Saint Martial de Limoges (3ème s.)
Évêque de Limoges
Martial de Limoges ou saint Martial (IIIe siècle), également appelé l’apôtre des Gaules ou l’apôtre d'Aquitaine est selon la tradition le premier évêque de Limoges.
Fondateur de l'Église d'Aquitaine, fêté le 30 juin, il est le saint patron éponyme de multiples villes, villages et lieux de cultes catholiques, dont le plus renommé est l'abbaye Saint-Martial de Limoges.
Si les traditions et les légendes le concernant convergent sur de nombreux points, la chronologie a donné lieu à deux versions nettement différentes.
Selon la première tradition, il ferait partie des sept missionnaires qui, au temps de la persécution de Dèce autour de 250, auraient été envoyés en Gaule par « les évêques de Rome » pour évangéliser la Gaule.
En réalité, l'Histoire des Francs de Grégoire de Tours
amalgame des récits d'origines, de dates et de valeurs différentes,
pour raconter l'histoire légendaire de ces sept missionnaires : Martial
de Limoges, Gatien de Tours, Trophime d'Arles, Paul de Narbonne, Saturnin de Toulouse, Denis de Paris, Austremoine de Clermont.
La
fondation des premiers évêchés n'est en effet connue le plus souvent
que par des traditions locales tardives et légendaires qui visent à
prouver l'antériorité d'un siège par rapport à un autre.
Une autre tradition, plus récente, place son action à l'époque même du Christ et des Apôtres.
Invoqué à Limoges à l’occasion du mal des ardents durant les ostensions de l’an 994, Martial obtient l'apostolicité par l'action du prédicateur Adémar de Chabannes, lors des conciles de Limoges de 1029 et 1031. Placé au rang des apôtres par Jean XIX (1024-1032), saint Martial draine un courant de pèlerinages fructueux pour l’abbaye Saint-Martial de Limoges et la ville.
Il reste vénéré comme apôtre jusqu'en 1850 dans la liturgie de l'Église limousine.
Dénoncée dès le XVIIe siècle,
cette apostolicité construite et plaidée par Adémar de Chabannes,
maintenue par la sacrée congrégation des rites et confirmée par décret
du 18 mai 1845 de Pie IX, est abandonnée par l'Église catholique au
début du XXe siècle.
Son culte reste aussi très populaire en Limousin.
Selon
cette tradition, Martial aurait été de la tribu de Benjamin et proche
parent en ligne droite du premier martyr, saint Étienne.
Il serait né près de Rama, dans un village ou l'on voyait encore au XVIe siècle une église qui lui était dédiée.
A
peine âgé de quinze ans, il se serait mit à la suite de Jésus Christ,
qu'il n'aurait plus quitté, tout en s'attachant particulièrement à saint
Pierre.
Traces historiques et archéologiques
Les mentions écrites les plus anciennes relatives à Martial de Limoges datent du début du Moyen Âge.
Sidoine Apollinaire, évêque de Clermont au Ve siècle, affirme qu’Augustoritum (ancien Limoges) reçut Martial comme évêque ; le célèbre Grégoire de Tours l’évoque dans son Historia Francorum (Histoire des Francs).
Il existe deux biographies fantaisistes de Martial, la vita antiquior (Vie primitive) publiée au VIIIe siècle par un membre du clergé limousin et la vita prolixior (littéralement « vie plus développée ») appelée aussi Vie récente écrite par le moine Adémar de Chabannes au début du XIe siècle.
Cette Vie récente obtient une large diffusion et des éditions imprimés paraissent dès le XVIe siècle.
On sait que le premier évêque fut inhumé dans le cimetière situé près de la via Agrippa.
Dans
les années 1960, des fouilles sont effectuées à Limoges sur
l'emplacement de l'ancienne abbaye Saint-Martial, à l'occasion du
creusement d'un parking souterrain sous la place de la République.
Dans
les restes d'une crypte, un tombeau attribué au saint est découvert
ainsi qu'une mosaïque du Haut-Empire témoignant de l'importance du
personnage inhumé.
Le culte
Sur son tombeau fut construite au début du Moyen Âge une abbaye, étape sur la route du pèlerinage de Saint-Jacques-de-Compostelle.
L'abbatiale romane dédiée au Sauveur était une des plus belles églises du sud de la France.
La bibliothèque des moines, en grande partie conservée à la
Bibliothèque nationale, est d'une grande richesse, les enluminures des
manuscrits sont de magnifiques témoins de l'art roman.
Les émaux qui y étaient produits eurent une renommée immense dans l'Occident chrétien.
Le culte de saint Martial se perpétue encore aujourd'hui lors d'ostensions, qui se déroulent tous les sept ans à Limoges.
Les plus récentes avaient lieu en 2016.
Présentation de la relique de Saint Martial aux fidèles lors des Ostensions de 2016 à Limoges
Ostension de la châsse de Martial lors des Ostensions de 2016 à Limoges
Héraldique
Le
portrait et les initiales de saint Martial figurent sur le blason de la
ville de Limoges et il est également cité dans la devise de la ville : Dieus gart la vila e sent Marsals la gent (occitan) : Dieu garde la ville et saint Martial le peuple.
