Hérode Antipas
Hérode Antipas II (21 av. J.-C. - 39 ap. J.-C.), tétrarque de Galilée et de Pérée (région située au nord-est de la Mer Morte, à l'est du Jourdain) de 4 av. J.-C. à 39, fils d'Hérode Ier le Grand et de Malthace la Samaritaine, sa quatrième femme.
Il construisit en l'honneur de l'empereur Tibère, la ville de Tibériade, sur le lac de Galilée.
Hérode
Antipas épouse d'abord Phasaelis une nabatéenne, fille d'Arétas
IV de Pétra, qu'il répudie pour épouser sa nièce Hérodiade, fille de son
demi-frère Aristobule IV et donc petite-fille d'Hérode le Grand.
Hérodiade est alors la femme du demi-frère d'Antipas Hérode Boëthos,
qu'elle quitte de son vivant ce qui fait scandale.
Elle
est la mère de Saloméque, très tôt, la tradition chrétienne assimile à
une fille anonyme d'Hérodiade présente dans un épisode néotestamentaire.
Vaincu
par son précédent beau-père Arétas IV lors d'une bataille où il perdit
son armée, il fut destitué par l'empereur Caligula en 39.
Les
Romains, excédés par le pouvoir important d'Hérode Antipas, décidèrent
de l'exiler dans le sud de la Gaule à Saint-Bertrand de
Comminges. Hérodiade choisit de le suivre.
L'héritage d'Hérode le Grand
À la mort de son père (4 av. J.-C.), Hérode Antipas reçoit le titre de tétrarque de Galilée et de Pérée.
En 6
apr. J.-C., lorsque l'empereur Auguste révoque son frère Hérode
Archélaos, Antipas qui espérait récupérer les territoires de son frère
est bien déçu.
L'exil
d'Archéloas à Vienne ne change rien pour lui et son demi-frère Philippe
le Tétrarque, car Auguste préfère transformer les territoires
d'Archélaos en une province romaine de Judée.
Il
obtient toutefois une maigre consolation, après la destitution de son
frère c'est lui qui devient l'intendant du Temple de Jérusalem.
Il a un droit de regard sur tout ce qui s'y passe, notamment sur les jugements prononcés par le Sanhédrin.
De
plus, le Préfet romain consule Antipas au sujet de toutes les affaires
qui concernent le culte, la religion et les traditions juives.
Tirant
probablement les conclusions de la destitution de son frère, Antipas ne
manquera aucune occasion de manifester sa soumission à Rome.
Une succession convoitée
À
la mort d'Hérode le Grand, le territoire de son royaume a été partagé
par Auguste entre trois des fils d'Hérode ainsi qu'une de ses
parentes. Philippe le Tétrarque a obtenu pour sa part « la Batanée, avec la Trachonitide et l’Auranitide, une partie de ce qu’on appela le domaine de Zénodore ».
Une partie de ces territoires sont frontaliers de la Nabathée.
Le territoire de Zénodore ayant été, source de conflit.
En
effet, les Nabathéens, avaient acheté l'Auranitide, une partie de ce
territoire pour cinquante talents, mais les romains en avaient décidé
tout autrement, donnant l'ensemble du royaume de Zénodore à Hérode Ier le Grand.
Les Nabathéens étant frustrés à la fois du territoire acheté et de leur argent.
En 34, Philippe le Tétrarque meurt, « la trente-septième année de son règne sur la Trachonitide, la Gaulanitide et le peuple de Batanée ».
« Comme
il était mort sans enfants, Tibère hérita de ses possessions et les
annexa à la province de Syrie, mais en ordonnant que les impôts levés
dans sa tétrarchie y fussent affectés ».
Bien
entendu, ce territoire qui n'est « donné » à personne attire les
convoitises, parmi lesquelles celles d'Hérode Antipas et probablement
aussi celles du roi de Nabatée Arétas IV(roi de Pétra), mais il devait y avoir d'autres prétendants.
La stratégie d'Hérode Antipas
Antipas estime probablement pour sa part que ce territoire administré jusque là par son frère lui revient de droit.
Depuis
37 ans, il gère correctement les territoires qu'il lui ont été donnés à
la mort de son père, le roi Hérode le Grand et Auguste avait même
promis la royauté à un autre de ses frères Hérode Archélaus, si celui-ci
s'en montrait digne.
Celui-ci
a été démis et exilé en Gaule à cause de ses erreurs, tandis qu'Antipas
estime ne pas avoir démérité. Il espère que le titre royal qui avait
été promis à son frère, lui sera remis un jour par l'empereur.
