Saint Pimen ou Poemen († 451)
ascète
Saint Poimen était originaire d'Egypte. A l'âge de quinze ans, il rejoignit ses six frères qui pratiquaient l'ascèse au désert de Scété : Abba Anoub était l'aîné (cf. 6 juin) et Paissios le cadet.
Alors
qu'il était encore jeune, Poimen alla interroger un vieillard sur trois
pensées, mais dans la conversation il oublia l'une d'elles.
Rentré
chez lui et s'en souvenant, il partit aussitôt et parcourut la longue
distance qui le séparait de l'Ancien pour lui soumettre sa pensée.
Admirant
son souci de présenter ainsi un coeur pur à Dieu, l'Ancien lui prédit :
« Poimen, ton nom sera prononcé dans toute l'Egypte et tu deviendra
réellement "pasteur" d'un immense troupeau. »
Lors
de la dévastation du centre monastique de Scété par les barbares
Maziques (407), les sept frères purent échapper au massacre et,
empruntant la route des exploitants de nitre, ils s'installèrent à
Térénuthis, en Haute-Égypte, sur les rives du Nil.
Poimen
acquit là une grande notoriété, si bien que les gens pieux délaissaient
les Anciens qu'ils avaient coutume de consulter pour prendre conseils
auprès de lui.
Quand
un visiteur venait interroger Abba Anoub, il l'envoyait auprès de
Poimen, car il reconnaissait qu'il avait reçu le charisme de
l'enseignement, mais Poimen ne prenait jamais la parole en présence de
son frère aîné et refusait de parler après un autre Ancien, bien qu'il
les dépassât tous.
Ayant
appris où les sept frères s'étaient retirés, leur mère chercha à les
voir, mais elle s'opposa à un ferme refus, aussi alla-t-elle se poster
devant l'église et attendit-elle que les ascètes s'y rendent pour la
synaxe hebdomadaire.
En la voyant, ses fils s'en retournèrent aussitôt.
Elle courut à leur suite et, trouvant porte close, elle criait en
gémissant. Poimen dit alors à sa mère de l'intérieur : « Préfères-tu
nous voir ici-bas ou dans le siècle à venir ? »
Elle
répondit : « Mais ne suis-je pas votre mère ? N'est ce pas moi qui vous
ai allaités ? J'ai maintenant des cheveux blancs, ne puis-je donc pas
vous voir ? »
Il reprit : « Si tu te domines toi-même pour ne pas nous voir ici, tu nous verras là-bas pour l'éternité. »
Et
la pieuse mère repartit alors pleine de joie, en disant : « Si je vous
vois parfaitement là-bas, alors je ne désire plus vous voir ici-bas. »
Dans
ses débuts Poimen jeûnait beaucoup, passant souvent deux ou trois jours
sans nourriture, et soumettait son corps à de grandes austérités.
Mais,
avec le temps, il acquit une grande expérience dans la science
spirituelle, et devenu médecin, pilote et lampe de discernement pour les
habitants du désert, il enseignait à manger modérément chaque jour,
afin de ne tomber ni dans l'orgueil ni dans la gourmandise, et de suivre
ainsi la voie royale qui est légère et aisée.
A un frère qui le surprit un jour en train de prendre un bain de pieds
et s'en scandalisait, il répondit : « Nous, nous n'avons pas appris à
tuer notre corps, mais à tuer nos passions. »
Il disait aussi souvent : « Tout ce qui dépasse la mesure vient des démons. »
Mesuré
dans l'ascèse, il était cependant très strict en ce qui concernait les
relations avec les hommes, et considérait sa cellule comme son tombeau,
dans lequel le moine, comme un mort, doit rester étranger à tout
attachement terrestre.
Un jour, le gouverneur de la contrée, désirant le voir, fit arrêter le
fils de sa soeur, pour que l'Ancien vienne intercéder en sa faveur.
Mais Poimen resta insensible aux supplications de sa sœur, disant : « Poimen n'a pas engendré de fils. »
Et il fit dire au gouverneur de le juger conformément aux lois, s'il avait commis une faute.
Quand
un visiteur voulait s'entretenir avec lui de choses élevées, l'Ancien
gardait le silence ; mais si on le questionnait sur les passions et sur
la manière de guérir l'âme, alors il répondait avec joie.
Il donnait à ses interlocuteurs des réponses proportionnées à leur
entendement et à leurs possibilités, pour les encourager aux progrès
dans la vertu.
