Saint Michel le Syncelle († 846)
Michel le Syncelle est un ecclésiastique et écrivain religieux byzantin, défenseur du culte des images et saint de l'Église orthodoxe, né à Jérusalem en 761, mort à Constantinople le 4 janvier 846.
Source
La principale source d'information sur ce personnage est sa Vie, anonyme et non datée.
Cependant, un certain nombre d'éléments dans le texte permettent de
supposer que l'auteur était un moine du
monastère Saint-Sauveur-in-Chora (dont Michel fut higoumène à la fin de
sa vie), et qu'il écrivait peu de temps après la mort du saint, sans
doute du vivant de l'empereur Michel III (mort le 23 septembre 867, et
désigné comme « le grand et orthodoxe souverain Michel »).
L'auteur déclare d'autre part qu'il a obtenu des informations auprès de
« parents, connaissances, compagnons, commensaux et disciples » du
saint, ainsi qu'auprès d'« associés du tyran (sc. l'empereur Théophile),
ceux en tout cas qui sont encore en vie ».
La manière dont il désigne le patriarche iconoclaste déposé Jean le
Grammairien sans le nommer (« un certain homme instruit qui savait très
bien parler et écouter ») pourrait indiquer que ce dernier était encore
en vie, ou que l'auteur avait été un temps de ses partisans, ou qu'il
connaissait des personnes qui en avaient été.
Biographie
En Palestine
Michel est né en 761 à Jérusalem dans une famille modeste d'origine qualifiée de « persane » (περσογενής).
Nous savons qu'il était arabophone, car on a conservé de lui la traduction de l'arabe au grec d'une Lettre aux Arméniens de Théodore Abu Qurrah (qui est une profession de foi chalcédonienne).
En 764,
âgé de trois ans, il fut offert par sa mère au clergé de l'église du
Saint-Sépulcre, sous la tutelle du patriarche de Jérusalem.
En 786, son père mourut et il plaça sa mère et ses sœurs dans un
couvent de la ville ; il entra lui-même alors dans lemonastère
Saint-Saba près de Bethléem.
En 798, il fut ordonné prêtre par le patriarche Georges Ier.
En 800, les frères Théodore et Théophane entrèrent à Saint-Saba et il les adopta comme disciples.
En 807,
deux moines d'un couvent d'obédience latine situé sur le Mont des
Oliviers, Égilbart et Félix, firent un séjour à la cour
de Charlemagne à Aix-la-Chapelle, et au retour introduisirent dans leur
communauté l'ajout du filioque au Credo qui était déjà d'usage à la cour impériale occidentale.
Cette
altération du symbole de Nicée-Constantinople causa un scandale parmi
les moines de Saint-Saba ; l'un d'entre eux, Jean, accusa les Latins
d'hérésie ; les moines occidentaux furent violemment pris à partie alors
qu'ils priaient la veille de Noël dans la grotte de
la Nativité à Bethléem ; la querelle devint publique, et la foule
orientale s'en prit aussi aux Latins.
En 809, le patriarche Thomas Ier confia
à deux moines occidentaux, Agamus et Roculphus, une lettre de
recommandations sur le sujet destinée au pape Léon IX et à Charlemagne ;
d'autre part, un moine du couvent du Mont des Oliviers, Léon, envoya
aussi au pape une lettre contresignée par six de ses compagnons,
décrivant les avanies subies par les religieux occidentaux.
Le pape transmit les deux lettres à Charlemagne.
Celui-ci réunit un concile d'évêques francs dans l'église palatine d'Aix-la-Chapelle en novembre 809, et l'ajout du filioque y fut déclaré justifié.
En
janvier 810, le pape Léon IX convoqua à Rome unsynode sur la question,
et ensuite, tout en admettant apparemment le fond de la doctrine, il
refusa d'ajouter le filioque dans la liturgie du Saint-Siège.
Cette
année 809, d'autre part, les attaques de pillards contre les monastères
chrétiens de Palestine, déjà monnaie courante (en 796, lors d'une
attaque de Saint-Saba, vingt moines avaient été tués), s'intensifièrent
après la mort du calife Hâroun ar-Rachîd le 24 mars.
En 811, Michel, nommé syncelle (c'est-à-dire adjoint) du patriarche Thomas Ier, fut transféré dans le monastère Tôn Spoudaiôn, attenant à l'église du Saint-Sépulcre à Jérusalem ; il s'y fit accompagner par ses deux disciples Théodore et Théophane.
En 812, les attaques de monastères se renouvelèrent, et plusieurs, dont Saint-Saba, furent occupés, d'autres détruits.
La même année, la Chronique de Théophane (due
essentiellement à un moine d'origine palestinienne,Georges le Syncelle)
signale un afflux de réfugiés venant de Palestine, moines et laïcs,
à Chypre.
A Byzance
En 812 ou 813, Michel fut chargé par le patriarche Thomas Ier d'une mission qui devait le conduire, d'abord à Constantinople, ensuite à Rome.
Il se fit accompagner par les frèresThéodore et Théophane et par un autre disciple nommé Job.
Selon la Vie de Michel, ils arrivèrent à Constantinople en mai 814, mais selon une lettre de Théodore conservée par parties dans sa Vie due à Syméon Métaphraste, ils seraient arrivés avant l'avènement de l'empereur Léon V l'Arménien le 10 juillet 813.
