Saint Théodore le Studite († 826)
Higoumène du monastère du Stoudion
Saint Théodore Studite ou saint Théodore le Studite (759-826), c'est-à-dire le moine du Stoudion, monastère de Constantinople, est un des grands Pères de l'Église, théologien, hymnographe, spirituel.
Une des plus importantes contributions de saint Théodore Studite a été son traité de défense des icônes lors de la deuxième période de l'iconoclasme (814-842).
Il est commémoré dans l'Église orthodoxe le 11 novembre (dormition) et le 26 janvier (translation de ses reliques de Chersonèse à Constantinople en 845).
Son frère, saint Joseph l'Hymnographe, fut archevêque de Thessalonique (commémoré le 14 juillet).
Vie de Théodore Studite
Saint
Théodore est né à Constantinople en 759 dans une famille de hauts
fonctionnaires, le milieu choisi de l'aristocratie constantinopolitaine.
En
ces temps troublés où l'empereur Constantin V Copronyme (741-775)
persécutait les défenseurs du culte des Saintes Images, son père Photin,
gardien du trésor impérial et ministre des finances, et sa mère
Théoctiste surent lui transmettre leur fermeté dans la Foi orthodoxe et
leur amour pour la vertu.
Il
reçut l'éducation la plus complète du temps dans les sciences sacrées
et profanes, mais acquit, surtout de sa mère, un grand zèle pour
l'ascèse et la prière, ainsi qu'un profond amour pour la vie monastique.
A
la mort de Constantin V, après le court règne de Léon IV (775-780),
l'impératrice Irène assura la régence et restaura prudemment, avec
l'aide du saint Patriarche Taraise de Constantinople (commémoré le 25
février), le culte des Images, en rappelant d'exil les confesseurs de
l'Orthodoxie. C'est ainsi qu'en 780, l'oncle maternel de Théodore,
Platon (735-814, commémoré le 4 avril), put revenir à Constantinople,
après être resté dix ans higoumène du monastère des Symboles en
Bithynie.
En
retrouvant sa famille, il sut si bien lui inspirer l'amour de la vie
monastique, qu'il décida Théodore, ses parents, ses frères et sœurs, et
quelques-uns de leurs amis, à embrasser la vie angélique.
Photin vendit tous ses biens et en distribua le revenu aux pauvres, à
l'exception d'une propriété qu'il possédait au mont Olympe de Bithynie :
le Sakkoudion, qui, par sa situation et ses conditions favorables,
pouvait être transformé en monastère ; car à cette époque la plupart des
monastères avaient été désertés du fait des persécutions. Sous la sage
direction de Platon, ils transformèrent bientôt l'endroit en un
monastère cénobitique, où Théodore fit de rapides progrès.
En
787, il fut ordonné prêtre par le Patriarche Taraise et se livra dès
lors à une ascèse plus rigoureuse : il ne dormait qu'une heure par nuit
et consacrait tout le reste de sa longue veille quotidienne à la prière
et à la méditation des saints Pères, dont il était un disciple fervent.
Saint Basile, saint Dorothée de Gaza, saint Nil le Sinaïte, saint Jean
Climaque étaient ses compagnons préférés.
Son oncle Platon revint à Constantinople en 793 et résida au monastère de Stoudion.
Au
début de 795, l'empereur Constantin VI (780-797) répudia son épouse,
Marie l'Arménienne, petite-fille de saint Philarète, pour s'unir à une
cousine de Théodore : Théodote. Le Patriarche Taraise refusa de bénir
cette union, mais l'empereur fit tout de même célébrer le mariage par un
prêtre opportuniste : Joseph, économe de la Grande-Eglise. Saints
Platon et Théodore s'élevèrent alors, indignés par cette prétention du
souverain à échapper aux lois de l'Église et à se placer au-dessus des
fidèles. Ils étaient seuls à se rebeller contre cet abus de pouvoir et,
pendant plus d'un an, ils résistèrent à toutes les tentatives de
concessions de l'empereur et de la cour. Finalement, Platon fut arrêté
et emprisonné à Constantinople, alors que Théodore et quelques-uns de
ses moines étaient envoyés en exil à Thessalonique, où ils souffrirent
de nombreuses tribulations.
