Judas Iscariote
Pour les chrétiens, Judas Iscariote est l'un des douze apôtres de Jésus de Nazareth.
Selon les évangiles canoniques, Judas a facilité l'arrestation de Jésus par les grands prêtres de Jérusalem, qui le menèrent ensuite devant Ponce Pilate.
Récits du Nouveau Testament
Selon les évangiles synoptiques, Judas l'Iscariote, l'un des Douze, assurait le rôle de trésorier.
Le surnom d’Iscariote signifie l'homme de Qeriyyot, localité du pays de Juda, dont parle le livre de Josué 15(25).
Mais on lit aussi que le mot viendrait du mot « sicaire » (du latin sicarius, le porteur de dagues), les sicaires étant un autre surnom des Zélotes.
Le plus vraisemblable est cependant que ce nom vienne de celui d'Issachar, « homme du salaire » (שָׂכֹר, SKR, Sakar)2, qui suit Juda dans la liste des fils de Léa et de Jacob.
Il vend Jésus pour trente pièces d'argent (parfois traduit par l'expression deniers de Judas) aux grands prêtres de Jérusalem (30 est la valeur numérique de יהודה, Yéhudah, « Judas » en hébreu).
Le baiser de Judas
Jésus se trouvait au jardin de Gethsémani. Judas le désigne aux gardes en l'embrassant (l'expression « baiser de Judas » désigne aujourd'hui un baiser de traître).
Le Sanhédrin, rassemblant les autorités religieuses juives, condamna Jésus à mort (Matt. 26, 65-66), puis le mena devant Ponce Pilate, gouverneur romain de Judée et autorité civile seule habilitée pour exécuter la sentence.
Les différentes morts de Judas Iscariote
Le Nouveau
Testament fait mourir Judas peu de temps après, suivant deux versions ;
la version la plus souvent citée est celle de l’Évangile selon Matthieu :
« pris
de remords, il se pendit peu après sa trahison non sans avoir rendu
leurs 30 pièces d'argent à ses commanditaires » (Matt. 27,5).
L'autre version, Actes des Apôtres 1(18), indique :
« Cet
homme, ayant acquis un champ avec le salaire du crime, est tombé, s'est
rompu par le milieu du corps, et toutes ses entrailles se sont
répandues ».
Une troisième version vient de l’Évangile de Judas, apocryphe gnostique du IIe siècle ;
celle-ci relate une discussion entre Jésus et Judas, dans laquelle
Jésus demande à Judas de le débarrasser de son enveloppe charnelle.
La Légende Dorée du
dominicain Jacques de Voragine (1228-1298) rapporte une tradition
supplémentaire concernant la mort de Judas, relayée selon lui par Papias
d'Hiérapolis, reprise plus tard par Euthyme Zigabène (mort vers 1120)
et Théophylacte d'Ohrid (mort après 1126) : Judas aurait survécu à sa
pendaison, mais serait devenu affreusement hydropique et aurait fini
écrasé par un char pour ensuite, selon ce dernier, « se retrouver au
ciel ». Pierre le Chantre (mort en 1197) explique pour sa part que Judas
aurait accepté l'argent pour des raisons honorables, sa famille étant
dans le besoin.
Pour
l'exégèse contemporaine, la version des Actes des Apôtres et celle de
Matthieu (27,5) ne sont pas contradictoires : La première, par la bouche
de l'apôtre Pierre, nous fournit des détails (Ac 1, 18) dans lesquels
l'apôtre Matthieu n'a pas voulu entrer dans le cadre du récit proprement
évangélique (des cas modernes, en médecine légale, ont montré que dans
certaines pendaisons improvisées, le bois à partir duquel pend le corps
peut se briser et entraîner la chute de ce dernier. Si la chute
s'effectue depuis une certaine hauteur, une dislocation et éclatement
des entrailles peuvent se produire). Ainsi, ce qui est indiqué en Ac
1,18 est un détail probable qui vient éclairer davantage le récit
laconique de l'évangéliste Matthieu.
Théologie chrétienne
Dans l'historiographie chrétienne, Judas devient l'image type du traître et son nom même passe dans l'usage commun.
Dante le
situe dans le neuvième cercle de sa Divine comédie réservé
aux traîtres, et lui y attribue même le pire châtiment : être
éternellement dévoré par Satan.
Il
est erroné, en théologie, de considérer que Judas a joué un rôle
essentiel dans le processus de rédemption et de considérer que, sans
lui, il n'y aurait pas eu d'arrestation de Jésus-Christ suivie
de crucifixion, et donc pas de rachat des péchés des hommes par l'œuvre
de Rédemption. Car les pharisiens et les scribes cherchaient de toute
manière une occasion propice pour procéder à cette arrestation et y
étaient décidés bien avant que Judas ne vienne leur proposer ses
services. Cette montée progressive de ressentiments contre Jésus, de la
part des chefs du peuple, est particulièrement mise en relief dans
l'évangile de Luc.
Quand
Judas se présenta à eux, ils acceptèrent ses services contre argent, ce
moyen étant pour eux une option parmi d'autres, car Jésus était de
toute manière à leur portée, enseignant tous les jours dans le Temple et
les synagogues et pouvant être retrouvé de jour ou de nuit par qui
voulait le chercher. Son arrestation allait s'accomplir, par le moyen de
Judas ou par un autre moyen, et était surtout la conséquence de la
volonté de quelques pharisiens, scribes et notables parmi les chefs du peuple.