Ils furent logés dans le monastère Saint-Sauveur-in-Chora, qui avait
été dévolu aux moines réfugiés de Palestine (Georges le Syncelle aussi y
avait séjourné).
Les objets de la mission cités par la Vie sont au nombre de trois. Le premier, concernant la visite à Rome, était de s'entretenir avec le pape de la question du filioque, et de l'aider à ramener les Francs sur le droit chemin.
Le
second était d'informer le pape, notamment, de l'imposition par les
musulmans d'une nouvelle taxe sur les églises de Jérusalem, et de lui
demander en conséquence une assistance financière.
Il
n'y a aucune autre mention de cette taxe dans la littérature grecque ou
arabe de l'époque, et il est probable qu'il s'agisse d'une allusion un
peu impropre aux violences exercées sur les institutions religieuses
chrétiennes de Palestine.
Le troisième objet est plus problématique : l'auteur de la Vie affirme
que le patriarche Thomas avait reçu une lettre de l'higoumène Théodore
Studite exilé, lui demandant son aide dans sa lutte contre
l'iconoclasme de l'empereur Léon l'Arménien et du patriarche de
Constantinople Théodote Cassitéras, et que la délégation était porteuse
d'une lettre de Thomas à l'empereur sur cette question.
Cette allégation est réfutée par la chronologie : même en mai 814, Léon
l'Arménien n'avait encore fait aucun pas en direction du rétablissement
de l'iconoclasme ; le patriarche iconodoule Nicéphore ne fut déposé que
le 13 mars 815, et son successeur Théodote ne fut intronisé que le Ier avril
suivant ; quant à Théodore Studite, il ne fut arrêté et détenu
en Bithynie qu'en avril ou mai 815, après avoir appelé à rejeter les
décisions du concile iconoclaste présidé par Théodote.
En fait, Théodore Studite n'écrivit au patriarche de Jérusalem que
depuis son deuxième lieu de détention, Bonéta, en Anatoliecentrale,
en 817 ou 818.
Donc
le plus probable est que le groupe est arrivé à Constantinople avant le
10 juillet 813, et qu'ensuite il y est resté qu'au début de 815 pour
des raisons non déterminées, mais qui à l'origine n'avaient aucun
rapport avec l'iconoclasme.
Peut-être, entre autres choses, attendirent-ils une réponse sur la question de l'assistance financière.
En tout cas, il est certain qu'ils ne continuèrent jamais leur voyage vers Rome.
Quant
à la lettre du patriarche Thomas à l'empereur sur l'iconoclasme, si
elle a jamais existé, elle n'a pu être envoyée que plusieurs années
après.
Sans
doute en avril ou mai 815, Michel et ses compagnons, qui s'étaient
opposés comme Théodore Stoudite au rétablissement de l'iconoclasme,
furent incarcérés dans la prison de la Phialê (« de la Fontaine », une
prison dans l'enceinte du Palais où étaient détenus les prisonniers
« spéciaux »).
Des tentatives furent faites pour leur faire changer d'avis, et on
essaya de les circonvenir, comme ce fut fait avec d'autres opposants, en
leur offrant de hauts postes ecclésiastiques.
Comme
ils refusaient toutes les propositions, ils furent séparés : les
frèresThéodore et Théophane furent envoyés dans une forteresse située
près de l'embouchure du Bosphore dans la Mer Noire, tandis que Michel et
Job restaient à la Phialê.
Ils y furent détenus jusqu'à l'assassinat de Léon V, le 25 décembre 820.
Le
nouvel empereur, Michel II, fit libérer tous les opposants à
l'iconoclasme, tout en refusant de revenir sur son rétablissement.
Michel et Job s'installèrent alors dans un monastère à Pruse, ville
située près du mont Olympe de Bithynie, haut lieu du monachisme.
L'hagiographe prétend
qu'ils y furent conduits « couverts de chaînes », laissant entendre
qu'ils furent seulement transférés d'une prison dans une autre.
En fait, il ne peut dissimuler qu'ensuite Michel correspondit librement avec d'autres membres du parti iconodoule.
L'empereur Théophile,
qui succéda en 829 à son père, renoua à partir de 832 ou 833 avec
un iconoclasme plus sectaire : il organisa alors un concile qui édicta
de lourdes peines pour ceux qui refusaient la communion avec
les iconoclastes.
En 834,
Michel et Job furent retirés de leur monastère et incarcérés dans la
prison du prétoire (celle de l'éparque, dans la ville de Constantinople,
pour les prisonniers « ordinaires »).
Ils y furent détenus à l'isolement et dans des conditions difficiles.
En
juillet 836, Théodore et Théophane furent aussi enfermés quelque temps
dans la même prison ; quand ils eurent subi le supplice de leur marquage
au visage, qui leur fut infligé sur l'ordre de l'éparque, Michel put
leur faire parvenir une lettre de consolation.
Il put aussi, d'ailleurs, faire passer des lettres à d'autres iconodoules.
Après
le rétablissement du culte des images (11 mars 843), Michel fut traité
en héros, comme tous ceux qui avaient souffert pour la cause.
Son hagiographe prétend qu'on pensa à lui pour le patriarcat de Constantinople.
En tout cas, il fut nommé syncelle du nouveau patriarche Méthode, et higoumène du monastère Saint-Sauveur-in-Chora.
Il mourut le 4 janvier 846 dans sa quatre-vingt-cinquième année.
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