luzel a aussi écrit dans le même article :
« Le
bâtiment [de la chapelle] (...) n'offre en lui-même rien d'intéressant
comme architecture et comme art ; ce n'est, à proprement parler, que de
la maçonnerie vulgaire. (...) La chapelle est sous le vocable et sous le
patronage des Sept-Saints. Quels sept Saints ? Ce na sont pas les sept
saints [fondateurs] de Bretagne (...) comme on serait tenté de le croire
d'abord, si les noms et le costume des sept statues rangées sur le
retable de l'autel principal ne nous indiquaient pas clairement qu'il
s'agit là des Sept Dormants d'Éphèse. (...) Les noms inscrits sur les
socles sont les suivants : Constantin, Sérafein (sic), Jean, Denis, Martineau, Marc et Maximilien. »
Ces noms sont presque les mêmes que ceux donnés par Jacques de Voragine (vers 1225-1298) dans la Légende dorée (Maximien, Malchus, Marcien, Denis, Jean, Serafion, Constantin) a quelques petites variantes orthographiques près. La gwerz
des Sept-Saints cite aussi quasiment les mêmes noms Marc, Maximien,
Martinien, Denis, Jean, Sérafion, Constantin), remarquait aussi
François-Marie Luzel.
Sept-Saints : le calvaire près de la chapelle
Description des statues des sept Saints
Le chœur et les statues des sept Dormants dans la chapelle
Les sept statues des sept Dormants d'Éphèse
(datées du XVIIIe siècle) dans la chapelle
François-Marie Luzel faisait déjà remarquer la naïveté des statues :
« Les sept frères sont uniformément vêtus et outrageusement peinturlurés, vernis, reluisants et jolis garçons
à souhait ; tête nue, cheveux longs et bouclés, bottes à l'écuyère
montant jusqu'aux genoux, première tunique vert-foncé, parsemée
d'étoiles d'or et seconde tunique qui descend presque jusqu'aux talons,
par devant, et dont les pans s'entrouvrent par devant en forme de "V"
renversé, à partir de la ceinture qui serre la taille, pour laisser voir
la tunique du dessous et les bottes. »
Ces statues, de style sulpicien datent du XVIIIe siècle.
Trois d'entre elles, volées, ont été récupérées en 1985 dans une
consigne de la gare Montparnasse à Paris où elles avaient été déposées
par le voleur repenti.
Les autres statues de la chapelle
La chapelle possède aussi :
- sur les côtés du maître-autel :
- une statue de l'archange saint Michel ; le saint foule aux pieds un monstre vert qui montre de longues dents crochues.Il tient dans sa main gauche un bouclier avec l'anagramme du Christ inscrit en lettres d'or et brandit de sa main droite une épée flamboyante. Il est coiffé d'un casque empanaché de plumes.
- une statue d'un ange gardien qui tient dans sa main droite une fleur de lys.
- l'autel du transept sud est dédié à saint Isidore, patron des laboureurs, représenté en paysan breton, vêtu d'un bragou bras, de guêtres en grosse toile, de sabots et portant des instruments de labour.
- l'autel du transept nord porte une statue de saint Joseph, une Mater dolorosa qui en 1878 selon le témoignage de François-Marie Luzel était « entourée d'une multitude de béquilles vouées par les malades guéris pour avoir invoqué les Sept-Saints et lavé leurs pieds avec l'eau sainte de la fontaine », une Vierge à l'Enfant et un saint non identifié.
Chapelle des Sept-Saints : Vierge à l'Enfant
Chapelle des Sept-Saints : pietà
Les Sept Dormants d'Éphèse
Les statues anciennes des sept Dormants d'Ephèse
dans la crypte
Les travaux de François-Marie Luzel et d'Ernest Renan dans la seconde moitié du XIXe siècle
ont permis de réaffirmer en 1878 le lien avec le récit légendaire des
Sept Dormants d'Éphèse, dont la tradition populaire gardait d'ailleurs
confusément le souvenir à travers la gwerz et les noms attribués à chacune des statues représentant l'un des sept Saints.
Ernest
Renan s'étonne de l'existence de ce culte lié à une légende orientale
dans un endroit isolé de cette Bretagne où des cultes innombrables sont
certes rendus à des saints très nombreux d'origine plus ou moins
mythique et à l'existence historique incertaine, les fameux saints
bretons, mais ayant une origine celte en provenance le plus souvent de
la Bretagne insulaire ou de l'Irlande (Îles Britanniques actuelles). Il
en trouve l'origine dans la Passio de Grégoire de Tours.