Ce fut le schisme moechien, qui dura jusqu'en 797, quand Constantin VI fut écarté du trône.
Lorsqu'en
797, Constantin VI fut écarté du pouvoir au profit de sa mère Irène
(797-802), Platon, Théodore et leurs compagnons (surnommés les Zélotes)
furent libérés et purent rentrer au Sakkoudion dans l'allégresse de
leurs disciples, avec les témoignages de respect du Patriarche, du Pape
de Rome et des grands de l'Empire, et l'admiration du peuple qui voyait
en eux l'incarnation de l'indépendance de l'Église et de la fermeté de
la tradition face au pouvoir temporel. Leur nouvelle installation fut
pourtant de courte durée. Les fréquentes incursions des Arabes les
obligèrent en effet à quitter le Mont Olympe pour trouver refuge à
Constantinople, où on leur offrit le monastère du Stoudion, du nom du
consul romain Studius qui le fonda en 463. Ce transfert de la
communauté, qui allait bientôt compter près de mille moines, fut
l'occasion pour Théodore d'adapter plus strictement qu'au Sakkoudion le
mode de vie commune prescrit par saint Basile le Grand.
L’âme de la résistance iconodoule
Théodore
devient le leader de l’aile dure du monachisme et l’âme de la
résistance iconodoule. Higoumène du monastère du Stoudion en 794, il est
un partisan déclaré du culte des saintes images et il souffre, de ce
fait, à trois reprises de l'exil en Asie mineure et subit aussi
violences et autres vexations. Ses écrits permettent de venir à bout du
second iconoclasme, mais il est déjà mort au moment du rétablissement
des images, le 11 mars 843.
Il meurt le 11 novembre 826 au monastère de Crescens, près de Nicomédie, où il avait été exilé.
Une grande famille de Constantinople
Théodore est né à Constantinople en 759 dans une famille de très hauts fonctionnaires : son père Photin était tamias tôn basilikôn chrêmatôn (c'est-à-dire sans doute sacellaire, ministre des finances).
Une
trentaine de membres de sa parenté sont connus dans les documents de
l'époque, dont Théodote, la deuxième femme de l'empereur Constantin VI.
Il
reçut une éducation soignée, conforme à son rang social, dans les
disciplines enseignées à l'époque : la grammaire, la rhétorique et la
prosodie antiques, la logique d'Aristote ; sa mère Théoctiste, très
soucieuse de l'éducation de ses enfants, s'instruisait par elle-même la
nuit pour pouvoir suivre leurs leçons.
L'oncle
maternel Platon (735-814), lui-même haut responsable de
l'administration fiscale, avait abandonné son office pour embrasser la
vie religieuse dans les années 760, et vécut ensuite comme moine au
monastère des Symboles en Bithynie.
Il
semble qu'à cette époque la famille, bien que très pieuse, n'ait pas
vraiment pris position sur la question du culte des images.
En 780,
après la mort de l'empereur Léon IV, Platon rendit visite à la famille
de sa sœur à Constantinople, et persuada tout le monde de se convertir à
la vie monastique : Théodore, son père Photin et ses deux frères Joseph
et Euthyme partirent avec lui pour la Bithynie où il fondèrent, sur la
propriété familiale de Boskytion, située dans la région de l'Olympe de
Bithynie, un nouveau monastère appelé le Sakkoudion. Platon en fut
l'higoumène, et Théodore son bras droit. Les femmes de la famille
étaient aussi entrées en religion.
Un moine intransigeant
A
partir de l'élévation de Taraise au patriarcat, en 784, les moines du
Sakkoudion soutinrent l'entreprise de restauration du culte des images,
accomplie avec le deuxième concile de Nicée en 787. Peu après ce
concile, Théodore fut ordonné prêtre par Taraise. En 794, il devint
formellement higoumène du Sakkoudion, tandis que son oncle Platon se
retirait de toute activité et se vouait au silence.
La même année, l'empereur Constantin VI décida de répudier son épouse Marie d'Amnia pour épouser la koubikoularia (suivante) de celle-ci, Théodote, qui était devenue sa maîtresse (et se trouvait être une cousine de Théodore).