Blason de la ville de Limoges
L'apostolicité de Martial
Statue de saint Martial (XVe), polychrome en pierre calcaire, église de Chamboulive
Élaborée entre le IXe et le XIe siècle, l'hagiographie la plus complète de Martial de Limoges est la Vita prolixior composée Adémar de Chabannes, moine de l'abbaye Saint-Martial.
Cette vita de saint Martial a été rédigée en vue de promouvoir et défendre la thèse de l'apostolicité de Martial.
Ainsi Adémar de Chabannes écrit : « Martial vécut au temps de Jésus et le suivit avec sa famille dès sa plus tendre enfance.
Il
reçut le baptême dans les eaux du Jourdain... / ... « Jésus prit pour
exemple le petit Martial en prononçant ces paroles : “Si vous ne vous
rendez pas semblables à cet enfant, vous n'entrerez pas dans le royaume
des cieux” (Matthieu XVIII, 3).
Martial est le petit garçon qui apporta les poissons lors de la multiplication des pains dans le désert. »
Dans le même but, Adémar de Chabanne rapporte le récit de multiples miracles.
« Il suivit le Christ jusqu’à Jérusalem où il servit lors de la Cène.
Auparavant, Jésus aurait demandé à saint Pierre d’envoyer Martial en Gaule.
Avec
deux compagnons, Alpinien et Austriclinien, Martial, le bâton de saint
Pierre à la main, partit évangéliser le peuple des Lémovices.
Sur
le chemin, Austriclinien mourut – on ne sait de quoi –, Martial prit
son bâton et toucha son compagnon défunt qui ressuscita.
Il
entra sur la terre du Limousin par Toulx, il y guérit une possédée qui
était la fille d’Arnulfus ainsi qu'un jeune garçon, le fils de Nerva,
qui allait périr étouffé ; les habitants, devant les miracles accomplis,
se convertirent. »
Remise du bâton de saint Pierre (détail) à saint Martial. Voûtain Est de la chapelle de saint Martial (palais des papes, Avignon)
« Sur
sa route, vers Augustoritum, il traversa Ahun où il rendit la vue à des
prêtres païens qui l’avaient molesté, c’est alors que le démon sortit
d’une statue de Jupiter qui se brisa.
Martial
guérit un paralytique qui lui avait demandé de l’aide. Le Christ
apparut à Martial, lui ordonnant de quitter la ville d’Ahun pour
continuer sa mission :
“Ne crains pas de descendre à Limoges, où je te glorifierai et serai toujours avec toi.”
Arrivant dans la capitale des Lémovices, Martial guérit un dément en présence de son hôtesse Suzanne et de sa fille Valérie.
Mais deux prêtres païens, André et Aurélien, firent emprisonner les trois compagnons ; les deux gallo-romains furent frappés par la foudre qui les tua.
Martial les ressuscita, puis aussitôt après les deux païens confessèrent tous leurs péchés.
Après le miracle de sainte Valérie – voir ci-dessous –, Martial ressuscita son bourreau et Hildebert, fils du comte de Poitiers, qui s’était noyé dans la Vienne.
Les trois évangélisateurs partirent convertir le reste de l’Aquitaine, ils arrivèrent à Bordeaux où Martial guérit Sigisbert, comte de la cité, qui était paralysé.
La ville fut alors victime d’un incendie, mais Martial de son bâton éteignit le feu.
Il
partit alors pour Poitiers où le Christ lui apparut, annonçant les
martyres de saint Pierre et saint Paul ; quelque temps plus tard, il lui
réapparut, lui affirmant qu’il allait bientôt mourir.
Martial
retourna à Limoges et choisit comme successeur Aurélien, l’ancien
prêtre païen ; l’évangélisateur mourut lors d’une messe à laquelle
assistaient de nombreux fidèles qui virent l’âme de l’apôtre s’élever
vers le ciel.
Le premier évêque de Limoges fut enterré hors de la ville ; sur le
parcours du cortège funéraire un paralytique fut guéri, le premier d’un
long cortège de malades qui viendraient demander leur guérison sur le
tombeau de saint Martial. »
Saint Martial Apôtre des Gaules
Adémar
de Chabannes, désireux de magnifier l'œuvre évangélique de Martial, et
par là même de rehausser le prestige de l'abbaye consacrée au saint
homme, voulut produire, lors des deux conciles de Limoges et de celui de
Bourges, les textes nécessaires à la reconnaissance de son
apostolicité.
Ceux-ci furent repris au XVIIe siècle par le père Bonaventure de Saint-Amable (v. 1610-1691) dont l'œuvre est à l'origine des multiples biographies de saint Martial et de sainte Valérie publiées au XIXe siècle.
Il faudra attendre les travaux de Charles de Lasteyrie, puis d'Alfred Leroux,
qui démontrent l'action d'Adémard de Chabannes, pour clore le débat sur
l'apostolicité de saint Martial, encore admise par le pape en 1850, et
défendue à Limoges même par le chanoine Arbellot, membre de la Société archéologique et historique du Limousin, dans sa Dissertation sur l'apostolat de saint Martial et l'antiquité des églises de France en 1855.
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