Article détaillé : Sept Dormants d'Éphèse.
L'origine du pardon des Sept Saints remonterait au IIIe siècle.
Le culte serait parvenu au Vieux Marché par l'intermédiaire de moines
et de missionnaires grecs qui accompagnaient les commerçants d'Orient
sur la route de l'étain qui, venant de Méditerranée, aurait traversé la
Bretagne selon un itinéraire allant de Vannes vers le littoral nord de
la Bretagne (sans doute Le Yaudet où ils parvenaient en suivant le cours
du Léguer et où existe une "Vierge couchée", probablement d'inspiration
orientale,) avant de traverser la Manche en direction des Îles
Britanniques où se trouvaient des gisements d'étain. Mais ce n'est là
qu'une hypothèse pour l'instant insuffisamment étayée.
La gwerz des Sept-Saints
La gwerz ar seiz sant ou "gwerz
des Sept-Saints de la paroisse de Plouaret" (la commune du Vieux-Marché
ne s'est détachée de celle de Plouaret qu'en 1860) est un chant en
"breton massacré" (médiocre langue bretonne mêlée de français) long de
54 versets.
On a pu alléguer que certaines strophes remonteraient au VIIe siècle en raison de la manière de compter par vingtaines (la gwerz
dit que la dormition des Sept Dormants d'Éphèse a duré « 18 ans, plus 8
fois 20 ans ») mais cette manière de compter s'est maintenue longtemps
et le cantique est caractéristique du style du XVIIe siècle. Il s'agit
d'une œuvre de propagande religieuse.
Il
existe aussi toute une symbolique du chiffre "7" en vieux breton :
l'enclos paroissial de Lanrivoaré (Finistère) abrite un "cimetière des 7
777 saints" (en fait 7847 chrétiens qui auraient et massacrés par las
païens), qui n'est peut-être pas étrangère au culte des "Sept Saints".
De même, dans Le roman de la Table ronde, Galehaut dit au roi
Artus :« Si je n'ai pas tenu ce que j'avais promis, que Dieu et les sept
Saints de cette église ne me soient jamais en aide ! », mais on ignore à
quelle église il est fait allusion.
La chapelle des Sept-Saints en 1898
Selon la gwerz
des Sept-Saints, traduit par Geneviève Massignon, dont il reste 18
strophes dans le cantique de la procession, la grotte (crypte) date de
la création du monde et les six pierres du dolmen n'ont pas été érigées
de main d'homme.
« Je vous parle d'un travail qui n'a pas été fait de main d'homme...
La chapelle n'est formée que de six pierres :
Quatre rochers servent de murailles,
Et deux autres de toiture ; qui ne comprendrait
Que, seul, le Dieu tout puissant a pu la bâtir ?
Vous me demanderez peut-être
Quand et comment elle fut bâtie ;
Et moi, je réponds, que je crois que quand furent créés le monde,
Le ciel, la mer, la terre, elle fut aussi bâtie »
La chapelle n'est formée que de six pierres :
Quatre rochers servent de murailles,
Et deux autres de toiture ; qui ne comprendrait
Que, seul, le Dieu tout puissant a pu la bâtir ?
Vous me demanderez peut-être
Quand et comment elle fut bâtie ;
Et moi, je réponds, que je crois que quand furent créés le monde,
Le ciel, la mer, la terre, elle fut aussi bâtie »
Le pardon traditionnel
La veille du pardon, le soir, une cérémonie se déroulait, suivie d'une procession et d'un tantad ("grand feu de joie" en breton). Le pardon était tombé en désuétude dans le courant du XXe siècle.
Le pèlerinage islamo-chrétien
Chapelle des Sept-Saints : texte de prière multiconfessionnelle
Chapelle des Sept-Saints : tableau offert par des Musulmans
Louis
Massignon, professeur au Collège de France et spécialiste des questions
orientales, visite la crypte des Sept dormants d'Éphèse aux Sept-Saints le 19 septembre 1951 et assiste au pardon de 1953 ; il est frappé par la similitude entre les paroles de la vieille gwerz
chantée en breton, et les versets de la sourate 18 du Coran, dite de la
Caverne. « C'est d'ailleurs l'intuition d'une solidarité généalogique
et topographique, dans le cadre de la méditation du thème de la
résurrection des morts de l'époque mégalithique que j'ai vécue, en
venant, après avoir visité la crypte d'Éphèse, prier avec les
paroissiens bretons, avec qui j'ai fait trois fois déjà la procession
traditionnelle et le feu de joie, tantad, au pardon des Sept
Saints »<. Il évoque à propos de la dévotion des Sept Dormants
d'Éphèse aux "Sept-Saints" « un mythe hors-classe » et relance en 1954
« un pardon greffé d'islam », c'est-à-dire un pèlerinage commun
réunissant chrétiens et musulmans.