Les accusations portées contre Marie d'Amnia étant fumeuses, le
patriarche Taraise aurait tenté quelque temps de résister, mais
finalement il céda et autorisa le nouveau mariage, célébré non par
lui-même, mais par Joseph, un prêtre de Sainte-Sophie.
C'est
alors que Théodore se posa en défenseur de l'"acribie", l'application
stricte de la loi religieuse, sans considération des circonstances ni
des personnes : il dénonça le mariage illégitime et exigea
l'excommunication du prêtre Joseph et de tous ceux qui avaient, après sa
forfaiture, maintenu avec lui la communion (ce qui concernait
apparemment l'empereur, le patriarche et toute la
cour). Constantin semble avoir tenté d'amadouer Théodore et Platon, qui,
par le mariage litigieux, étaient devenus ses parents par alliance :
prenant les eaux aux thermes impériaux de Pruse, il les invita à venir
le rencontrer, mais ils refusèrent.
Ulcéré, l'empereur envoya des troupes au Sakkoudion pour les arrêter, disperser les moines et fermer le monastère.
Théodore fut fouetté et exilé avec dix autres moines à Thessalonique; Platon fut incarcéré à Constantinople.
Les
exilés arrivèrent à Thessalonique en mars 797, mais n'y restèrent pas
longtemps: en août de la même année, Constantin fut renversé et eut les
yeux crevés sur l'ordre de sa propre mère Irène, qui annula aussitôt les
condamnations.
Le
prêtre Joseph fut destitué, et Théodore reçu au palais par
l'impératrice (qui, ayant pris le pouvoir, se fit d'ailleurs appeler
"empereur"). Ainsi prit fin l'histoire assez embrouillée qui est restée
dans l'histoire sous le nom de "schisme moechien" (du grec moichios, "relatif à un adultère").
La refondation du monastère de Stoudios
Théodore
et ses compagnons retournèrent au Sakkoudion, mais bientôt,
en 798 ou 799, Irène invita Théodore et Platon à venir s'installer
à Constantinople pour relever l'ancien monastère Saint-Jean de Stoudios,
fondé au Ve siècle par le dignitaire de ce nom, mais à l'époque,
semble-t-il, à peu près abandonné.
Cette
proposition fut peut-être en partie motivée par les raids
qu'effectuaient alors les Arabes en Asie Mineure, et qui arrivaient
désormais jusqu'en Bithynie ; mais il faut dire aussi que le monachisme
prôné par Théodore était fort peu porté à l'isolement dans un désert et à
la rupture avec la vie sociale, et qu'en tout cas l'installation en
milieu urbain ne le contrariait en rien.
Théodore
se lança dans des travaux très importants, fit construire une
bibliothèque, un scriptorium et plusieurs ateliers pour assurer
l'auto-suffisance du monastère de Stoudios dont il fit rapidement le
plus important de la capitale.
Il mit en place autour de lui une congrégation, dont faisait partie,
entre autres, le Sakkoudion, et qu'il dirigeait par un courrier abondant
acheminé régulièrement par ce qui ressemblait à une poste privée.
Les homélies qu'il adressait trois fois par semaine à ses moines
devinrent vite célèbres.
Il
fit du monastère refondé l'un des centres les plus influents du
monachisme byzantin, et en proposa, sur plusieurs points, un nouveau
modèle, différent du monachisme oriental des siècles précédents.
Conflit avec les deux Nicéphore
En février 806, le patriarche Taraise mourut et il fallut pourvoir à son remplacement.
L'empereur Nicéphore
Ier choisit un haut fonctionnaire laïc, son homonyme, à qui on fit
franchir en quelques jours tous les échelons de la hiérarchie
ecclésiastique (on avait du reste procédé de même en 784 pour Taraise,
qui, avant son élévation au patriarcat, était prôtoasêkrêtis, chef de la chancellerie impériale, comme son successeur l'avait été).
Les
Stoudites élevèrent immédiatement une protestation publique, qui
provoqua l'incarcération de Théodore et de Platon pendant vingt-quatre
jours.
Peu
après, l'empereur demanda au nouveau patriarche Nicéphore de
réhabiliter l'ex-prêtre Joseph, sans doute parce qu'il avait tenu avec
succès le rôle d'intermédiaire dans les négociations qui suivirent la
rebellion de Bardane le Turc (803).