« Dans les mois qui suivent la mort de Philippe, Antipas croit que son heure est enfin venue. »
Il
commence par organiser « des obsèques somptueuses » pour son frère
qu'il préside probablement, puis se prépare à aller à Rome, pour
rencontrer Tibère.
Pour
être nommé à la tête de la tétrarchie de Philippe par l'empereur,
Antipas a imaginé conforter sa position en se mariant avec Hérodiade,
pourtant mariée à son demi-frère Hérode Boëthos.
« Partant
pour Rome », là où tout se décide, il fait étape au début du voyage
chez son demi-frère Hérode Boëthos (appelé aussi par les historiens
modernes Hérode Philippe Ier ou Hérode, fils de Mariamne II, la fille du
grand-prêtre Simon Boëthos) qui l'héberge dans sa demeure. « Obéissant à
des motivations purement dynastiques », il en profite pour proposer
àHérodiade, la femme de ce dernier de se marier avec lui.
Ils conviennent « qu'elle cohabiterait avec lui dès son retour de Rome et qu'il répudierait la fille d'Arétas ».
Hérodiade s'empresse
d'accepter ce projet de mariage, mais celui-ci doit rester secret, au
moins jusqu'à ce qu'Antipas revienne de Rome.
Ce mariage fera scandale, car il a lieu alors qu'Hérode Boëthos est encore vivant.
En tout cas, la manœuvre est habile car Hérodiade est non seulement une descendante des Hasmonéens (la dynastie légitime) et la sœur du futur Hérode Agrippa Ier, adversaire potentiel, qui d'ailleurs gagnera finalement ce combat d'influence.
« Il est donc possible qu'Antipas n'ait pas été séduit par son charme, mais plutôt par son rang. »
Antipas
passe quelques mois à Rome mais ne parvient pas à séduire suffisamment
l'empereur Tibère, qui « contrairement àAuguste, n'est pas favorable au
maintien des États clients. »
Il rentre dans ses territoires, mais rien n'est encore perdu.
Surtout
qu'Hérode Agrippa s'est ruiné dans la vie luxueuse de Rome. Rentré
en Palestine, « il se retira dans un fort à Malatha d'Idumée » et pense
même « à se tuer »
Toutefois sa femme Cypros va s'entendre avec Hérodiade (la sœur d'Agrippa),
pour qu'Antipas lui donne une fonction assez bien
rémunérée (probablement après le retour de Rome d'Hérode Antipas,
vers 34 - 35).
« Cypros
(femme d'Agrippa) essayait elle-même par tous les moyens de soulager
son époux sans avoir autant de ressources qu'Hérode et Hérodiade.
[Ceux-ci] firent venir Agrippa, lui assignèrent comme
résidence Tibériade avec une somme limitée pour vivre et l'honorèrent
des fonctions d'agoranome (inspecteur des marchés) de Tibériade. »
Désormais
Agrippa n'est plus un danger, il est devenu un obligé d'Antipas et il
est quasiment assigné en Galilée. Mais cette stratégie va quand même
être mise en défaut.
Guerre, défaite et perte de Gamala
« Arétas
chercha un prétexte d'hostilités dans une contestation au sujet des
frontières du territoire de Gamala. Tous deux réunirent leur armée en
vue de la guerre et y envoyèrent à leur place des généraux. Une bataille
eut lieu et toute l'armée d'Hérode fut taillée en pièces à cause de la
trahison de transfuges qui, tout en appartenant à la tétrarchie de
Philippe, étaient au service d'Hérode (Antipas). »
Les
« transfuges qui, tout en appartenant à la tétrarchie de Philippe,
étaient au service d'Hérode » sont probablement les habitants de
laBatanée (que Flavius Josèphe appelle des souvent des Babyloniens) et qui fournissent traditionnellement une « aile » de cavalerie aux rois ou tétrarques juifs.
Le peuple voit dans la défaite des armées d’Antipas contre Arétas IV un châtiment divin sanctionnant le meurtre du Baptiste.
Intercesseur entre les Romains et le roi Parthe Artaban III
Vers
l'automne 36, tous les rois de la région sont conviés à une rencontre
qui a lieu sur un pont de l'Euphrate pour signer la paix générale dans
la région.
Vitellius, Artaban
III et Mithridate d'Arménie sont là naturellement, mais tous les autres
rois de la région sont probablement aussi présents. Antipas y
participe, alors que ses territoires sont pourtant assez éloigné du
théâtre d'opération et qu'il n'a pas pris part au conflit. Il est
possible qu'un rôle d'intercesseur avait été confié au tétrarque de
Galilée.