« Le
pardon a lieu le quatrième dimanche de Juillet le dimanche suivant
sainte Madeleine. Le pèlerinage commence le samedi matin, et continue
l’après midi par un colloque, auquel prennent part des représentants des
trois religions monothéistes et un représentant agnostique. Le thème
varie tous les ans. Le soir à la chapelle, grand’messe à 21h00 suivie
d’une procession et d’un « tantad » (feu de joie). Le dimanche à
11h, grand messe du Pardon suivie d’une procession qui va à la fontaine
où a lieu une cérémonie musulmane, là la sourate 18 du Coran est
psalmodiée par un Imam et traduite en français. Ainsi se terminent les
cérémonies ».
En
1965, la cathédrale Saint-Philippe d'Alger (devenue mosquée Ketchaoua) a
offert sa grande cloche à la chapelle des Sept-Saints (« Appelez-moi
cloche de l'Unité ») ; celle-ci a été placée dans l'église paroissiale
du Vieux-Marché car la chapelle des Sept-Saints était trop petite pour
la recevoir.
Sept-Saints : texte musulman de la prière multiconfessionnelle (traduction en français)
La source-lavoir
La source des Sept-Saints aménagée en fontaine
Probablement
ancien lieu de culte païen (druidique), cette source se caractérise par
sept trous qui sont peut-être à l'origine du mythe. Aménagée en lavoir
depuis un temps immémorial, cette source a retrouvé sa seule fonction
originelle depuis que les pierre du lavoir ont été enlevées dans la
décennie 1950. La gwerz des Sept-Saints, en langue bretonne, la décrit ainsi :
« (...) Il y a, dans le voisinage, une belle fontaine dédiée aux Sept-Saints et qui a sept sources. Ce sont sept canaux par lesquels Dieu répand ses grâces, et fait constamment grand nombre de miracles. »
François-Marie
Luzel écrit en 1878 que « les malades faisaient autrefois leurs
ablutions dans la fontaine » et qu'elle sert de lavoir aux femmes du
village.
« La
fontaine est à l'ouest de la chapelle, dans un champ. On ne voit sortir
qu'un assez maigre filet d'eau du bassin inférieur où les malades
faisaient autrefois leurs ablutions et qui sert aujourd'hui de lavoir
aux femmes du village » écrit un auteur anonyme en 1888.
La "crypte-dolmen" du Stivel
Plan du dolmen-chapelle des Sept-Saints en 1888
Le
dolmen du Stivel (mot qui signifie source ou lavoir en langue bretonne)
est formé de quatre pierres verticales formant piliers, recouvertes de
deux pierres horizontales formant tables de couverture. L'ensemble est
long de 4,40 mètres et large de 2 mètres environ. Depuis la construction
de la chapelle, pour partie au-dessus du dolmen, celui-ci se trouve
dans une crypte. Ce dolmen est classé Monument historique depuis 1889.
Il aurait été christianisé dès le VIe siècle.
Franois-Marie Luzel la décrivit ainsi en 1878 :
« La caverne ou la crypte, convertie aujourd'hui en oratoire populaire, est partagée en deux parties à peu près égales par une claire-voie de bois, qui se trouve vers le milieu. On s'y tient assez facilement debout. Au fond, au-delà de la claire-voie, est un autel de pierre d'une simplicité toute primitive et sur lequel on voit sept statuettes d'environ vingt-cinq ou trente cm de hauteur et d'un art très grossier. (...) Ces petits saints m'ont paru être drapés à la romaine (...) et fortement détériorés. Ce sont là les Sept-Saints primitifs, ceux que la tradition dit avoir trouvé sous le dolmen, et en l'honneur de qui la chapelle a été érigée. C'est encore à eux que les pèlerins s'adressent de préférence. »
Selon la légende, ces anciennes statues des sept Saints d'Éphèse auraient été trouvées miraculeusement.
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