Le
patriarche tint sur la question un synode auquel Théodore assista, et
qui décida la réintégration de Joseph dans le sacerdoce.
Théodore
ne fit aucune objection sur le moment. Vers la même époque
(en 806 ou 807), Joseph, le frère de Théodore, fut nommé archevêque
de Thessalonique par le patriarche Nicéphore.
C'est
au début de 808 que Théodore fit savoir qu'il refusait de reconnaître
comme valide la réhabilitation du prêtre Joseph, et qu'il refusait
d'entrer en communion, non seulement avec lui, mais avec tous ceux qui
communiaient avec lui, ce qui, implicitement, incluait l'empereur et le
patriarche.
Dans
une lettre ouverte, il offrit de venir s'expliquer devant l'empereur,
et de se prosterner devant lui comme empereur. Le souverain ignora cette
offre.
A la fin de l'année 808, Joseph, frère de Théodore, vint à Constantinople et séjourna au monastère de Stoudios.
Il
refusa, comme archevêque de Thessalonique, d'assister à la messe de
Noël à Sainte-Sophie; en conséquence, il fut immédiatement destitué de
son titre épiscopal.
Peu
après, Théodore, Joseph et Platon furent arrêtés; un synode tenu en
janvier 809 les déclara schismatiques; ils furent relégués dans les îles
des Princes (Théodore à Chalki, Joseph à Proti, Platon à Oxeia).
Cette
relégation n'empêcha pas Théodore de demeurer très actif par voie de
lettres, et de continuer en fait à diriger sa congrégation.
En
juillet 811, l'empereur Nicéphore Ier mourut à la guerre, et son
successeur Michel Ier Rhangabé abrogea les condamnations. Le prêtre
Joseph fut à nouveau destitué, et le patriarche Nicéphore et les
Stoudites se réconcilièrent superficiellement.
Cependant
l'higoumène et le patriarche continuèrent à représenter deux
orientations opposées. L'empereur annonça son intention de réprimer deux
groupes d'hérétiques présents en Asie Mineure, les Pauliciens et les
Athingans ;
consultés sur la légitimité d'appliquer la peine de mort
aux hérétiques, le patriarche Nicéphore répondit par l'affirmative,
Théodore par la négative ("Les hérétiques doivent être convertis et non
tués").
De
même, Kroum, le khan des Bulgares, ayant proposé de conclure la paix
moyennant un échange de déserteurs, le patriarche conseilla à l'empereur
d'accepter, tandis que Théodore le pressa de refuser, car cela
signifiait livrer des chrétiens à un païen.
Dans
les deux cas l'avis de Théodore prévalut, mais avec de fâcheuses
conséquences dans le second : à la fin de 812, Kroum s'empara de la
ville de Mésembrie et en massacra les habitants chrétiens.
Le
4 avril 814, Platon mourut dans le monastère de Stoudios, après une
longue maladie. L'oraison funèbre que Théodore composa en cette occasion
(appelée parfois Vie de saint Platon) est notre principale source d'information sur l'histoire de sa famille.
L’âme de la résistance iconodoule
Au
printemps 814, le nouvel empereur Léon V l'Arménien manifesta son
intention de rétablir l'iconoclasme comme doctrine officielle, et il
chargea Jean le Grammairien et Antoine Cassymatas, évêque de Syllaion,
de réunir les documents pour justifier cette décision.
Le patriarche Nicéphore s'opposa vigoureusement à ce projet et groupa autour de lui de fermes partisans du culte des images.
Le jour de Noël 814, une dispute fut organisée devant l'empereur
entre iconoclastes, dirigés par Jean le Grammairien, et iconophiles,
menés par le patriarche Nicéphore.
Théodore et son frère Joseph, présents, se rangèrent dans le camp des iconophiles.
En mars 815, le patriarche Nicéphore fut déposé et exilé dans un monastère de Bithynie.
Le 25 mars, dimanche des Rameaux, les Stoudites défilèrent dans la
vigne de leur monastère, au vu de tout le voisinage, en portant
des icônes.
Le
nouveau patriarche désigné, Théodote Cassitéras, tint
un synode à Sainte-Sophie en avril et proclama la restauration de
l'iconoclasme.