Concernant
la possibilité de sa damnation personnelle, il en va de Judas comme de
tout homme : pour l'Église, cette option est ouverte devant tout homme,
comme l'option du salut. D'autant qu'elle considère, en même temps,
qu'on ne peut affirmer d'une personne qu'elle est nommément damnée, pas
même de Judas, ou qu'il aurait définitivement raté. Cette option est ouverte sans
qu'elle puisse être prouvée, Dieu seul en ayant connaissance,
théologiquement parlant. Les Écritures affirment formellement
l'existence de l'enfer. Mais nul ne peut affirmer, selon le jugement de l'Église, quels sont les réprouvés parmi ceux qui sont défunts.
Cela
étant, la majeure partie des théologiens considère aujourd'hui que ce
n'est pas tant la trahison de Judas qui fait problème, car elle est
pardonnable puisque pour tout péché, miséricorde, pour peu
qu'il y ait au moins un début de regret. Mais le problème est surtout
le suicide de Judas qui, dans ce cas précis, marque un refus de
l'espérance, donc de la miséricorde et du pardon, ce qui est attesté par
le fait que Jésus a, d'avance, formellement désigné Judas comme
"démon" : 'N'est-ce pas moi qui vous ai choisis, vous, les Douze ? Et pourtant l'un d'entre vous est un démon." (Jean 6,70)
Historique de la théologie chrétienne avant le XXe siècle
La damnation de Judas était considérée comme évidente jusqu'au début du XXe siècle.
Tous
les Pères de l'Église ont affirmé comme une vérité révélée la damnation
de Judas. Ainsi, au cours des trois premiers siècles de l'Église, tous
ceux qui défendaient le salut de Judas étaient déclarés hérétiques.
De même, le catéchisme du concile de Trente, écrit au XVIe siècle, contient trois passages enseignant explicitement que Judas n’a pas profité de la Rédemption et qu’il a perdu son âme.
Un livre récent, Judas est en Enfer montre
que la damnation de Judas a toujours fait partie de la Foi de l'Église
au regard de l'Écriture Sainte : Jn 6.70, 13.10, 17.12 ; Mt 26.24 ;
27.6, de la Tradition de l'Église, qui ni n'a jamais fêté la saint Judas
ni prié pour qu'il soit délivré du Purgatoire, en sorte qu'elle montre
ainsi qu'elle sait qu'il est en Enfer, et de son Magistère.
Le
premier pape, Pierre, lors du premier synode des évêques réunis par et
sous son autorité suprême, enseigne que Judas « est allé dans son lieu à
lui » (Ac 1.25). Cela qui signifierait que si Judas est « dans son lieu
à lui », il n'est pas dans l'éternelle Communion des Saints, car en
elle « nul ne dit sien ce qui à soi… » (Ac 2.44 ; 4.32.)
Autres interprétations
- Dans le patronyme Judas Iscariote, l'Apôtre qui trahit Jésus, « Iscariote » est interprété par certains chercheurs comme étant la traduction hellénisante de sicaires. Le suffixe -ote dénote l'appartenance à une communauté — dans ce cas, celle des Sicaires. Ce sens est perdu dans les traductions en hébreu moderne des Évangiles : Judas est considéré comme étant un Ish-Kerayot, c'est-à-dire « un homme de la banlieue ». Robert Eisenman en l'identifie en tant que « Judas le Sicaire ». La plupart des consonnes et des voyelles correspondent, entre le Sicarioi/Sicariōn de Josèphe et le Iscariot du Nouveau Testament9. De ce point de vue, l'appelation « Judas, fils de Simon l'iscariote », devrait être entendue comme « Judas, fils de Simon, l'iscariote. »
- John Shelby Spong, dont les thèses se veulent à la fois chrétiennes et anti-théistes, tente de montrer l'évolution du rôle de Judas vers un rôle de traître dans les versions successives de l'Évangile.
- Armand Abécassis montre, dans son livre Judas et Jésus, une liaison dangereuse, que le verbe paradidonaï, traduit par livrer ne doit pas être interprété au sens de trahir, mais qu'au contraire, il existe une véritable connivence entre Judas et Jésus. Judas n'a toutefois pas bien compris le message de Jésus qui refuse l'usage de la violence pour prendre le pouvoir. Il le livre, avec l'assentiment de celui-ci, pour que Jésus se manifeste publiquement comme chef politique et religieux des Juifs et, selon Abécassis, il croit que cette confrontation le fera reconnaître comme tel. Jésus sait que, sauf à fuir et à renoncer à tout enseignement, il ne peut plus échapper à une arrestation et accepte d'être livré pour annoncer sa messianité, mais il sait aussi qu'il ne sera pas reconnu comme tel et qu'il sera condamné à mort. Mais ce faisant, A. Abécassis renouvelle une très vieille thématique, jamais admise par l'Église : celle de l'apocryphe "Évangile de Judas", écrit gnostique tardif (IIe s.) émanant du milieu caïnite.
- Le nom Juda renvoie aussi à la Judée et au peuple juif. Le fait que ce nom soit porté par celui qui a trahi Jésus pour de l'argent a un lien avec les accusations de déicide et de vénalité dont on a accusé les Juifs au cours des siècles.
- L'évangile de Judas est publié dans une version intégrale commentée chez Flamarion se référant aux études de National géographique, en français Juin 2006.
Judas dans l'art
Iconographie
L'attribut de Judas est la bourse d'argent.
Dans l'iconographie, Judas porte une bourse qui représente non seulement sa charge de trésorier au sein de la communauté des apôtres, mais aussi et surtout le salaire de sa trahison.
Sur La Cène de Léonard de Vinci, Judas est représenté avec une bourse pendue à sa ceinture.
Dans l'iconographie classique, Judas est souvent représenté vêtu de jaune. C'est en particulier de cet état de fait que découle l'association du jaune et de la notion de traîtrise.
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