Pour
E. Mary Smallwood, Arétas IV et ses alliés ont justement profité de
l'implication d'Antipas dans cette conférence, pour déclencher
l'offensive au sujet des frontières dans la région de Gamala, qui avait
aussi pour but de venger l'humiliation faite à la fille d'Arétas et le
meurtre de « Jean surnommé Baptiste ».
L'attaque d'Arétas suivant probablement de peu la conférence sur l'Euphrate.
Cette rencontre scelle la victoire romaine sur le roi des Parthes, Artaban III, qui abandonne ses prétentions sur l'Arménie.
Elle marque aussi le réel succès de Lucius Vitelliusobtenu en deux années de manœuvres et aussi « deux été de guerres » (d'après Tacite), menées de mains de maître en minimisant le plus possible l'intervention directe des forces romaines.
Lors
de cette entrevue, Artaban reconnaît le roi Mithridate d'Arménie qui
est le candidat des romains, aussi soutenu par son frère, le
roi Pharsman Ier d'Ibérie, avec lequel Vittelius vient de le réconcilier.
Dans l'esprit de Vitellius, cette alliance arméno-iberne est conçue pour durer et destinée à dominer la Transcaucasie.
Artaban
accepte aussi d'envoyer certains de ses fils en otages à Rome. il faut
dire qu'il est à ce moment là en position très difficile puisque deux de
ses fils, pressentis pour être rois d'Arménie, ont été tués dans
l'aventure Arménienne et que ses nobles se sont rebellés pour nommer un
roi concurrent en Parthie.
Cette « guerre civile en Parthie » est d'ailleurs « conçue par Rome » et secrètement soutenue par les romains.
Pour
E. Mary Smallwwood, le problème Armeno-Parthe, en suspens depuis quinze
ans, trouvait ainsi une solution, alors que « le roi parthe avait été
suffisamment humilié pour être prêt à accepter la volonté romaine en
Arménie en échange de la reconnaissance par les romains de sa
souveraineté indépendante. » Ce qui marquait le plein succès de
Vitellius.
Antipas
a du connaître un immense moment de fierté, lorsqu'en tant que simple
tétrarque, il a invité le Roi des Rois et tous les autres hauts
personnages participants à la conférence, à un grand banquet pour
célébrer la signature de l'accord.
Le tétrarque de Galilée écrit immédiatement à Tibère pour lui faire part de ce succès diplomatique.
Lucius Vitellius fait de même de son côté mais Tibère lui répond qu'il savait déjà tout grâce à la lettre d'Antipas.
Flavius
Josèphe nous indique alors que Vitellius s'inquiéta du tort que ce
courrier et la présentation des faits par Antipas aurait pu lui
occasionner.
Il conclut toutefois que finalement il s’aperçut que ce courrier ne lui était pas défavorable.
Fort
de ce résultat, dans lequel pourtant il n'avait pas joué un rôle
décisif et de ses trente sept années d'administration sur la Galilée et
la Pérée, Antipas pense que les territoires de l'ex tétrarchie de
Philippe vont lui être confiés.
Il se voit même déjà roi. C'est sans compter, sur l'imbroglio que sa
candidature au règne sur les territoires de Philippe a créé tant auprès
du peuple et des féodaux de cette région, dont Jean le Baptiste semble
avoir été un des porte-paroles mais aussi auprès de plusieurs
rois nabatéens dont Arétas IV bien sûr, mais aussi Izatès
II d'Adiabène et Abgar V d'Edesse, qui sont allés jusqu'à fournir des
auxiliaires à Arétas IV pour qu'il obtienne sa victoire sur Antipas.
E.
Mary Smallwood estime que cet épisode est « monté à la tête d'Antipas »
et que c'est « à ce moment là, ou peu après, qu'il a préparé la voie
pour sa propre déposition en présumant de sa position favorable pour
obtenir le titre de roi. »
Exil et mort d'Antipas
Agrippa rentre
dans ses territoires en été 38, après que la situation a été éclaircie
sur place par Lucius Vitellius et Marullus, envoyé par Caligula avec le
titre de vice-roi.
Il
y a probablement eu une négociation et un accord avec
les nabatéens de Pétra et tous les rois arabes concernés, mais cela
n'est pas relaté par le texte de Flavius Josèphe.
Si
on en croit, une des lettres de Paul de Tarse considérée comme
authentique, Arétas IV règne sur Damas lorsque Paul s'y trouve
vers 37 ou peu après.
Toutefois,
cette datation du passage de Paul à Damas est contestée et donne lieu à
une polémique qui n'est pas près de s'éteindre.
On
constate toutefois que la ville de Damas n'était pas sous l'autorité du
roi de Pétra auparavant, que la guerre prévue entre les Romains et
Arétas n'a clairement pas eu lieu et que pour autant l'ex-tétrarchie de
Philippe est bien libre de troupes arabes lorsque Agrippa vient en
prendre possession.