Aussitôt Théodore envoya partout des lettres appelant à se révolter contre la décision du synode.
Il fut arrêté et conduit dans la forteresse de Métopa au bord du lac d'Apollonia près de Pruse.
Comme
il parvenait à maintenir le contact avec ses partisans, toujours par
lettres, il fut transféré un an plus tard (avril ou mai 816) dans la
forteresse de Bonéta située en Anatolie centrale (près du lac salé
d'Aci-Tuz-Göl).
Mais
ça ne l'empêcha pas de correspondre encore, ayant visiblement de
nombreux appuis : quand l'empereur Léon V ordonna qu'il fût fouetté, ses
geôliers refusèrent de s'exécuter.
En 817,
Théodore écrivit au pape Pascal Ier et aux patriarches d'Antioche et
de Jérusalem pour les appeler à tenir un concile et à condamner
l'iconoclasme.
Cette
fois, en ordonnant de le fouetter, l'empereur s'assura de l'exécution
de son ordre : Théodore fut tellement malmené qu'il dut rester alité.
Après son rétablissement, il fut conduit à Smyrne (fin mai-début juin819).
Le jour de Noël 820, Léon V fut assassiné à Sainte-Sophie. Théodore fut alors élargi (janvier 821).
Il écrivit deux lettres au nouvel empereur Michel II, dont les iconophiles espéraient qu'il rétablirait le culte des images.
Mais
une audience au palais, à laquelle Théodore assista, n'aboutit qu'à lui
faire dire qu'il comptait laisser l'Eglise comme il l'avait trouvée, et
qu'il permettait aux moines de vénérer les icônes, mais seulement en
dehors de la capitale.
Théodore
retourna en Anatolie, où il continua la lutte en faveur du culte des
images, mais on ignore le détail de ses actions dans ses dernières
années.
Il aurait participé en 823 ou 824 à une réunion d'une centaine
d'iconodoules, avec notamment l'ermite Joannice et
les métropolites de Chalcédoine et de Nicée, mais des tiraillements
semblent s'y être exprimés dans le parti.
Il protesta aussi, en 823, contre le mariage de Michel II avec la fille
de Constantin VI, Euphrosyne, qu'il fit extraire d'un couvent, mais sur
un ton bien moins virulent qu'au temps du "schisme moechien".
Il mourut le 11 novembre 826 au monastère de Crescens, près de Nicomédie, en célébrant la messe. S
es
restes furent transférés au monastère de Stoudios, en même temps que
ceux de son frère Joseph, en 844, après la restauration du culte des
images.
Le Monachisme selon Théodore Studite
Conception de la vie religieuse
Le
monachisme oriental avait traditionnellement une forme assez
individualiste et anarchique ; il consistait d'autre part souvent en une
rupture totale ou quasi-totale avec la société, sur le modèle des
anachorètes égyptiens comme saint Antoine, dont la Vie, attribuée à Athanase d'Alexandrie, était l'une des principales sources d'inspiration de tout le mouvement monastique oriental.
Cette
tradition, à l'époque de Théodore, était représentée avec éclat par
l'ermite Joannice du mont Olympe de Bithynie. Il arrive à Théodore
d'exprimer son admiration et son estime pour lui, mais il conseille
explicitement à ses moines de ne pas suivre son exemple.
Il
y eut à cette époque une certaine opposition entre le modèle de retrait
du monde représenté par les moines "olympiens" et le monachisme urbain
et impliqué dans les controverses incarné par les moines "stoudites".
Mais
il existait aussi dans le monde grec, avant Théodore, une tradition de
monachisme plus communautaire : à la suite de saint Pacôme, Basile de
Césarée, sans rédiger vraiment de règle, avait préconisé pour les moines
la vie en commun, l'obéissance à l'higoumène, l'obligation du travail
(manuel ou intellectuel), plus importante à ses yeux que les grandes
austérités chères aux Pères du désert, et un programme quotidien de
prières minutieusement réglé.
Au
temps de Justinien, les moines avaient reçu obligation de vivre dans
des monastères communautaires, avec un seul réfectoire et un seul
dortoir, soumis à la juridiction de l'évêque du lieu ; les dérogations
étaient très limitées.