Avant
tout il leur recommandait de ne pas donner place aux pensées
passionnées en s'y complaisant ou en essayant de leur répondre et
assurait qu'elles disparaîtront ainsi d'elles-mêmes : « Nous ne pouvons
pas les empêcher de venir nous troubler, mais il est en notre pouvoir de
leur résister ».
Il enseignait que se jeter devant Dieu, ne pas se mesurer soi-même et
abandonner derrière soi toute volonté propre sont les instruments de la
purification de l'âme, mais que c'est surtout par le blâme de soi et la
vigilance qu'elle pourra être édifiée et progresser vers la perfection.
Quand
on lui demanda un jour s'il convenait de reprendre les frères que l'on
voyait en état de faute, Poimen répondit : « A l'heure même où nous
cachons la faute de notre frère, Dieu cache la nôtre, et à l'heure où
nous manifestons la faute de notre frère, Dieu manifeste aussi la nôtre.
»
Et
lorsqu'il voyait un frère s'endormir à l'église, loin de le reprendre,
le Saint Ancien préférait placer sa tête sur ses genoux et le laisser se
reposer.
Quant
à la vigilance sur lui-même, il l'observait strictement en tout temps,
sachant que le principe de tous les vices est la dispersion ; et quand
il devait sortir de sa cellule, il passait auparavant une heure assis à
examiner ses pensées.
Il
disait aussi que : « l'homme a besoin de l'humilité comme du souffle
qui sort de ses narines », et que c'est par le blâme de soi, qui nous
fait considérer notre frère comme supérieur, que nous pouvons parvenir à
cette humilité qui nous procure en toute circonstance le repos.
Il avait porté, quant à lui, à un tel degré le mépris de lui-même qu'il
déclarait avec sincérité : « Dans le lieu où Satan est jeté, je me
jette et me place au-dessous des êtres irrationnels, car je sais qu'eux
sont irréprochables. »
Quand
on lui demanda comment il était possible de se considérer inférieur à
toute créature et même à un meurtrier, l'Ancien répondit : « Lui a
commis seulement cette faute, mais moi je pèche chaque jour. »
Voyant
un jour une femme se lamenter sur le tombeau de son mari et de son
fils, Abba Poimen dit à son frère Anoub que si l'on n'acquiert pas un
tel état de deuil et une mortification constante de la chair, on ne peut
devenir moine.
Une autre fois il tomba en extase devant un de ses proches, qui lui demanda ensuite où il avait été transféré.
Il
répondit : « Ma pensée était là où se trouvait la Sainte Mère de Dieu,
qui pleurait sur la Croix du Sauveur, et je voudrais tout le temps
pleurer ainsi. »
Un
jour des visiteurs notoires vinrent de Syrie pour l'interroger sur la
pureté du coeur, mais l'Ancien ne savait pas le grec, et il ne se
trouvait pas d'interprète.
Constatant
l'embarras de ses visiteurs, Poimen se mit soudain à leur parler en
grec et leur dit : « La nature de l'eau est molle, celle de la pierre
est dure ; mais une outre suspendue au-dessus de la pierre, faisant
tomber l'eau goutte à goutte, transperce la pierre.
Ainsi
en est-il de la Parole de Dieu : elle est tendre et notre coeur est
dur, mais l'homme qui l'entend souvent ouvre son coeur à la crainte de
Dieu. »
Après
avoir brillé de longues années comme un astre dans le désert,
enseignant par sa propre expérience et se faisant un modèle vivant de
toutes les vertus, Abba Poimen s'endormit en paix, quelque temps après
Saint Arsène (après 449), mais sans avoir revu le désert de Scété.
1. Il n'est pas sur que ce Païssios soit le Saint commémoré le 19 juin.
2. Poimen en grec signifie "pasteur", "berger".
3. Avec plus de 200 apophtegmes, admirables par leur profondeur et leur sagesse, c'est St Poimen qui occupe la première place dans les différentes collections d'Apophtegmes des Pères du Désert. Comme il rapportait souvent les sentences des Pères antérieurs, on estime que c'est à St Poimen ou à ses proches que l'on doit les premiers recueils d'apophtegmes.
2. Poimen en grec signifie "pasteur", "berger".
3. Avec plus de 200 apophtegmes, admirables par leur profondeur et leur sagesse, c'est St Poimen qui occupe la première place dans les différentes collections d'Apophtegmes des Pères du Désert. Comme il rapportait souvent les sentences des Pères antérieurs, on estime que c'est à St Poimen ou à ses proches que l'on doit les premiers recueils d'apophtegmes.
Fête le 27 août.
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