Hérodiade voit fondre alors toutes ses ambitions et les promesses qu'Antipas lui avait faites avant son mariage.
Pour
elle, celui qui lui ravit « son » titre royal est son frère ruiné, qui
quémandait de l'argent et un emploi et qui était même passé par la
prison.
Au comble de la jalousie, elle pousse Hérode Antipas à demander à l'empereur Caligula qu'il lui accorde le même statut.
Celui-ci finit par céder aux demandes insistantes de sa femme et part pour Rome en 39.
Informé de ce voyage,Agrippa dépêche à Rome son plus fidèle affranchi, porteur d'une lettre pour Caligula.
Il
y accuse Antipas de fomenter un complot avec les Parthes et d'avoir
accumulé sans le dire à l'Empereur, des stocks d'armes dans ses arsenaux
deTibériade.
La seconde accusation est vraie, mais la première est probablement fausse.
Pour autant Caligula déchoit, bannit et exile Hérode Antipas dans le sud des Gaules (39 ap. J.-C.).
Agrippa
reçoit les territoires d'Antipas, la Galilée et la Pérée, ainsi que
tous les biens confisqués au tétrarque et à son épouse.
Par
respect pour son frère, l'empereur offre à Hérodiade la possibilité de
retourner en Palestine pour vivre à la cour d'Agrippa, en y conservant
sa fortune.
Mais
dans ultime élan de noblesse ou d'orgueil, ou peut-être parce qu'elle
n'a pas confiance en son frère, elle préfère accompagner Antipas dans
son exil.
Dans les Antiquités judaïques, Flavius
Josèpheindique qu'Antipas fut banni à Lugdunum, ce qui bien sûr fait
penser à Lyon, mais dans la Guerre des Juifs, il situe ce bannissement
en Hispanie.
Il
est admis généralement qu'il s'agit alors de Lugdunum
Convenarum (actuelle Saint-Bertrand de Comminges) située près de la
frontière espagnole (en Haute-Garonne) et pas l'actuelle ville de Lyon.
C'est là vraisemblablement qu'Hérode Antipas est mort à une date inconnue.
Hérode Antipas dans la littérature chrétienne antique
Article détaillé : Jean surnommé Baptiste chez Flavius Josèphe.
Dans les Évangiles
Le nom Antipas ne figure pas dans les Évangiles. On n'y trouve que le seul nom d'Hérode, qualifié par Jésus de « renard » (Lc 13,32).
Les traditions ecclésiastiques insistent pour dire que le seul Hérode que Jésus rencontra était Hérode Antipas.
Les seuls passages des évangiles où Hérode Antipas est
identifiable, grâce à la mention de Flavius Josèphe, sont ceux liés à
son affrontement avec Jean le Baptiste. Ce sont notamment :
- la relation de la décapitation de Jean le Baptiste qui lui reprochait d’avoir épousé Hérodiade (Mc 6,17 ; Mt 14,1) et dont il offre la tête coupée sur un plateau à Salomé
- la relation du procès de Jésus : dans l'Évangile attribué à Luc, Pilate renvoie ce dernier à Hérode parce qu'il était Galiléen (Lc 23,8). Les traditions ecclésiastiques établies à partir du VIe siècle disent que derrière cet Hérode se cache Hérode Antipas.
- le fragment que nous connaissons de l'Évangile de Pierre, duquel nous pouvons déduire que comme dans l'évangile attribué à Luc, un Hérode participe au procès, mais il est appelé « roi Hérode », ce qui renvoie soit à Hérode Agrippa Ier, soit à Hérode de Chalcis, soit à Hérode Agrippa II. Le Pilate mentionné n'étant pas alors Ponce Pilate, mais un autre gouverneur lui aussi décoré d'un pilum d'or (c'est la signification de Pilatus). Ce gouverneur pouvant alors très bien être un procurateur si nous sommes après 45. En effet le nom Ponce Pilate n'est mentionné qu'une seule fois dans un des évangiles, celui attribué à Luc, mais c'est dans un prologue. Au moment du procès et de la condamnation, tous les évangiles apocryphes ou non disent simplement Pilate.
Dans les Actes des Apôtres
Les Actes des Apôtres ont conservé une liste de « prophètes et de docteurs »
d'Antioche: Barnabé le lévite chypriote, Simon Niger (ou Simon le
Noir), Lucius de Cyrène, Manaaem-Ménahem et Saul (Paul de Tarse).
Ménahem
était un compagnon d'enfance d'Hérode Antipas, « preuve que le
christianisme n'a pas uniquement recruté dans les basses classes de la
société. »
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