L'organisation de la vie religieuse
Le
rôle et la responsabilité de l'higoumène sont considérés comme
essentiels : il a renoncé à sa famille et à ses biens pour se consacrer
entièrement à sa communauté, dont il est le directeur spirituel.
Dans tous ses actes, il prend conseil des moines les plus anciens. Il est assisté d'un adjoint, appelé le "second" (deuteros),
et de préposés aux différents domaines : un économe, un préposé à la
discipline, un responsable de la musique religieuse, etc., selon le
principe de la division des tâches.
L'higoumène est seul juge des délits commis par les moines, qui ne saurait relever d'une juridiction laïque.
Les
peines prononcées sont les jeûnes, les privations de communion, les
prosternations répétées, les séquestres, mais les châtiments corporels
sont exclus comme dégradants.
La
communauté des biens est entière et va jusqu'aux vêtements: ceux-ci
sont lavés tous les samedis et redistribués indifféremment. Le régime
alimentaire est spartiate : pas de viande; jeûne avec pain, eau et
légumes secs le mercredi, le samedi et pendant les quatre carêmes.
A
l'aube, la simandre (sorte de gong) retentit trois fois: c'est l'heure
de la lecture de prime à l'église. Ensuite, il y a une récitation toutes
les trois heures pendant la journée (tierce, sexte, none, vêpres et
complies).
Entre
les récitations, ce sont les phases de travail, sauf deux heures de
repos après la lecture de la sixième heure (c'est-à-dire midi).
Tout en travaillant, les moines récitent le psautier, sauf dans le scriptorium.
Le
coucher se fait à sept heures l'hiver, à neuf heures l'été. Pendant la
nuit (à une heure l'été et à trois heures l'hiver), il y a un office à
l'église, pendant lequel l'higoumène reçoit les confessions des moines.
Le Monastère du Stoudion
Le monastère est strictement enclos et organisé comme une unité auto-suffisante.
Le
travail, manuel ou intellectuel, est obligatoire pour tous, et il y a
des corvées auxquelles nul n'échappe (pétrissage de la pâte à pain,
déchargement des bateaux, ou travaux saisonniers).
Dans le monastère stoudite, le travail est un critère de ferveur, il est la "messe du moine".
Le
monastère est une véritable ruche, avec des laboureurs, des jardiniers,
des menuisiers, des tisserands, des cordonniers, des maçons, des
infirmiers, des scribes...
Ces
derniers sont devenus célèbres pour la qualité de leurs manuscrits, et
ont joué un grand rôle, sinon dans l'invention, du moins dans la
diffusion de la minuscule cursive qui remplaça l'ancienne onciale dans
presque tous les manuscrits byzantins.
L’entrée
dans le monastère peut se faire dès l'âge de 10 ans, mais généralement
elle se produit vers 16 ou 17 ans. On appelle les nouveaux venus des novices. Ils prennent l’habit noir du moine, le schêma, symbole de sainteté.
L'échec du système
Théodore
n’a cependant pas réussi à fonder un véritable ordre monastique, même
si la plupart des monastères byzantins se réfèrent à ses instructions ;
le monachisme byzantin reste donc anarchique.
La
cause principale est que l’érémitisme demeure le modèle. De plus, le
monastère est formé d’un groupement lâche sous l’autorité d’un cénobe.
Très souvent, le monastère est considéré comme une étape : le moine entre dans le monastère pour devenir par la suite un ermite.
Au IXe siècle et dans la première partie du Xe siècle, se multiplient sur l’Olympe de Bithynie de nombreux monastères indépendants.
Cette surpopulation entraîne le départ de certains moines vers l’Athos (Chalcidique).
La Règle
Sa
Règle, connue sous le nom d'Hypotyposis, (du grec ὑποτύπωσις ébauche,
modèle) fut codifiée peu après la mort de Théodore et fut adoptée
au mont Athos en 962, lorsque saint Athanase l'Athonite fonda le
monastère de la Grande Lavra, et dans la « Rus' de Kiev », car saint
Théodose l'introduisit dans la Lavra des Grottes de Kiev. Elle fut aussi
adoptée dans les couvents grecs de la Sicile normande.
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